Saint Pierre in Gallicantu

" Et à l'instant, comme il parlait encore, un coq chanta Et le Seigneur, s'étant retourné, arrêta son regard sur Pierre, et Pierre se souvint de la parole du Seigneur, comme il lui avait dit: " Avant que le coq ait chanté aujourd'hui, tu me renieras trois fois. " Et étant sorti, il pleura amèrement.” (Lc 22, 60-62.) À Jérusalem, cet épisode est situé sur le flanc oriental du mont Sion, pas très loin du Cénacle, dans un quartier résidentiel de la ville aux temps de Jésus-Christ, d’où l’on percevait les

Traces de notre foi

« La cohorte, le tribun et les satellites des Juifs se saisirent de Jésus et le lièrent. Ils l’emmenèrent d’abord chez Anne parce qu’il était beau père de Caïphe, lequel était grand-prêtre cette année-là. Or, Caïphe était celui qui avait donné ce conseil aux Juifs : « Il convient qu’un seul homme meure pour le peuple ». (Jn 18, 12-14.)

Les quatre évangélistes rapportent l’interrogatoire auquel les princes des prêtres et le Sanhédrin ont soumis Jésus et qui eut lieu chez Caïphe. (Cfr. Mt 26, 57). Deux témoins exceptionnels réussirent à être là : Simon Pierre et un autre disciple suivirent Jésus. Ce dernier, connu du grand prêtre, entra dans sa cour. Il alla trouver la gardienne et y introduisit Pierre (Cf. Mt 26, 57.)

Durant le procès, l’attitude du Maître et celle de saint Pierre sont contrastées. Devant les accusations injustes, les charges non fondées, les faux témoignages, les affronts, Jésus se tut. Par la suite, lorsqu’il dut proclamer la vérité, il l’affirma sereinement. En revanche, Pierre, ayant peur des serviteurs, nia qu’il eût quelque chose à voir avec le Maître : « Je ne le connais pas (Lc 22, 58), je ne sais pas de quoi tu parles (Mt 26, 70), je ne connais pas cet homme (Mc 14, 71) ».

" Et à l'instant, comme il parlait encore, un coq chanta. le Seigneur, s'étant retourné, arrêta son regard sur Pierre, alors Pierre se souvint de la parole du Seigneur, comme il lui avait dit: " Avant que le coq n’ait chanté aujourd'hui, tu me renieras trois fois. " Et étant sorti, il pleura amèrement. (Lc 22, 60-62.)

La maison de Caïphe

À Jérusalem, cet épisode est situé sur le flanc oriental du mont Sion, pas très loin du Cénacle, dans un quartier résidentiel de la ville aux temps de Jésus-Christ, d’où l’on percevait les torrents Cédron et Gihon.

Photo: Alfred Driessen

Les érudits proposent dans cette zone au moins deux emplacements différents pour la maison de Caïphe mais les résultats archéologiques penchent plutôt vers Saint Pierre in Gallicantu. Ce sanctuaire se dresse sur une propriété appartenant aux Augustiniens Assomptionnistes depuis la fin du XIXème siècle. Les fouilles de 1888 à 1909 et de 1992 à 2002 ont mis en lumière les vestiges d’une demeure d’époque hérodienne, avec des moulins, des citernes, des dépendances rupestres.

Par ailleurs, on a trouvé le seuil d’une porte, en pierre finement taillée, avec une inscription indiquant le lieu où l’on déposait les aumônes pour le pardon des péchés et deux collections de mesures et de poids, utilisées au Temple. Cette maison aurait été vénérée plus tard par les chrétiens qui, au Vème siècle, y construisirent une église par-dessus, dont on conserve quelques sols en mosaïque. Une profonde citerne, au centre de la basilique, était sans doute initialement destinée aux bains juifs rituels.

Cet ancien témoignage du VIème siècle fait sans doute référence à ce sanctuaire: “Deux cents pas séparent le Golgotha de Sainte Sion, la mère de toutes les églises puisqu’elle a été fondée par notre Seigneur Jésus-Christ et par les apôtres. Elle fut la demeure de saint Marc évangéliste. À peu près cinquante pas séparent Sainte Sion de la maison de Caïphe, devenue l’église Saint Pierre ”. Theodosii, De situ Terræ Sanctæ, 7 (CCL 175, 118)

Cet édifice byzantin connut le sort de nombreux autres temples en Terre Sainte: détruit au VIIème siècle par les Perses, il fut restauré. Ce deuxième sanctuaire, détruit à son tour au XIème siècle, les Croisés construisirent une troisième basilique au XIIème siècle qui fut rasée et remplacée par la suite par un petit oratoire qui disparut à son tour au XIVème siècle. Les vestiges de chacune de ces étapes furent ensevelis et découverts en 1887, lorsque les religieux assomptionnistes récupérèrent ce terrain.

L’église

L’église actuelle fut consacrée en 1931 et totalement rénovée en 1997. Elle a deux niveaux et une crypte. Dans la chapelle d’en haut, coiffée d’une coupole décorée de mosaïques et de vitraux, on évoque le procès de Jésus devant le Sanhédrin. Dans l’oratoire intermédiaire, où le sol rocailleux apparaît sous le pavement, on évoque les reniements de Pierre, ses larmes et sa rencontre avec le Seigneur ressuscité, sur les rives de la mer de Galilée, quand sa mission fut confirmée. En dessous, à la crypte, il y a plusieurs grottes dont on a du mal à préciser l’usage qui en a été fait tout au long des siècles. On trouve aussi une citerne vénérée depuis l’époque byzantine, appelée « fosse profonde ».

Il s’agit de la partie de la maison originelle qui attira l’attention des chrétiens depuis les temps les plus reculés. Elle est d’un intérêt extrême: le premier accès à cette cavité se fait par un escalier et une double porte. Cela montre qu’elle était affectée aux bains juifs de purification. À un moment donné, on a encore creusé pour l’approfondir et qu’elle devienne une citerne. On ouvrit alors une fente circulaire dans la voûte. Les signes ajoutés par les fidèles, —trois croix gravées sur la circonférence interne de la fente, la silhouette d’un homme en prière et sept autres croix peintes sur les parois de la fosse — montrent qu’au Vème siècle le lieu était considéré comme celui où Jésus avait attendu le lever du jour, le Vendredi Saint. Dans le prolongement de cette tradition, les pèlerins de nos jours y méditent les souffrances du Christ, évoquées par le psalmiste :

Tu m'as mis au plus profond de la fosse,

en des lieux engloutis, ténébreux ;

le poids de ta colère m'écrase,

tu déverses tes flots contre moi.

Tu éloignes de moi mes amis,

tu m'as rendu abominable pour eux ;

enfermé, je n'ai pas d'issue :

à force de souffrir,

mes yeux s'éteignent.

Je t'appelle, Seigneur, tout le jour,

je tends les mains vers toi :

(Ps (87) 88, 7-10.)

À l’extérieur de cette église, il y a d’autres vestiges archéologiques, parmi lesquels une rue en escalier, perpendiculaire au flanc. Elle rattachait les quartiers nobles de la zone haute, aux quartiers populaires, tout le long du torrent Cédron, près des points d’approvisionnement d’eau : la source du Gihon et la piscine de Siloé.

Bien que moins pavoisée, cette voie existait sans doute aux temps du Seigneur et il l’a fort probablement empruntée à plusieurs reprises, notamment durant la nuit du Jeudi Saint, entouré d’abord par ses disciples, lorsqu’il alla du Cénacle à Gethsémani et ensuite, conduit de force par la troupe de ceux qui l’avaient arrêté au Jardin des Oliviers pour le conduire chez le grand prêtre.

Photo: Leobard HInfelaar

Dans l’enceinte du sanctuaire, les pèlerins trouvent une maquette de la Jérusalem byzantine à grande échelle. Les sept églises construites entre le IVème et le VIème siècles y sont reproduites: le Saint-Sépulcre, Sainte-Sion, groupant la Dormition et le Cénacle, Sainte-Marie de la Probatique, qui coïncide plus ou moins aujourd’hui avec Sainte-Anne, Saint-Jean-Baptiste, où se trouvait le palais d’Hérode et où actuellement se dresse la Citadelle, Siloé, sur la piscine, Sainte-Marie, dite « la Néa », à l’angle supérieur, qui a disparu aussi, et Saint-Pierre.

Lors de son séjour en Terre Sainte, en 1994, don Alvaro del Portillo se recueillit à Saint-Pierre in Gallicantu, dans l’après-midi du 21 mars, la veille de son retour à Rome.

La miséricorde du Seigneur ne nous fait jamais défaut

Lorsque le coq chanta, le Seigneur se retourna et regarda Pierre. Pierre se souvint alors des paroles de Jésus : « Avant que le coq ne chante aujourd’hui, tu m’auras renié trois fois ». Alors, il sortit et pleura amèrement ( (Lc 22, 61-62)” Saint Luc est le seul à noter ce geste miséricordieux de Jésus: le Seigneur convertit Pierre qui l’avait renié trois fois, sans lui adresser le moindre reproche, rien qu’avec un regard d’Amour.

— Il nous regarde nous aussi de ces mêmes yeux, après nos chutes. Puissions-nous lui dire comme Pierre « Seigneur, tu sais tout, tu sais que je t’aime ! » et changer de vie (Sillon, n. 964).

Et saint Ambroise de commenter : « Tous ceux que Jésus regarde, pleurent. La première fois, Pierre renia et ne pleura pas : le Seigneur ne l’avait pas regardé. Il le nia encore une deuxième fois et il n’en pleura pas non plus puisque le Seigneur ne l’avait pas encore regardé. Or, en le niant une troisième fois, Jésus riva sur lui son regard et il se mit à pleurer avec une amertume inconsolable (…). Pierre pleura avec une profonde amertume. Il pleura pour que ses larmes lavent son péché. Tu dois, toi aussi, pleurer tes fautes avec des larmes si tu veux être pardonné dès l’instant où le Christ te regardera. S’il t’arrive de tomber dans le péché, lui, qui est le témoin du plus intime de ton être, te regarde pour te rappeler ton erreur et te permettre de l’avouer ». Saint Ambroise , Expositio Evangelii secundum Lucam, X, 89-90.

Le péché mortel détruit la charité dans le coeur de l’homme et l’écarte de Dieu (Cf. Catéchisme de l’Église catholique, n. 1855), cependant la miséricorde du Seigneur ne nous quitte pas, la conversion est toujours possible : « J’invite chaque chrétien, en quelque lieu et situation où il se trouve, à renouveler aujourd’hui même sa rencontre personnelle avec Jésus Christ ou, au moins, à prendre la décision de se laisser rencontrer par lui, […] Quand quelqu’un fait un petit pas vers Jésus, il découvre que celui-ci attendait déjà sa venue à bras ouverts. C’est le moment pour dire à Jésus Christ : « Seigneur, je me suis laissé tromper, de mille manières j’ai fui ton amour, cependant je suis ici une fois encore pour renouveler mon alliance avec toi. J’ai besoin de toi. Rachète-moi de nouveau Seigneur, accepte-moi encore une fois entre tes bras rédempteurs ». Cela nous fait tant de bien de revenir à lui quand nous nous sommes égarés ! J’insiste encore une fois : Dieu ne se fatigue jamais de pardonner, c’est nous qui nous fatiguons de demander sa miséricorde.» Francisco, Exhort. apost. Evangelii gaudium, 24-XI-2013, n. 3.

Lorsque nous nous battons, en ce combat qui durera jusqu’à la mort, n’écarte pas la possibilité de voir se dresser violemment les ennemis du dehors et du dedans. Et en plus de ce lest, il se pourrait que tes erreurs passées, nombreuses peut-être, se bousculent dans ton esprit. Au nom de Dieu, ne désespère pas.

Si cela t’arrivait, ce qui ne sera ni forcément ni habituellement le cas, fais que cette occasion te porte à t’unir davantage au Seigneur qui t’a choisi comme fils et ne t’abandonnera pas. Il permet cette épreuve pour que tu aimes davantage et pour que tu perçoives plus nettement sa protection continuelle, son Amour.

Quoi qu’il advienne, courage ! Serre fort le bras du Seigneur et considère que Dieu ne perd point de bataille. Si, pour une raison quelconque, tu t’en écartais, réagis avec l’humilité de commencer et recommencer, de revenir, en fils prodigue, tous les jours, voire souvent au fil des vingt-quatre heures, et de régler ton cœur contrit en confession, vrai miracle de l’Amour de Dieu. Le Seigneur lave ton âme dans ce sacrement merveilleux ; il t’inonde de joie et de force pour que tu ne défailles pas dans ta lutte, et que tu reviennes inlassablement à Dieu, quand bien même tout te semblerait obscur. De plus la Mère de Dieu, qui est aussi notre Mère, de sa sollicitude toute maternelle, te protège et raffermit tes pas.

Amis de Dieu, n. 214

Les évangélistes ne disent pas si saint Jean est resté chez Caïphe ou s’il a suivi saint Pierre. Nous ne savons pas non plus où chacun est passé par la suite. Mais nous retrouvons plus tard saint Jean, au pied de la Croix, près de Sainte Maire : avant, tout seul, tu n’y arrivais pas… — Désormais, tu as eu recours à Notre Dame, et avec Elle, que c’est facile !

Chemin, 513.