Un jubilé peut en cacher un autre
Un jubilé, parfois, peut en cacher un autre : l’année sainte, annoncée pour 2025, est précédée, avec délicatesse céleste, par le jubilé en l’honneur du Sacré Cœur, fêté à Paray-le-Monial. Dans le 350e anniversaire des révélations à Sainte Marguerite-Marie, il vient d’être mis en valeur par l’encyclique du pape François : Il nous a aimé (24/10/2024).
Le Sauveur aime sans conditions, en premier, sans limites. La dévotion au Sacré-Cœur est « une synthèse de l’Évangile », rappelle le pape avec des paroles de Pie XII (ibid. §83). La visitandine bourguignonne a légué à l’Église entière un patrimoine fécond de foi et de piété, qui s’est développé avec vigueur.
Depuis Saint Augustin et de nombreux autres mystiques, le regard sur l’initiative amoureuse du Christ n’a cessé de grandir. « Le Père des cieux livre son Fils à la mort pour le rachat du genre humain » (Bible de Saint Louis, t. 3, f. 36 : © Moleiro, 2002). Dans un luxe de piété, l’enluminure parisienne montre Dieu le Père, tout proche du Transpercé, en train de caresser son corps. Le Père compatit, assiste, remercie. Une caresse divine est une bénédiction irréversible, qui se prolonge en faveur des bénéficiaires de la Passion.
« L’Esprit Saint, lien d’amour entre le Père et le Fils, trouve dans le Verbe un Cœur humain » (saint Josémaria)
« Dans le Cœur transpercé du Christ se concentrent, inscrites dans la chair, toutes les expressions d’amour des Écritures » (pape François, ibid. §101). Le cœur humain est le destinataire de la révélation, le vase porteur du salut ; « les entrailles de miséricorde » (Luc 1, 78) expriment bien la vigueur du « Cœur » de Dieu ; dans le Cœur du Verbe incarné, dans son Âme indéfectiblement sainte, la Trinité vibre de tous ses feux : « L’Esprit Saint, lien d’amour entre le Père et le Fils, trouve dans le Verbe un Cœur humain » (saint Josémaria, Quand le Christ passe §169).
Devant une culture sans cœur, qui devient inhumaine, le chrétien apporte, par le Cœur Saint de Jésus, un souffle de renouveau.
Le Sauveur « est en mesure de donner du cœur à cette terre et de réinventer l’amour, là où nous pensons que la capacité d’aimer est définitivement morte » (pape François, ibid. §218). Devant une culture sans cœur, qui devient inhumaine, le chrétien apporte, par le Cœur Saint de Jésus, un souffle de renouveau. Le Cœur humain du Fils, « chef d’œuvre de l’Esprit-Saint », selon la formule de saint Jean-Paul II, prononce l’Amen à l’Amour, fonde la civilisation de la bienveillance, plus forte que tous les égoïsmes et violences qui ruinent le monde.
Le Sacré-Cœur console et fortifie afin d’étendre autour de nous son Royaume amoureux. « De son saint Cœur jaillissent ces fleuves d’eau vive qui guérissent les blessures que nous nous infligeons, qui renforcent notre capacité d’aimer et de servir, qui nous poussent à apprendre à marcher ensemble vers un monde juste, solidaire et fraternel. (pape François, ibid. §220).
Le Saint Esprit éveille chez les fidèles l’esprit de réparation pour le mal, en suivant les traces du Rédempteur, qui porte sur lui le péché du monde pour l’effacer. « Puisque le Seigneur tout-puissant, dans sa liberté divine, a voulu avoir besoin de nous, la réparation se comprend comme une libération des obstacles que nous mettons à l’expansion de son amour dans le monde, par notre manque de confiance, de gratitude et de don de soi » (pape François, ibid. §194).
« J’ai attendu des consolateurs, et je n’en ai pas trouvé » (Psaume 68 21). Jésus a été transpercé à notre place. La blessure, qu’il a fait toucher après Pâques, devient garantie de salut, refuge dans la lutte, source intarissable, exemple intégral. « La blessure visible dévoile la blessure invisible d’amour » (Saint Bonaventure, La Vigne mystique 3, 10). Le Cœur grand ouvert est une épiphanie de la miséricorde.
« Tu as blessé mon cœur » (Cantique 4, 9). Jésus montre à l’Église et à chaque fidèle, comme il le fit avec Thomas, la poitrine ouverte (Bible de Saint Louis, t. 2, f. 79). Ce sacrifice généreux rassure et stimule ; guide notre mission chrétienne et garantit les fruits de nos efforts.
La tendresse divine est irrésistible : dans la première manifestation du Sacré-Cœur (1673), la sainte fut invitée à reposer la tête sur la poitrine déchirée, avec la même confiance qu'avait montrée l’aigle des évangélistes (Jean 13, 23). Nous osons le faire aussi, pour éprouver cette proximité intime au quotidien (pape François, ibid. §81), qui nous rapproche de sa miséricorde inépuisable.