Homélie de l'ordination diaconale

Le 22 novembre, Mgr Xavier Echevarria, prélat de l'Opus Dei, a conféré l'ordination diaconale à 30 fidèles de la Prélature. Voici le texte de l'homélie qu'il a prononcée.

Chers frères et sœurs,

Très chers fils, qui allez recevoir le diaconat,

Une fois de plus nous célébrons, avec une profonde gratitude, la solennité du Christ Roi de l’Univers, parvenant ainsi au terme de l’année liturgique. Ce n’est pas une nouveauté que des fidèles de la Prélature soient ordonnés diacres à cette date. En premier lieu, nous rendons grâce à Dieu pour ce don qu’il fait à l’Église universelle et à la petite partie de cette dernière qu’est la prélature de l’Opus Dei.

Saint Josémaria, s’adressant à ses fils prêtres - et par conséquent aussi à vous qui vous préparez à recevoir ce sacrement dans six mois -, assurait que nous sommes les fils de sa prière, et aussi, alors qu’il vivait encore sur cette terre, de sa mortification. Notre reconnaissance pour ce saint prêtre, qui nous aima tant, doit se manifester en une décision ferme de vivre la loyauté envers Jésus-Christ et son Église.

La solennité liturgique que nous célébrons aujourd’hui proclame une certitude essentielle pour tous les chrétiens : Le Christ est le roi de l’Univers. Saint Jean nous l’explique dans l’Apocalypse avec des paroles remplies de poésie : j’ai vu le ciel ouvert, et voici un cheval blanc : celui qui le monte s’appelle Fidèle et Véritable (…). Il est habillé d’un vêtement trempé de sang, et le nom qu’il porte est « le Verbe de Dieu » (…). Sur son vêtement (…) il a un nom écrit : « Roi des rois et Seigneur des seigneurs » (Ap. 19, 11-16).

Dans les temps actuels, alors que tant de personnes prétendent exclure le Christ de la vie des nations, c’est un devoir de proclamer - sans crainte ni réticences – que le Christ est Roi : « Face à ceux qui réduisent la religion à une somme de négations, ou qui se contentent d'un catholicisme en demi-teinte ; face à ceux qui veulent tourner le Seigneur contre le mur, ou le reléguer dans un coin de leur âme..., par nos paroles et par nos actes nous devons affirmer que nous aspirons à faire du Christ un Roi authentique de tous les cœurs... même du cœur de ces gens-là »[1] Regnare Christum volumus ! répéta tant de fois saint Josémaria. Nous voulons que le Christ règne ; et nous le voulons parce que son règne est « sans limite et sans fin : règne de vie et de vérité, règne de grâce et de sainteté, règne de justice, d’amour et de paix. »[2] En outre, nous voulons « placer le Christ au sommet de toutes les activités des hommes »[3] parce que nous sommes conscients de ce qu’il est l’unique chemin pour combler les cœurs de joie et pour instaurer la concorde entre les peuples, afin que l’humanité progresse réellement sur le chemin de la justice et de la solidarité. Le Christ est l’alpha et l’oméga, le premier et le dernier, le commencement et la fin (Ap. 22, 13). Il revient aux chrétiens d’alimenter la « certitude de l’espérance », comme le soulignait récemment Benoît XVI. « Le futur n’est pas une nuit obscure dans laquelle personne ne peut s’orienter »[4], parce que la lumière et la grâce divine soutiennent notre foi et notre optimisme.

Jésus-Christ n’est pas un roi despotique, qui s’impose par la force : Il désire régner dans notre vie en respectant notre liberté. Ce n’est pas un dominateur qui vit à l’écart de nous, qui ne comprend pas les besoins et les aspirations des femmes et des hommes de notre temps. Le Christ est « un Roi avec un cœur de chair comme le nôtre ; qui (…) mendie un peu d'amour en nous montrant en silence les plaies de ses mains »[5]. L’esprit de service de Jésus envers nous est tel que, comme l’affirmait avec audace saint Josémaria, « dans sa folie d'Amour, il va jusqu'à abandonner - tu me comprends! - le magnifique palais du Ciel, ce palais auquel tu ne peux pas encore parvenir, pour t'attendre dans le Tabernacle »[6].

Par conséquent, en suivant ici les enseignements du Fondateur de l’Opus Dei, soyons convaincus de ce que « si nous laissons le Christ régner en notre âme nous servirons tous les hommes. Service. Comme j'aime ce mot ! (…) Si les chrétiens savaient servir ! (…) Ce n'est qu'en accomplissant cette mission de service que nous pourrons connaître le Christ et L'aimer. Le faire connaître et Le faire aimer. »[7]

Le chrétien véritable veut servir les autres. Les paroles de l’Évangile de la Messe nous apportent la confirmation du fait que le Seigneur récompense avec la vie éternelle celui qui se met au service du prochain : Venez, les bénis de mon Père, recevez en héritage le Royaume préparé pour vous depuis la création du monde. Car j’avais faim, et vous m’avez donné à manger ; j’avais soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais un étranger, et vous m’avez accueilli ; j’étais nu, et vous m’avez habillé ; j’étais malade, et vous m’avez visité (Mt. 25, 35-36). Et lorsqu’on lui demande : Seigneur, quand t’avons-nous rendu ces services ?, le Christ répond : Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait (Mt. 25, 40).

« Seul le service du prochain ouvre mes yeux sur ce que Dieu fait pour moi et sur sa manière à Lui de m’aimer (…). Amour de Dieu et amour du prochain sont inséparables, c’est un unique commandement. Tous les deux cependant vivent de l’amour prévenant de Dieu qui nous a aimés le premier (…). L’amour est «divin» parce qu’il vient de Dieu et qu’il nous unit à Dieu, et, à travers ce processus d’unification, il nous transforme en un Nous, qui surpasse nos divisions et qui nous fait devenir un, jusqu’à ce que, à la fin, Dieu soit «tout en tous» (1 Co 15, 28) »[8]

Chaque service rendu à notre prochain, qu’il soit proche ou éloigné, d’ordre matériel ou spirituel, s’il est réalisé par amour de Dieu, est un service rendu à Jésus-Christ lui-même, qui a voulu s’identifier avec ses frères et ses sœurs, et de façon spéciale avec les plus nécessiteux ; et ce service mérite récompense.

Saint Josémaria, employant une image forte, parlait de la nécessité de « devenir un tapis profond que les autres pourront fouler au pied ». Il appliquait cette métaphore, de façon particulière, aux ministres consacrés, mais pas seulement à eux, car tous les chrétiens, en vertu du Baptême, participent de façon différente à l’unique sacerdoce du Christ. Pour éviter que ces paroles ne s’affadissent et ne fussent comprises que comme une tournure poétique, le Fondateur de l’Opus Dei avait l’habitude d’ajouter : « En prêchant qu'il faut devenir tel un tapis profond (…), je ne prétends pas faire une belle phrase ; non, ceci doit devenir réalité ! C'est difficile, comme la sainteté est difficile, mais c'est aussi facile car, j'y insiste, la sainteté est accessible à tous. »[9]

A la lumière de ces considérations, examinons comment nous pouvons mettre en pratique l’esprit de service dans la famille, au travail, dans les relations sociales les plus courantes. Demandons-nous : Est-ce que je peux me considérer comme un véritable serviteur des autres ? Cette ordination diaconale est une invitation à l’être davantage. En effet, nos frères ici présents sont appelés à être, à partir de maintenant, de façon spéciale, des serviteurs des autres par la prédication de la parole de Dieu, la participation au service de l’autel et le service de la charité.

Je m’adresse maintenant plus directement aux nouveaux diacres. A vous, mes fils, s’appliquent de façon spéciale ces paroles du prophète Ézéchiel. C’est moi qui ferai paître mon troupeau, c’est moi qui le ferai reposer (…). La brebis perdue, je la chercherai, l’égarée, je la ramènerai. Celle qui est blessée, je la soignerai. Celle qui est faible, je lui rendrai des forces. Celle qui est grasse et vigoureuse, je la garderai, je la ferai paître avec justice. (Ez. 34, 15-16) N’oubliez donc pas que vous serez des ministres du Christ, qui veut conduire au Ciel son troupeau en se servant de vous comme d’instruments : maintenant comme collaborateurs de l’Évêque et des prêtres ; ensuite, et à plus forte raison, quand vous recevrez l’ordination sacerdotale.

Nos prières ne vous feront pas défaut lorsque vous réaliserez vos tâches. C’est un devoir du peuple chrétien que de prier pour ses ministres consacrés – depuis le Pape et les Évêques, jusqu’au dernier diacre récemment ordonné – en demandant au Seigneur qu’il envoie beaucoup d’ouvriers à sa vigne. Nous nous unissons aussi à la personne et aux intentions du Cardinal Vicaire de Sa Sainteté à Rome.

Frères et sœurs, ne négligez pas ce devoir. Et vous tous, parents et proches parents des nouveaux diacres, priez et faites priez pour eux. Ce sera la meilleure façon de rendre grâce à Dieu pour ce don qu’il a fait à vos familles, à la prélature de l’Opus Dei et à toute l’Église.

Je demande à la Vierge Marie, notre Mère, à saint Joseph, son très chaste époux et à saint Josémaria, notre très cher Père, qu’ils guident vos fils d’une main sûre sur le chemin du service ministériel qu’ils ont commencé à parcourir.

Amen.

[1] Saint Josémaria, Sillon, n. 608

[2] Préface de la Messe du Christ Roi de l’Univers

[3] Saint Josémaria, Forge, n. 685

[4] Benoît XVI, discours au cours de l’audience générale du 12 novembre 2008

[5] Saint Josémaria, Quand le Christ passe, n. 179

[6] Saint Josémaria, Forge, n. 1004

[7] Saint Josémaria, Quand le Christ passe, n. 182

[8] Benoît XVI, encyclique Deus Caritas est, 25 décembre 2005, n. 18

[9] Saint Josémaria, Forge, n. 562