Thème 8 - Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme

Le Christ Jésus a assumé la nature humaine sans cesser d’être Dieu : il est vraiment Dieu et vraiment homme.

8.

Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme

  • L’incarnation du Verbe

« Mais lorsque est venue la plénitude des temps, Dieu a envoyé son Fils né d'une femme et soumis à la loi de Moïse» (Gal 4, 4). C’est ainsi que s’accomplit la promesse d’un sauveur, promesse faite par Dieu à Adam et Ève au moment de les expulser du Paradis : « Je mettrai une hostilité entre toi et la femme, entre ton lignage et le sien : Il t’écrasera la tête, et tu l’atteindras au talon » (Gn 3, 15). Ce verset de la Genèse est appelé protoévangile parce qu’il constitue la toute première annonce de la bonne nouvelle du salut. « La traduction grecque, en commençant la dernière phrase par un pronom masculin, attribue cette victoire, non au lignage de la femme en général, mais à l’un des fils de la femme ; ainsi est explicitée l’interprétation messianique qui est donnée par beaucoup de Pères. Avec le Messie, sa Mère est impliquée, et l’interprétation mariologique de la traduction latine ipsa conteret caput est devenue traditionnelle dans l’Église »[1]

Jésus et Marie, dans le film de Mel Gibson "La Passion". Dieu s'est incarné et a vécu une vie semblable à la nôtre.

Depuis lors, et jusqu’au moment où « le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous » (Jn 1, 14), Dieu a préparé l’humanité pour qu’elle puisse accueillir avec profit son Fils Unique. Dieu s'est choisi le peuple d’Israël, a établi une Alliance avec lui et l'a progressivement formé, intervenant dans son histoire, lui manifestant ses desseins par les patriarches et les prophètes, et le sanctifiant pour lui. Et tout ceci, comme une préparation en figures de la parfaite et nouvelle Alliance qu’il allait conclure dans son Christ, de la pleine et définitive révélation que le Verbe incarné allait réaliser[2]. Quoique Dieu ait préparé la venue du Sauveur surtout moyennant le choix du peuple d’Israël, cela ne signifie pas qu’il abandonnait les autres peuples, les « gentils », car jamais il n’avait cessé de se rendre témoignage à lui-même (cf. Act. 14, 16-17). La Providence divine a fait que les païens gardent une conscience plus ou moins explicite de la nécessité du salut, et jusque dans les moindres recoins de la terre, on conservait le désir d’être sauvés.

L'Incarnation a pour origine l’amour de Dieu envers les hommes : « Voici comment Dieu a manifesté son amour parmi nous : Dieu a envoyé son Fils unique dans le monde pour que nous vivions par lui » (1 Jn 4, 9). L’Incarnation est la démonstration par excellence de l’Amour de Dieu pour les hommes, étant donné qu’en elle, c’est Dieu lui-même qui se donne aux hommes, participant à la nature humaine dans une unité de personne.

Après la chute d’Adam et Ève au paradis terrestre, l’Incarnation reçoit une finalité salvatrice et rédemptrice, comme nous le disons dans le Credo : « Pour nous, les hommes, et pour notre salut, il descendit du ciel ; par l’Esprit Saint, il a pris chair de la Vierge Marie, et s’est fait homme »[3]. Le Christ a affirmé de lui-même que « le Fils de l'homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu » (Lc 19, 10 ; cf. Mt 18, 11) et que « Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé » (Jn 3, 17).

L’Incarnation manifeste l’amour infini de Dieu pour les hommes, son infinie miséricorde, sa justice, son pouvoir, non moins que la cohérence du plan divin de salut. La profonde sagesse de Dieu se voit dans le fait que l’Incarnation du Verbe, la forme choisie pour sauver l’homme, est la plus convenable à notre nature humaine.

Jésus-Christ, le Verbe Incarné, « n’est ni un mythe ni une quelconque idée abstraite. Il est un homme qui a vécu dans un contexte concret, qui est mort après avoir mené sa propre existence dans l’évolution de l’histoire. Une recherche historique à son sujet est donc une requête de la foi chrétienne elle-même » [4].

L’existence réelle du Christ appartient à la doctrine de la foi, de même que sa mort véritable pour nous, et sa résurrection au troisième jour (cf. 1 Co 15, 3-11). L’existence de Jésus est un fait prouvé par la science historique, surtout au moyen de l’analyse du Nouveau Testament, dont la valeur historique est hors de doute. Il existe d’autres témoignages antiques, non chrétiens, païens ou juifs, sur l’existence de Jésus. C’est précisément pour cela que ne sont pas acceptables les positions de ceux qui dissocient le Jésus historique du Christ de la foi, soutenant l’idée que presque tout ce que le Nouveau Testament dit du Christ ne serait qu’une interprétation de foi faite par les disciples de Jésus, alors que sa figure historique authentique nous resterait encore inconnue. Ces affirmations, qui sont en bien des cas issues d’un fort préjugé contraire au surnaturel, ne tiennent aucun compte de la recherche historique contemporaine. Celle-ci tend à conclure que la présentation que le christianisme primitif fait de Jésus se fonde sur d’authentiques faits historiquement avérés.

  • Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme

L’Incarnation est « le mystère de l’admirable union de la nature divine et de la nature humaine dans l’unique Personne du Verbe » (Catéchisme, 483). L’Incarnation du Fils de Dieu « ne signifie pas que Jésus-Christ soit en partie Dieu et en partie homme, ni qu’il soit le résultat du mélange confus entre le divin et l’humain. Il s’est fait vraiment homme en restant vraiment Dieu. Jésus-Christ est vrai Dieu et vrai homme » (Catéchisme, 464). La divinité de Jésus-Christ, Verbe éternel de Dieu, a été étudiée en relation avec la Sainte Trinité. Nous allons ici nous en tenir surtout à ce qui a trait à son humanité.

L'Église a défendu et expliqué cette vérité de foi durant les premiers siècles face aux hérésies qui la falsifiaient. Au premier siècle déjà, certains chrétiens issus du judaïsme, les ébionites, considérèrent le Christ comme un simple homme, quoique très saint. Au siècle suivant surgit l’adoptianisme : Jésus ne serait qu’un homme dans lequel habite la force de Dieu ; pour eux, Dieu lui-même est une seule Personne. Cette hérésie fut condamnée en l’an 190, par le Pape saint Victor, puis par le Concile d’Antioche (en 268), par le premier Concile de Constantinople et par le Synode Romain de l’an 382[5]. L’hérésie arienne, niant la divinité du Verbe, niait aussi que Jésus-Christ fût Dieu. Arius fut condamné par le premier Concile de Nicée, en l’an 325. Aujourd’hui encore, l’Église a réaffirmé que Jésus-Christ est le Fils de Dieu, subsistant de toute éternité, et qui dans l’Incarnation, a assumé la nature humaine dans son unique Personne divine[6].

L’Église a encore dû faire face à d’autres erreurs niant la réalité de la nature humaine du Christ. Parmi celles-ci, sont à mentionner les hérésies qui rejetaient la réalité du corps ou de l’âme du Christ, comme le docétisme qui, dans ses différentes variantes, est tributaire du gnosticisme et du manichéisme. Certains de ses représentants affirmaient que le Christ possédait un corps céleste, ou que son corps n’était qu’une apparence, ou qu’il est apparu brusquement en Judée sans avoir eu à naître ou grandir. Saint Jean lui-même eut à combattre ce genre d’erreurs : « Beaucoup d'imposteurs se sont répandus dans le monde,

ils refusent de proclamer que Jésus Christ est venu dans la chair; celui qui agit ainsi est l'imposteur et l'anti-Christ » (2 Jn 7 ; cf. 1 Jn 4, 1-2). Arius et Apollinaire de Laodicée ont nié l’existence de l’âme humaine du Christ. Le second a eu une importance particulière dans ce domaine, et son influence s'est manifestée durant plusieurs siècles lors des controverses christologiques postérieures. Dans sa tentative de défendre l’unité du Christ et son impeccabilité, Apollinaire soutint que le Verbe jouait le rôle de l’âme spirituelle humaine. Cette doctrine impliquait cependant la négation de la véritable humanité du Christ, puisque celle-ci devait, comme en tout homme, être composée du corps et de l’âme spirituelle (cf. Catéchisme, 471). Elle fut donc condamnée par le premier Concile de Constantinople, ainsi que par le Synode Romain de l’an 382[7].

  • L’union hypostatique

Au début du Vème siècle, à la suite des controverses précédentes, il était clair qu’il fallait affirmer en toute fermeté l’intégrité des deux natures, humaine et divine, dans la Personne du Verbe, de sorte que l’unité personnelle du Christ commençait à devenir le centre d’attention de la christologie et de la sotériologie patristique. De nouvelles discussions contribuèrent alors à de nouveaux approfondissements.

La première grande controverse prit son origine de certaines affirmations du Patriarche de Constantinople, Nestor. Celui-ci utilisait un langage laissant entendre qu’en Jésus-Christ se trouvent deux sujets : le sujet divin et le sujet humain, unis entre eux par un lien non pas physique mais seulement moral. De cette erreur christologique découle son rejet du titre de Theotókos, Mère de Dieu, attribué à la Vierge Marie. Elle ne serait que la mère du Christ, mais pas la mère de Dieu. Face à cette hérésie, saint Cyrille d’Alexandrie ainsi que le Concile d’Éphèse de l’année 431 rappelèrent que « l’humanité du Christ n’a d’autre sujet que la personne divine du Fils de Dieu qui l’a assumée et faite sienne dès sa conception. Pour cela, le Concile d’Éphèse a proclamé en 431 que Marie est devenue en toute vérité Mère de Dieu par la conception humaine du Fils de Dieu dans son sein » (Catéchisme, 466 ; cf. DS 250-251).

Quelques années plus tard surgit l’hérésie monophysite. Cette hérésie a ses antécédents dans l’apollinarisme, doublé d’une mauvaise compréhension de la doctrine et du langage utilisé par saint Cyrille de la part d’Eutychès, archimandrite d’un monastère de Constantinople. Eutychès affirmait, entre autres, que le Christ est une Personne subsistant en une seule nature, la nature humaine ayant été absorbée dans la nature divine. Cette erreur fut condamnée par le pape saint Léon le Grand, dans son Tomus ad Flavianum[8], authentique joyau de la théologie latine, ainsi que par le Concile oecuménique de Chalcédoine, en 451, point de référence obligé pour la christologie. Voici ses termes : « Nous enseignons unanimement à confesser un seul et même Fils, notre Seigneur Jésus-Christ, le même parfait en divinité et parfait en humanité »[9], ajoutant que l’union des deux natures est « sans confusion, sans changement, sans division, sans séparation »[10].

La doctrine chalcédonienne fut confirmée et explicitée par le Concile de Constantinople II, en l’an 553, qui offre une interprétation authentique du Concile antérieur. Après avoir souligné plusieurs fois l’unité du Christ[11], il affirme que l’union des deux natures du Christ a lieu selon l’hypostase[12], surmontant en cela la formule cyrillienne équivoque qui parlait d’unité selon la physis. Dans cette même ligne, le Concile de Constantinople II indiqua aussi le sens dans lequel devrait être comprise la formule cyrillienne bien connue d’« une nature du Verbe incarné »[13], phrase que saint Cyrille pensait être de saint Athanase, mais qui en réalité n’était qu’une falsification apollinariste.

Dans ces décisions conciliaires qui avaient pour but de contrer quelques erreurs concrètes et non pas d’exposer le mystère du Christ dans sa totalité, les Pères conciliaires ont utilisé le langage de leur temps. De même que Nicée emploie le terme consubstantiel, Chalcédoine utilise des termes tels que nature, personne, hypostase, etc., selon la signification habituelle qu’ils avaient dans le langage commun et dans la théologie de leur époque. Ceci ne signifie pas, comme certains l’ont affirmé, que le message évangélique se soit hellénisé. En réalité, ceux qui se sont montrés rigidement hellénisants ont été précisément ceux qui proposaient les doctrines hérétiques, comme Arius ou Nestor, qui ne surent pas voir les limitations du langage philosophique de leur époque par rapport au mystère de Dieu et du Christ.

  • La sainte Humanité de Jésus-Christ

« Dans l’union mystérieuse de l’Incarnation " la nature humaine a été assumée, non absorbée " (GS 22, § 2) » (Catéchisme, 470). C’est pourquoi l’Église a enseigné « la pleine réalité de l’âme humaine, avec ses opérations d’intelligence et de volonté, et du corps humain du Christ. Mais parallèlement, elle a eu à rappeler chaque fois que la nature humaine du Christ appartient en propre à la personne divine du Fils de Dieu qui l’a assumée. Tout ce qu’il est et ce qu’il fait en elle relève " d’Un de la Trinité ". Le Fils de Dieu communique donc à son humanité son propre mode d’exister personnel dans la Trinité. Ainsi, dans son âme comme dans son corps, le Christ exprime humainement les mœurs divines de la Trinité (cf. Jn 14, 9-10) » (Catéchisme, 470).

L’âme humaine du Christ possède une véritable connaissance humaine. La doctrine catholique a traditionnellement enseigné que le Christ, en tant qu’homme, possède une connaissance acquise, une science infuse et la science propre aux bienheureux du Ciel. La science acquise du Christ ne pouvait pas être en soi illimitée : « C’est pourquoi le Fils de Dieu a pu vouloir en se faisant homme " croître en sagesse, en taille et en grâce " (Lc 2, 52) et de même avoir à s’enquérir sur ce que dans la condition humaine on doit apprendre de manière expérimentale (cf. Mc 6, 38 ; Mc 8, 27 ; Jn 11, 34) » (Catéchisme, 472). Le Christ, sur qui repose la plénitude de l’Esprit Saint et de ses dons (cf. Is 11, 1-3), a possédé également la science infuse, c’est-à-dire la connaissance que l’on n’acquiert pas directement par le travail de la raison, mais qui est infusée directement par Dieu dans l’intelligence humaine. En effet, « le Fils montrait aussi dans sa connaissance humaine la pénétration divine qu’il avait des pensées secrètes du cœur des hommes (cf. Mc 2, 8 ; Jn 2, 25 ; 6, 61) (Catéchisme, 473). Le Christ possédait également la science propre aux bienheureux : « De par son union à la Sagesse divine en la personne du Verbe incarné, la connaissance humaine du Christ jouissait en plénitude de la science des desseins éternels qu’il était venu révéler (cf. Mc 8, 31 ; 9, 31 ; 10, 33-34 ; 14, 18-20. 26-30) » (Catéchisme, 474). En raison de tout cela, il faut affirmer que le Christ en tant qu’homme est infaillible : admettre l’erreur en lui serait l’admettre dans le Verbe, unique personne existante dans le Christ. Au sujet d’une éventuelle ignorance proprement dite, il faut considérer que « ce qu’il reconnaît ignorer dans ce domaine (cf. Mc 13, 32), il déclare ailleurs n’avoir pas mission de le révéler (cf. Ac 1, 7) » (Catéchisme, 474). On comprend que le Christ ait été humainement conscient d’être le Verbe et d’avoir une mission salvifique[14]. Par ailleurs, la théologie catholique, affirmant que le Christ possédait déjà ici-bas la vision immédiate de Dieu, a toujours nié l’existence chez le Christ de la vertu de la foi[15].

Face aux hérésies du monoenergétisme et du monothélisme qui, en une continuité logique avec le monophysisme précédent, affirmaient que le Christ n’avait qu’une seule opération ou une seule volonté, l’Église a établi, au Concile œcuménique de Constantinople III, en 681, « que le Christ possède deux volontés et deux opérations naturelles, divines et humaines, non pas opposées, mais coopérants, de sorte que le Verbe fait chair a voulu humainement dans l’obéissance à son Père tout ce qu’il a décidé divinement avec le Père et le Saint-Esprit pour notre salut (cf. DS 556-559). La volonté humaine du Christ " suit sa volonté divine, sans être en résistance ni en opposition vis-à-vis d’elle, mais bien plutôt en étant subordonnée à cette volonté toute-puissante " (DS 556) » (Catéchisme, 475). Il s’agit d’une question fondamentale, en relation directe avec l’être du Christ et notre salut. Saint Maxime le Confesseur s’est distingué dans cet effort doctrinal de clarification, se servant avec une grande efficacité du passage bien connu de la prière de Jésus au Jardin des Oliviers, dans laquelle apparaît l’accord de la volonté humaine du Christ avec la volonté du Père (cf. Mt 26, 39).

Une conséquence de la dualité de natures est aussi la dualité d’opération. Chez le Christ, il y a deux agir : l’agir divin, procédant de sa nature divine, et l’agir humain procédant de sa nature humaine. On parle aussi d’agir théandrique pour se référer aux œuvres dans lesquelles l’agir humain sert d’instrument au pouvoir divin : c’est le cas pour les miracles réalisés par le Christ.

Le réalisme de l’Incarnation du Verbe s’est encore manifesté lors de la dernière grande controverse christologique de l’époque patristique : la question des images. La coutume de représenter le Christ en fresques, icônes, bas-reliefs, etc., est très ancienne. Il en existe des témoignages remontant au moins au IIe siècle. La crise iconoclaste se produisit à Constantinople, au début du VIIIe siècle. Elle eut pour origine une décision de l’empereur. Auparavant, les théologiens s’étaient déjà montrés divisés en partisans et opposés à l’usage d’images, mais les deux tendances avaient coexisté pacifiquement. Ceux qui s’y opposaient argumentaient en disant que Dieu n’a pas de limite et qu’il ne peut donc pas s’enfermer dans les traits d’une œuvre d’art, qu’il ne peut être circonscrit. Pourtant, comme l’a signalé saint Jean Damascène, c’est l’Incarnation elle-même qui a circonscrit le Verbe : « Puisque le Verbe s’est fait chair en assumant une vraie humanité, le corps du Christ était délimité. (…) À cause de cela, le visage humain de Jésus peut être " dépeint " (Ga 3, 2) » (Catéchisme, 476). Au deuxième Concile œcuménique de Nicée, en 787, « l’Église a reconnu comme légitime qu’il soit représenté sur des images saintes » (Catéchisme, 476). En effet, « les particularités individuelles du corps du Christ expriment la personne divine du Fils de Dieu. Il a fait siens les traits de son propre corps humain au point que, peints en une image sacrée, ils peuvent être vénérés parce que le croyant qui vénère l’image vénère en elle la personne de celui qu’elle représente[16] ».

L’âme du Christ, n’étant pas divine par essence mais seulement humaine, a été perfectionnée comme les âmes des autres hommes, moyennant la grâce habituelle qui est « un don habituel, une disposition stable et surnaturelle perfectionnant l’âme même pour la rendre capable de vivre avec Dieu, d’agir par son amour » (Catéchisme, 2000). Le Christ est saint, comme l’avait dit l’archange Gabriel à Marie lors de l’Annonciation (Lc 1, 35). L’humanité du Christ est radicalement sainte, source et paradigme de la sainteté de tous les hommes. Par l’Incarnation, la nature humaine du Christ a été élevée à la plus grande union avec la divinité – avec la Personne du Verbe – à laquelle aucune créature ne peut être élevée. Du point de vue de l’humanité du Seigneur, l’union hypostatique est le plus grand don que l’on ait jamais pu recevoir, appelé grâce d’union. Par la grâce habituelle, l’âme du Christ a été divinisée par la transformation qui élève la nature et les opérations de l’âme au plan de la vie intime de Dieu, donnant à ses opérations surnaturelles une connaturalité que, d’une autre façon, il ne saurait avoir. Sa plénitude de grâce implique aussi l’existence des vertus infuses et des dons de l’Esprit Saint. Et « tous ont eu part à sa plénitude, nous avons reçu grâce après grâce » (Jn 1, 16). La grâce et les dons ont été concédés au Christ non seulement eu égard à sa divinité, mais aussi à sa mission de nouvel Adam et Tête de l’Église. C’est pourquoi l’on parle de la grâce capitale du Christ, qui n’est pas différente de sa grâce personnelle mais en est un aspect, soulignant son action sanctificatrice sur les membres de l’Église. Celle-ci en effet « est le Corps du Christ » (Catéchisme, 805), un corps « dont le Christ est la Tête : elle vit de lui, en lui et pour lui ; il vit avec elle et en elle » (Catéchisme, 807).

Le Cœur du Verbe Incarné. « Jésus nous a tous et chacun connus et aimés durant sa vie, son agonie et sa passion et il s’est livré pour chacun de nous : " Le Fils de Dieu m’a aimé et s’est livré pour moi " (Ga 2, 20). Il nous a tous aimés d’un cœur humain » (Catéchisme, 478). Pour cette raison, le Sacré Cœur de Jésus est le symbole par excellence de l’amour avec lequel il aime continuellement le Père éternel et tous les hommes (cf. Ibidem).

José Antonio Riestra

Bibliographie de base

Catéchisme de l’Église catholique, 422-483.

Benoît XVI-Joseph Ratzinger, Jésus de Nazareth, Flammarion, 2007.


[1] La Bible de Jérusalem, 1956

[2] Concile Vatican II, const. dogm. Lumen gentium, 9

[3] Concile de Constantinople I, Symbolum, DS 150 ; cf. Concile Vatican II, const. Dogm. Lumen gentium, 55

[4] Commission Théologique Internationale, Questions choisies de Christologie (1979)

[5] Cf. DS 151 et 157-158

[6]Cf. Congrégation pour la Doctrine de la Foi, décl. Mysterium Filii Dei, 21 février 1972, dans AAS 64(1972)237-241

[7] Cf. DS 151 et 159

[8]Cf. Ibidem, 290-295

[9]Cf. Ibidem, 301; Catéchisme, 467

[10] Cf. Idem

[11] Cf. Ibidem, 423

[12] Cf. Ibidem, 425

[13] Cf. Ibidem, 429

[14] Commission Théologique Internationale, La conscience que Jésus avait de Lui-même et de sa mission (1985)

[15] Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Notification, n. V, 26 novembre 2006

[16] Concile de Nicée II, DS 601