Le fondateur de l’Opus Dei adopta face à la IIème République une attitude semblable à celle de nombreux Espagnols de l’époque, aux différentes sensibilités. Tout d’abord il attendit de voir comment tourneraient les événements. Il fut logiquement navré de constater le caractère anti-clérical de nombreuses lois promulguées très vite par le premier gouvernement de la Seconde République et la passivité des autorités devant certains abus.
Le 11 mai 1931, après l’incendie des églises, le fondateur écrivit: « La persécution a commencé. Le lundi 11, accompagné de Manuel Romeo, après avoir endossé un costume civil, j’ai consommé l’hostie de l’ostensoir et nous avons quitté la Fondation [Sainte- Isabelle dont saint Josémaria était l’aumônier depuis 1931 et qui comprenait deux communautés de religieuses], par une porte dérobée, comme des voleurs, avec un ciboire plein d’hosties consacrées, enveloppé dans une soutane et dans des papiers. Cette nuit-là et celles du 12 et du 16 (à cause d’une fausse alerte des religieuses cette fois-ci) j’ai gardé le Seigneur chez Pepito » (VAZQUEZ DE PRADA, A., Le Fondateur de l’Opus Dei, Vie de Josémaria Escriva de Balaguer, Tome I: Seigneur, que je voie ! Editions Le Laurier-Wilson & Lafleur, Paris, 2005, chapitre VI, p. 356).
Le 13 mai 1931, de peur que les foules ne mettent le feu à l’édifice de la Fondation, il déménagea, avec sa mère, sa sœur et son frère, dans un appartement tout proche, rue Viriato, n°22. « Le 13, nous avons su qu’on s’apprêtait à brûler la Fondation : à seize heures nous nous sommes installés, avec armes et bagages, 22 rue Viriato, dans une pièce misérable, fenêtre sur cour intérieure, que j’ai providentiellement trouvée » (VAZQUEZ DE PRADA, A., Le Fondateur de l’Opus Dei, Vie de Josémaria Escriva de Balaguer, Tome I: Seigneur, que je voie ! Editions Le Laurier-Wilson & Lafleur, Paris, 2005, chapitre VI, p. 357)
Nous pouvons apprécier cette attitude dans la lettre que saint Josémaria écrivit à Isidoro Zorzano le 5 mai 1931 dans laquelle il insiste pour qu’il ne lâche ni sa méditation ni sa Communion et pour qu’il ait un confesseur fixe et où il lui parle de la nouvelle situation du pays. L’Opus Dei n’a pas de choix politique et chaque membre, de façon toujours cohérente avec la vocation chrétienne, se fait librement son idée personnelle. « Que ce changement politique ne te fasse ni chaud ni froid : seul le fait qu’on n’offense pas Dieu doit te tenir à cœur. »
(PERO-SANZ, J. M., Isidoro Zorzano Ledesma, 2ª ed., Palabra, Madrid 1996, p. 126).
Au coeur d’un contexte social dominé par les extrémismes, il se conduisit toujours de façon sereine et sacerdotale. Et voyant que l’entente sociale se détériorait progressivement dans un climat de haine, de rancœur et de désirs de revanche, il donnait un conseil à ceux qui le suivaient, un conseil qu’il reprit très souvent tout au long de sa vie : « prier, pardonner, comprendre, excuser. »
Parmi ses amis, il y avait des militants républicains, comme Candido Baselga, de Barbastro, qui fut sévèrement puni après la guerre : il fit plusieurs années de prison en deux phases successives, dans les années quarante, accusé d’avoir été un dirigeant du parti Union Républicaine et d’avoir fait partie de la franc-maçonnerie. Saint Josémaria lui rendit visite en prison, le consola et le suivit de très près. Leur relation, épistolaire après le départ à Rome de saint Josémaria en 1946, ne s’interrompit qu’à la mort de Baselga en 1972.