Un saint de notre temps

L’évêque de Cartagena réfléchit dans cet article sur la figure du bienheureux Josémaria, la situant dans le contexte du siècle passé, que Jean-Paul II voit comme « un siècle de guerres et de douleurs » qui « n’en a pas moins été, en même temps, un siècle de générosité et de grandeur. L’histoire témoigne du fait que, dans les époques de tragédie et de souffrance, des hommes et des femmes surgissent qui, comme des lumières éclairant le chemin de la vie, marquent par leur exemple la route de la dignité de l...

...’être humain. »

La vision haute et juste avec laquelle le souverain pontife actuel, Jean Paul II, est en train de gouverner l’Église, nous a fait voir les lumières et les ombres que l’humanité vient de vivre dans le XXe siècle récemment achevé, ainsi que les riches apports du christianisme.

Un siècle de guerres et de douleurs, dit-il, n’en a pas moins été, en même temps, un siècle de générosité et de grandeur. L’histoire témoigne du fait que, dans les époques de tragédie et de souffrance, des hommes et des femmes surgissent qui, comme des lumière éclairant le chemin de la vie, marquent par leur exemple la route de la dignité de l’être humain.

À côté des ombres des deux guerres mondiales et de conflits locaux incessants, à côté des camps de concentration dégradants et des camps de réfugiés, à côté des guerres tribales et des massacres liés au trafic de drogue ou au terrorisme, des comportements héroïques n’ont pas manqué non plus de la part de milliers d’hommes et de femmes qui ont vécu la douleur avec force, la mort avec dignité et le despotisme arbitraire avec des gestes de pardon exemplaires.

L’Église n’a pas été à l’écart de ces désordres mais elle a vécu, dans la chair de ses meilleurs enfants, les conséquences d’une telle folie.

Il est une tâche que le pape actuel considère urgente en tant qu’application de la doctrine conciliaire : celle de porter à la lumière publique le témoignage exemplaire de tant d’hommes et de femmes qui, en plein XXe siècle, ont concrétisé dans leurs vie ce qui est au cœur des enseignements du dernier Concile, l’appel universel à la sainteté.

Ces jours-ci, nous sommes en train de célébrer le centenaire de la naissance de l’un de ces hommes : le bienheureux Josémaria Escriva de Balaguer. Ce prêtre exemplaire n’a pas seulement compris la sainteté comme étant la seule expression authentique de son appartenance à l’Église, mais il a consacré toute sa vie, avant et après le Concile, à diffuser ce message de sainteté pour tous les baptisés quelle que soit leur état, profession ou métier.

Depuis que le 2 octobre 1928, le Seigneur lui fit voir l’Opus Dei, il travailla sans relâche pour crier à l’oreille de tous que les crises mondiales sont des crises de saints (Chemin, 301). Lorsque, au commencement du troisième millénaire, Jean Paul II veut engager l’Église sur des chemins d’espérance, il proposera ce même objectif : la sainteté (cf. Lettre apostolique Novo millennio ineunte, n. 30).

Pour le bienheureux Josémaria, la sainteté n’est pas une utopie que seule une élite peut atteindre ou un idéal réservé à des personnes qui ont choisi une forme de vie éloignée du monde et de ses avatars quotidiens. Il part d’une conviction : le Baptême est une véritable vocation. Tout baptisé est appelé par Dieu à devenir saint. Les moyens pour atteindre la sainteté ne se trouvent pas dans l’état de vie choisi, mais dans grâce de Dieu qui se donne à nous tous dans les sacrements.

Toute activité humaine, droitement comprise, est une participation à l’œuvre créatrice de Dieu et une forme de service aux hommes. Tout travail, réalisé à partir de notre radicale condition baptismale, exige la mise en exercice des vertus théologales, il se transforme en moyen de pratiquer les vertus morales et il est l’occasion de porter aux autres, par la parole et par l’exemple, le message chrétien.

Aucune tâche humaine, si elle est honnête, ne saurait empêcher l’union avec Dieu. Dans l’homélie prononcée dans le campus de l’Université de Navarre le 8 octobre 1967, le bienheureux Josémaria disait ; « J’avais l’habitude de dire à ces étudiants et à ces ouvriers qui se joignaient à moi vers les années trente qu’ils devaient savoir matérialiser la vie spirituelle. Je voulais de la sorte éloigner d’eux la tentation, si fréquente alors comme aujourd’hui, de mener une espèce de double vie : d’un côté la vie intérieure, le vie de relation avec Dieu ; de l’autre, une vie distincte et à part, la vie familiale, professionnelle et sociale, pleine de petites réalités terrestres.

« Non, mes enfants ! non, il ne peut y avoir de double vie, nous ne pouvons être pareils aux schizophrènes si nous voulons être chrétiens ; il n’y a qu’une seule vie, faite de chair et d’esprit et c’est cette vie-là qui doit être — corps et âme — sainte et pleine de Dieu : ce Dieu invisible, nous le découvrons dans les choses les plus visibles et les plus matérielles.

« Il n’y a pas d’autre chemin, mes enfants : ou nous savons trouver le Seigneur dans notre vie ordinaire, ou nous ne le trouverons jamais . »

Cette doctrine, forte et claire, est le riche héritage que le bienheureux Josémaria laissa à l’Église et que la prélature diffuse, comme un trésor inestimable, avec une exemplaire fidélité partout dans le monde, comme nous le constatons tous les jours dans notre propre diocèse.

Il est bon de rendre grâce à Dieu pour la personne et l’œuvre du bienheureux Josémaria à l’occasion de la célébration du premier centenaire de sa naissance, tout en attendant avec enthousiasme le jour de sa canonisation.

Manuel Ureña Pastor (évêque du diocèse de Cartagena) // La Verdad (Murcie)