Joseph, homme de foi
La deuxième lecture de la Messe d'aujourd'hui, grande solennité de saint Joseph, qui revêt une si grande importance pour nous et pour toute l'Église, nous présente en premier lieu la figure d'Abraham, ce grand patriarche que l'Église considère comme notre père dans la foi.
Dans l'Épitre aux Romains, saint Paul nous dit aujourd'hui qu'Abraham « dans l'espérance, a cru contre toute espérance ». Il a cru qu’il serait le père de nombreux peuples, et cela lui a valu la justification.
Nous connaissons bien l'histoire d'Abraham et sa disponibilité à la volonté de Dieu, disponibilité peu compréhensible humainement. Être père de nombreux peuples, compte tenu de l'âge qui était le sien ! Ensuite, il se mit en chemin sans savoir où il allait, confiant que Dieu lui montrerait à chaque instant ce qu'il aurait à faire et à planifier. Une grande foi !
C'est ce personnage que la liturgie nous présente aujourd'hui, comme précurseur de saint Joseph, notre père et seigneur, ce grand patriarche du Nouveau Testament. Nous voyons là aussi, en tout premier lieu, la grande foi de saint Joseph.
Aujourd'hui, dans notre prière, nous lui demandons de nous obtenir une très grande foi. Nous l'appelons « notre père et seigneur » et nous lui demandons de nous obtenir une foi sans condition, synonyme de confiance complète en le Seigneur : une confiance en tout.
La liturgie de la messe offre le choix entre deux évangiles. Celui de saint Matthieu nous rapporte comment saint Joseph a fait face à un mystère, le très grand mystère de l'Incarnation. Humainement, saint Joseph est mis devant le fait accompli. Homme juste, il ne veut pas dénoncer Marie et tient à garder le secret. Mais il fait un songe, qui lui transmet rien de moins que le Mystère : « Ce qui est en elle vient de l'Esprit Saint. Elle donnera le jour à un Fils. Tu donneras à l'Enfant le nom de Jésus, parce qu'Il sauvera son peuple de ses péchés. Lorsque Joseph se réveilla, il fit ce que lui avait commandé l'Ange du Seigneur ». Assurément, c'est un songe spécial accompagné, pour sa clarté, de toute la grâce de Dieu.
Ensuite, nous connaissons l'attitude de saint Joseph devant des phénomènes extraordinaires. Il y a d’abord la naissance : de Nazareth, ils doivent se rendre à Bethléem où ils ne trouvent pas de place. Puis il leur faut fuir subrepticement en Égypte. Joseph avait entendu l'Ange lui dire que cet Enfant sauverait le peuple de ses péchés, et il n'est pas capable de se sauver lui-même, il lui faut fuir. Dans la plus grande incertitude, car il ne s'entend pas dire « Rends-toi pour tant de temps en Égypte », mais « vas-y jusqu'à ce que je te dise d'en partir ». Ce pourraient être des mois, des années, des semaines... Telle est la disponibilité que nous devons avoir devant ce que nous demande le Seigneur, lorsque sa demande comporte un doute particulier, quelque chose d'imprévisible, un futur difficilement incontrôlable. Mais c'est là qu'est la foi, la foi de nous en remettre au Seigneur.
que nous sachions mettre notre foi dans le Seigneur. Que nous mettions notre confiance dans les moyens par lesquels il désire nous parler
Dans notre vie, nous passerons fréquemment par des moments qui ne seront probablement pas aussi extraordinaires mais où, d’une certaine façon, nous devrons d’abord faire confiance au Seigneur. Nous allons le demander, aujourd'hui spécialement, à saint Joseph : que nous sachions mettre notre foi dans le Seigneur. Que nous mettions notre confiance dans les moyens par lesquels il désire nous parler. Saint Joseph aurait pu penser : « J'ai eu un songe, j'ai rêvé cela, mais on m’en reparlera plus clairement ». Mais il n’a pas attendu pour obéir.
Une grande foi, donc. Ensuite, il y a ce retour d'Égypte. Joseph obéit mais en pensant, en assumant sa responsabilité, en prenant des initiatives pour retourner à Nazareth, au lieu de rester à Bethléem. Telle est l'obéissance de la foi : mettre notre confiance dans le Seigneur. Seigneur, aide-nous à mettre notre confiance en Toi. À mettre notre confiance dans tout ce que ta Providence nous envoie, même quand c'est aussi extraordinaire. Que nous sachions obéir. Que, sachant obéir par amour, nous soyons libres.
Une obéissance qui ne consiste pas à arrêter de penser. Saint Josémaria, dans une homélie sur saint Joseph, a montré que dans les différentes circonstances de sa vie, le patriarche n'avait pas renoncé à penser, ni abandonné sa responsabilité. De la même manière, notre obéissance aux plans de Dieu, qu’ils soient grands ou petits, doit se fonder sur notre liberté, sur notre responsabilité de faire les choses parce que nous le voulons. De la sorte, nous serons toujours libres. Combien de fois ne l'avons-nous pas médité, suivant les enseignements de notre fondateur. Nous ne sommes pas libres uniquement par notre capacité de pouvoir choisir ceci ou cela. Nous sommes libres parce que nous pouvons aimer, parce que nous pouvons nous sentir, disait-il, comme des oiseaux. Libres également dans ces circonstances d'enfermement dues au coronavirus. Nous sommes libres comme des oiseaux, parce que nous pouvons aimer. Nous pouvons aimer et, par conséquent, tout faire et tout souffrir par amour ; en un mot, parce que nous en avons envie.
Saint Joseph est aussi pour nous un modèle de tous les jours, dans la monotonie de notre vie ordinaire. Saint Josémaria nous dit : que peut espérer un habitant d'une bourgade perdue comme Nazareth ? Rien d’autre que le travail de tous les jours, toujours dans le même effort. Et, la journée finie, une maison pauvre et petite où refaire ses forces, puis repartir à la tâche le lendemain.
Il en va de même dans notre vie. Un jour de travail après l'autre, sans nouveauté particulière. Mais que pouvons-nous attendre, demandait saint Josémaria ? Que pouvait attendre saint Joseph? Et il poursuivait : « Le nom de Joseph signifie en hébreu Dieu ajoutera. Dieu ajoute à la vie sainte de celui qui accomplit ses volontés, des dimensions insoupçonnées ». Ce qu'il y a d'important, ce qui donne à sa valeur à toute chose, c’est le divin. Telle est notre vie.
Nous Te rendons grâce, Seigneur et nous Te demandons par l'intercession de saint Joseph, de nous faire comprendre la grandeur de la vie ordinaire. Ce sujet que nous avons tant de fois médité et que, tant de fois, nous avons besoin de réapprendre : la grandeur de la vie ordinaire, et concrètement, la grandeur de la vie de travail.
Le divin, c'est Lui-même. Le divin, c'est sa Présence, sa Grâce.
C’est dans notre vie apparemment monotone que Dieu met le divin, disait notre fondateur. Et qu'est ce que le divin ? Le divin, c'est Lui-même. Le divin, c'est sa Présence, sa Grâce. Le divin, c'est l'efficacité surnaturelle de notre travail. C'est rendre divin notre travail, en faire une réalité sainte.
Nous ne connaissons que peu de détails de la vie de saint Joseph, mais nous pouvons imaginer son travail à Nazareth. Comment travaillait-il, particulièrement avec Jésus ? Nous, Seigneur, nous voulons travailler avec toi, nous voulons que notre travail quotidien, courant, ordinaire profite aussi de ce « plus » divin qu’est ta Présence. Que nous travaillions avec Toi, Seigneur. Qu'il nous soit habituel, avec ou sans paroles, de Te dire : « Jésus, nous allons faire cela, toi et moi ». Cela va nous donner joie et sécurité, mais cela implique aussi une certaine responsabilité : nous ne sommes pas en train de réaliser, tout seul, une chose qui soit nôtre ; nous faisons quelque chose qui appartient à Dieu, nous collaborons avec Jésus dans tout ce que nous faisons.
Joseph, homme d’espérance
Foi : la foi de saint Joseph. Espérance : la foi est le fondement de l'espérance. Cette espérance qui, comme nous le lisons dans l'épitre aux Colossiens, est mise dans « ce qui nous est réservé au Ciel ». C’est dans l'espérance de ce «qui nous est réservé aux cieux » que nous devons voir notre travail. Dès à présent, sans attendre, par la grâce et la miséricorde de Dieu, d’aller au Ciel, si nous sommes fidèles ; mais dès maintenant, « ce qui nous est réservé aux cieux » est l'aide de Dieu, l'affection de Dieu, cette façon qu'a Dieu de nous voir amoureusement à tout instant.
Quelle est notre espérance ? Qu'espérons-nous pendant notre journée ? Tant de choses. Mais que notre espérance soit aux cieux. Qu'elle soit le fruit de la foi. Espérons toujours, d'une espérance sûre, que le divin vienne dans notre vie.
Cela nous donnera de l'assurance devant ce qui paraît difficile dans la vie spirituelle ; si souvent, la conscience de notre vocation à la sainteté pourra nous paraître impossible, compte tenu de l'expérience de nos limites et de nos misères. La réalisation de notre mission apostolique pourra également nous paraître impossible : transformer le monde, amener ce monde à Dieu, mettre le Christ au sommet de toutes les activités humaines. Très souvent, nous dirons : « Seigneur, cela est impossible ; mais nous, Seigneur, nous Te demandons ici, devant le Corps de saint Josémaria, de nous donner – comme il l'a eue, l'assurance de l'impossible ».
Saint Joseph a eu l'assurance de l'impossible. Cette assurance nous fera imiter saint Joseph en ce que disait notre fondateur, qui voyait en saint Joseph l'homme au sourire permanent et au haussement d'épaules. Un haussement d'épaules non certes d'indifférence, mais revenant à dire: « Bon, peu m'importe, parce que, quoi qu'il en soit, l'efficacité est là ».
nous pouvons nous imaginer son visage aimable, sympathique
Et le sourire permanent. Dans l'évangile, nous ne voyons pas le sourire de saint Joseph, mais nous pouvons, avec saint Josémaria, nous en imaginer le visage aimable, sympathique, illuminé d’un sourire permanent communiquant la joie aux autres, et leur donnant l'assurance. Seigneur, par l'intercession de saint Joseph, nous te demandons d'être des personnes qui savent sourire. Que nous sachions sourire même devant les difficultés, face à la contrariété. Nous en avons fait l'expérience si souvent : un sourire peut être la meilleure mortification. Parce que, parfois, il en coûte de sourire, devant les difficultés, les préoccupations, la maladie. Oui, il peut en coûter de sourire. Mais alors, le sourire n'est pas factice ; il peut et doit être profondément authentique, parce qu'il consiste à sourire en sachant que là, le Seigneur met le divin dans notre vie. Et savoir sourire pour aider les autres, pour donner joie et assurance.
Dans les situations difficiles, sachons sourire et, surtout, prier. Hier le Pape François, parlant de la pandémie, lançait cette invitation : « Invoque toujours saint Joseph, surtout dans les moments difficiles, et confie ton existence à ce grand saint ». Nous allons donc maintenant nous unir à la prière du Pape, et demander à saint Joseph que s'achève, que s'abrège ce temps difficile pour tant de personnes dans le monde entier.
Charité et fidélité de Joseph
Foi, espérance et charité. L'amour. La foi opère par la charité. Nous pouvons imaginer la tendresse de saint Joseph pour l'Enfant Jésus et pour la Vierge. Une affection qui se traduit dans le service, le don de soi, la responsabilité pour que cette famille sainte puisse aller de l'avant.
La charité a tant à voir avec la fidélité. Une fidélité que nous voulons renouveler aujourd'hui, avec saint Joseph. Dis une fois de plus au Seigneur, maintenant : « Me voici, Seigneur, pour ce que Tu voudras ». En outre, nous rendons grâces, parce que nous sommes conscients que le pouvoir que nous avons de nous donner au Seigneur est un grand don qu’il nous fait, un grand cadeau.
Benoît XVI disait que la fidélité au fil du temps est le nom de l'amour. Effectivement, le renouvellement de notre fidélité est le nom de l'amour, il doit provenir de l'amour, de vouloir, de désirer l'union au Seigneur. Ce renouvellement doit également naître de l'amour des autres, parce que notre fidélité aux plans de Dieu, à notre vocation chrétienne, à notre vocation à l'Œuvre est amour du Seigneur, amour des autres, renouvelé au fil du temps.
Nous demandons au Seigneur, par l'intercession de saint Joseph, la fidélité de tous, que tous renouvellent leur fidélité dans l'Œuvre. Que nous ayons tous une conscience très vive de ce que la fidélité à la vocation est la fidélité à Jésus-Christ. Oui, c'est une fidélité à un mode de vie, à une mission, à un esprit, mais c'est cela la fidélité à Jésus-Christ ; c’est cela qui nous fera nous sentir toujours plus proches du Seigneur.
Saint Paul écrivait : « Si nous vivons, nous vivons pour le Seigneur, et si nous mourons, que nous vivions ou que nous mourions, nous appartenons au Seigneur » (Rm 14,8). C'est là notre grande identité : « nous sommes du Seigneur ».
Notre fidélité consiste à réaffirmer avec reconnaissance que « nous sommes du Seigneur ». Tout cela, bien sûr, en étant fidèles à l'esprit reçu de notre fondateur : il est saint ; il est logique que nous recourions spécialement à son intercession.
Cette fidélité qui est la nôtre, que nous voulons renouveler avec une volonté actuelle, ferme, est fidélité à saint Josémaria. Ne le considérons pas, ne le voyons jamais comme une figure de l'histoire, admirable, qui nous a laissé des écrits formidables... Envisageons aussi cette fidélité comme suivant le conseil de saint Paul VI à don Alvaro : « Quand vous avez à dire quelque chose, pensez à la façon dont le dirait votre fondateur, et vous serez dans le vrai ». Et, commenta don Alvaro, ce conseil lui causa une grande joie parce que c'était ce qu'il faisait depuis le premier moment.
Que cette fidélité qui est la nôtre présente cette nuance – pour nous très importante – de fidélité à notre fondateur. Augmentons notre l'intérêt de mieux le connaître, de mieux connaître son esprit, ses écrits, sa vie… Tout cela nous aidera à être plus fidèles dans la vie ordinaire, dans le travail, dans les petites choses de chaque jour, dans le hic et nunc. Cela nous aidera également à être fidèles lorsque nous nous retrouvons, comme à saint Joseph, dans des occasions spéciales, particulièrement difficiles.
Fidélité. La fidélité au fil du temps est le nom de l'amour. Il en est ainsi : notre amour est un amour de réponse. L'objet fondamental de notre foi est la foi en l'amour de Dieu pour nous. Pour que notre amour, notre fidélité soient une réponse, sachons-nous aimés du Seigneur. Comme le disait notre fondateur, nous le rappelions plus haut, sachons que Dieu nous regarde avec amour à chaque instant, oui, à chaque instant. Nous ne sommes jamais seuls, Non seulement parce que nous sommes, grâce à Dieu, entourés de personnes qui nous aiment, mais parce que le Seigneur est avec nous. Il se trouve tellement avec nous que nous lui appartenons en quelque sorte : Domini sumus.
Aussi la fidélité doit-elle être une fidélité pleine de joie. Elle l'est. Et ici, au moment de renouveler notre fidélité, nous voulons qu'elle soit aussi un renouvellement de la joie avec laquelle nous prenons tout ce qui passe par nos mains : le travail, les circonstances actuelles si particulières de l'épidémie. Vivons avec joie.
Vivons avec ce sourire permanent de saint Joseph, parce que c'est ce que le Seigneur veut. Être fidèle au Seigneur, c'est aussi être content. Lorsque nous ne sommes pas contents, nous ne sommes pas fidèles, puisque le Seigneur veut notre joie : « Que ma joie soit avec vous et que votre joie soit parfaite » (Jn 15,11).
Il est formidable de penser que Dieu veut que nous soyons contents, que nous soyons fidèles. Et pour cela, Il nous donne tous les moyens pour être fidèles. Il nous donne surtout sa présence, son amour, sa compagnie.
Avec cette foi, avec cette espérance, avec cette charité, avec cette réponse fidèle, nous voulons une fidélité apostolique. Il ne peut en être autrement. Notre identification au Christ amène nécessairement au zèle pour les âmes, que nous avons de façon spéciale mises hier dans les mains de saint Joseph. Ici, avec les paroles de saint Josémaria, nous disons au Seigneur, en prenant saint Joseph pour intercesseur : « Des âmes, des âmes d'apôtres, elles sont pour Toi, pour ta gloire. » Nous allons beaucoup le répéter, aujourd'hui peut être. Nous le ferons en parcourant le monde, puisque le monde est à nous – le Seigneur nous l'a donné en héritage : Afrique, Amérique, Asie, Europe, Océanie : « Des âmes, des âmes d'apôtres, elles sont pour Toi ; elles sont pour ta gloire ».
Nous terminons en ayant recours à Marie, avec Joseph ; et en nous tournant, avec Marie et Joseph, vers Jésus. Jésus, Marie, Joseph : la trinité de la terre. Qu'ils nous conduisent par la main vers la Trinité du Ciel, vers ce Dieu à qui nous appartenons. Domini sumus, « nous appartenons à Dieu ».