Doux hôte de l’âme

L'abbé Pégourier nous propose plusieurs pistes pour fréquenter l'Esprit Saint, à quelques jours de la Pentecôte.

Cette invocation d’une grande richesse est tirée de la « séquence de la Pentecôte », fastueuse hymne qui prie le Saint-Esprit de remplir jusqu’à l’intime le cœur de ses fidèles ; supplique qui, adroitement, manie les contrastes pour exprimer sa bienfaisante influence chez ceux qui recherchent son intimité :

Repos dans le labeur, Calme dans l’ardeur, Soulagement dans les larmes.

C’est une composition du XIIIe siècle. Pour en appliquer la trame au contexte de la vie moderne, pourquoi ne pas y ajouter :

« Frein dans la consommation,

Paix malgré les divisions,

Réconfort au sein du stress » ?

Hôte, le Paraclet l’est à un point que nous ne soupçonnons pas car, selon la Tradition, de même qu’un cachet sur de la cire, il imprime en notre âme la ressemblance du Christ : il transforme notre homme intérieur et le divinise, comme le feu rend le métal incandescent ; il l’habite d’une présence radicalement active, d’une présence qui descend jusqu’aux racines de notre être ; c’est ainsi qu’il « refait l’homme du dedans, le re-crée selon l’exemplaire divin qu’est le Fils »[1].

Perspective grandiose, enthousiasmante ! Ne vaut-il pas la peine de s’y attacher dans la perspective de la Pentecôte ? Rendons-nous compte : Il est celui par qui le Dieu insondable… se communique et nous permet de l’appeler « Père » en toute confiance ; celui par qui nous contemplons comme dans un miroir, comme si, déjà, ils étaient là, les biens promis qui nous attendent ; celui par qui nous est rendu le Paradis[2]

Saint Josémaria, dans sa catéchèse, expliquait son rôle d’une façon plus concrète : « Il se trouve au centre de notre âme et là, il confère un caractère surnaturel à nos actions. Alors qu’elles pourraient être celles d’un animal, il fait en sorte qu’elles soient celles d’un chrétien. Aussi pouvons-nous parler à Dieu simplement, sans extravagances, et lui raconter ce qui nous arrive, en priant, en réparant, en adorant, bref en aimant »[3]. Manifestons-lui notre empathie, ouvrons l’Évangile, demandons-lui de l’aide. Et lui qui est lien d’amour, envahira peu à peu notre vie, comme chez les bienheureux. Envisageons les choses dans cette optique : cela nous aidera puissamment à nous détacher de nos idées personnelles, à repousser les désirs pervers, à vaincre dans les escarmouches du quotidien, à rayonner de cordialité.

Doux hôte, douceur rafraîchissante ! Ce sont plus que de belles images car cette inhabitation :

-         pacifie notre âme,

-         nous « pousse à être vis-à-vis des autres, extérieurement, par notre visage, notre abord, notre allure, nos paroles, comme à l’intérieur, des doux »[4], à l’exemple de Jésus qui confesse : « Je suis doux et humble de cœur »[5] ;

-         suscite « des sentiments, des pensées, un ensemble de vie intérieure doux, dans une possession de soi-même qui réprime l’indignation, l’impatience, la colère[6].

 

Le divin Paraclet est un bon Maître, un doux pédagogue. D’après l’étymologie grecque du mot, il est l’interprète accrédité de la voix de Dieu. Á nos côtés il joue désormais le rôle même de Jésus auprès des disciples d’Emmaüs. Par lui, le Christ des Écritures devient la vie de notre âme car il nous rappelle ses enseignements et nous aide à les mettre en pratique. Sur la route de notre existence, il est « l’animateur des énergies secrètes, des options courageuses, des fidélités inébranlables. Il nous fait vivre dans l’abondance de la vie divine elle-même »[7].

Repars du Christ ! Avance au large : dominantes du message pour le nouveau millénaire. Malgré nos pesanteurs, lui, l’Esprit d’Amour, peut ouvrir nos cœurs, nous apprendre à aimer, nous mettre à la hauteur[8]. Amour-Don ou Dieudonné, nous te demandons donc, en terminant notre séquence :

Donne mérite et vertu, Donne le salut final, Donne la joie éternelle !

[1]              Cf. Jean-Paul II, Discours à l’audience générale, 26.VII.1989.

[2]              Cf. saint Basile de Césarée, Traité du Saint-Esprit, 15.

[3]              Deux mois de catéchèse (1972) : la vie chrétienne.

[4]              A. Gardeil, o.p., Le rôle du Saint-Esprit dans l’âme, coll. Du Laurier, n° 161, s/ la béatitude de la douceur.

[5]              Mt 11, 30

[6]              A. Gardeil, Ibid. [7]              Jean-Paul II, Rome, 1981.

[8]              Cf. Benoît XVI, Vêpres en la Cathédrale Notre-Dame de Paris, 12.IX.08.