Mes très chers enfants, que Jésus vous garde !
Le 15 août 2007, Benoît XVI, en se référant à l’antienne d’ouverture de la sainte messe : un signe grandiose apparut dans le ciel : une femme, ayant le soleil pour manteau, la lune sous les pieds et, sur la tête, une couronne de douze étoiles[1], commentait que cette femme est la Vierge Marie, qui vit entièrement en Dieu, entourée et vêtue de soleil, c’est-à-dire de Dieu […]. Couronnée de douze étoiles, c'est-à-dire des douze tribus d'Israël, de tout le Peuple de Dieu, de toute la communion des saints, et avec à ses pieds la lune, image de la mort et de la mortalité. […]. Ainsi, dans la gloire, ayant surmonté la mort, elle nous dit : « Courage, à la fin l'amour est vainqueur ! Ma vie consistait à dire : « Je suis la servante de Dieu ». Ma vie a été un continuel don de moi-même à Dieu et au prochain. Et cette vie de service m’a conduit aujourd’hui à la vie véritable »[2]. Cette louange adressée à la Vierge Marie nous rappelle la foi avec laquelle Saint Josémaria, dès 1951, répétait Cor Mariæ dulcissimum, iter para tutum, en ayant recours à son intercession.
Sept jours après, en la fête de la Vierge Marie Reine, la liturgie nous montre Notre Dame aux côtés du Christ, sous les ors d’Ophir[3]. Ce sont des paroles pleines de contenu qui, cependant, n’arrivent pas à rendre pleinement hommage à la Mère de Dieu. Nous sommes pleins d’admiration lorsque nous contemplons cette scène du cinquième mystère glorieux du saint rosaire dans laquelle le Père, le Fils et le Saint-Esprit couronnent la Vierge Marie en tant qu’Impératrice de l’univers. Et les anges, ses sujets, lui rendent hommage..., et les patriarches, les prophètes et les apôtres..., et les martyrs, les confesseurs, les vierges et tous les saints..., et tous les pécheurs, et toi et moi[4].
La pleine de grâce, depuis le moment de sa conception immaculée, n’a cessé de croître en sainteté grâce à son don total à Dieu, au point d’être couronnée comme Reine du Ciel et de la terre ; et cette Reine du Ciel est notre Mère, qui nous invite à lutter pour répondre à l’appel divin, avec une générosité totale qui nous procurera la joie. Profitons de sa puissante intercession ! Et suivons le conseil de notre saint fondateur : plein d’une audace filiale, unis-toi à cette fête du ciel. Et moi, la Mère de Dieu, qui est aussi ma Mère, je la couronne de mes misères purifiées, parce que je ne possède ni pierres précieuses ni vertus. Ose le faire, toi aussi ![5]
La Vierge Marie mérite le titre de Maîtresse de toutes les vertus. Ce mois marial est une bonne occasion, au cours de cette année consacrée à la miséricorde, de lui demander qu’elle nous obtienne de son Fils qu’il nous fasse croître dans cette vertu ! Accourons à Sainte Marie, trône de la grâce et de la gloire, ut misericordiam consequamur[6], afin que nous obtenions miséricorde.
L’évangile de la messe de l’Assomption relate une très belle scène de la vie de la Sainte Vierge : la visitation à sa cousine Élisabeth. Ces deux femmes, disait le Saint-Père, se rencontrent dans la joie. Cet instant est une fête ! Si nous apprenions à rendre ce service d’aller à la rencontre des autres, comme le monde changerait ! La rencontre est aussi un signe du chrétien. Une personne qui se dit chrétienne et n’est pas capable d’aller à la rencontre des autres n’est pas totalement chrétienne. Le service comme la rencontre exigent de sortir de soi : sortir pour servir et sortir pour rencontrer, pour embrasser l’autre[7].
Je vous propose à présent de considérer une œuvre de miséricorde que le Catéchisme de l’Église Catholique présente ainsi : supporter avec patience les contrariétés[8], tant celles qui proviennent de nos propres limites que celles qui viennent de l’extérieur. Ayons une pleine confiance en la miséricorde du Seigneur qui sait tirer du bien de toutes les situations. La patience est aussi l’un de fruits les plus savoureux de la charité exercée envers le prochain. Saint Paul l’indiquait déjà dans son magnifique hymne à cette vertu : L’amour prend patience ; l’amour rend service ; l’amour ne jalouse pas ; il ne se vante pas, ne se gonfle pas d’orgueil ; il ne fait rien d’inconvenant ; il ne cherche pas son intérêt ; il ne s’emporte pas ; il n’entretient pas de rancune ; il ne se réjouit pas de ce qui est injuste, mais il trouve sa joie dans ce qui est vrai ; il supporte tout, il fait confiance en tout, il espère tout, il endure tout[9].
La miséricorde doit nous pousser à nous conduire avec patience avec les autres, même lorsqu’ils nous dérangent. Nous avons tous des défauts, un caractère avec ses aspérités et, même si nous ne le faisons pas exprès, en de nombreuses occasions nous pouvons blesser les autres : les membres de notre famille, nos collègues de travail ou nos amis, dans les moments de crispation comme les embouteillages, etc. Toutes ces occasions nous offrent la possibilité de rendre agréable la vie des autres, en ne nous laissant pas guider par notre mauvais caractère.
La patience nous aide à considérer sans exagération dramatique les imperfections des autres, sans tomber dans la tentation de les leur reprocher tout le temps, ni chercher à se soulager en le commentant de façon médisante à de tierces personnes. Il serait inutile, par exemple, de ne pas indiquer un défaut à quelqu’un sous la forme d’une correction fraternelle, pour ensuite le lui faire remarquer par un commentaire ironique ; ou que notre frustration nous pousse à les traiter avec froideur ; ou que nous médisions de façon subtile, acte qui cause du tort à la personne qui médit, à celle dont on médit et à la personne témoin de cette médisance. Supporter avec patience les défauts des autres implique aussi d’éviter que cela ne nuise à l’affection que nous devons leur témoigner : il ne s’agit pas de les aimer malgré leurs limites, mais avec leurs limites. Il s’agit d’une grâce que nous pouvons demander au Seigneur : ne pas justifier nos mauvaises réactions face à la façon d’agir des autres qui nous déplaît, parce que tout le monde possède beaucoup plus de richesse et de bonté que de faiblesses. Ainsi, lorsque nous sentons que notre cœur répugne à agir ainsi, mettons-le dans le cœur du Seigneur : Cor Iesu sacratissimum et misericors, dona nobis pacem ! Et il transformera notre cœur de pierre en un cœur de chair[10].
Nous allons nous efforcer de bien accomplir l’ensemble de nos devoirs, même ceux qui semblent moins importants ; nous allons augmenter notre patience dans les contrariétés de chaque instant, faire attention aux petits détails. Nous devons rendre plus vigoureux nos efforts d’amélioration ; pour cela, répondons à Dieu dans les petites luttes où Il nous attend. Pourquoi s’attarder sur les heurts provenant de caractères distincts et opposés, qui sont le propre de la vie en commun ? Luttons, triomphons contre nous-mêmes ! C’est là que Dieu nous attend[11].
Recevoir avec un sourire ceux qui s’approchent de nous avec un geste brusque, ou qui répondent avec des paroles hargneuses à l’intérêt que nous leur portons, est une manière formidable de vivre l’esprit de sacrifice. En de nombreuses occasions, comme le disait Saint Josémaria, un sourire sera la meilleure manifestation de notre esprit de pénitence. Déjà dans Chemin, dans les exemples de mortification qu’il suggérait dans les années trente, il soulignait : Ce bon mot, cette blague qui n’est pas sortie de ta bouche ; le sourire aimable pour qui t’agace ; ce silence devant l’accusation injuste ; une conversation bienveillante avec les “raseurs” et les importuns ; le fait de passer, chaque jour, sur les détails ennuyeux et impertinents de ton entourage… Tout cela, avec persévérance : voilà de la bonne mortification intérieure[12].
Les Journées Mondiales de la Jeunesse, qui viennent de s’achever à Cracovie, sont un motif d’actions de grâce à Dieu, au pape François et à tant de personnes qui se sont données généreusement pour leur organisation. Prions pour que les fruits apostoliques de ces journées soient très abondants et pérennes, en ayant recours particulièrement à l’intercession de Saint Jean-Paul II, qui justement a mené une part importante de son ministère au sein de l’Église et du monde à Cracovie, et qui présida les JMJ de Czestokowa auxquelles participa notre bien-aimé Don Alvaro.
Comme tous les ans à l’occasion de la solennité de l’Assomption, nous vivrons très unis à notre Père en renouvelant, dans les centres de l’Œuvre, la consécration de l’Opus Dei au Cœur très doux de Marie. Méditez les paroles qu’écrivit saint Josémaria et continuez de penser dans vos prières à mes intentions pour l’Église, pour le pape, pour l’Œuvre, pour nos frères et sœurs malades ou en difficulté, pour qu’ils sachent les considérer avec vision surnaturelle et les unir à la Croix du Seigneur, en s’appuyant sur l’intercession puissante de la Mère de Dieu qui est aussi notre Mère.
Avec toute mon affection je vous bénis,
Votre Père
+ Xavier
Cracovie, le 1er août 2016.
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[1] Missel Romain, Assomption de la Vierge Marie, Antienne d’ouverture (cf. Ap 12, 1).
[2] Benoît XVI, Homélie, 15 août 2007.
[3] Missel Romain, Fête de la Vierge Marie Reine, Antienne d’ouverture (cf. Ps 44, 10).
[4] Saint Josémaria, Saint Rosaire, 5ème mystère glorieux.
[5] Saint Josémaria, Forge, n° 285.
[6] Cf. Hb 4, 16.
[7] Pape François, Homélie en l’église Sainte-Marthe, 31 mai 2016.
[8] Cf. Catéchisme de l’Église Catholique, n° 2447.
[9] Cf. 1 Cor 13, 4-7.
[10] Cf. Ez 11, 19.
[11] Saint Josémaria, Notes prises au cours d’une méditation, 24 juin 1937.
[12] Saint Josémaria, Chemin, n° 173.