La glaise et la gloire

Contemplation d'un antique ivoire italien, représentant l'Ascension du Seigneur : "la Droite paternelle accueille le Fils ressuscité ; les témoins de la Résurrection l’adorent, tout en regrettant son départ."

Précurseur dans la gloire, le Fils incarné obtient la place qui lui revient. Son sacrifice, agréé par le Ciel, lui a fait mériter sa propre résurrection et aussi la nôtre. Le Christ trône à côté du Père, qui ne l’a jamais abandonné.

Un antique ivoire italien, daté de la fin du 4e siècle (au Musée National de Bavière, Munich) montre la Droite paternelle qui accueille le Fils ressuscité ; les témoins de la Résurrection l’adorent, tout en regrettant son départ. Au sommet, deux mains se resserrent : comme dans un dialogue tendrement éternel : ‑ Tu es mon Fils. ‑ Tu es mon Père.

« Grâce à lui, dans un seul Esprit, nous avons l'accès auprès du Père » 

Son absence peut être lourde à porter, mais tant de promesses redonnent confiance. « Il est en mesure de sauver d’une manière définitive ceux qui, par lui, s’approchent de Dieu, puisqu’il est toujours vivant pour intercéder en leur faveur » (Hébreux 7, 25). Il montre au Père les plaies miséricordieuses de sa Passion, lui ouvre son Cœur amoureux. «Grâce à lui, dans un seul Esprit, nous avons l'accès auprès du Père» (Éphésiens 2, 18).

« Élevons notre cœur !»

« Héritier universel » (Hébreux 1, 2), dans le giron du Géniteur, Jésus partage sans limite ses biens infinis « jusqu’aux extrémités de la terre » (Psaume 2, 8). L’Aîné, heureux à la droite du Père, reçoit la louange des saints, gouverne l'histoire, étend son Royaume. Notre Dame et les disciples regardaient vers le haut au moment où Jésus leur fut enlevé ; l’Église exhorte au quotidien, dans le prélude à la prière eucharistique : « Élevons notre cœur !». La solennité de l’Ascension prête un réalisme enthousiaste à cette invitation.

L’élévation du Sauveur nous fait regarder et monter, sans baisser les bras qui prient, sans tourner le dos au paradis. La terre et la gloire se rejoignent : l’homme, formé de la poussière, devait y retourner après le péché ; désormais « cette même nature est aujourd'hui au ciel avec le Christ » (Grégoire le Grand, Homélie 29).

Le Pasteur souverain veille sur le troupeau en chemin. Sa grâce se mêle aussi à notre glaise friable. « Quand bien même les rayons souverains du Soleil de Justice te feraient briller comme l’or, en se réfléchissant de haut sur ta misère, n’oublie pas la pauvreté de ta condition » (Chemin §599). Le Seigneur accroche dans son roc l’ancre de notre espérance : « Qui condamnera ? Jésus Christ est mort, bien plus il est ressuscité, lui qui est à la droite de Dieu et qui intercède pour nous ! » (Romains 8, 34).

Le Seigneur accroche dans son roc l’ancre de notre espérance

Le grand Réconciliateur apporte la paix ici-bas. Son absence assure d’une nouvelle présence dans l’Église, dans la communion des sanctifiés et des sacrements qui sanctifient ; l’Eucharistie nous pousse au quotidien à chercher les biens durables. Le Roi de paix intercède pour la paix du monde, « pour les responsables des nations » (pape François, discours, 22/05/2022).

Abbé Fernandez