Plusieurs textes anciens, sous le titre de « Passage », « Dormition » ou « Assomption de la Vierge », parlent de sa mort au Mont Sion et de sa sépulture au Mont des Oliviers, près de la Vallée de Josaphat, où deux lieux de culte y subsistent encore. Marie, accompagnée des apôtres et entourée d’anges, éprouve un bienheureux sommeil ; Jésus vient à sa rencontre. Le corps est inhumé mais, trois jours après, on découvre le sépulcre vide.
Les Pères de l’Église, dès l’aube du 3e siècle, ont comparé le corps de la Mère du Sauveur à « l’arche de bois incorruptible » (Hippolyte de Rome, Commentaire au Psaume 22). La Mère de la Vie nouvelle trouve au ciel, y compris dans sa chair, un palais, un trône, une alcôve. « Ève se fit avec des feuilles un manteau misérable, mais la Vierge Mère a reçu un vêtement de gloire » (saint Éphrem, Hymne pour la Nativité). Le Seigneur l’honore au maximum ; l’aiguillon de la mort est brisé.
les apôtres prient et pleurent autour du lit de la Vierge ; son âme quitte le corps. « Jésus tient une enfant dans ses bras : c’est Marie, devenue ‘petite’ pour le Royaume et conduite au Ciel par le Seigneur » (Benoît XVI, Angélus, 15 août 2011)
Éphèse dédie à Marie la cathédrale métropolitaine où a lieu le concile œcuménique (431). Dès cette époque, Jérusalem fête, le 15 août, le jour de la glorification de la Theotókos, avec une procession entre le Cénacle et le tombeau. Grégoire de Tours est témoin précis de cette foi (Livres des miracles I, 4), qui fut célébrée sitôt dans la liturgie gallicane. Les homélies des pasteurs déploient le sens eschatologique du mystère : la femme sans péché, la mère vierge est délivrée de la dégradation physique après la mort et glorifiée en corps et âme. Les dons de Dieu peuvent élever à une dignité insoupçonnée.
À la fin de sa vie, saint Jean de Damas prêche au sanctuaire marial de Gethsémani. Si en théologien chevronné il sonde le mystère, en vieux moine il déploie l’imagination émue : « Ceux qui se tenaient auprès de ce corps saint, avec des larmes d'allégresse, entouraient ce divin tabernacle, ils l'embrassaient, comblés à son contact de sainteté et de bénédiction » (Homélies sur la Dormition, 2 §11).
« Je ne dirai pas que ton saint départ est une mort, mais une dormition, ou un passage, ou mieux une entrée dans la demeure de Dieu » (idem, 1 §11). Aussitôt après sa dormition, la sainte Vierge prend possession du royaume des cieux, où se trouvent les anges et les justes : « Désormais rien ne s'interpose entre la Mère et le Fils ! » (idem, 3 §5).
Un délicat ivoire byzantin du 10e siècle exprime sa mort en douceur : les apôtres prient et pleurent autour du lit de la Vierge ; son âme quitte le corps. « Jésus tient une enfant dans ses bras : c’est Marie, devenue ‘petite’ pour le Royaume et conduite au Ciel par le Seigneur » (Benoît XVI, Angélus, 15 août 2011). Les icônes et mosaïques reproduiront le même scénario.
L’avalanche mariale de saint Bernard inspire les artistes. Le tympan de la cathédrale de Laon (vers 1150) s’associe à la catéchèse. À Sienne, les six médaillons qui couronnent le retable de la Maestà (Duccio de Buoninsegna, 1311) donnent la séquence des épisodes, selon la Légende Dorée. Cathédrales, basiliques et sanctuaires chantent partout la gloire royale de Notre Dame. La demande populaire, depuis le 19e siècle a poussé le magistère à mettre en relief cette vérité d’espérance.
La déclaration de l’Assomption a été soigneusement filmée. Ce mercredi ensoleillé, 1er novembre de l’année sainte, dès 9 heures du matin, un demi-million de fidèles, accourus des quatre coins monde, entourait Pie XII sur la place Saint-Pierre. Après le Veni Creator, il lit en latin, d’une voix vivace : « C'est un dogme divinement révélé que Marie, l'Immaculée Mère de Dieu toujours Vierge, à la fin du cours de sa vie terrestre, a été élevée en âme et en corps à la gloire céleste » (constitution Munificentissimus Deus, 1950). Une messe pontificale s’ensuivit à l’intérieur la basilique, devant 50 mille fidèles. Les noms des 608 évêques présents ont été gravés en plaques de marbre à l’entrée du narthex. Sur le champ, l’invocation fut insérée dans les litanies de Lorette (Congrégation des Rites, décret Ingenti populi, 31/10/1950).
L’Assomption nous invite à faciliter « la naissance du Christ dans nos cœurs et la conversion intérieure »
La « Reine élevée aux cieux » renforce l’unité de l’Église, rapproche de la prière, des sacrements, des œuvres de miséricorde. La gloire de l’Assomption rend la Mère « conforme à son Fils, Seigneur des seigneurs, victorieux du péché et de la mort » (Lumen Gentium §59), comme fruit mûr de la Pâque et de la Pentecôte. Ce don est « une participation singulière à la Résurrection de son Fils et une anticipation de la résurrection des autres chrétiens » (Catéchisme §966).
L’Assomption nous invite à faciliter « la naissance du Christ dans nos cœurs et la conversion intérieure » (Patriarche Bartholomée de Constantinople, La Dormition de la Theotókos, 2010).
Au milieu des épreuves, la Reine de l’Assomption est guide sûr vers le bonheur, par « l'amour de Dieu, ce câble, robuste et indestructible, qui relie notre vie sur terre à la vie définitive dans la Patrie » (saint Josémaria, Quand le Christ passe §178). Marie quitte cette « vallée de larmes » sans angoisse car elle a vécu ancrée dans les biens d’en haut, pendant tout son pèlerinage terrestre.
Une flamme d’amour éternel te dérobe à la terre éphémère : « Je défaille, je meurs d’amour » (Cantique 5, 8). Viens, Bien-Aimée ! La Trinité t’attend.
Abbé Antoine Fernandez
Résumé en italien de la proclamation du dogme de l'Assomption (1er novembre 1950)