Le culte des défunts

Le 2 novembre est le jour que l'Église universelle consacre aux défunts qui se trouvent au purgatoire. Mais en a-t-il toujours été ainsi ?

Rome. Catacombes de Priscille – Les trois enfants dans la fournaise

Un mystère non élucidé

Des ossements de près de 4000 corps soigneusement rangés les uns sur les autres. Ce fut la découverte faite il y a cinq ans dans des salles annexes aux catacombes des saints Pierre et Marcellin au sud est de Rome. L’enquête en cours n’a pu encore révéler la cause du décès de ces jeunes adultes pour la plupart, inhumés ensemble et à la hâte, et qui ne semblent pas être des martyrs. Les cavités funéraires se trouvent  derrière un mur recouvert d’une fresque « aux auréoles », auquel est adossé un autel destiné au culte des pèlerins. Ces dépouilles ont fait l’objet de suffrages élevés à leur intention.

Nos amies, les âmes bénies du purgatoire

Cet exemple est une illustration de la tradition immémoriale de l’Eglise qui, telle une bonne mère, demande de prier pour ses enfants défunts. L’épigraphie, comme l’iconographie funéraire, est instructive à cet égard. Sur deux tombes du milieu du deuxième siècle, on peut lire, sur l’une, l’inscription Orate pro me, peccatore, « Priez pour moi, pécheur », et sur l’autre Qui legis, ora pro eo, « Toi qui lis, prie pour lui ». Et, parmi les fresques retrouvées sur les murs des catacombes, il en est qui représentent Daniel dans la fosse aux lions, les Hébreux passant la Mer rouge, David terrassant Goliath, les trois enfants dans la fournaise …, autant de scènes bibliques qui ne dépeignent pas la béatitude des élus du ciel, mais donnent plutôt à penser que la victoire des défunts n’est pas complètement acquise. 

Rome. Catacombes de Priscille – Les trois enfants dans la fournaise

Aussi l'Église, en ce mois de novembre qui leur est dédié, nous sollicite-t-elle pour que nous apportions par nos mérites un concours décisif aux âmes du purgatoire. Elles sont en transit dans cet état intermédiaire entre ciel et terre où elles souffrent, heureuses et amoureuses, pour apprendre à aimer vrai et se purifier des séquelles laissées dans leur personnalité par les péchés qu’elles ont contractés par le passé.

Dans la communion de toute l’Eglise, …

Les Pères de Vatican II le rappelaient, l’union des pèlerins à ceux qui se sont endormis dans la paix – la visite traditionnelle des tombes de ses proches autour de la Toussaint en est l’occasion privilégiée – se fortifie par la communication de biens spirituels : l’offrande du sacrifice du Christ renouvelé dans la sainte messe, le travail sanctifié et converti en prière, les indulgences « gagnées » pour leur entrée dans la joie du ciel… Mais cette union est à double sens et les visiteurs en tirent parti ; car le silence de ces lieux est en mesure de raviver leur propre identité religieuse ; il leur suggère ce sentiment de solidarité indissolublement lié à la foi et à l'espérance. D’ailleurs , la définition même de coemeteria, «dortoirs», indique que les cimetières (chrétiens) sont de véritables lieux de repos communautaires, où tous nos frères dans le Christ, indépendamment de leur rang et de leur profession, reposent dans une vaste étreinte solidaire, dans l'attente de la résurrection de la chair. 

Rome. Catacombes des Saints-Marcellin-et-Pierre – Jonas est recraché par la baleine

C'est pourquoi, dans l’Antiquité chrétienne, les catacombes n'étaient pas des lieux tristes : elles étaient décorées de fresques, de mosaïques et de sculptures, comme pour égayer leurs méandres obscurs et anticiper par des images de fleurs, d'oiseaux et d'arbres la vision du paradis attendu à la fin des temps.

 … Nous voulons nommer en premier lieu la bienheureuse Marie toujours Vierge

Le recueillement auquel nous invite la visite des tombes chrétiennes est un face à face dans la foi, anticipation de la vision béatifique, source de confiance en la miséricorde de Dieu, et d’audace pour notre mission apostolique. Saint Josémaria l’exprimait peu de temps après son arrivée à Rome en 1946 :Comme les premiers fidèles dans la quiétude des catacombes romaines, nous pouvons nous écrier : « Dominus illuminatio mea et salus mea, quem timebo ? (Ps 26, 1) : le Seigneur est ma lumière et mon salut, de qui aurais-je crainte » ? Ce n’est qu’ainsi qu’il est possible d’expliquer les hauts faits, l’héroïsme de ces premiers chrétiens. Assurés de l’aide de Dieu, sans faire de choses bizarres, ils se sont glissés partout : au forum, dans les palais, voire même chez l’empereur !

Nous contemplons en Marie ce qu’est l'Église dans son pèlerinage de la foi, et ce qu’elle sera dans la patrie, au terme de sa marche : en attendant la venue du jour du Seigneur, elle brille déjà devant nos yeux, défunts et vifs, comme un signe d’espérance assurée et de consolation (cf. CEC 972).