Sainte Brigitte : dans l’espoir de bâtir

Méditation à l'occasion de la fête de Sainte Brigitte de Suède, le 23 juillet. Déclarée co-patronne de l'Europe par le pape Jean-Paul II, le 1er octobre 1999, en même temps que Catherine de Sienne et Edith Stein, elle nous stimule à être nous aussi des bâtisseurs de l'unité de l'Église.

Les révélations sur la Passion faites à Ste Brigitte, retable baroque anonyme, paroisse Ste-Brigitte, Berg, Haut Palatinat, Bavière

« Si le Seigneur ne bâtit la maison, les bâtisseurs travaillent en vain » (Ps 126, 1). Le Maître travaille sans cesse pour consolider son Corps mystique, aidé par les membres qui, dans la charité agissante, sont plus proches de lui. L’Église qui vit et pâtit en Europe compte six d’entre eux pour redresser sa mémoire chrétienne et ouvrir de nouveaux chemins de dignité spirituelle. « Ce trésor de sainteté est le secret de son passé et l'espérance de son avenir » (Jean-Paul II, Lettre L’espérance de bâtir, 1/10/1999 §2).

Depuis 1999, sainte Brigitte de Suède fait partie des « sponsors » attitrés du continent. Noble épouse, mère féconde, conseillère de rois, mystique, fondatrice et chevronnée en pèlerinages, elle a été choisie comme figure emblématique de sainteté et, partant, d’amour pour l’unité de l’Église.

Dix ans auparavant, dans son voyage en Suède (1989), Jean-Paul II, après avoir visité le premier monastère des brigittines (fondé à Vadstena en 1346), reçut, non sans émoi, un cadeau singulier offert par la communauté protestante : un bloc en provenance de la cathédrale luthérienne voisine (au sud de Stockholm), qui deviendrait la première pierre de la cathédrale catholique de la région. «Ce noble geste est le signe d’un grand espoir qui anime tout le peuple de Dieu. Nous sommes sincèrement résolus à reconstruire ensemble ce qui a été divisé par le passé » (Jean-Paul II, message, 11/06/1989).

Il reste beaucoup à bâtir, à l’intérieur et à l’extérieur de l’Église. Chaque chrétien, avec l’aide divine et le secours des saints, active son cœur et ses bras : l’exemple de droiture, la limpidité du regard, la parole stimulante, le respect de tous sans conditions. La charité du Christ circule aisément par ce réseau de bienveillance, capable d’œuvrer des miracles. Nous sommes engagés dans une histoire de sanctification au milieu d’un monde qui change et qui souvent se révolte contre les caricatures de l’Évangile. Ils « s'opposent à Jésus-Christ, ou plutôt à son ombre, car le Christ, ils ne le connaissent pas ; ils n'ont pas vu la beauté de son visage et ne savent rien de sa merveilleuse doctrine » (Saint Josémaria, Quand le Christ passe §179).

Sainte Brigitte s’est aussi signalée par le témoignage rendu, avec une vigueur prophétique, à la Passion et à la Croix du Sauveur, en référence aux épreuves de l’Église de son temps. Elle n’épargne pas des avertissements sévères visant la réforme morale du peuple chrétien et du clergé. « Elle le faisait toujours dans une attitude de respect et en pleine fidélité au Magistère de l’Église, en particulier au Successeur de l’apôtre Pierre » (Benoît XVI, Audience, 27/10/2010).

Les quinze prières sur la Passion, diffusées partout après sa mort, rapprochent du mystère de l’Agneau immolé, broyé pour notre salut ; le dernier texte développe l’allégorie du « pressoir mystique », bien présente dans l’iconographie tardo-médiévale.

À plusieurs reprises, Jean-Paul II avait mis la sainte en exergue : dans le 6e anniversaire de sa canonisation (1991), à l’occasion de son patronage européen (1999) et pour le 7e centenaire de la naissance (2002). Des vêpres solennelles eurent lieu à Rome, en présence, entre autre, des autorités civiles du royaume de Suède et des autorités religieuses luthériennes. La sainte constitue un précieux lien œcuménique dans le Christ, seul Pasteur. Près de la « Porte de la Prière », à la basilique Saint-Pierre au Vatican, une statue en marbre montre la fondatrice comme un pilier du ministère pétrinien.

Un phare aussi pour la croissance morale des peuples. Les sociétés chrétiennes ont beaucoup à apporter pour consolider des bases de dialogue durable dans la vérité et l’amour. « Une Europe qui remplacerait les valeurs de tolérance et de respect universel par l'indifférentisme éthique et le scepticisme en matière de valeurs inaliénables, s'ouvrirait aux aventures les plus risquées et verrait tôt ou tard réapparaître sous de nouvelles formes les spectres les plus effroyables de son histoire » (Jean-Paul II, Lettre Spes aedificandi, §10).

Abbé Fernandez

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