Réjouis-toi, Mère du Ressuscité !

Contemplation du bonheur de Notre Dame retrouvant son Fils, ressuscité, glorieux, exprimé dans l'invocation du Regina Caeli

Filippino Lippi - Apparition du Christ à Marie (1493, Musée de Peinture Ancienne, Munich)

« En ce moment précis, oh combien sont emportés par la maladie, ici tout autour de nous, n'ayant même pas le temps de faire pénitence » (Grégoire de Tours, Histoires des Francs, 10,1). L’historien rapporte cette exclamation du pape Grégoire I, dans une homélie au peuple affligé, en l’an 590, par une sévère épidémie.

L’évêque de Rome invoqua la Mère de Dieu et convoqua une procession pénitentielle massive, pour endiguer le fléau. Une vision céleste les rassura. Près du Tibre, des anges chantaient l’alléluia en l’honneur de la Mère du Ressuscité : « Reine du ciel, réjouis-toi, car celui que tu as mérité de porter est ressuscité comme il l’avait prédit ».

Un vitrail contemporain illustre le récit, à l’église paroissiale de Notre Dame de l’Assomption de Passy (Paris).

La gloire du Fils suscite le bonheur de Notre Dame. Telle joie dépassait celle qui avait apporté l’annonce de Gabriel. La prière du Regina caeli, devenue antienne mariale pour le temps de Pâques, s’est répandue partout dans l’Église.

Le poète Dante l’attribue aux saints contemplatifs qui, pleins de tendresse et jubilation, l’adressent à Marie en gloire (Paradis, chant 23). De dizaines de compositeurs, de Lully à Gounod, l’ont dotée de mélodies radieuses. Des centaines d’allocutions papales tournent autour de cette prière.

Bien que les évangélistes décrivent des apparitions de Jésus ressuscité aux saintes femmes, ils ne mentionnent aucune offerte à sa Mère. « Ce silence ne doit pas inciter à conclure que le Christ n'est pas apparu à Marie après la résurrection ; il nous invite en revanche à rechercher les motifs d'un tel choix de la part des Évangélistes » (Jean-Paul II, Audience, 21 mai 1997).

Certainement les apparitions consignées dans le Nouveau Testament n’ont pas la prétention d’être exhaustives ; en toute vraisemblance, les auteurs inspirés en ont fait une sélection en fonction de la valeur de témoignage public. Or, celui de la Mère n’était pas significatif pour les non croyants. En revanche, Marie, bien unie au sacrifice du Fils au Calvaire, était la plus apte à recevoir l’annonce de la victoire sur la mort.

Depuis le 5e siècle, les poètes chrétiens ont chanté ce moment mémorable : « Celle qui fut autrefois le chemin pour l’arrivée du Messie, elle est encore le témoin de son retour glorieux » (Caelius Sedulius, Chant pascal, 5, 363-364).

Marie, témoin de la résurrection, est ainsi modèle de l’Église qui attend et contemple. La foi nous invite à regarder le mystère pascal avec les yeux éblouis de Marie et à partager l’explosion de bonheur de la Mère du Vivant, même au milieu des tribulations, des épidémies.

L’invocation Regina caeli, qui traduit les sentiments du ciel et de la terre, encadre, à midi, notre dialogue quotidien avec le Fils glorieux et la Mère en liesse.

Abbé Fernandez