Mexico, le 12 décembre 1955
« Ce matin, le Seigneur est resté pour toujours dans l’oratoire du centre d’études. Nous avons placé une peinture de l’Immaculée Conception (un grand tableau), l’autel est en marbre vert et doré (le marbre est une imitation, mais le résultat est très beau). Le tabernacle est en bois doré avec une porte de verre. Tout a été fait dans l’atelier où Aurora apprend à dorer et à sculpter. Priez beaucoup pour cette maison, afin que toutes les vocations qui viendront persévèrent jusqu’à la fin et soient très saintes. Aujourd’hui, comme c’est ma fête et qu’au Mexique c’est une date importante, beaucoup de gens sont venus à la messe à la maison pour prier pour moi à la communion. J’ai vraiment remarqué qu’il y avait beaucoup de gens qui priaient pour moi et je sais que vous aussi, vous l’avez fait, ainsi que toutes mes sœurs du monde entier. J’ai aussi reçu une lettre de ma famille : j’ai l’impression que tout le monde se rapproche de plus en plus de l'Oeuvre. Ils sont très heureux de m’écrire, surtout Eduardo et Laurita (qui sont de chez nous). […] Comme vous le dites, pour que se réalise tout ce que Dieu veut, une seule chose est nécessaire : la sainteté personnelle. Je veux y arriver, mais je sais aussi que j’en suis loin. J’accomplis les normes (1), j’ai la volonté de servir, je réprime mon caractère (qui est fort) et je suis toujours contente, mais de là à être contemplative et sainte, j’ai encore du chemin à faire, même si je ne sais pas bien sur quoi lutter pour y arriver. Priez beaucoup, beaucoup pour moi. Je veux faire de mon mieux, mais parfois je gâche tout : il n’y a pas moyen ! Priez beaucoup aussi pour les plus âgés de la région, pour qu’ensemble nous parvenions à tout faire. Je sais que vous n’aimez pas le gouvernement personnel dans l’Oeuvre. Dieu non plus, et moi non plus, je vous le garantis. Je fais très attention à répartir les responsabilités et à faire tout en accord les unes avec les autres, en renonçant à mon jugement bien souvent. Père, je suis à la tête depuis des années, ne serait-il pas bon de commencer « à être les pieds » ? Mais vous savez bien qu’ici, ou là où on m’enverra, je serai heureuse de servir Dieu dans l’Oeuvre. »
Montefalco (Mexique) 15 février 1956
« Père, je vous écris de Montefalco, où je suis avec un groupe des nôtres pour la retraite. […] J’ai l’impression qu’elles l’ont très bien faite et qu’avec l’aide de Dieu et la vôtre, nous allons commencer au Mexique une nouvelle période d’expansion et de profondeur spirituelle. Vous ne savez pas combien je le demande à Dieu pour moi et pour toutes. Nous en avons besoin. La direction spirituelle est déjà plus organisée : dans chaque centre, il y a un confesseur fixe et toutes celles d’entre nous qui ont une tâche de direction se rendent compte que nous avons cette énorme responsabilité d’être saintes et d’aider les autres à
l’être. Je suis très contente parce qu’il y a chez nous des filles à vous qui ont un très bon esprit et qui sont dociles. Je crois que rien ne leur semble exagéré. Nous lisions, pendant les repas, la vie de saint Jean de la Croix, mais rien de ce qu’il dit ne nous effraie et même si notre esprit est différent, il n’est pas plus facile, loin de là. C’est clair que notre don (si nous le vivons bien) est immense. Il ne peut pas être plus grand. […] »
(1) Elle se réfère aux normes de piété du plan de vie, c’est-à-dire aux pratiques de piété propres de la vie chrétienne que les membres de l’Opus Dei se proposent de vivre pour « chercher Dieu, le trouver, le fréquenter », selon les mots du fondateur de l’Opus Dei. Ce plan de vie, tracé par saint Josémaria, comprend notamment le Rosaire et la méditation personnelle, ainsi que l’action de grâce à Dieu et les oraisons jaculatoires adressées à Notre Dame. Cf. « Plan de vie », Elena ÁLVAREZ in Diccionario de San Josemaría Escrivá de Balaguer, José Luis ILLANES (dir.), Burgos, Monte Carmelo, 2013.