Exemple de foi (5) Marie, modèle et éducatrice de la foi

Notre Mère nous apprend à être totalement ouverts à la volonté divine, même si elle est mystérieuse. C'est pourquoi elle est pour nous modèle et éducatrice de la foi.

Nous avons essayé de méditer sur différents aspects de la foi. Plus précisément, en contemplant la vie de quelques-unes des grandes figures de l’Ancien Testament — Abraham, Moïse, David et Élie — nous avons compris que le fait de rencontrer Dieu donne un nouveau sens à toutes nos actions et nous incite à l’obéissance, à la confiance et à l’humilité

Poursuivons maintenant le parcours de l’histoire de notre foi, guidés par les personnages du Nouveau Testament dans lequel la Révélation a atteint avec le Christ sa plénitude et son accomplissement : Après avoir, à maintes reprises et sous maintes formes, parlé jadis aux Pères par les prophètes, Dieu, en ces jours qui sont les derniers, nous a parlé par le Fils[1].

Icône parfaite de la foi

Quand vint la plénitude du temps, Dieu envoya son Fils, né d’une femme, né sujet de la Loi [2]. Toute l’espérance de l’Ancien Testament pour l’arrivée du Sauveur est concentrée dans l’attitude de la Vierge Marie. « En Marie s’accomplit la longue histoire de foi de l’Ancien Testament, avec le récit de la vie de beaucoup de femmes fidèles, à commencer par Sara, femmes qui, à côté des Patriarches, étaient le lieu où la promesse de Dieu s’accomplissait, et la vie nouvelle s’épanouissait. [3] » À l’instar d’Abraham — « notre père dans la foi » [4]— qui quitta son pays plein de confiance en la promesse de Dieu, Marie s’abandonne avec une totale confiance à la parole que lui annonce l’ange, devenant ainsi le modèle et la mère des croyants. La Vierge Marie, « l’icône parfaite de la foi » [5], a cru que rien n’est impossible à Dieu et permis que le Verbe habite parmi nous.

Notre Mère est un modèle de la foi. « Par la foi, Marie a accueilli la parole de l’Ange et elle a cru à l’annonce qu’elle deviendrait Mère de Dieu dans l’obéissance de son dévouement (cf. Lc 1, 38). Visitant Élisabeth, elle éleva son cantique de louange vers le Très-Haut pour les merveilles qu’il accomplissait en tous ceux qui s’en remettent à lui (cf. Lc 1, 46-55). Avec joie et anxiété elle met au jour son fils unique, maintenant intacte sa virginité (cf. Lc 2, 6-7). Comptant sur Joseph son époux, elle porta Jésus en Égypte pour le sauver de la persécution d’Hérode (cf. Mt 2, 13-15). Avec la même foi, elle suivit le Seigneur dans sa prédication et demeura avec lui jusque sur le Golgotha (cf. Jn 19, 25-27). Avec foi Marie goûta les fruits de la résurrection de Jésus et, conservant chaque souvenir dans son cœur (cf. Lc 2, 19.51), elle les transmit aux Douze réunis avec elle au Cénacle pour recevoir l’Esprit Saint (cf. Ac 1, 14 ; 2, 1-4). [6] »

La Très Sainte Vierge a vécu sa foi dans une existence pleinement humaine, celle d’une femme courante. Si Dieu a voulu exalter sa Mère, Marie n’en a pas moins connu durant sa vie terrestre la douleur, la fatigue, les clairs-obscurs de la foi. A cette femme du peuple qui, un jour, éclata en louanges envers Jésus en s’exclamant : Heureuses les entrailles qui t’ont porté et les seins qui t’ont allaité (Lc 11, 27-28), le Seigneur répondit : Heureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu et la gardent ! C’était l’éloge de sa Mère, de son fiat (Lc 1, 38) — “que cela se fasse” — sincère, généreux, sans limite, qui se manifeste, non par des actions voyantes, mais par un sacrifice quotidien, silencieux et caché [7].

La Vierge Marie « vit entièrement de la et dans la relation avec le Seigneur ; elle est dans une attitude d’écoute, attentive à saisir les signes de Dieu sur le chemin de son peuple ; elle est insérée dans une histoire de foi et d’espérance dans les promesses de Dieu, qui constitue le tissu de son existence » [8]

Éducatrice de la foi

Par la foi, Marie a pénétré dans le mystère du Dieu Un et Trine comme il n’a été donné de le faire à aucune autre créature et, en tant que « mère de notre foi » [9], elle nous a fait partager cette connaissance. Nous n’approfondirons jamais assez ce mystère ineffable ; nous ne pourrons jamais remercier assez notre Mère de cette familiarité avec la Très Sainte Trinité qu’elle nous a donnée [10].

La Sainte Vierge est éducatrice de la foi. Tout déploiement de la foi dans l’existence trouve son prototype en elle : son engagement devant Dieu et son effort pour configurer les circonstances de la vie ordinaire à la lumière de la foi, y compris dans les moments d’obscurité. Notre Mère nous apprend à être tout à fait ouverts au vouloir divin, « même s’il est mystérieux, même si souvent il ne correspond pas à notre propre volonté et qu’il est une épée qui transperce l’âme, comme le dira prophétiquement le vieux Syméon à Marie, au moment où Jésus est présenté au Temple (cf. Lc 2, 35) » [11]. Sa pleine confiance dans le Dieu fidèle et ses promesses ne décroît pas, même si les propos du Seigneur sont difficiles ou apparemment impossibles d’accueillir.

C’est pourquoi si notre foi est faible, accourons à Marie [12]. Dans l’obscurité de la Croix, la foi et la docilité de la Vierge Marie portent un fruit inattendu. En la personne de Jean, le Christ confie tous les hommes à sa Mère et spécialement ses disciples : ceux qui devaient croire en lui [13]. Sa maternité s’étend au Corps mystique du Señor tout entier. Jésus nous donne pour mère sa propre Mère, il nous confie à ses soins et nous offre son intercession. Pour cette raison, à l’occasion de l’Année de la foi, l’Église invite les fidèles « à s’adresser avec une particulière dévotion à Marie ».

Notre fragilité n’est pas un obstacle pour la grâce. Dieu compte avec elle, c’est pourquoi il nous a donné une mère. « Dans cette lutte, que les disciples de Jésus doivent affronter —nous tous, nous, tous les disciples de Jésus nous devons affronter cette lutte — Marie ne les laisse pas seuls ; la Mère du Christ et de l’Église est toujours avec nous. Toujours, elle marche avec nous, elle est avec nous. […] Elle nous accompagne, elle lutte avec nous, elle soutient les chrétiens dans le combat contre les forces du mal »[14]

La Vierge Marie est la meilleure éducatrice de l’école de la foi, car elle a toujours eu une attitude confiante, ouverte, éclairée par la foi, face à tout ce qui arrivait autour d’elle. L’Évangile nous la présente ainsi : Marie conservait avec soin toutes ces choses, les méditant en son cœur [15]. Efforçons-nous de l’imiter en parlant au Seigneur, dans un dialogue d’amour, de tout ce qui nous arrive, jusqu’aux événements les plus menus. N’oublions pas que nous devons les peser, les évaluer, les voir avec les yeux de la foi, pour découvrir la Volonté de Dieu [16]. Son cheminement dans la foi est semblable au nôtre, quoique sur un mode différent : il y a des moments de lumière mais aussi d’autres d’une certaine obscurité par rapport à la Volonté divine. Lorsqu’ils ont retrouvé Jésus dans le Temple, Marie et Joseph ne comprirent pas la parole qu’il venait de leur dire [17]. Si, comme elle, nous accueillons le don de la foi et mettons toute notre confiance dans le Seigneur, nous aborderons chaque situation cum gaudio et pace, avec la joie et la paix des enfants de Dieu.

Imiter la foi de Marie

« Ainsi, en Marie, le chemin de foi de l’Ancien Testament est assumé dans le fait de suivre Jésus, et il se laisse transformer par lui, en entrant dans le regard-même du Fils de Dieu incarné. [18] » Au moment de l’Annonciation, la réponse de la Sainte Vierge résume sa foi en tant qu’engagement, don de soi, vocation : Je suis la servante du Seigneur ; qu’il m’advienne selon ta parole [19]. Comme elle l’a fait, nous autres chrétiens, nous devons vivre face à Dieu en prononçant ce fiat mihi secundum verbum tuum […] dont dépend la fidélité à la vocation personnelle, unique dans chaque cas et qui ne peut être transférée, qui fera de nous des coopérateurs de l’œuvre du salut que Dieu réalise en nous et dans le monde entier [20].

Or, comment toujours répondre avec une foi aussi ferme que celle de la Vierge Marie, sans perdre la confiance en Dieu ? En l’imitant, en faisant en sorte que son attitude foncière face à Dieu soit bien présente dans notre vie : elle n’éprouve ni peur ni méfiance mais « entre dans un dialogue intime avec la Parole de Dieu qui lui a été annoncée, elle ne la considère pas superficiellement, mais elle s’arrête, elle la laisse pénétrer dans son esprit et dans son cœur pour comprendre ce que le Seigneur veut d’elle, le sens de l’annonce » [21]. Comme elle l’a fait, cherchons à rassembler dans notre cœur tous les événements qui nous arrivent, en reconnaissant que tout provient de la Volonté de Dieu. Marie regarde à fond, réfléchit, soupèse et comprend ainsi les différents événements avec une compréhension que seule la foi peut donner. Puissions-nous, aidés de notre Mère, apporter la même réponse !

Imiter Marie, lui permettre de nous prendre par la main, contempler sa vie nous amène aussi à susciter chez ceux qui nous entourent (proches parents et amis) la même grande ouverture à la lumière de la foi : par l’exemple d’une vie cohérente, par des entretiens personnels d’amitié et de confidence, par la doctrine indispensable, afin de leur faciliter la rencontre personnelle avec le Christ dans les sacrements et les pratiques de piété, dans le travail et les moments de repos. Si nous nous identifions à Marie, si nous imitons ses vertus, nous pouvons obtenir que le Christ naisse, par la grâce, dans l’âme de beaucoup de personnes qui s’identifieront à lui par l’action de l’Esprit Saint. Si nous imitons Marie, nous participerons d’une certaine façon de sa maternité spirituelle. En silence, comme Notre Dame ; sans que cela se remarque, presque sans mots, par le témoignage intègre et cohérent d’une conduite chrétienne, avec la générosité qui nous fera répéter un fiat sans cesse renouvelé, comme quelque chose d’intime entre nous et Dieu [22].

***

En regardant la Vierge Marie, demandons-lui de nous aider à vivre de la foi et à reconnaître Jésus, présent dans notre vie : à croire que rien n’est comparable à l’Amour de Dieu qui nous a été donné ; croire que rien n’est impossible pour qui travaille pour le Christ et avec lui dans son Église ; croire que tous les hommes peuvent se convertir à Dieu ; croire que malgré nos misères et nos défaites nous pouvons nous refaire avec son aide et celle des autres ; croire dans les moyens de sanctification que Dieu a prévus dans l’Œuvre et dans la valeur surnaturelle du travail et des petites choses ; croire que nous pouvons ramener notre monde à Dieu si nous ne lâchons pas sa main. En définitive, croire que Dieu place chacun dans les meilleures circonstances — bonne santé ou maladie, situation personnelle ou travail professionnel, etc. — pour que nous devenions des saints, si nous sommes fidèles dans notre lutte quotidienne. Jésus-Christ pose comme condition que nous vivions de la foi : alors nous serons capables de déplacer des montagnes. Il y a tant de choses à déplacer dans le monde, et d’abord… dans notre cœur. Tant d’obstacles à la grâce ! Alors, ayez la foi et les œuvres, la foi et l’esprit de sacrifice, la foi et l’humilité. La foi fait de nous des créatures toutes-puissantes : et tout ce que vous demanderez dans une prière pleine de foi, vous l’obtiendrez (Mt 21, 22) [23]. Poussés par la force de la foi, nous disons à Jésus : Seigneur, je crois ! Mais aide-moi à croire, plus, mieux ! Adressons enfin cette prière à Sainte Marie, Mère de Dieu et notre Mère, modèle de foi : Oui, bienheureuse celle qui a cru en l’accomplissement de ce qui lui a été dit de la part du Seigneur (Lc 1, 45) [24]. « Ô Mère, aide notre foi ! [25] »

Francisco Suárez – Javier Yániz (juillet 2013)


[1]. He 1, 1-2.

[2]. Ga 4, 4.

[3]. Pape François, Litt. enc. Lumen fidei, 29 juin 2013, n° 58.

[4]. Missel romain, Prière eucharistique I.

[5]. Pape François, Litt. enc. Lumen fidei, 29 juin 2013, n° 58.

[6]. Benoît XVI, Motu proprio Porta fidei, 11 octobre 2011, n° 13.

[7]. Quand le Christ passe, n° 172.

[8]. Benoît XVI, Audience générale, 19 décembre 2012.

[9]. Pape François, Litt. enc. Lumen fidei, 29 juin 2013, n° 60.

[10]. Amis de Dieu, n° 276.

[11]. Benoît XVI, Audience générale, 19 décembre 2012.

[12]. Amis de Dieu, n° 285.

[13]. Ibid., n° 288.

[14]. Pape François, Homélie, 15 août 2013.

[15]. Lc 2, 19.

[16]. Amis de Dieu, n° 285.

[17]. Lc 2, 50.

[18]. Pape François, Litt. enc. Lumen fidei, 29 juin 2013, n° 58.

[19]. Lc 1, 38.

[20]. Entretiens, n° 112.

[21]. Benoît XVI, Audience générale, 19 décembre 2012.

[22]. Amis de Dieu, n° 281.

[23]. Ibid., n° 203.

[24]. Ibid., n° 204.

[25]. Pape François, Litt. enc. Lumen fidei, 29 juin 2013, n° 60.