L’Eglise face à la violence

Une journée d’études sur l’Église face à la violence, réunissait à Paris Jean-Luc Chabot, Professeur de Science Politique, et Jean-Marie Petitclerc, prêtre salésien, pour une approche historique et pratique d’un phénomène de société.

Pour la troisième année consécutive, Stéphane Hénaux et Jean-Paul Savignac, prêtres de l’Opus Dei organisaient une journée de formation destinée aux prêtres diocésains. Les participants étaient accueillis par la Paroisse St François de Molitor, à Paris.

La violence vient du péché

Pour Jean-Luc Chabot, la violence est un phénomène universel et constant. Reprenant René Girard, qui présente le Christ comme le dernier bouc émissaire de la haine des hommes, il a montré en quoi le christianisme apporte en principe une pacification : non seulement l’origine du mal est éclairée par la notion de péché originel, mais le Christ a opéré la grande réconciliation de l’homme avec Dieu, avec lui-même et avec ses semblables. Ceux qui prolongent l’action du Christ aujourd’hui, notamment les prêtres dans l’administration du sacrement de pénitence, sont les grands pacificateurs.

Histoire de la violence

On constate une lente régression de la violence dans la chrétienté : les martyrs ont supporté pacifiquement la cruauté ; les évêques ont assuré des fonctions juridictionnelles ; l’Église a promu des trêves, s’est opposée aux duels, a suscité nombre d’œuvres de bienfaisance. Tout récemment, Jean-Paul II est en quelque sorte allé jusqu’au bout en faisant acte de repentance pour les offenses commises par certains catholiques. Aujourd’hui, l’action internationale de l’Eglise est pacificatrice.

A côté de cela, la déchristianisation actuelle de l’Occident fait planer la menace d’un retour à la barbarie. D’une part, les idéologies de la révolution, du nationalisme, de l’Etat comme seul acteur de la communauté internationale n’excluent pas, quand elles ne le programment pas, le recours à la violence. D’autre part, l’idée de souveraineté absolue du sujet humain, supposé totalement libre, permet aujourd’hui de justifier l’avortement, l’euthanasie, l’eugénisme, la pornographie, etc.

Une libération de l’humanité peut cependant être attendue et elle viendra par la patiente évangélisation, c’est à dire par l’ouverture des cœurs au Christ.

Guérir la violence aujourd’hui.

Jean-Marie Petitclerc relève de nouvelles formes de violence chez les jeunes des zones sensibles, quand ils ne reçoivent pas des adultes les repères nécessaires pour construire une identité « raisonnable ». Un adolescent sous-valorisé se réfugie dans le clan de ses pairs et adopte un comportement agressif pour s’identifier au groupe, faute d’avoir forgé sa propre identité. S’il manque d’estime de soi parce qu’il «ne réussit pas », son seul moyen d’exister, c’est d’imposer sa force. La télé, les jeux vidéo ont le grave inconvénient de confondre l’imaginaire et le réel jusqu’à finir par prendre l’imaginaire pour le réel. On peut alors avoir des comportements cruels et gratuits - qui ne cherchent aucun bénéfice - sans percevoir la souffrance qu’on impose à autrui. Les contes des grands mères d’autrefois, remarquait l’intervenant, quoique souvent très violents, possédaient une fin rassurante, réalisant une initiation sécurisante à l’existence du mal.

Le rôle des adultes

Une solution éducative efficace est d’amener un jeune à penser ses actes, analyser ses intentions et valoriser ses moyens. Sans l’autorité «naturelle » de l’adulte, le pouvoir juridictionnel a un impact très faible. La sanction d’un acte délictueux est nécessaire pour éclairer les frontières du bien et du mal, mais elle doit être réparatrice de l’injustice causée, à la différence de la punition qui, elle, fait souffrir la personne.

La violence collective ou privée peut donc notablement diminuer si la personnalité est volontairement valorisée au milieu de ses échecs. Si l’on comprend que la violence est un mode d’expression, l’ultime moyen d’un être pour exister quand la culture ou les repères objectifs de la normalité humaine lui ont complètement manqué.