ACTIVITÉ DE L’OPUS DEI

1. Une double activité. 2. Activités pour les hommes et les femmes. 3. Activité liée à la formation individuelle. 4. Activité relative aux apostolats collectifs.

1. Une double activité.
2. Activités pour les hommes et les femmes.

3. Activité liée à la formation individuelle.

4. Activité relative aux apostolats collectifs.

Lorsque saint Jean-Paul II a érigé l’Opus Dei en 1982, avec la Constitution apostolique Ut sit, en Prélature personnelle composée de clercs et de laïcs (cf. Statuta,1 § 1), l’autorité suprême de l’Église lui a accordé des Statuts qui se réfèrent à une mission pastorale clairement définie : promouvoir la sanctification de ses fidèles, selon une spiritualité essentiellement séculière (cf. Statuta,2 § 1); et travailler, en commençant par les intellectuels, afin qu’il y ait des hommes et des femmes de toutes les couches et de tous les états civils de la société qui vivent leur foi de manière cohérente, se sanctifient dans leur profession et leur ordre selon la volonté du Créateur, exerçant un apostolat efficace dans tous les environnements (cf. Statuta,2 § 2).

1. Une double activité

En 1981, la Congrégation pour les évêques, dans une note d’information sur l’Opus Dei, avait eu recours, pour décrire l’activité de la future prélature, à l’expression « finalité doublement pastorale », en la commentant dans les termes suivants : « le prélat et son presbytère accomplissent un travail pastoral particulier au service du laïcat – bien délimité – de la Prélature, et toute la Prélature – presbytérat et laïcat conjointement – accomplit un apostolat spécifique au service de l’Église universelle et des Églises locales » (IJC, p. 467 s.).

Quand on parle d'« activité de l’Opus Dei », on fait référence au fait que l’Opus Dei en tant que telle se consacre à la diffusion de l’appel universel à la sainteté et à l’apostolat et à la pastorale vis-à-vis de ses membres et des hommes et des femmes qui s’approchent des moyens que la Prélature offre à cette fin. Grâce à ce travail de formation et d’encouragement, de nature essentiellement spirituel, doctrinal et apostolique, elle contribue à ce que ces personnes, de plus en plus conscientes des exigences de la vie dans le Christ reçues avec le baptême, luttent pour exercer les vertus chrétiennes dans leur existence ordinaire et s’efforcent de développer un apostolat intense parmi les personnes de toutes conditions.

« L'Opus Dei a pour activité principale de donner à ses membres, et aux personnes qui le désirent, les moyens spirituels nécessaires pour vivre dans le monde en bons chrétiens » (Entretiens 27), affirme saint Josémaria, en ajoutant que, en conséquence de cette activité formatrice de l’Œuvre, naît ce qui peut être considéré comme le service spécifique que la Prélature rend à l’Église : un apostolat spontané, multiforme et capillaire qui échappe aux prétentions d’un récit sociologique parce qu’il s’agit d’une « mer sans rivages »(Entretiens 57). Dans ce sens, le fondateur a expliqué que l’apostolat essentiel de l’Opus Dei est celui que chaque fidèle développe individuellement, « chaque membre dans son propre lieu de travail, dans sa famille, parmi ses amis. Action qui n'attire pas l'attention, difficile à traduire en statistiques, mais génératrice de fruits de sainteté dans des milliers d'âmes, qui vont à la suite du Christ, silencieusement et efficacement, dans leur tâche professionnelle quotidienne » (Entretiens 71). « Qui peut mesurer l'efficacité surnaturelle de cet apostolat silencieux et humble ? On ne saurait évaluer l'aide que fournit l'exemple d'un ami loyal et sincère, ou l'influence d'une bonne mère au sein de la famille » (Entretiens 31). En effet, il est impossible d’évaluer l’impact évangélisateur de la présence de chrétiens cohérents, et cela a été souligné par saint Josémaria en répondant à une question qui lui était posée par un journaliste : À l’Opus Dei appartiennent « des personnes de toute condition sociale, de toute profession, de tout âge et de toute situation : femmes et hommes, prêtres et laïcs, vieux et jeunes, célibataires et gens mariés, universitaires, ouvriers, paysans, employés, membres de professions libérales ou fonctionnaires, etc. ». Et puis, s’adressant directement à l’intervieweur, il demandait : « Avez-vous pensé au pouvoir de rayonnement chrétien que représente une gamme aussi étendue et aussi variée de personnes, et davantage encore si elles se comptent par dizaines de milliers et sont animées d'un même esprit apostolique (...) ? » (Entretiens 18).

Étant entendue la primauté de l’apostolat personnel, rien n’empêche cependant que s’ajoute à ce travail évangélisateur individuel des activités aux fins apostoliques qu’il serait difficile voire impossible de réaliser par un seul individu et dans lesquelles, par conséquent, diverses personnes collaborent, membres de l’Opus Dei ou non. « Parce que comme tous les fidèles, ils sont chargés par Dieu de l’apostolat en vertu du baptême et de la confirmation, les laïcs sont tenus par l’obligation et jouissent du droit, individuellement ou groupés en associations, de travailler à ce que le message divin du salut soit connu et reçu par tous les hommes et par toute la terre » (CEC, n. 900). Ce critère fondamental de l’apostolat individuel et collectif, que le Catéchisme exprime en recommandant les enseignements du Concile Vatican II sur la mission des laïcs, se reflète dans l’activité de l’Opus Dei, qui non seulement favorise et canalise l’apostolat personnel, mais promeut, « avec le concours d’un grand nombre de personnes (...) des entreprises collectives au moyen desquelles l'Œuvre tâche de contribuer à la solution de tant de problèmes qui se posent dans le monde actuel. Ce sont des centres d'éducation, d'assistance, de promotion et de formation professionnelle, etc. » (Entretiens 84; cf. Statuta,121 § 1).

En nous plaçant à un autre niveau, non pas celui de l’apostolat, mais celui que nous pourrions qualifier d’institutionnel, la Prélature développe également d’autres activités. Il s’agit, en effet, d’une institution hiérarchique qui dépend du Pontife Romain, de la Congrégation pour les Évêques et des autres organes du Saint-Siège compétents dans chaque cas ; elle entretient une communion étroite avec les évêques des diocèses dans lesquels elle exerce son travail pastoral ; elle est soumise aux lois justes des différents États où vivent ses fidèles ; elle a besoin de moyens économiques pour le développement de ses initiatives apostoliques, même si la Prélature elle-même ne possède qu’un minimum de biens ; elle doit expliquer son travail aux personnes et doit défendre sa réputation lorsqu’elle est attaquée ; etc. Les activités correspondantes – tant celles des organes directeurs de la Prélature que celles de ses membres – sont naturellement très variées et multiples. Pour chacun des cinq champs qui viennent d’être mis en évidence, saint Josémaria a nommé un saint intercesseur, à savoir saint Pie X, pour les relations de l’Œuvre avec le Saint-Siège ; Saint Jean-Baptiste Marie Vianney, curé d’Ars, pour les relations avec les évêques diocésains ; Saint Thomas More, pour les relations avec les autorités non ecclésiastiques ; Saint Nicolas de Bari, pour les affaires économiques ; et sainte Catherine de Sienne, pour l’apostolat de l’opinion publique.

On pourrait aussi ajouter à ces manifestations de « l’activité de l’Opus Dei », l’exercice du pouvoir sacré par le Prélat comme Ordinaire de la Prélature – lorsqu’il érige de nouvelles Régions ou appelle certains membres laïcs à recevoir les ordres sacrés, par exemple – ou les dispositions de ses Vicaires Régionaux avec leurs Conseils respectifs sur l’incorporation des fidèles, etc. Tout cela, cependant, est toujours d’une manière ou d’une autre lié au but « doublement pastoral » de l’Opus Dei, qui sert donc à exposer ce qui est vraiment essentiel dans son activité.

2. Activités pour les hommes et les femmes

Avant de poursuivre et d’analyser l’activité de l’Œuvre liée à la formation individuelle de ses membres et des personnes qui le souhaitent, ainsi que son activité visant à orienter les œuvres d’apostolat collectif, il est nécessaire de mentionner un point caractéristique commun aux deux types d’activité : le fait, fixé dans les Statuts de la Prélature (cf. Statuta, 4 § 3), que les deux sections de l’Opus Dei, celles des hommes et celle des femmes, ont chacune leurs propres apostolats.

C’est un principe fondationnel inébranlable, que saint Josémaria a toujours clairement souligné, également en référence à l’une de ses manifestations les plus significatives : le soin spirituel séparé des personnes mariées. Il vaut la peine de le citer longuement : « Je sais qu'il y a des groupes de catholiques qui organisent des retraites spirituelles et autres activités formatrices pour les couples. Il me paraît très bien que, dans l'usage de leur liberté, ils fassent ce qu'ils jugent opportun ; et aussi que ceux qui y trouvent le moyen de mieux vivre la vocation chrétienne participent à ces activités. Mais je considère que ce n'est pas l'unique possibilité, et il n'est pas évident non plus que ce soit la meilleure. Il y a beaucoup de formes de la vie ecclésiale que les couples et même toute la famille peuvent et doivent quelquefois pratiquer ensemble, telle que la participation au sacrifice eucharistique et à d'autres actes du culte. Je pense, cependant, que certaines activités déterminées de formation spirituelle sont plus efficaces si le mari et la femme s'y adonnent séparément. D'une part, on souligne ainsi le caractère fondamentalement personnel de la sanctification, de la lutte ascétique, de l'union avec Dieu, qui, plus tard, se répandent sur les autres, mais où la conscience de chacun ne peut être substituée. D'autre part, il est ainsi plus facile d'adapter la formation aux exigences et aux besoins personnels et même à la psychologie de chacun. Cela ne veut pas dire que, dans ces activités, on fasse abstraction du fait que les assistants sont mariés : rien n'est plus loin de l'esprit de l'Opus Dei. (...). Je répète qu'en cela nous ne prétendons pas non plus que notre façon d'agir soit la seule bonne, ou que tout le monde doive l'adopter. Il me semble simplement qu'elle donne de bons résultats et qu'il y a de fortes raisons — en plus d'une longue expérience — pour agir ainsi, mais je ne critique pas l'opinion inverse » (Entretiens 99).

Ce que saint Josémaria expose dans le texte cité sur la prise en charge différenciée des personnes mariées n’est qu’un aspect, certainement caractéristique, de la séparation des apostolats des hommes et des femmes qui est observée dans la Prélature. Saint Josémaria a toujours défendu cette façon de procéder, insistant sur l’indépendance et l’autonomie nécessaires du travail apostolique des deux Sections. Les moyens de formation offerts par l’Opus Dei sont toujours organisés soit pour les hommes, soit pour les femmes. En conséquence, les œuvres d’apostolat qui bénéficient de son orientation et de son soutien pastoral – résidences étudiantes, écoles primaires et secondaires, etc. – sont également pour les garçons ou pour les filles et sont dirigées par des hommes ou par des femmes, bien qu’il existe des initiatives dans lesquelles, de par leur nature même, il n’est pas possible d’appliquer le même critère, telles que, par exemple, les crèches, les hôpitaux ou les universités.

3. Activité relative à la formation individuelle

L’activité de formation que mène l’Opus Dei s’adresse généralement aux fidèles laïcs, il est donc facile de comprendre que, comme l’a affirmé saint Josémaria lui-même, l’accent n’est pas mis sur « les comités, assemblées, réunions, etc. », mais sur l’attention personnalisée. Pour cette raison, poursuivait-il, « je suis allé parfois, à l'étonnement de certains, jusqu'à dire que l'Opus Dei, en ce sens, est une organisation désorganisée » (Entretiens 63). De cette façon, continuait le fondateur, la plupart de ses fidèles « vivent pour leur propre compte, à l'endroit où ils vivraient s'ils n'appartenaient pas à l'Opus Dei : chez eux, avec leur famille, au lieu même où ils accomplissent leur travail.

Et là où il se trouve, chaque membre de l'Œuvre remplit la fin de l'Opus Dei : s'efforcer d'être saint, en faisant de sa vie un apostolat quotidien, courant, minime si l'on veut, mais persévérant et divinement efficace. Là est l'important ; et pour nourrir cette vie de sainteté et d'apostolat, chacun reçoit de l'Opus Dei l'aide spirituelle nécessaire, le conseil, l'orientation. Mais uniquement et strictement dans ce qui est d'ordre spirituel. Pour tout le reste — travail, relations sociales, etc. — chacun se conduit comme il l'entend, sachant qu'il ne s'agit pas d'un terrain neutre, mais d'une matière sanctifiante, sanctifiable et d'un moyen d'apostolat » (ibid.).

Transmettre cette formation et fournir cette assistance pastorale continue « exige une certaine structure mais toujours très réduite ; on recourt aux moyens qu'il faut pour qu'elle se limite à ce qui est absolument indispensable. On organise une formation religieuse doctrinale, qui dure toute la vie, et incite à une piété active, sincère et authentique, et à une ferveur qui implique nécessairement l'oraison continuelle du contemplatif et la tâche apostolique, personnelle et responsable, exempte de toute espèce de fanatisme » (ibid.).

En parlant de cette formation, saint Josémaria insiste toujours sur le fait que l’Opus Dei non seulement respecte la liberté de ses membres, mais leur en fait clairement prendre conscience. Elle leur enseigne « à savoir administrer leur propre liberté : en présence de Dieu, avec une piété sincère, et une doctrine sûre. Telle est la mission fondamentale des directeurs de notre Œuvre : faciliter à tous les membres la connaissance et la pratique de la foi chrétienne, de manière qu'ils en fassent la réalité même de leur existence, en toute autonomie » (Entretiens 53). On donne donc « une importance première et fondamentale à la spontanéité apostolique de la personne, sa libre initiative et à sa responsabilité, guidées par l'action de l'Esprit ; et non pas aux structures d'organisation, aux mandats, aux tactiques et aux plans imposés du sommet, siège de gouvernement » (Entretiens 19). Un minimum d’organisation est nécessaire, bien sûr, pour fournir une assistance spirituelle et une formation doctrinale... « Après quoi, débrouillez-vous ! Autrement dit : chrétiens, sanctifiez tous les chemins que parcourent les hommes, et qu'ils gardent le parfum du passage de Dieu » (ibid.). Avec l’organisation et l’offre de la formation chrétienne, l’activité de l’Opus Dei s’achève, dans un certain sens, et l’action personnelle libre et responsable de ses fidèles commence. « Chacun, avec une spontanéité apostolique, œuvrant en toute liberté personnelle et se formant une conscience autonome face aux décisions concrètes qu'il doit prendre, essaie d'atteindre la perfection chrétienne et de témoigner chrétiennement dans son propre milieu, en sanctifiant son travail professionnel, intellectuel ou manuel. Naturellement, comme chacun prend ses décisions en toute autonomie dans sa vie séculière, parmi les réalités temporelles où il évolue, on trouve fréquemment des options, des jugements et des activités diverses. On aboutit, en un mot, à cette désorganisation bénie, à ce pluralisme juste et nécessaire, qui est une caractéristique essentielle du bon esprit de l'Opus Dei et qui m'a toujours paru la seule manière correcte et ordonnée de concevoir l'apostolat des laïcs » (ibid.).

Pour établir ce minimum d’organisation désorganisée, saint Josémaria a souligné, dès les premières années de la fondation, trois domaines principaux de l’activité de l’Opus Dei, appelés respectivement « œuvre de saint Michel », « œuvre de saint Gabriel » et « œuvre de saint Raphaël ». Au cours d’une retraite spirituelle qu’il fit, en octobre 1932, au couvent des moniales Carmélites Déchaussées de Ségovie, il avait eu « la motion intérieure d’invoquer pour la première fois les trois Archanges et les trois Apôtres » (Instruction,8-XII-41, n. 9 ; AVP, I, p. 477), et depuis lors il les considérait comme les patrons de ces trois domaines de l’apostolat : saint Michel est, avec saint Pierre, patron de l’œuvre formatrice de l’Opus Dei avec les membres célibataires (numéraires et agrégés) ; saint Gabriel est, avec saint Paul, patron du travail avec des personnes qui ne s’engagent pas dans le célibat et qui sont pour la plupart mariées (surnuméraires et coopérateurs) ; saint Raphaël est, avec saint Jean, le patron de l’apostolat auprès de la jeunesse. Des allusions à cette dernière œuvre se trouvent dans Chemin :« Tu ris parce que je te dis que tu as la “ vocation du mariage ” ? — Eh bien, tu l’as. Et c’est bel et bien une vocation. Mets-toi sous la protection de saint Raphaël pour qu’il te conduise dans la chasteté jusqu’au bout du chemin, comme il guida Tobie » (C 27). « Tu es parti d’un rire très franc quand je t’ai conseillé de placer tes jeunes années sous la protection de saint Raphaël : pour qu’il te mène, comme le jeune Tobie, à un saint mariage avec une femme bonne, belle et riche, t’ai-je dit en plaisantant. Puis comme tu es resté pensif, lorsque j’ai poursuivi en te conseillant de te placer aussi sous le patronage de Jean, l’apôtre adolescent, pour le cas où le Seigneur t’en demanderait davantage ! » (C 360).

Dans les trois domaines, les activités habituelles du travail de formation — méditations, récollections mensuelles, cours de doctrine, causeries ou cercles de formation ascétique et apostolique, direction spirituelle personnelle, etc. — sont proposées dans divers lieux. Des activités similaires sont organisées pour les prêtres diocésains qui adhèrent à la Société sacerdotale de la Sainte-Croix ou qui cherchent, sans être des associés, l’aide spirituelle de l’Opus Dei pour se sanctifier dans leur ministère. Ces activités respectent et complètent toujours les activités formatrices que les Évêques prévoient pour leurs diocèses respectifs (cf. Statuta, n. 72).

4. Activité relative aux apostolats collectifs

Comme on l’a dit, l’Opus Dei ne limite pas son activité à des tâches de formation individuelle, mais admet la possibilité de certaines initiatives éducatives ou sociales promues d’un commun accord par ses fidèles, qui s’associent, pour atteindre ces fins, à d’autres personnes de bonne volonté. Pour comprendre le caractère spécifique de cette dimension de l’activité de l’Opus Dei, qui respecte toujours la liberté de ses fidèles dans le domaine civil, il est utile de rappeler ce que le Concile Vatican II a souligné : « Les liens de l’apostolat des laïcs avec la hiérarchie peuvent revêtir des modalités différentes selon la diversité des formes et des buts de cet apostolat. On trouve dans l’Église un certain nombre d’initiatives apostoliques qui doivent leur origine au libre choix des laïcs et dont la gestion relève de leur propre jugement prudentiel. De telles initiatives permettent à l’Église, en certaines circonstances, de mieux remplir sa mission ; aussi n’est-il pas rare que la hiérarchie les loue et les recommande, mais aucune initiative ne peut prétendre au nom de catholique, sans le consentement de l’autorité ecclésiastique légitime » (AA, 24).

Les œuvres apostoliques inspirées par l’Opus Dei sont réalisées par ses membres avec d’autres personnes, qui souvent ne partagent pas la même foi. Elles ne s’appellent généralement pas « catholiques », et elles n’ont pas non plus de noms de saints, etc., une façon de procéder qui est conforme à la vocation des fidèles laïcs qui recherchent la sainteté en exerçant leurs droits en tant que citoyens. « Mais je dois aussi avouer – ce sont des paroles de saint Josémaria dans ce contexte — que je n'ai guère de sympathie pour des expressions telles que : école catholique, collège de l'Église, etc., tout en respectant l'opinion de ceux qui pensent le contraire. Je préfère que les réalités se distinguent à leurs fruits, plutôt qu'à leur nom. Un collège sera effectivement chrétien si, tout en étant comme les autres et en s'appliquant à se surpasser, il réalise une tâche de formation complète — chrétienne y compris — dans un climat de liberté personnelle et dans le souci d'une justice sociale d'ailleurs impérieuse. S'il fait réellement tout cela, la question du nom aura perdu de son importance. Personnellement, je le répète, je préfère éviter ces adjectifs » (Entretiens 81). Le Code de droit canonique va dans le même sens. Il souligne que tous les fidèles, en participant à la mission de l’Église, « ont le droit de promouvoir ou de soutenir une activité apostolique, même par leurs propres entreprises ; cependant, aucune entreprise ne peut se réclamer du nom de catholique sans le consentement de l'autorité ecclésiastique compétente » (CDC, c. 216). Et il ajoute, dans un contexte plus précis, qu’il n’est permis à personne de désigner une école comme « catholique », sans ce consentement hiérarchique, même si elle est « réellement catholique » (CDC, c. 803 § 3)

Dans les Statuts de l’Opus Dei (cf. Statuta,121-123), deux types d’œuvres apostoliques sont considérés comme accomplis par la libre initiative de ses fidèles, et auxquelles la Prélature apporte son assistance pastorale : certaines sont généralement appelés « œuvres collectives » ; les autres n’ont pas de nom spécifique, bien qu’elles soient souvent désignées comme des « œuvres personnelles », dans le sens où ce sont des collèges, clubs, résidences, etc., organisés par diverses personnes dans l’exercice de leur liberté et sous leur propre responsabilité. Alors que l’Opus Dei offre aux œuvres collectives une garantie morale de leur vivification chrétienne, dans les œuvres personnelles elle ne fournit, à la demande de ceux qui les promeuvent ou les gèrent, qu’une certaine attention pastorale (aumôniers, professeurs de religion, orientation doctrinale, etc.). Dans ce qui suit, nous parlerons presque exclusivement des œuvres collectives, car elles impliquent une « activité de l’Opus Dei » en tant que telle.

Les « œuvres collectives » ont généralement les caractéristiques suivantes : 1) il s’agit d’initiatives civiles – et non ecclésiastiques – portées par des fidèles de l’Opus Dei avec d’autres personnes, chrétiennes ou non, par lesquelles il s’agit de satisfaire des besoins concrets de la société, conformément aux lois de chaque lieu ; 2) elles ont une nette finalité apostolique, de sorte qu’elles sont également appelées « œuvres d’apostolat collectif », pour indiquer clairement que « l’aspect collectif » de ces initiatives n’est que l’apostolat ; 3) les aspects techniques et économiques de chacune de ces œuvres sont pris en charge par les propriétaires et les gérants, et non par la Prélature ; 4) L’Opus Dei, en revanche, est responsable de l’identité chrétienne de ces initiatives, parce qu’elle leur fournit une assistance pastorale diligente, afin qu’elle puisse garantir que le travail qui y est effectué est conforme à la doctrine de l’Église Catholique et à l’esprit de l’Opus Dei.

Nous développerons ci-après ces quatre notes, en les illustrant avec des mots du fondateur.

1) Il est intéressant de souligner, en premier lieu, leur caractère civil et professionnel, non confessionnel : « ce ne sont point des œuvres ecclésiastiques (...). Ce sont des œuvres de promotion humaine, culturelle et sociale, réalisées par des citoyens qui tentent de les éclairer à la lumière de l'Évangile et de les réchauffer à la chaleur de l'amour du Christ » (Entretiens 119). Il peut y avoir – et il y a effectivement – quelques exceptions à ce principe général : les Facultés ecclésiastiques et les séminaires internationaux pour la formation des candidats au sacerdoce que la Prélature soutient. Mais ce sont, comme on l’a dit, des exceptions : le plus courant sont des activités de nature civile.

Les œuvres collectives sont destinées à contribuer « à résoudre chrétiennement des problèmes qui affectent les communautés humaines dans les divers pays » (Entretiens 19). Elles ne sont donc pas « conçues suivant des schémas préalables. On étudie dans chaque cas les besoins particuliers de la société où ces œuvres vont être implantées, de manière à les adapter aux exigences réelles » (Entretiens 31). L’éventail des activités qui existent dans les pays où l’Opus Dei travaille de manière stable va d’un « centre universitaire ou une résidence d'étudiants jusqu'au dispensaire ou à la ferme-école pour paysans. Résultat logique : nous avons une mosaïque multicolore d'activités, une mosaïque organiquement désorganisée » (Entretiens 19).

2) Le caractère apostolique de ces œuvres doit également être souligné. La mission de l’Opus Dei est axée sur la vivification chrétienne « des tâches qui constituent clairement et immédiatement un service chrétien, un apostolat. Il serait absurde de penser que l'Opus Dei en tant que tel puisse se consacrer à l'exploitation de mines ou à des entreprises d'ordre économique, quelles qu'elles soient. Ses œuvres collectives sont, toutes, des activités directement apostoliques : écoles de formation paysanne, dispensaires installés dans une région ou un pays en voie de développement, centres destinés à la promotion sociale de la femme, etc. Autrement dit, des établissements d'assistance, d'éducation ou de bienfaisance, comme ceux que fondent, dans le monde entier, les institutions de toutes croyances » (Entretiens 27).

3) Il convient également de noter le fait, contenu dans les Statuts de la Prélature (cf. Statuta,122), que, en ce qui concerne les aspects techniques et économiques d’un travail d’apostolat collectif – et il en va de même, avec plus de raison, pour les « œuvres personnelles » – les seuls responsables sont ses promoteurs et ses gestionnaires. La Prélature n’est pas non plus propriétaire de ces œuvres. C’est un principe essentiel, qui n’est pas de nature tactique, mais qui découle du caractère laïc de la vocation à l’Opus Dei, qui fait que ses fidèles agissent dans tous les domaines de la société comme ce qu’ils sont : des citoyens qui font usage de leurs droits et accomplissent consciencieusement leurs devoirs. Tout en cherchant conseil près des directeurs de l’Opus Dei sur les aspects apostoliques de l’œuvre correspondante, ce sont les promoteurs qui régissent l’initiative, choisissent les instruments juridiques les plus appropriés pour la canaliser, recherchent les moyens de financement nécessaires, s’occupent de l’obtention des permis administratifs, etc. Saint Josémaria illustrait et complétait ce tableau ainsi : « toute activité sociale, éducative, ou de bienfaisance doit recourir à des moyens financiers. Chaque centre alimente sa trésorerie de la même manière que tout autre de son espèce. Les résidences d'étudiants, par exemple, perçoivent les pensions que paient les résidents ; les collèges touchent les mensualités que versent les élèves ; les écoles d'agriculture encaissent le produit de leurs ventes, etc. Il est clair, néanmoins, que ces entrées suffisent rarement à couvrir les frais d'un centre, surtout si l'on songe que toutes les œuvres de l'Opus Dei sont conçues dans un esprit apostolique et que la plupart d'entre elles s'adressent à des personnes économiquement faibles qui, dans de nombreux cas, ne versent, pour la formation qu'on leur dispense, que des sommes symboliques » (Entretiens 51).

Compte tenu du but directement apostolique de ces œuvres et de la difficulté objective de les maintenir, la Prélature peut conseiller à ses fidèles de les soutenir, contribuant ainsi à leur travail. « Pour rendre ces œuvres possibles, - éclaircit le fondateur - on compte également sur l'apport des membres, qui y destinent une partie de l'argent qu'ils gagnent par leur travail professionnel. Et surtout sur l'aide de personnes, et elles sont nombreuses, qui, sans appartenir à l'Opus Dei, entendent collaborer à d'importantes tâches d'ordre social ou éducatif » (ibid., n. 51). « Certains sont attirés par des raisons spirituelles ; d'autres, sans même partager ces vues apostoliques, estiment qu'il s'agit là d'initiatives qui tournent au bénéfice de la société et sont ouvertes à tous, sans discrimination de race, de religion ou d'idéologie » (ibid., n. 27).

Il est logique que les promoteurs aient également recours à des subventions et aides officielles, étatiques, municipales, etc., qui, pour des raisons de justice distributive, soutiennent les initiatives visant le bien commun que leurs citoyens réalisent. Pour les œuvres collectives de l’Opus Dei ceci « ne constitue pas un privilège. C'est simplement la reconnaissance de l'utilité sociale qu'elles présentent et qui a pour effet de ménager les deniers publics » (ibid., n.33).

4) Il reste à commenter la dernière des notes, soulignées ci-dessus, qui définissent les œuvres collectives : la garantie morale offerte par la Prélature. Bien qu’elle favorise les activités sociales, éducatives et caritatives, « ce n'est cependant pas là la tâche principale de l’Œuvre, dit le fondateur ; ce à quoi tend l'Opus Dei, c'est à ce que de nombreux hommes et femmes s'efforcent d'être de bons chrétiens et, par conséquent, des témoins du Christ au sein de leurs occupations ordinaires » (ibid.,51). C’est précisément à cette fin que ces œuvres répondent. Les Statuts indiquent clairement le rôle de la Prélature dans ces activités : la vivification chrétienne. Pour cela, le Vicaire Régional concerné nomme, d’une part, les professeurs de religion (cf. Statuta,121 § 2) ; et d’autre part, il veille à ce que la formation doctrinale appropriée soit fournie aux personnes impliquées – enseignants, étudiants, parents, résidents, personnel administratif, etc. – et qu’elles soient sacerdotalement assistées. À cette fin, elle peut ériger un Centre de l’Œuvre pour s’occuper de ce travail (cf. Statuta,123).

Les Statuts mentionnent expressément, au numéro auquel il vient d’être fait référence, le respect de la liberté des consciences qui est vécue dans les œuvres collectives, soulignant ainsi une note fondamentale de tout l’apostolat de l’Opus Dei que saint Josémaria a soulignée d’innombrables fois : « Ces tâches collectives (...) sont ouvertes à tous, sans aucune discrimination sociale, culturelle ou religieuse » (Entretiens 60). « L'Opus Dei, depuis sa fondation, n'a jamais fait aucune discrimination: il travaille et vit en paix avec tous, parce qu'il voit dans chaque personne une âme à respecter et à aimer. Ce ne sont pas là que des mots (...). J'ai toujours défendu la liberté des consciences. Je ne comprends pas la violence ; elle ne me semble apte ni à convaincre ni à vaincre ; l'erreur se dépasse par la prière, par la grâce de Dieu, par l'étude ; jamais par la force, toujours par la charité » (ibid., n.44).


Thèmes connexes : Apostolat ; Formation : Considération générale ; Patrons et intercesseurs de l’Opus Dei.

Bibliographie :Entretiens 19, 27, 31, 33, 44, 47, 51, 53, 60, 67, 71, 81, 99, 119 ; Statuta Operis Dei o Codex iuris particularis seu Statuta Praelaturae Sanctae Crucis et Operis Dei,in OIG, p. 309-346 et IJC, p. 628 à 657; AVP, I, p. 474 à 494 ; IJC, p. 476 s. ; Concile Vatican II, Decr. Apostolicam Actuositatem 1965, n. 24 ; CEC, nn. 898-912 ; Jean-Paul II, Const. Ap. Ut sit 28-XI-1982, in OIG, pp. 305-307 ; Ernst Burkhart - Javier López Vie quotidienne et sainteté dans l’enseignement de saint Josémaria. Etude de téologie spirituelle, I, Madrid, Rialp, 2010, pp. 66-79 ; Carlos José ERRÁZURIZ, “Le iniziative apostoliche dei fedeli nell’ambito dell’educazione. Profili canonistici” Romana. Bolletino della Prelatura della Santa Croce e Opus Dei,12 (1990), p. 279-294 ; Álvaro del Portillo Entretien sur le fondateur de l’Opus Dei, Madrid, Rialp, 1993.

Ernst Burkhart