Le Fils relevé

Les illustrations de la Bible de Saint Louis inspirent ce nouvel article sur la Résurrection du Christ. "Comme dans un baiser paternel, la toute-puissance se penche sur le Cadavre divin de Jésus, pour réunir l’Âme et le corps qui s’étaient séparés sur la Croix. Toute la Trinité est protagoniste de la résurrection".

L’alléluia pascal salue le retour du Sauveur, « livré pour nos fautes, ressuscité pour notre justification » (Romains 4, 25). Le corps pris par le Verbe éternel, broyé dans la Passion, se relève enfin du tombeau. Il a le pouvoir de reprendre sa vie (Jean 10, 18).

« Le Père m’aime parce que je donne ma vie, pour ensuite la recevoir à nouveau »

« Le Seigneur est à ma droite, je suis inébranlable » (Psaume 15, 8). Dans l’enluminure médiévale (Bible de Saint Louis, Paris, 1235, ©Moleiro, 2002 : v. 2, Livre de Job, f. 146), les bras du Père halent et bénissent le corps glorieux du Fils. Des ténèbres du sépulcre, désormais vide, le Christ resurgit pour recevoir tous les honneurs : « établi, selon le Saint-Esprit, Fils de Dieu avec puissance » (Romains 1, 4).

Le sacrifice plénier du Fils a remué à l’infini, si l’on peut dire, les entrailles de la Miséricorde éternelle. « Le Père m’aime parce que je donne ma vie, pour ensuite la recevoir à nouveau » (Jean 10, 17). Le Père, qui était resté plutôt silencieux au Golgotha, se glisse attendri dans le caveau du Bien-aimé. Comme dans un baiser paternel, la toute-puissance se penche sur le Cadavre divin de Jésus, pour réunir l’Âme et le corps qui s’étaient séparés sur la Croix. Toute la Trinité est protagoniste de la résurrection (Catéchisme §648) ; le Père, source intarissable qui « vivifie les morts » (Jean 5, 21), visite par son Esprit le sépulcre éphémère du Transpercé.

« Aussi mon cœur se réjouit, mon âme exulte et ma chair demeure en sûreté, car tu ne m’abandonnes pas aux enfers, tu ne laisses pas ton fidèle voir la corruption » (Psaume 15, 9-10). La prédication apostolique a lu ces versets, a juste titre, comme une prophétie de la résurrection. L’identité divine du Christ est certifiée par la signature du Père. Jésus atteint l’immortalité, bien méritée, pour lui-même et la prépare pour nous (Romains 8, 11). Par le Fils Aîné, la Trinité nous adopte comme des fils au baptême.

La Pâque nous place devant le visage d’un Jésus qui vit et règne, « le même pour tous les siècles » (Hébreux 13, 8), et qui nous invite à partager sa vie. « En lui, nous trouvons tout ; hors de lui, notre vie est vide » (Saint Josémaria, Quand le Christ passe §102). Le Ressuscité nous prend avec lui, pour nous associer à ses pas. « Le chrétien doit vivre selon la vie du Christ, en faisant siens les sentiments du Christ… : si je vis, ce n’est plus moi, mais le Christ qui vit en moi » (Ibidem §103).

En développant les traditions précédentes, le commentaire parisien regarde un épisode heureux de l’histoire de Joseph (Genèse 41, 14) : après avoir été emprisonné par une calomnie, la droiture du serviteur s’impose ; Pharaon le libère de la geôle. « Joseph, sorti de prison, symbolise le Christ qui ressuscite du sépulcre » (Bible de Saint Louis, v. 1, Genèse, f. 21). Le médaillon montre Dieu le Père qui, du haut du ciel, bénit le Ressuscité ; Jésus, debout sur le tombeau vide, portant l’Évangile du salut à la main, le glorifie, en présence des anges et d’un groupe admiratif de fidèles. Le commentaire exhorte les chrétiens à être fiers évangélisateurs de ce mystère, bien attesté par des nombreux disciples.

La Pâque apporte aussi un message libérateur, avec un optimisme exigeant. Le Ressuscité dévoile le sens de la vie éternelle mais aussi le respect de la vie temporelle. Chacune à son niveau, ce sont des dons du Père. A nous de recevoir ce message et de le transmettre sans peur, dans une société anesthésiée, qui est parfois égarée par des législateurs myopes. L’Évangile de vie est plus fort que la culture de la mort.

« Tu me fais connaître la route de la vie ; la joie abonde près de ta face, à ta droite, les délices éternelles » (Psaume 15, 11).

Abbé Fernandez

Photo : Rembrandt - Mise au tombeau