Opus Dei une croisade silencieuse

Le mercredi 10 février, à 22h20, La Une (RTBF) a diffusé le reportage « Opus Dei, une croisade silencieuse » de Jean de Certeau et Marcela Said. Elle avait fait de même le 26 mai 2006. Nous reproduisons ici la réaction du bureau d’information de la Prélature de l’Opus Dei en Belgique de l’époque :

Le vendredi 26 mai, la RTBF a retransmis un reportage intitulé « Opus Dei, une croisade silencieuse ».

Cinquante minutes de reportage sur fond de musique sinistre ont tenté de nous imposer l’image d’un Opus Dei secret, élitiste, de droite, riche et influent, lié au régime du dictateur Pinochet.

Commençons par ce dernier point. Sur les milliers de membres et de coopérateurs que compte l’Opus Dei au Chili, les journalistes en ont identifié trois ou quatre qui, d’une manière ou d’une autre, auraient eu, selon eux, un lien avec le général Pinochet. Cela suffit pour associer définitivement toute l’institution catholique à la dictature. Cette thèse est d’autant moins crédible qu’aucune des personnes incriminées n’est interviewée, sauf une —Joaquín Lavín, candidat aux élections présidentielles—, à qui on ne pose aucune question sur ce sujet. Sur le problème du lien passé ou présent de ces personnes avec le régime chilien, le spectateur est donc livré aux dires des réalisateurs du programme. La seule personne qui manifeste son admiration pour le dictateur est une journaliste interrogée au milieu d’une foule qui sort d’une conférence au IESE de Madrid. Ici, il est suggéré —mais non vérifié— que cette personne serait de l’Opus Dei.

Autre « preuve » du lien de l’Opus Dei avec le régime militaire : le fondateur de l’Opus Dei terminait ses réunions publiques au Chili par une prière pour les autorités du pays... Les réalisateurs du documentaire oublient de dire que Saint Josémaria a toujours eu cette coutume, dans tous les pays qu’il visitait. Par ailleurs, tous les prêtres du monde prient régulièrement pour les autorités locales, notamment dans la messe dominicale, sans qu’on puisse les soupçonner pour autant de connivence avec la politique de leur gouvernement.

L’élitisme de l’Opus Dei est un axiome de départ dans l’émission. Si l’on nous montre l’école technique Nocedal, c’est pour la présenter comme « vitrine sociale » de l’Opus Dei : en d’autres mots, au Chili, l’Opus Dei ne s’occupe des pauvres que pour soigner son image de marque ou, pire encore, pour maintenir les pauvres dans leur condition. Ce genre de considérations s’apparente au procès d’intention. Elles relèvent aussi de l’insulte pour les milliers de fidèles de la Prélature à travers le monde qui sont engagés dans des centaines de projets au profit des plus défavorisés.

Les numéraires auxiliaires, qui suivent une formation professionnelle dans le domaine de l’hôtellerie et qui assurent notamment l’intendance des centres de l’Opus Dei, sont présentées comme des esclaves. Le secteur hôtelier serait-il indigne de la personne humaine ? Ce genre de vision dit davantage sur les conceptions de ceux qui les profèrent que sur la situation des personnes qui exercent les professions du secteur du service. Elle méconnaît l’idéal du Christ lui-même qui n’est pas venu pour être servi, mais pour servir (cfr Mt 20, 28).

Le reportage ignore, par ailleurs, que les femmes dans l’Opus Dei exercent des activités professionnelles dans les secteurs les plus divers et qu’elle participent, au même titre que les hommes, au gouvernement de la Prélature, même au niveau central.

La thèse de l’Opus Dei secret ne colle pas très bien, il faut l’avouer, avec les images tournées jusque dans les chambres des numéraires et les foyers des fidèles mariés de l’Opus Dei.

Au-delà de ces manipulations, il faut regretter aussi le manque de rigueur des auteurs du reportage. Ils reviennent par exemple sans arrêt sur les « vœux » prononcés par les membres : s’il y a bien un point central dans la spiritualité de l’Opus Dei —que tout observateur sérieux connaît— c’est la sécularité, qui ne s’accommode pas de la formule des « vœux », propre des religieux. Passons sur le fait qu’après ce reportage, il faut réécrire l’histoire d’Espagne et situer le début de la guerre civile en 1928.

Plus regrettables encore sont les citations totalement fausses qui ponctuent l’émission, ainsi que les manipulations du livre « Chemin ». Quand on met dans la bouche de Saint Josémaria qu’une femme ne devient sainte qu’à partir de son 8ème enfant, on aimerait connaître la source d’une telle affirmation. Idem pour la thèse attribuée au fondateur de l’IESE, selon qui le capitalisme aurait été révélé par Dieu. Un Dieu qui n’a pas donné aux hommes dix commandements, mais dix « amendements », toujours selon le reportage…

Enfin, on ne peut accepter la manipulation d’enfants mineurs d’âge, interviewés en l’absence de leurs parents, pour enregistrer des déclarations qu’aucune chaîne de télévision ou média sérieux n’oserait utiliser.

Restons en là, pour ne pas allonger la liste des manquements d’un reportage qui fut navrant de parti pris et de légèreté.

 

Abbé Stéphane Seminckx

Directeur du Bureau d’Information de la Prélature de l’Opus Dei en Belgique