L'identité de Jésus dans le Nouveau Testament
Les Évangiles nous racontent l'histoire de Jésus et c'est le fondement de toute la doctrine christologique. La christologie n'est rien d'autre que la réflexion sur qui est Jésus et ce qu'il est venu faire dans le monde.
Cette réflexion trouve son point de départ dans les écrits du Nouveau Testament : les Évangiles, les lettres de saint Paul et de saint Jean, et les autres textes. Ils s’interrogent à la fois sur Jésus et sur son importance pour l'humanité. Et ils partent d'une conviction très importante : celle que Jésus ne peut pas être seulement un homme. En effet, dans les années qui ont suivi la Résurrection, les premiers chrétiens vénéraient le nom de Jésus, le louaient, lui chantaient des hymnes et se réunissaient le dimanche pour célébrer l'Eucharistie en sa mémoire.
Tout cela était assez logique si on prenait la vie de Jésus dans son ensemble. À la lumière des récits des Évangiles, on voit que Jésus s'est considéré comme l'unique représentant de Dieu dans le monde, revendiquant (même de manière humble et naturelle) des prérogatives divines telles que le pardon des péchés, la réforme de la parole que Dieu avait donnée au peuple par l'intermédiaire de Moïse, ou l'exigence d'un amour absolu pour sa personne ; en outre, il a confirmé tout cela par des miracles importants, comme la résurrection de Lazare qui a montré sa domination et son pouvoir sur les éléments cosmiques, les hommes et les démons ; il s'est ressuscité Lui-même et, du trône du Père, il a envoyé le Saint-Esprit. Tout cela signifiait aussi que Jésus avait accompli les promesses que Dieu avait faites à Israël pour les temps ultimes et définitifs : la promesse d'établir un Royaume qui durerait toujours, dont Lui, Jésus, était le Roi-Messie trônant dans les cieux. Jésus ne pouvait pas être un simple homme, aussi saint qu'on puisse l'imaginer.
Cette conviction se heurtait cependant à une question fondamentale : quelle était la relation de Jésus à Dieu ? Il n'était pas facile pour les premiers chrétiens de répondre à cette question. Ils confessaient qu'il n'y avait qu'un seul Dieu, mais ils se rendaient également compte que Jésus avait agi et parlé comme s'il était Dieu Lui-même. Le problème était alors très clair : peut-on dire que Jésus est Dieu, mais dans quel sens ? Cela ne veut-il pas dire confesser deux dieux ? Ce dernier point était une absurdité, car ils étaient également convaincus, comme tous les Juifs, qu'il n'y a – qu'il ne peut y avoir – qu'un seul Dieu. Quelle est donc la relation de Jésus avec le Dieu d'Israël ?
Cette réflexion aboutira progressivement à des solutions satisfaisantes. Déjà dans les lettres de saint Paul, nous voyons que l'apôtre utilise diverses manières d'exprimer la divinité de Jésus, sans le confondre avec Dieu le Père et sans affirmer deux dieux. Par exemple, dans la première lettre aux Corinthiens, il écrit : « Pour nous, au contraire, il n’y a qu’un seul Dieu, le Père, de qui tout vient et vers qui nous allons ; et un seul Seigneur, Jésus Christ, par qui tout vient et par qui nous vivons » (1 Co 8, 6). Il utilise cette expression, « un seul Dieu et un seul Seigneur », qui met concrètement sur le même plan Dieu le Père et le Christ, puisque dans l'Ancien Testament « Seigneur » était « le nom le plus habituel pour désigner la divinité même du Dieu d'Israël » (Catéchisme, no 446). « En attribuant à Jésus le titre divin de Seigneur », dit le Catéchisme de l'Église Catholique, « les premières confessions de foi de l’Église affirment, dès l’origine (cf. Ac 2, 34-36), que le pouvoir, l’honneur et la gloire dus à Dieu le Père conviennent aussi à Jésus (cf. Rm 9, 5 ; Tt 2, 13 ; Ap 5, 13) parce qu’il est de « condition divine » (Ph 2, 6) » (Catéchisme, no 449).
Cela est encore plus clair dans l'Évangile de Jean qui, dès le début, distingue clairement Dieu le Père du Verbe de Dieu qui était en Dieu dès le commencement et était Dieu lui-même (cf. Jn 1, 1). Jésus, dit Jean, est le Verbe incarné qui s'est fait homme et est venu dans le monde pour notre salut. Cette Parole existait avant le temps et la création, et n'est donc pas créée. Il a toujours été la Parole du Père et est donc distinct du Père, même s'il est en relation avec lui. C'est un texte important, dans lequel Jean répond au problème de savoir comment dire que Jésus est Dieu sans dire qu'il y a deux dieux. Ce Verbe, pense Jean, est divin comme le Père lui-même, mais il ne peut être considéré comme un second Dieu car il est complètement relatif au Père. Cela ouvre la voie à une considération du Dieu unique comme une trinité de personnes : le Père, le Fils et l'Esprit. Ainsi, dans le Nouveau Testament, le Dieu d'Israël ouvre son intimité et se révèle comme Amour, Amour qui réalise l'unité parfaite des trois personnes divines.
L'identité de Jésus à la lumière des conseils christologiques
Au cours des siècles qui ont suivi l'ère apostolique, l'Église a précisé sa connaissance de Jésus et l'a approfondie sur la base de ce que le Nouveau Testament avait affirmé. La diffusion de l'évangélisation a mis l'Évangile en contact avec le monde non-juif, et en particulier avec la pensée grecque, qui admettait une pluralité de dieux à des degrés divers.
Dans ce contexte, on pouvait aboutir à considérer Jésus comme un second Dieu, inférieur au Père et capable de changer et de s'incarner (contrairement au Père qui serait immuable). C'est bien la proposition d'Arius contre laquelle le Concile de Nicée a réagi en 325 (cf. Catéchisme, no 465). Lors de ce concile a été élaboré ce que nous récitons chaque dimanche dans le Credo, à savoir que Jésus est « Dieu, né de Dieu, lumière, née de la lumière, vrai Dieu, né du vrai Dieu. Engendré non pas créé, de même nature que le [consubstantiel au] Père ». Il en ressort que le Père et le Fils partagent la même divinité unique et ont la même dignité.
Un siècle plus tard, un autre problème important fut soulevé : si Jésus est Dieu, comment peut-il être à la fois homme et Dieu ? L'expérience nous dit qu'un homme est un individu et que Dieu est aussi un être distinct et individuel. Comment peuvent-ils être une seule réalité ? Lorsque nous pensons au Christ, ne s'agit-il pas plutôt de deux êtres distincts et pourtant profondément unis d'une certaine manière ? La proposition du patriarche de Constantinople, Nestorius, allait dans ce sens. Pour lui, Dieu et l'homme Jésus forment une unité car ils agissent toujours en parfaite conjonction. De même qu'un cheval au galop et le cavalier qui le conduit agissent conjointement, ils se conforment l'un à l'autre, bien qu'il s'agisse en réalité de deux êtres distincts qui forment une seule et même figure. À partir de cette approche, Nestorius en concluait que Jésus était né, avait vécu en Palestine, était mort sur la croix, etc., mais on ne pouvait pas dire la même chose de Dieu. Le Verbe éternel est immuable et ne peut pas naître comme un être humain. Par conséquent, on ne peut pas non plus dire que Marie est la mère de Dieu, mais seulement la mère de l'homme Jésus.
Le problème de cette thèse était qu'elle ne garantissait pas vraiment que le Christ était un seul être, une seule réalité vivante, comme nous le voyons dans les Évangiles. Le Concile d'Éphèse, en 431, s'y opposa en affirmant que la deuxième personne de la Trinité, le Verbe de Dieu, s'était fait chair, c'est-à-dire qu'il avait fait sienne une nature humaine, comme s'il l'intégrait à lui-même (cf. Catéchisme, no 446). C'est pourquoi il était un seul être et non deux réalités distinctes, plus ou moins unies, comme le soutenait Nestorius. Par le nom de « Jésus », nous entendons le Verbe, une fois qu'il a fait sienne la nature humaine, une fois qu'il s'est fait homme. Cette doctrine est connue sous le nom d'union hypostatique (parce que l'humain est intégré à la personne préexistante du Verbe = à l'hypostase du Verbe). Elle fut formulée au Concile d'Éphèse.
Cependant, certains comprirent mal cette doctrine et pensèrent que l'élément humain dans le Christ, absorbé comme il l'était dans la personne divine, était alors dissous dans celle-ci. Ainsi, l'élément humain en Jésus perdait toute sa consistance. Pour surmonter cette erreur, vingt ans plus tard, un autre concile œcuménique, qui se tint dans la ville de Chalcédoine, reformula l'idée éphésienne d'une manière quelque peu différente : Jésus est une seule personne, dit le Concile, mais il existe de deux façons : en tant que Dieu éternellement et en tant qu'homme dans le temps. Il est le vrai Dieu et le vrai homme, le Dieu parfait et l'homme complet et entier. De là, les conciles ultérieurs ont précisé la doctrine de Chalcédoine et en ont tiré certaines conséquences, par exemple, que Jésus a une véritable volonté humaine, puisqu'il est vraiment homme. Et en tant qu'homme, il a accompli l'œuvre de notre salut.
L'Incarnation
Au-delà des questions historiques, ce qui est fondamental pour la doctrine de l'incarnation c'est la présence personnelle du Fils de Dieu dans l'histoire. Par ses paroles et ses gestes humains, nous apprenons à connaître le Fils de Dieu et, d'une certaine manière, nous comprenons comment est Dieu lui-même. Et ce que nous voyons, surtout, c'est que Dieu est Amour, un amour fort, capable de donner sa vie pour nous.
L'Incarnation est l'œuvre du Dieu trinitaire. Le Père envoie son Fils dans le monde, c'est-à-dire que le Fils entre dans le temps et fait sienne la substance humaine, l'humanité, que l'Esprit Saint fait naître dans le sein virginal de Marie avec sa coopération et son consentement. Ainsi, le Verbe de Dieu, qui existait éternellement, commence aussi à exister en tant qu'homme dans l'histoire.
La présence dans l'histoire du Fils de Dieu est aussi proximité du Père et de l'Esprit Saint, car en Jésus et par Lui les autres personnes divines se font également connaître des hommes. Saint Jean, en particulier, a insisté sur ces aspects : la venue de Jésus révèle les traits intimes et inaccessibles de l'Être divin, de sorte que Celui que « personne n'a jamais vu » (Jn 1,18) se manifeste dans la vie du Christ, le Fils Unique incarné. Le Christ montre dans ses gestes, dans ses affections et ses paroles, sa relation avec le Père et avec les hommes, la bienveillance de Dieu envers les créatures et la valeur et le sens de la réalité terrestre.
Jésus est donc le Fils unique de Dieu qui s'est fait homme pour notre salut. Il est aussi le porteur de l'Esprit Saint, son temple et sa demeure dans l'histoire, et c'est pourquoi il est aussi appelé Christ, l'Oint. Certes, d'autres personnages de l'ancien Israël étaient oints d'huile à l'occasion de leur vocation ou de leur mission particulière et pour signifier la présence en eux de l'Esprit divin, mais l'onction de Jésus est beaucoup plus radicale, car elle découle de sa propre constitution d'homme, du mystère de l'Incarnation. Jésus vient dans le monde pleinement oint par l'Esprit, et donc tout en lui évoque la présence divine et reflète la pureté et la spiritualité de la réalité du ciel.
Et cette présence radicale de l'Esprit le remplit aussi de grâce et de dons surnaturels qu'il déploie dans ses actions, pleines de justice et de bonté, et qui inspirent ses paroles, impérieuses ou douces, mais toujours pleines de sagesse et de vie. Tout en Jésus révèle aux hommes l'amour de Dieu et cet amour qui remplit son cœur humain, se déverse sur la réalité qu'il rencontre, sur tout ce que le péché a abîmé, pour le restaurer et le ramener au Père.
La connaissance et la volonté humaine de Jésus
Nous avons déjà dit que Jésus est un Dieu parfait et un homme parfait. Naturellement, parce qu'il est Dieu, il a une connaissance éternelle et intemporelle de toutes choses, mais une fois devenu homme, sa connaissance de la réalité suit les voies propres à la manière de connaître de l'homme, c'est-à-dire que Jésus, comme nous, connaît aussi la réalité extérieure à travers des expériences, des images, des concepts, etc. qui se forment dans son esprit humain. En s'incarnant, le Christ n'a pas voulu contourner les lois de la nature et il a donc dû lui aussi apprendre beaucoup de choses comme tout être humain : il a appris à parler, à lire, à travailler, à connaître peu à peu les éléments nécessaires à la vie pratique, et il a dû aussi apprendre beaucoup de choses de la religiosité d'Israël qui lui a été enseignée principalement par Marie et Joseph.
L'esprit humain du Christ, comme toute intelligence humaine, était limité. Cependant, cela ne signifie pas que le Seigneur n'avait pas une connaissance au-delà de ce qui est possible à l'expérience ou à la science humaine ordinaire : une connaissance surnaturelle. Les Évangiles montrent, par exemple, que Jésus avait prévu la trahison de saint Pierre et celle de Judas. Dans ces cas et dans d'autres cas similaires, il s'agissait d'intuitions qui se présentaient à l'esprit humain du Christ comme le fruit d'une inspiration divine.
Cependant, la connaissance la plus importante et la plus profonde que Jésus eut dans sa vie sur terre était celle de son Dieu Père. Cette connaissance était aussi profondément surnaturelle et constituait une dimension permanente de sa vie et de son intimité, car sa Personne était éternellement unie au Père – Il est le Fils Unique du Père – et son humanité avait été assumée (intégrée) dans sa Personne. Ainsi, Jésus faisait l'expérience, dans sa conscience humaine, de sa parfaite unité avec le Père. Il était pleinement conscient d'être le Fils de Dieu, envoyé dans le monde pour sauver l'humanité.
Le Compendium du Catéchisme de l'Église catholique a résumé la connaissance humaine du Christ de la manière suivante : « Le Fils de Dieu a assumé un corps animé par une âme humaine raisonnable. Avec son intelligence humaine, Jésus a appris beaucoup par l’expérience. Mais aussi comme homme, le Fils de Dieu avait une connaissance intime et immédiate de Dieu son Père. Il pénétrait également les pensées secrètes des hommes et connaissait pleinement les desseins éternels qu’il est venu révéler » (no 90).
Jésus avait également une véritable volonté humaine et était un homme pleinement libre. Il était libre en premier lieu parce qu'il n'était pas soumis à ce désordre intérieur qui procède en nous du péché originel, et qui nous amène à céder facilement aux trois convoitises – la convoitise du monde, la convoitise des yeux et la convoitise de la chair – et à en être esclaves. L'Esprit Saint avait façonné son humanité dès le début dans le sein de Marie et a toujours été pleinement présent dans sa vie par la suite. Mais dans un sens plus profond, Jésus était libre parce que ses actions étaient toujours motivées par l'amour de son Père et de la mission qui lui avait été confiée. Il désirait à tout moment accomplir la volonté du Père, et l'amour de l'Esprit Saint dans son cœur remplissait ses actes de justice et de charité. C'est pourquoi, comme l'a dit le Concile Vatican II, Jésus est toujours pour nous le modèle de ce qu'est l'homme (cf. Gaudium et Spes, no 22).
Cette grande liberté du Christ s'est manifestée de multiples façons : il ne s'est pas laissé conditionner par les personnes, les circonstances ou toute forme de peur, et ne s'est pas plié aux barrières culturelles de la société de son temps dans laquelle les justes méprisaient les pécheurs et cherchaient à ne pas se mêler à eux. Jésus, au contraire, mangeait avec des pécheurs et a même choisi certains disciples, comme Matthieu, dans des milieux qui n’étaient pas socialement bien vus. Il n'a eu aucun problème à rompre avec les légalismes inutiles, même s'ils étaient répandus à son époque, ni à se mettre en colère et à renverser les tables des marchands qui violaient la dignité sacrée du Temple ; il ne s'est pas laissé conditionner par sa famille, ni par les structures de pouvoir, il n'a eu aucun scrupule à affronter les pharisiens et à dénoncer ce qu'ils faisaient de mal ; et, surtout, il n'a eu aucun problème à donner volontairement sa vie pour nous. Nous voyons donc que Jésus avait une grande liberté, qui lui permettait de toujours choisir ce qui était bon pour les gens, ce qui était agréable pour le Père.
En tout cela, Jésus réalisait par sa volonté humaine ce qu'il avait éternellement décidé avec le Père et le Saint-Esprit. Les actions du Christ ont fait entrer l'amour et la miséricorde de Dieu pour l'humanité dans le domaine de l'histoire.
La valeur du mystère de l'Incarnation
Lorsque nous récitons dans le Credo « il s’est incarné par l’œuvre du Saint-Esprit dans le sein de la Vierge Marie »[1], nous affirmons que l'humanité assumée par le Verbe est vraie et réelle, fruit de la chair d'une femme, et que par conséquent il est l'un de nous et appartient à notre race. S'il n'en était pas ainsi, Il n'aurait pas un cœur et une âme humaine, Il ne pourrait pas souffrir et mourir, et il n'y aurait pas de résurrection. C'est pourquoi le mystère de l'Incarnation est la base et le présupposé de tous les autres mystères de la vie de Jésus.
Le Verbe a pris notre condition matérielle et corporelle, soumise à de nombreux besoins, afin de nous sauver de nos péchés et de nous ramener dans la maison de Dieu notre Père, puisque Dieu nous a créés pour être ses enfants adoptifs. Cette œuvre de salut, le Seigneur l'accomplit dans toutes ses actions, y compris dans ces années de jeunesse (ce qu'on appelle la « vie cachée » du Christ) sans manifestations particulièrement publiques.
Tous les actes de Jésus réalisent notre rédemption parce que, en les vivant de manière juste et équitable, agréable au Père, il nous permet aussi de les vivre de cette manière, et nous ouvre ainsi la voie. Les Pères de l'Église aimaient dire que Jésus, en faisant sienne notre nature, l'avait guérie et purifiée. Nous pouvons prolonger cette idée en disant que notre Seigneur a purifié la vie ordinaire, en la faisant sienne ; il l'a transformée en quelque chose d'agréable à Dieu. Comme le disait saint Josémaria : « En grandissant et en vivant comme l'un d'entre nous, Jésus nous révèle que l'existence humaine, nos occupations courantes et ordinaires, ont un sens divin » (Quand le Christ passe, no 14). De sa place au ciel, Jésus ressuscité nous donne sa grâce pour que nous puissions découvrir dans nos tâches quotidiennes l'amour que Dieu a pour nous, et qu'ainsi elles deviennent pour nous un chemin de sanctification. Ainsi, Jésus, avec sa vie même, est notre chemin, qui nous conduit au Père.
En plus de leur valeur rédemptrice, toutes les œuvres de Jésus ont également une valeur révélatrice,car elles nous montrent l'amour de Dieu pour nous, et une valeur récapitulative, car elles réalisent le plan de Dieu pour l'humanité et établissent la souveraineté de Dieu, son royaume, dans le monde.
Marie, mère de Dieu et de l'Église
La Vierge Marie a été prédestinée à être la Mère de Dieu dès l'éternité en même temps que l'Incarnation du Verbe.
« Pour être la Mère du Sauveur, Marie "fut pourvue par Dieu de dons à la mesure d’une si grande tâche" (Lumen Gentium 56) » (Catéchisme,490). À l'Annonciation, l'archange Gabriel la salue comme « pleine de grâce » (Lc 1, 28). Avant que le Verbe ne s'incarne, Marie était déjà, par sa correspondance aux dons divins, pleine de grâce. Le Seigneur lui a donné ces dons spéciaux de grâce parce qu'il la préparait à être sa Mère. Guidée par eux, elle a pu donner son libre consentement à l'annonce de sa vocation (cf. Catéchisme, 490), rester pure de tout péché personnel (cf. Catéchisme, 493) et se donner pleinement au service de l'œuvre rédemptrice du Fils.
Elle-même a été rachetée dès sa conception : « C’est ce que confesse le dogme de l’Immaculée Conception, proclamé en 1854 par le pape Pie IX : La bienheureuse Vierge Marie a été, au premier instant de sa conception, par une grâce et une faveur singulière du Dieu Tout-Puissant, en vue des mérites de Jésus-Christ Sauveur du genre humain, préservée intacte de toute souillure du péché originel (DS 2803) » (Catéchisme, 491).
Marie est vraiment la Mère de Dieu parce que « celui qu’elle a conçu comme homme du Saint-Esprit, [...] n’est autre que le Fils éternel du Père, la deuxième Personne de la Sainte Trinité » (Catéchisme, 495).
Marie a toujours été vierge. Depuis les temps anciens, l'Église confesse dans le Credo et célèbre dans sa liturgie Marie « comme la Aeiparthenos, " toujours vierge " (cf. Lumen Gentium 52) » (Catéchisme, 499 ; cf. Catéchisme, 496-507). Cette foi de l'Église se reflète dans l'ancienne formule : « Vierge avant l'accouchement, pendant l'accouchement et après l'accouchement ». « Dès les premières formulations de la foi (cf. DS 10-64), l’Église a confessé que Jésus a été conçu par la seule puissance du Saint-Esprit dans le sein de la Vierge Marie, affirmant aussi l’aspect corporel de cet événement : Jésus a été conçu "de l’Esprit Saint sans semence virile" (Cc. Latran en 649 : DS 503) » (Catéchisme, 496). Marie était également vierge en couches, car Jésus, à sa naissance, a consacré sa virginité (cf. Catéchisme, 499). Et elle est également restée vierge après la naissance de Jésus.
Marie a été élevée au Ciel. « Enfin la Vierge immaculée, préservée par Dieu de toute atteinte de la faute originelle, ayant accompli le cours de sa vie terrestre, fut élevée corps et âme à la gloire du ciel, et exaltée par le Seigneur comme la Reine de l’univers, pour être ainsi plus entièrement conforme à son Fils, Seigneur des seigneurs, victorieux du péché et de la mort[2] » (Catéchisme 966). Son Assomption est une anticipation de la résurrection des autres chrétiens. (Cf. Ibid.).
Marie est la Mère du Rédempteur. C'est pourquoi sa maternité divine implique aussi sa coopération au salut de l'humanité : « Marie, [...] épousant à plein cœur, sans que nul péché ne la retienne, la volonté divine de salut, se livra elle-même intégralement, comme la servante du Seigneur, à la personne et à l’œuvre de son Fils, pour servir, dans sa dépendance et avec lui, par la grâce du Dieu tout-puissant, au mystère de la Rédemption » (Lumen Gentium, n. 56). Cette coopération se manifeste principalement dans sa maternité spirituelle. Elle est vraiment notre mère dans l'ordre de la grâce et coopère à la naissance à la vie de la grâce et au développement spirituel des fidèles. De plus, du haut du ciel, elle veille sur nous comme notre mère, nous procurant par son intercession multiple les grâces de Dieu dont nous avons besoin pour notre vocation chrétienne et notre salut (cf. Catéchisme, 969).
Marie est le type et le modèle de l'Église : « la Vierge Marie est pour l’Église le modèle de la foi et de la charité. Par-là elle est "membre suréminent et absolument unique de l’Église" (Lumen Gentium 53), elle constitue même "la réalisation exemplaire" (…) de l’Église (Lumen Gentium 63) » (Catéchisme, 967). Paul VI, le 21 novembre 1964, a solennellement nommé Marie Mère de l'Église, afin de souligner explicitement la fonction maternelle que la Vierge exerce sur le peuple chrétien.
On comprend, au vu de ce qui précède, que la piété de l'Église envers la Sainte Vierge soit un élément intrinsèque du culte chrétien. La Sainte Vierge « est légitimement honorée par l’Église d’un culte spécial » (Catéchisme, 971), ce qui se manifeste par les nombreuses fêtes, mémoires liturgiques et pratiques de piété que nous, catholiques, lui consacrons.
Bibliographie de base
- Catéchisme de l'Église catholique, n° 430-534
- ID., n 721-726
- ID., n° 963-975
- Jean-Paul II, Je crois en Jésus-Christ. Catéchèse sur le Credo (II).
Bibliographie recommandée
- Vicente Ferrer, Jésus-Christ, notre Sauveur, Laurier, 2005.
- Joseph Grifone,Des Évangiles à Jésus-Christ, Tempora, 2007.
- Antonio O. Delclos, Mère de Dieu et notre Mère, Laurier, 2004.
[1] NdT : Cf. Credo du Peuple de Dieu (Saint Paul VI)
[2] Lumen Gentium 59 ; cf. la proclamation du dogme de l’Assomption de la Bienheureuse Vierge Marie par le Pape Pie XII en 1950 : DS 3903)