Pour la première fois, l’Église universelle fête cette année le « premier évangéliste de la résurrection du Seigneur » (Congrégation pour le culte divin, Décret, 3/06/16) au même rang que les apôtres. Sainte Marie Madeleine a fait l’expérience de la miséricorde du Ressuscité. Son parcours de conversion, de contemplation et d’apostolat est un guide pour tous, notamment pour les femmes.
La clémence du Christ « avait fait sortir d’elle sept démons » (Marc 16, 9) ; reconnaissante, elle répondit à la bienveillance du Maître ; par la force d’un amour pur, elle le suivit dans son parcours évangélisateur, jusqu’au pied de la Croix.
« Lorsque le sabbat fut passé, Marie de Magdala, Marie mère de Jacques, et Salomé achetèrent des parfums pour aller oindre Jésus » (Marc 16, 1). Elle accourt à la tombe, avec les autres « myrrhophores », un groupe de femmes courageuses, généreuses, diligentes ; devant le tombeau vide, elle écoute la nouvelle surprenante des anges, qu’elle transmet sans délai à Pierre. Mais Jésus lui manque. De nouveau elle se dirige vers la grotte à la recherche du Corps rédempteur. « Je me lèverai et parcourrai la ville. Dans les rues et sur les places, je chercherai celui que mon cœur aime » (Cantique 3, 2).
L’absence de bien aimé lui est insupportable : à tout prix, elle veut savoir où il se trouve. «Je vous adjure, filles de Jérusalem, si vous rencontrez mon bien-aimé, dites-lui que je suis malade d’amour» (Cantique 5, 8). La nuit de l’absence semble éternelle. Dans l’épreuve, l’âme fidèle ressent aussi « une soif de Dieu, un désir de voir son sourire, son visage » (saint Josémaria, Amis de Dieu §310). La douleur ravivée se traduit en larmes. « Marie se tenait dehors, près du tombeau, et pleurait » (Jean 20,11). Si Jésus tarde à venir c’est pour accroître notre amour. « Les saints désirs grandissent avec l’attente » (saint Grégoire le Grand, Homélies sur les Évangiles, 25, 4).
La nuit de l’absence semble éternelle. Dans l’épreuve, l’âme fidèle ressent aussi " une soif de Dieu, un désir de voir son sourire, son visage " (...) "Les saints désirs grandissent avec l’attente"
C’est le Christ en personne qui s’inquiète de la raison de ses larmes : «Pourquoi pleures-tu?» (Jean 20, 15). Après un bref dialogue, Jésus se manifeste sans détours à la femme fidèle : « Marie ! » (Jean 20,16), qui reconnaît tout de suite « la voix du bien-aimé » (Cantique 2, 8). Ravie, Marie court l’affirmer : « J’ai vu le Seigneur ! » (Jean 20, 18). "Jésus est vivant et veut être cherché parmi les vivants. Après l’avoir rencontré, il envoie chacun porter l’annonce de Pâques, susciter et ressusciter l’espérance dans les cœurs appesantis par la tristesse" (pape François, Homélie dans la veillée pascale, 26/03/16).
La dévotion à la sainte, très vénérée en Orient, s’est diffusée en Europe à partir du moyen âge, à partir du sud de la France. La paroisse parisienne, érigée en son honneur, en avait reçu en 1824 une relique. La nouvelle église, en guise de retable, montre une statue en marbre, relevée par les ors de l’autel : Le ravissement de sainte Marie Madeleine, œuvre de Ch. Marochetti, qui mit douze ans à la sculpter. Sur l’abside, une imposante mosaïque (Ch.-J. Lameire, 1893), montre le Christ ressuscité, au centre des évangélisateurs de la France ; à la droite du Rédempteur, Marie Madeleine, premier témoin public du Ressuscité, l’adore.
nous lui demandons le même zèle : « Toi, qui as été blessée d’amour, fais que nos cœurs brûlent des feux de la charité »
Celle qui avait vécu de pénitence et d’amour est en droit d’évangéliser l’espérance. La femme qui annonça le message central de Pâques et devint « l’apôtre des apôtres » (Missel romain, Préface, 22/07), a beaucoup à nous dire. Vingt siècles après, nous lui demandons le même zèle : « Toi, qui as été blessée d’amour, fais que nos cœurs brûlent des feux de la charité » (Liturgie des Heures, Hymne de laudes). « Il y en a tellement besoin aujourd’hui. Oublieux de nous-mêmes, comme des serviteurs joyeux de l’espérance, nous sommes appelés à annoncer le Ressuscité avec la vie et par l’amour… à donner l’espérance dont le monde est assoiffé » (pape François, ibidem).
Abbé Antoine Fernandez