Il y a huit ans, à Madrid, l’Église béatifia Mgr Alvaro del Portillo (1914-1994). Le pape François, dans son message, salua le pasteur courageux qui sut avancer « contre-courant » pour être fidèle à l’Église ; plus de 150 évêques participèrent à la messe, dont 18 cardinaux. La béatification donna lieu à une initiative sociale d’envergure pour les pays d’Afrique.
Prélat de l’Opus Dei, il avait succédé au fondateur, saint Josémaria qui, en signe de confiance pour son plus proche collaborateur, lui donna le surnom biblique de saxum (le roc solide).
Selon un auteur américain le bienheureux Alvaro est « un don de l’Église et pour l’Église », car son relief ecclésial est de première grandeur, à en juger par le procès en béatification (2004-2010) : parmi les 133 témoins, 31 étaient des cardinaux, archevêques ou évêques. L’étude minutieuse de ses écrits a mis en relief une densité théologique, canonique et pastorale remarquable, surtout en rapport avec les droits des baptisés, hommes et femmes. Sa renommée mondiale de sainteté s’est manifestée par 12 000 récits de faveurs et dix millions d’images pour la dévotion privée.
Sa première biographie complète (J. Medina, 2012) synthétise les événements principaux de ce parcours. Malgré une santé délicate, il s’est donné à fond : des responsabilités pastorales dans l’Opus Dei et dans une dizaine de dicastères du Saint Siège ; « cheville ouvrière » du célèbre décret sur les prêtres de Vatican II et participant (dès 1983) à plusieurs synodes.
Comme pasteur de l’Opus Dei (1975 - 1994), il a préparé au sacerdoce environ 40 candidats par an, dans une période avare en vocations. Il promut à Rome l’Université Pontificale de la Sainte-Croix, qui en peu de temps a atteint un prestige reconnu. Son rayonnement international a été éloquent : parmi ses 200 voyages pastoraux, qui ont sillonné les cinq continents, il a fait des séjours prolongés en 34 pays, où il a dialogué avec les évêques et avec de dizaines de milliers de fidèles.
Grand promoteur de la science sacrée et de la formation de prêtres et de laïcs, il a été ordonné évêque ‑ après avoir refusé depuis 1982 ‑ par Jean-Paul II en 1991 ; plus de 200 cardinaux et prélats lui ont imposé les mains dans la cérémonie.
Sa devise programmatique « Nous voulons que le Christ règne » a été confirmée par les faits. Bon ministre du Royaume, il fut le premier, parmi les 320 évêques consacrés par Jean-Paul II, à être béatifié.
Une accolade « prophétique », bien au-delà du protocole, entre les deux futurs bienheureux, eut lieu en 1992, le lendemain de la béatification de Mgr Escriva. En amont, une ancienne amitié. Le premier contact, bref, eut lieu à la basilique vaticane pendant la deuxième session du concile ; ensuite le cardinal Wojtyla découvrit l’Opus Dei. Avant le conclave du mois d’août 1978, ils prièrent ensemble. Le lendemain de l’élection papale (17 octobre), ils se rencontrèrent dans la clinique où ils rendaient visite à un ami commun, malade. Depuis, les contacts ont été intenses et fructueux. À la mort de Mgr del Portillo (23 mars 1994, à 80 ans), le pape s’est déplacé pour prier devant la dépouille de l’ami : « C’était un devoir », commenta le pontife. Le cardinal Dziwisz soulignerait ce geste exceptionnel.
Au début du XVe siècle, Jean I, duc de Berry, commanda un livre d’heures pour ses prières ; le résultat, avec ses plus de 60 grandes enluminures, en 206 feuilles de vélin, représente un joyau bibliophile du musée Condé de Chantilly : on l’appelle Les Très Riches Heures. Mgr del Portillo a bien rempli sa biographie, sans chômer dans le service : il nous laisse ses « riches heures » à méditer. Un cardinal ami souhaitait que, dans l’Église, il y en ait beaucoup comme lui.
voir la vidéo "Merci à tous !" éditée pour remercier tous ceux qui ont participé aux préparatifs de la Béatification