
Le dominicain breton, Alain de la Roche est célèbre pour avoir diffusé inlassablement, dans plusieurs pays d’Europe, suivant de près l’esprit de son fondateur, la dévotion du rosaire. En Flandre (Douai, 1470) il en créa la première confrérie ; il fixa la forme de récitation et méditation, bien connue de nos jours, qui fut approuvée à partir de Sixte IV. Léon XIII indiqua de le conclure par les litanies de Lorette. Le pape François proposa d’y ajouter la prière à saint Michel archange.
Alain, vénéré comme bienheureux dans l’Ordre des Prêcheurs, est représenté dans la xylographie d’un incunable (1492), moins de vingt ans après sa mort, en train de diffuser la dévotion. Depuis, les artistes ont rivalisé pour exprimer le thème, le plus souvent en rapport avec saint Dominique : entre autres, au 16e siècle, V. Da Pavia, à Palerme, et G. Reni, à Bologne ; A. Van Dyck, encore à Palerme, le siècle suivant ; ou G. B. Tiepolo, à Venise, au 18e.
Des nombreux lieux majeurs de culte sont dédiés à cette invocation, dans toutes les latitudes : des sanctuaires, qui attirent des pèlerins ; des basiliques, réputées par la splendeur du culte ; des paroisses qui, avec un solide enracinement local, maintiennent la flamme auprès de fidèles. Parmi les innombrables églises et chapelles avec ce vocable, on peut mentionner seize cathédrales. L’une d’entre elles, au nord du Vietnam, l’ancienne région du Tonkin, fut érigée à la fin du 19e siècle, grâce à la magnificence d’un prêtre zélé. En face de la mer de Chine, dans le delta du Fleuve Rouge, une région marécageuse assainie par le mandarin local, l’Évangile s’était diffusé par l’œuvre des Missions Étrangères de Paris.
Un jeune diacre, pendant la persécution de 1860, fut condamné à l’exil ; lors d’une maladie qui menaçait de l’emporter, il fit le vœu de bâtir une église en l’honneur de Notre Dame. Devenu curé de Phat Diem, à 120 km au sud-est de Hanoi, le Père Trân Van Luc érigea, en un temps record, la plus grande cathédrale du Sud-Est asiatique, centre de culte et de spiritualité bien fréquenté par les fidèles, malgré les injustes restrictions idéologiques.
Sur un terrain de 30 mille mètres carrés, s’étend un complexe architectural grandiose avec plusieurs grottes et chapelles, dont le joyau de la cathédrale. Des millions de tonnes de bois (y compris du bois de fer pour les cinquante colonnes de la nef), de marbre et de granite furent acheminées à la force des bras des fidèles. Le retable, riche de sculptures raffinées, est présidé par un tableau de la Vierge, Reine du rosaire, muni d’une couronne et entouré d’anges. Dans les jardins, une gracieuse Vierge à l’Enfant montre la Mère de Dieu dans le vêtement traditionnel vietnamien, l’ao-dai. L’ensemble (terminé en 1899) marie les styles orientaux et occidentaux, selon un juste équilibre.
« le Rosaire, en tant que méditation sur le Christ avec Marie, est une contemplation salutaire » (Jean Paul II)
Notre Dame inspire et accueille la prière du rosaire. Beaucoup d’Ave Maria sont peu de chose par rapport aux prévenances qui lui accorde la Trinité. D’ailleurs le centre de gravité des formules se trouve au plus haut du ciel, par la prière du Seigneur et la glorification des Trois Personnes divines ; la mention de Marie, vingt fois dans chaque dizaine, s’ajoute harmonieusement à ces noms chéris, comme une mélodie filiale, un rondeau reconnaissant.
Notre Dame inspire et accueille la prière du rosaire
Malgré les temps durs, à cause des assauts du diable et des atrocités humaines, l’intercession mariale nous entoure comme un bouclier pour redonner l’espérance ou un flambeau pour forger la foi de nos frères. « Si la liturgie, action du Christ et de l'Église, est l'action salvifique par excellence, le Rosaire, en tant que méditation sur le Christ avec Marie, est une contemplation salutaire » (Jean-Paul II, lettre Le rosaire de la Vierge Marie §13). Ainsi le chrétien se rapproche de son divin modèle à travers le regard pénétrant de sa Mère. Elle, qui a vécu en contemplant son Fils, nous apprend à vivre de la sorte. Avec la fraîcheur d’un cœur passionné, « Marie retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur » (Lc 2, 19 et 51).
La simplicité du rosaire fait mûrir et vaincre.
En une fête du Rosaire, Jean-Paul II s’adressa aux pèlerins venus à Rome pour la canonisation de saint Josémaria, en rappelant à propos de celui-ci : « Il écrivit un bel opuscule intitulé Le Saint Rosaire, qui s'inspire de l'enfance spirituelle, disposition d'esprit propre à ceux qui veulent parvenir à un abandon total à la volonté divine ». La simplicité du rosaire fait mûrir et vaincre. L’auteur dévoilait son épaisseur contemplative : le rosaire « représente un continuel acte de foi, d’espérance et d’amour, d’adoration et de réparation ».
