Le « T » initial de la prière eucharistique romaine, qui s’adresse au Père éternel (« Toi »), a été enluminé, depuis le Haut Moyen Age, avec le Christ en croix.
Comme la phrase suit immédiatement le trisagion (« Saint, Saint, Saint ») qui couronne la préface, les enlumineurs cambrésiens ont enrichi le motif avec une représentation trinitaire, désignée par la suite comme « le trône de la grâce » (Hébreux 4, 16) : le Missel de Cambrai, vers 1120, rajoute la présence du Père et le l’Esprit dans l’œuvre de salut.
Pour se dévoiler à nos yeux, la Trinité éternelle a pris son temps. Après les insinuations de l’Ancienne Alliance, Notre Dame devient la première confidente de l’heureux mystère ; les théophanies du Jourdain et du Thabor matérialisent, pour ainsi dire, l’identité de chacune des Personnes du Dieu unique ; la Dernière Cène est théâtre de révélations majeures sur le rôle de l’Esprit qui est envoyé par le Père et le Fils ; au Calvaire, Jésus, en dialogue ému avec le Père, remet son esprit ; avant de monter auprès du Père, le Ressuscité promet le Consolateur, qui embrasera l’Épouse de l’Agneau divin ; enfin, il envoie baptiser au Nom de la Trinité.
Les apôtres invoquent les trois Personnes dans les salutations et les doxologies. « Que la grâce du Seigneur Jésus Christ, l'amour de Dieu et la communion de l'Esprit saint soient avec vous tous ! » (2 Corinthiens 13, 13). La liturgie déploie les acclamations et les demandes de miséricorde : « Gloire au Père et au Fils et au Saint-Esprit, pour les siècles des siècles ».
Le jubilé ordinaire de 2025, commémorera le 17e centenaire du concile de Nicée. Son anniversaire invite les chrétiens à s’unir dans la louange et l’action de grâce à la Sainte Trinité » (Pape François)
Le jubilé ordinaire de 2025, commémorera aussi le 17e centenaire du concile de Nicée, « une pierre milliaire dans l’histoire de l’Église. Son anniversaire invite les chrétiens à s’unir dans la louange et l’action de grâce à la Sainte Trinité » (pape François, L’espérance ne déçoit pas §17). Ce mystère de communion ardente est la référence pour toutes nos relations, dans l’Église et dans le monde.
« Personne n’arrive à saisir / de quelle grandiose manière / ta vie sans fin se déploie » (Liturgie des heures, Solennité de la Très Sainte Trinité, hymne latine). L’expérience des contemplatifs le confirme. Si le fidèle se laisse purifier par le suave cautère de l’Amour, il ressent le besoin « de distinguer et d’adorer chacune des Personnes divines. L’âme fait en quelque sorte une découverte dans la vie surnaturelle, comme une créature qui ouvre peu à peu les yeux à l’existence » (saint Josémaria, Amis de Dieu §306).
Nous croyons et espérons en cet amour d’un Dieu, « Unique mais non pas solitaire »
L’apôtre bien-aimé fut saisi d’admiration devant la Majesté souveraine : Saint, saint, saint, le Seigneur, le Dieu tout-puissant, celui qui était, qui est et qui vient ! » (Apocalypse 4, 8). Chaque jour, l’assemblée eucharistique s’associe à ce « trois fois saint » superlatif, qui adore la Trinité salutaire. Nous croyons et espérons en cet amour d’un Dieu, « Unique mais non pas solitaire » (Catéchisme §254). Les chœurs du ciel s’adonnent inlassablement à la tâche : « Amen ! Louange, gloire, sagesse, action de grâce, honneur, puissance et force à notre Dieu pour les siècles des siècles ! Amen ! » (Apocalypse 7, 12). « Saint Dieu, Saint Fort, Saint Immortel », invoque l’Église le Vendredi saint. Le feu de l’Esprit donne lumière à la foi et dynamisme à la langue.
Toute la vie et la prière du chrétien est une grande doxologie, y compris dans le Notre Père et l’Ave Maria ou encore dans le rosaire marial. Le Consolateur nous configure à l’image du Fils et, avec lui, nous fait chercher la gloire du Père. Dieu demeure au-dedans de nous. La Trinité œuvre l’alliance d’amour avec l’Église sur terre et la garantit pour l’éternité.
La pédagogie chrétienne a montré en schéma les relations mutuelles entre les trois Personnes, dans un graphique appelé « le bouclier de la foi », comme dans le relief gothique du tympan, à l’église Notre-Dame de Calais. Le Père est Dieu ; de même, le Fils et l’Esprit ; chacun ne se confond avec aucun des deux autres, Une seule vie s’identifie à Trois Vivants. Le chrétien est familier de ce trésor suprême, qui est son centre vital.
La Trinité Bienheureuse s’intéresse à notre bonheur ; elle a conçu et crée des êtres capables de partager sa plénitude.
Dieu n’est pas un souverain étranger, mais l’Être vibrant de Lumière et d’Amour éternels qui veut se donner. La Trinité Bienheureuse s’intéresse à notre bonheur ; elle a conçu et crée des êtres capables de partager sa plénitude. La Trinité vit et distribue la vie : elle communique, parle, élève, comme un reflet de la communion intime de trois Personnes. La Trinité, « éprise de l'homme, désire vivement demeurer dans notre âme » (Saint Josémaria, Quand le Christ passe §84). Nous sommes les témoins et les bénéficiaires de sa liberté donatrice.
« Célébrer la Sainte Trinité n’est pas tant un exercice théologique, qu’une révolution dans notre mode de vie » (Pape François)
Le signe de croix habituel, avec l’invocation des trois Personnes, n’est pas une routine machinale, mais une profession de foi ardente et transformante. « Célébrer la Sainte Trinité n’est pas tant un exercice théologique, qu’une révolution dans notre mode de vie…, qui inspire ma façon de parler, de rencontrer, de répondre, de juger, de pardonner. Que la Vierge, fille du Père, mère du Fils et épouse de l’Esprit, nous aide à accueillir et à témoigner dans notre vie du mystère de Dieu-Amour » (pape François, Angélus, 12/06/22).