L'alléluia nuptial

« Ces jours-ci, quand nous entendons l'alléluia, notre esprit se transforme. Nous savourons un je ne sais quoi de la cité céleste » (5ème tableau de la série "Sur les traces du Ressuscité")

5. L'alléluia nuptial.

Dès la veillée pascale, l'alléluia retentit. Jésus a brisé, pour lui-même, le joug acerbe de la mort ; et pour nous, aussi les liens du péché, du diable et de l'enfer. Notre alléluia module harmonieusement le triomphe pascal de l'amour. Les psaumes invitent le peuple : « Louez le Seigneur ! ». Jésus l'a répété avec ferveur. Une louange due à l'Unique. Dans les lèvres du Fils, vrai héritier spirituel de David, l'alléluia prend parfum d'éternité.

Annibal Carrache, Le Christ en gloire (Florence, 1583)

La première génération chrétienne l'a immédiatement adopté dans le culte, écho de la liturgie éternelle : « Amen, alléluia ! » (Apocalypse 19, 4). Les baptisés entonnent à juste titre le « chant nouveau » (Psaume 149, 1). « Ces jours-ci, quand nous entendons l'alléluia, notre esprit se transforme. Nous savourons un je ne sais quoi de la cité céleste » (saint Augustin, sermon 229-B §2).

C'est un cri eucharistique devant le Ressuscité. Le Père a glorifié le corps du Fils, qui a versé son sang précieux par amour. Le Ressuscité a réveillé la foi au Cénacle, embrasé les cœurs à Emmaüs, rempli les filets à Génésareth. La résurrection finale des fidèles commence dans leur Chef, Époux de l'Église : « Alléluia ! Réjouissons-nous et rendons-lui gloire, car voici les noces de l'agneau » (Apocalypse 19, 6-7). L'alléluia de victoire devient marche nuptiale. Le Christ en gloire d'Annibal Carrache (Bologne, 1583), montre le bonheur de l'Église pour la Résurrection. Après l'Ascension, le regard rivé vers l'éternité, l'Épouse avance.

Dans la liturgie de la Parole, l'alléluia rythme l'accueil de l'Évangile, où Jésus vivant parlera. Les fidèles se mettent debout, comme les vierges sages : « Voici l'Époux ! Sortez à sa rencontre ! » (Matthieu 25, 6). Chaque alléluia est un pas vers la rencontre définitive ; l'un de ces « gémissements inexprimables » (Romains 8, 26), qui remplissent les temples et les rues (Tobit 13, 18). L'alléluia marque la prière publique et privée des chrétiens d'Orient et d'Occident, ponctue antiennes et psaumes, accompagne la louange mariale. Dans la conversation courante, il exprime le soulagement. Il désigne des plantes, à feuilles trifoliées et cordiformes. Il a imprégné la culture, inspirant compositeurs, cinéastes, parfumeurs et pâtissiers.

« J'entendis comme la grande rumeur d'une foule immense qui, dans le ciel, disait : Alléluia ! » (Apocalypse 19, 1). L'alléluia céleste se prolonge dans les petits alléluias du quotidien. Saint Augustin veut qu'il se traduise jour et nuit dans les actes : « Louez de tout votre être : avec la conscience, la vie, les œuvres » (Sur le Psaume 148 §2).

Abbé Fernandez