Le moteur de mon action.

Diplômé de l'École Centrale de Lyon, Frédéric, 39 ans, est membre de l'Opus Dei depuis l'âge de 19 ans.

Comment avez-vous connu l'Opus Dei ?

J'étais en classe préparatoire, un ami m'a demandé : « Tu es chrétien ? »

J'ai répondu « oui » avec une certaine fierté : j'allais à la messe presque

tous les dimanches. Il m'a proposé d'assister à une méditation prêchée. J'ai

refusé considérant que j'en faisais assez pour Dieu. Quelques mois plus

tard, j'ai changé d'avis. Je ne recherchais rien de particulier, mais

j'avais un peu plus de curiosité.

Qu'est-ce qui vous a marqué ?

J'ai découvert le sens du travail et l'occasion qu'il m'offrait de

rencontrer Dieu. J'ai été, particulièrement, frappé par la citation de

Chemin, de saint Josémaria, qui dit que pour un chrétien moderne, une heure

de travail peut devenir une heure de prière.

À Marseille, où vous vivez, vous avez participé à la création de

l'association Jeunes Plus. Pourquoi ?

Après une thèse à l'École des Mines de Paris sur le vieillissement de

certains matériaux dans les centrales nucléaires, je me suis tourné vers

l'enseignement. Mon expérience en collège m'a fait prendre conscience des

difficultés des jeunes issus de milieux sociaux défavorisés. Le cas d'un

enfant très doué qui tombait malade la veille de chaque contrôle m'a ouvert

les yeux. Son père le considérait comme un bon à rien et le lui manifestait

s'il ne rapportait pas une note excellente ! Nous en avons parlé entre

enseignants, sans trouver de solution faute d'avoir établi une relation de

confiance avec le père. De là m'est venue l'idée d'entreprendre quelque

chose.

Pourriez-vous nous décrire Jeunes Plus ?

C'est une centaine d'enfants et 60 tuteurs qui se rencontrent, chaque

semaine, pour un soutien scolaire d'une heure. Cette fréquence évite de

créer une dépendance, l'objectif étant de développer l'autonomie du jeune.

Nos locaux sont dans un quartier de Marseille qui est réellement – mais pas

médiatiquement – en difficulté : chômage, échec scolaire, tissu associatif

distendu. Il faut d'abord convaincre les enfants qu'ils peuvent réussir.

Beaucoup s'en croient incapables car l'uniformité du système scolaire ne

leur convient pas. Il faut les aider à reprendre confiance. Souvent, ils se

sentent valorisés par le seul fait qu'un plus grand s'occupe d'eux. Cela

résout bien des problèmes.

En quoi votre engagement dans l'Opus Dei intervient-il dans cette

entreprise ?

L'Opus Dei est le moteur de mon action personnelle. En voyant des

initiatives sociales partout dans le monde, j'ai rêvé d'en monter une. J'ai

observé diverses réalisations, et j'ai remarqué que les bénéficiaires

étaient plus sensibles à l'affection et à l'intérêt que leur témoignaient

les membres de l'Opus Dei qu'à la perfection technique des activités

proposées. J'ai donc pensé que, sans être un expert, j'étais en mesure

d'apporter, moi aussi, des solutions.

Quel est votre objectif ?

Donner à chacun les moyens de développer son intelligence. Il me semble

fondamental d'investir dans l'éducation, de fournir aux jeunes les outils et

la culture pour qu'ils réfléchissent par eux-mêmes et non par

l'intermédiaire des autres ! Il faut les libérer des aliénations, des effets

de mode ! J'espère ainsi contribuer à l'amélioration de leur quotidien.

Quelle est la place de la religion dans votre programme ?

Le critère religieux n'intervient pas dans le recrutement des professeurs.

Nous leur demandons simplement de ne faire aucun prosélytisme. Quant à notre

public, il reflète la composition du quartier : nous accueillons un peu plus

de musulmans que de juifs ou de chrétiens.

Votre action est pourtant chrétienne ?

Elle est profondément humaniste. Mais il est vrai que la formation

pédagogique repose sur une vision chrétienne, une anthropologie de l'homme

qui considère l'enfant comme une personne et non comme un cerveau à remplir

ou un consommateur à séduire.

Financièrement, qui vous soutient ?

Principalement, la ville de Marseille, le Conseil général, et des

institutions privées. Mais nous manquons d'argent et de bénévoles.

Pourriez-vous nous donner un exemple de résultat ?

Celui de cet enfant qui avait perdu ses deux parents, dont la tante était

malade, et la grand-mère désemparée. Il ne voulait plus travailler, les

professeurs ne savaient que faire. Après deux mois à Jeunes Plus, il est «

reparti », simplement parce que quelqu'un s'occupait de lui. Pour la

directrice de l'école, c'était un miracle ! C'est un cas extrême, mais il

aide à comprendre notre action.