Du cœur aux Cœurs
La liturgie rapproche le Sacré-Cœur de Jésus et le Cœur Immaculé de Marie. La première solennité synthétise l’œuvre du Christ ; la mémoire mariale célèbre sa coopération au salut. « Le mystère du Cœur du Sauveur s’imprime et se reflète dans le Cœur de sa Mère » (Saint Siège, La piété populaire §174). Deux dévotions bien ancrées dans l’Église, qui rappellent l’initiative divine : « Je vais parler à son cœur » (Osée 2, 16).
La maternité divine rapproche ciel et terre. Le sein de la Toute Sainte, qui a formé l’affectivité de son Fils, recueille sa flamme : Bethléem, Nazareth, Cana, Jérusalem… seront théâtre d’un jeu divin qui prend l’humain au sérieux. La Vierge s’est « associée d’un cœur maternel au sacrifice, donnant le consentement de son amour » (Concile Vatican II, Lumen Gentium §58). Le Crucifié élargit la maternité de Marie, comme « Mère des vivants » de la Nouvelle Alliance. Depuis la transfixion, le Cœur ouvert du Sauveur attire les regards de Notre Dame, de l’évangéliste et des chrétiens. Les musiciens composent à l’envie des Stabat mater.
Le cœur à cœur entre le Fils et la Mère, vivant à l’unisson de l’amour, accueille volontiers le fidèle. « Les richesses de la grâce » (Éphésiens 1, 7) trouvent un digne écrin dans ces Cœurs. Les mystiques voient le cœur de la mère transpercé, spirituellement, par le même fer de lance (saint Bernard, Homélie pour l’octave de l’Assomption) et bénéficient de confirmations consolantes : « Nous n’étions que comme un Cœur », confiait Marie à sainte Brigitte (Révélations 1, 35). Les prédicateurs imaginent leur intercession au ciel : « le Christ, son flanc découvert, montre au Père ce côté et ses blessures. Marie montre son sein au Christ » (Arnaud de Chartres, Les sept paroles). L’art flamand a osé l’image, dans l’huile sur chêne du Jugement dernier (Jean Provoost, Bruges, 1525).
Depuis sainte Marguerite-Marie, la dévotion au Sacré-Cœur s’est enracinée, à partir de la France, partout ; de même, la dévotion au Cœur Immaculé. Avec une confiance sans bornes, les papes leur ont consacré la famille humaine. Le cœur du chrétien a besoin de s’y greffer. La sève de ces amours fait pousser vite la foi, « l’esprit de supplication » (Zacharie 12, 10) et les œuvres de miséricorde, à commencer par le pardon. Le zèle évangélisateur du peuple de Dieu y grandira fertile.
Abbé Antoine Fernandez