Homélie du Prélat de l’Opus Dei en la fête de saint Josémaria Escriva, à Rome, 2012

L’invitation au travail, en tant que complément de l’œuvre de la création est la vocation originelle de toute femme et de tout homme. Aussi Saint Josémaria affirmait-il, à raison, que tout travail honnête est « un moyen nécessaire que Dieu nous confie ici-bas, tout en allongeant nos jours et en nous faisant participer à son pouvoir créateur, afin qu’en nous procurant de quoi vivre nous récoltions simultanément des fruits pour la vie éternelle.»

Chers frères et sœurs.

Nous avons déjà commenté les lectures de la Messe en l’honneur de Saint Josémaria à différentes reprises, lors de précédents anniversaires. J’aimerais aujourd’hui que nous nous arrêtions, vous et moi, à considérer le message que nous a transmis le fondateur de l’Opus Dei : la sanctification de la vie ordinaire telle que le Christ l’a décrite, telle qu’elle est présentée dans les textes de la Genèse, de la lettre de saint Paul aux Romains et dans le passage de l’Évangile de la messe d’aujourd’hui.

Penchons-nous sur la fin du texte de la Genèse que nous venons d’entendre: Le Seigneur Dieu prit l’homme et le plaça au jardin d’Éden pour qu’il le travaille et le garde (Gn 2, 15. L’invitation au travail, en tant que complément de l’œuvre de la création est la vocation originelle de toute femme et de tout homme. Aussi Saint Josémaria affirmait-il, à raison, que tout travail honnête est « un moyen nécessaire que Dieu nous confie ici-bas, tout en allongeant nos jours et en nous faisant participer à son pouvoir créateur, afin qu’en nous procurant de quoi vivre nous récoltions simultanément des fruits pour la vie éternelle » (Saint Josémaria, Amis de Dieu, 57). Il nous invitait ainsi à redécouvrir Dieu, aussi bien dans les tâches importantes que dans les occupations quotidiennes qui peuvent devenir le fondement solide de notre sainteté personnelle.

Cette dimension originelle du travail est la raison la plus profonde du droit de tous à avoir une occupation professionnelle pour leur permettre de vivre et faire face aux besoins de leur famille. Malheureusement, dans les circonstances actuelles, beaucoup de pays subissent la plaie du chômage qui entraîne tant de soucis et de malaise chez d’innombrables familles. Prions pour les autorités civiles et pour les responsables de la vie publique, à tous les niveaux, afin qu’illuminés par la Sagesse divine, ils sachent trouver et mettre en pratique les mesures appropriées pour que leurs nations respectives sortent de la crise actuelle, dans un total respect de la dignité des personnes et du bien commun. Confions cette intention à Dieu par l’intercession de saint Josémaria, apôtre de la sanctification du travail.

Nous sommes fils de Dieu

La deuxième lecture, avec des paroles de saint Paul, nous rappelle qu’en tant que chrétiens, nous sommes fils de Dieu, guidés par le Saint-Esprit.

L’Apôtre tire de cette affirmation une conséquence immédiate: l’esprit que vous avez reçu ne fait pas de vous des esclaves ; des gens qui ont encore peur ; c’est un Esprit qui fait de vous des fils ; poussés par cet Esprit, nous crions vers le Père en l’appelant : « Abba Père ! » (Rm 8, 15).

Paul évoque les craintes et les angoisses de la société de son temps, soumise à de multiples puissances, mauvaises pour la plupart, caractéristiques de l’ancien paganisme. C’est la raison pour laquelle, comme l’explique Benoît XVI dans l’une de ses encycliques, ces peuples étaient plongés dans la crainte malgré tous ces dieux. « Or leurs dieux, dit le saint-père, s’étaient montrés incertains et aucune espérance ne jaillissait de leurs mythes contradictoires. Malgré leurs dieux, ils étaient « sans Dieu » et, par conséquent, ils étaient dans un monde obscur, face à un sombre avenir » (Benôit XVI, Spe Salvi, n.2). En revanche, les chrétiens, en tant que fils de Dieu, savent que leur futur est lumineux. « Cela ne veut pas dire qu’ils connaissent les détails de ce qui les attend, poursuit le saint-père, mais ils savent que l’ensemble de leur vie n’est pas voué à tomber dans le vide. Ce n’est que lorsque le futur est certain, comme réalité positive, que le présent est aussi supportable » (Benôit XVI, Spe Salvi, n.2).

Méditons fréquemment cette réalité: je suis fils de Dieu, je suis fille de Dieu; et grâce à un tel don, nous devons logiquement nous attacher à donner du relief surnaturel à tout ce que nous faisons. Saint Josémaria disait souvent que, concernant les hommes, ce qui est surnaturel devient tout à fait humain. Si nous correspondons à la grâce nous sommes en mesure d’être en dialogue avec Dieu le Père, Dieu le Fils, Dieu le Saint Esprit, en toute circonstance et en toute activité.

Cette grande merveille de notre foi devrait nous remplir de courage, chers frères et sœurs, pour faire face avec confiance en Dieu et avec sérénité aux difficultés qui se présenteront dans notre existence. Soutenus par cette certitude, nous pouvons faire nôtres ces paroles du psaume responsoriel : laudate Dominum omnes gentes, pour répondre aux promesses que Dieu lui-même nous fait : demande-moi et je te donne les nations en héritage, pour domaine, la terre tout entière (Ps 2 ; 8). Mais nous devons demander avec foi et persévérance que les souffrances que provoque le manque de travail se résolvent positivement. Fermement unis à la Volonté de Dieu qui dirige tous les événements pour le bien de ceux qui croient en Lui, nous pouvons répéter : Servez le Seigneur avec crainte et rendez-lui votre hommage en tremblant […] Bienheureux ceux qui trouvent en Lui leur refuge (Ps 2, 11-12).

3. Nous avons contemplé encore une fois dans l’Évangile, le grand prodige de la première pêche miraculeuse. D’un point de vue humain, l’ordre de Jésus, — jeter les filets en plein jour après une nuit infructueuse— semblait inutile et absurde. Par ailleurs, Pierre et les autres étaient des pêcheurs aguerris : ils connaissaient bien leur métier et les zones les plus reculées du lac de Tibériade n’avaient pas de secrets pour eux. Cependant, ils obéissent : in verbo autem tuo laxabo retia (Lc 5, 5), sur ta parole, je jetterai les filets. Elle est vraiment merveilleuse la foi de Pierre, n’est-ce pas ? Nous avons-nous aussi besoin de foi pour faire face aux vicissitudes de notre existence, spécialement celles qui demandent une réponse généreuse aux desseins de Dieu.

L’Année de la Foi

Dans quelques mois, en octobre, l’Année de la Foi convoquée par le Pape va commencer. Comment nous y préparons-nous ? Faisons-nous des actes explicites de cette vertu-là avant de recevoir le sacrement de la Confession ou de la Communion ? Nous adressons-nous à Dieu avec foi dans notre prière pour ce qui est des diverses obligations d’une vie remplie d’occupations professionnelles ? Tâchons-nous de rapprocher du Seigneur les personnes que nous aimons, nos amis, nos collègues d’étude ou de travail ? N’oublions pas cette vérité profonde : Dieu veut aussi se servir de chacune et de chacun de nous pour que les autres le connaissent, le fréquentent et l’aiment.

Considérez que la foi ouvre toutes les portes grandes ouvertes et nous permet de découvrir des panoramas qui semblaient bouchés. C’est l’enseignement de l’Évangile. En obéissant à l’injonction du Seigneur, Pierre et ses camarades jetèrent les filets : ils le firent, dit saint Luc, et ils prirent une telle quantité de poissons que leurs filets se déchiraient. Ils firent signe aux compagnons de l’autre barque de venir les aider. Ceux-ci vinrent et ils remplirent les deux barques à tel point qu’elles enfonçaient (Lc 5, 6-7).

Quelle grande leçon de foi et d’obéissance à Dieu! Jésus-Christ nous invite, nous aussi, à nous sanctifier dans toutes les circonstances courantes de la vie et à jeter les filets de l’apostolat dans la mer du monde.

Demandons à la Sainte Vierge Marie, par l’intercession de saint Josémaria, de faire en sorte que chacun sache écouter la voix du Christ et s’attacher, j’insiste, à ce que cette voix résonne aux oreilles de beaucoup d’autres personnes.

Nous serons ainsi comme les Apôtres, des disciples du Christ et des pêcheurs d’hommes au cœur de nos occupations habituelles.

Et, naturellement, demandons au Seigneur, comme de bons fils du successeur de Pierre, d’aider le saint-père, les évêques, les prêtres en leur mission de Pasteurs sachant donner leur vie au service de toutes les âmes. Ainsi soit-il.

Rome, Basilique Saint-Eugène, 26 juin 2012