STATUTS DE L'OPUS DEI

1. Les statuts des prélatures personnelles 2. Contenu des Statuts de la Prélature de l'Opus Dei. 3 Le droit particulier de la Prélature de l'Opus Dei : brève note historique.

1. Les statuts des prélatures personnelles
2. Contenu des Statuts de la Prélature de l'Opus Dei.
3 Le droit particulier de la Prélature de l'Opus Dei : brève note historique.

Les statuts de l'Opus Dei (Statuta Operis Dei ou Codex iuris particularis seu Statuta Prælaturæ Sanctæ Crucis et Operis Dei) sont les normes particulières régissant la Prélature, données par le Siège Apostolique lors de son érection en 1982.

1. Les statuts des prélatures personnelles

Les canons 294-297 duCodex Iuris Canonici (CIC) condensent quelques éléments de base du régime général des prélatures personnelles, régime complété sous divers aspects ‒ par comparaison expresse du législateur ou par analogie (cf. c. 19) ‒ par l'application de normes du Codeapplicables à des cas similaires (pour d'autres circonscriptions, en particulier les diocèses), de dispositions ne faisant pas partie du code ainsi que d'autres critères établis par la praxis.

Parmi ces dispositions générales, le canon 295 § 1 établit que « la prélature personnelle est régie par des statuts donnés par le Siège apostolique », confirmant ainsi la conception de ce mode d'organisation comme instrument conçu pour assurer des missions pastorales particulières, variables selon les circonstances, les destinataires, les besoins, etc. C'est précisément à travers les statuts que lelégislateur, sans nullement modifier la structure propre à une prélature, peut réglementer spécifiquement les caractéristiques les plus appropriées pour chaque prélature personnelle qu'il érige.

Pour préciser la nature juridique de ces « statuts donnés par le Siège apostolique », il faut rappeler que, selon le canon 94 § 1, les statuts au sens propre sont les dispositions établies par les organes de direction des corporations et des fondations pour régler leur organisation et leur fonctionnement. Par conséquent, le terme « statuts » s'applique à juste titre aux normes découlant de l'autonomie normative de ces entités, qui élaborent leur propre régime juridique interne dans le cadre du droit.

Parfois, cependant, l'auteur des normes régissant l'organisation et l'activité de certaines entités ecclésiastiques est le législateur lui-même. Le canon 94 § 3 dispose qu’alors « les dispositions statutaires établies et promulguées en vertu du pouvoir législatif sont régies par les prescriptions des canons qui concernent les lois ».En effet, bien que le contenu et la fonction de ces normes soient analogues à ceux qui caractérisent les statuts au sens propre ‒ d’où leur dénomination ‒ leur nature est proprement législative, puisqu'elles découlent d'un acte de pouvoir du législateur canonique.

À ce type appartiennent les statuts émis par le Siège Apostolique pour les prélatures personnelles ou pour d'autres circonscriptions ecclésiastiques. Il s'agit de lois particulières qui complètent le régime juridique général par des normes adaptées aux exigences et aux caractéristiques particulières de la circonscription en question, compte tenu de sa mission propre. Ces éléments particuliers, plus que des exceptions aux normes communes, sont des précisions, des déterminations et des développements du régime de base du droit universel, établis par droit pontifical particulier.

2. Contenu des statuts de la prélature de l'Opus Dei

Les statuts donnés par le Siège Apostolique à la Prélature de l'Opus Dei, appelés aussi Codex iuris particularis seu Statuta Prælaturæ Sanctæ Crucis et Operis Dei (cf. Jean-Paul II, Const. ap. Ut sit II), comportent 185 numéros, répartis en 5 titres.

Le premier chapitre du Titre I décrit l'Opus Dei comme une prélature personnelle d'envergure internationale, composée de clercs et de laïcs, érigée pour réaliser une œuvre pastorale particulière en liaison intime avec le sacerdoce ministériel des uns et le sacerdoce commun des autres, sous le régime de gouvernement du prélat (nos 1 et 4). Les clercs, promus au sacrement de l'ordre parmi les laïcs de la prélature et incardinés dans celle-ci, forment le presbyterium de la prélature. Les fidèles laïcs de la prélature sont ceux qui, mus par une vocation divine, s‘y incorporent par un lien juridique spécifique (no 1 § 2). Après avoir énuméré les normes juridiques qui régissent la prélature (no 1 § 3), les statuts énoncent sa mission propre et décrivent brièvement les moyens surnaturels et l'esprit avec lequel elle doit être développée (nos 2, 3 et 5). Les autres chapitres du Titre I traitent de manière plus détaillée de l'incorporation des fidèles dans la prélature et de leur éventuel départ de celle-ci.

Le Titre II, divisé en trois chapitres, est consacré au presbyterium de la prélature et à la Société sacerdotalede la Sainte-Croix, association de clercs propre à la prélature et inséparable de celle-ci. Du fait même de leur incardination, les clercs de la prélature appartiennent aussi à la Société sacerdotale. Peuvent également en faire partie les clercs séculiers incardinés dans d'autres circonscriptions ecclésiastiques ; ils ne s’incorporent pas pour autant au presbyterium de la prélature ni ne s’associent à ses propres tâches pastorales dans la mesure où cette affiliation à une association de clercs relève de la sphère de la liberté personnelle des clercs en ce qui concerne leur vie spirituelle (cf. c. 214 et 278). Leur affiliation ne modifie en rien leur condition de prêtres diocésains, ni leur dépendance ministérielle exclusive vis-à-vis de leurs évêques respectifs (nos 42-43 et 57-78). Quant aux clercs de la prélature, ils proviennent uniquement des fidèles laïcs, précédemment incorporés à celle-ci, qui reçoivent la formation prescrite et sont promus aux ordres sacrés pour être incardinés dans la prélature et réaliser leur ministère au service de sa mission pastorale (nos 36-41 et 44-56).

Le Titre III traite, en trois chapitres denses (nos 79-124), de la vie, de la formation et de l'apostolat des fidèles de la prélature. Le numéro 79 § 1 y introduit en affirmant que l'esprit et la praxis ascétique de la prélature possèdent des caractéristiques spécifiques, bien déterminées, en vue d’assurer sa finalité propre. Les numéros suivants détaillent quelques-unes de ces caractéristiques fondamentales, harmonieusement intégrées dans une unité de vie qui pousse à assumer pleinement la dignité et les exigences de la condition chrétienne dans toutes les facettes de la vie ordinaire, vie spirituelle, familiale, professionnelle et sociale, en les considérant comme sphère et matière de sanctification et d'apostolat dans un esprit pleinement séculier.

Le titre IV contient, dans ses cinq chapitres (nos 125-180), les dispositions fondamentales sur le gouvernement de la prélature et sur les offices et organismes qui l'exercent en coopérant à la fonction de gouvernement du prélat et sous sa juridiction, aux différents niveaux d'organisation (central, régional et local). Il traite également des assemblées régionales et des relations de la prélature avec les évêques diocésains dans les diocèses dans lesquels s'exerce sa mission. Ce dernier chapitre contient les principales normes pratiques de coordination entre la juridiction territoriale des évêques, aux diocèses desquels appartiennent les fidèles de la prélature selon les normes canoniques communes, ainsi que les autres fidèles qui participent à ses activités apostoliques, et la juridiction personnelle du prélat, limitée à la mission propre de la prélature telle que déterminée dans les statuts.

Enfin, le titre V a trait à la stabilité et à la fermeté juridique des normes contenues dans le Codex iuris particularis seu Statuta Prælaturæ Sanctæ Crucis et Operis Dei. Les garanties particulières qui renforcent juridiquement la stabilité de ce Codex iuris particularis s'expliquent par le fait que son contenu ne se limite pas à des normes techniques ou pratiques sur l'organisation et l'activité de la prélature, mais manifeste une présence significative d'éléments spirituels, théologiques – théologaux si l’on préfère ‒ qui décrivent sans équivoque une physionomie spirituelle bien déterminée.

3. Le droit particulier de la prélature de l'Opus Dei : un bref aperçu historique

Dès les premiers pas qu'il a dû faire en vue de la configuration juridique de l'Opus Dei, saint Josémaria a fait preuve d’une conscience aiguë de sa responsabilité de garder fidèlement le charisme qu'il avait reçu, en évitant qu'il ne soit dénaturé par sa reconnaissance en recourant à des figures canoniques disponibles à l'époque, toujours plus ou moins inadéquates, mais adoptées, car viableset suffisantes pour résoudre momentanément les besoins du développement de l'Œuvre.

À cette fin, et dès la première approbation diocésaine accordée par l'évêque de Madrid en 1941, le fondateur présenta un bref Règlement accompagné de cinq documents complémentaires (Régime, Ordre, Coutumes, Esprit et Cérémonial),décrivant la physionomie de la réalité qui recevait alors sa première configuration canonique comme Union pieuse (cf. IJC, p. 91).

Dans les étapes successives du parcours juridique ainsi entamé, il a également fait en sorte que l'identité substantielle du phénomène spirituel et apostolique soit affirmée sans équivoque, soit dans le texte des normes sanctionnées par l'autorité compétente, soit dans des documents officiels complémentaires. Dans une de ses lettres, il écrit à ce sujet : « Je me suis senti poussé à préciser notre droit particulier, afin que ce qui, dans le droit général, pourrait un jour être interprété d'une manière étrangère aux caractéristiques de notre vocation, soit clairement sanctionné dans le droit particulier et conformément aux traits essentiels de notre chemin » (Lettre 25 janvier 1961, n° 22 : IJC, p. 97).

Dans cette optique, le ius peculiare établi par le fondateur, comme fruit du discernement entre ce qu’exigeait le charisme reçu et ce qui, au contraire, le défigurait ou était incompatible avec lui, en plus de contenir des normes juridiques qui fixaient certaines facettes de la réalité fondatrice, affirmait des éléments fondamentaux de l'esprit et explicitait divers aspects essentiels de la vocation à la sainteté au milieu du monde.

Ainsi, dans les étapes successives vers une configuration juridique appropriée à la réalité d'origine divine qui se développait (cf. Jean-Paul II, Const. ap. Ut sit,Prœmio), le ius peculiare remplissait une fonction de sauvegarde du charisme, en fournissant les clés d'interprétation et d'application de la législation propre à des figures juridiques qui n'étaient pas aptes en elles-mêmes à l'accueillir et à lui donnerun cadre conforme à sa nature propre. Et, comme le fondateur le configurait avec « la grave responsabilité de faire en sorte que ce nouveau phénomène s'inscrive dans les normes de notre droit particulier selon la volonté du Seigneur » (Lettre 25 janvier 1961, n° 28 : CMI, p. 98, n. 30), il servait à la fois de point de référence et de support pour avancer progressivement vers une configuration juridique pleinement adéquate.

À partir d'un certain moment, saint Josémaria a considéré que l'effort pour exprimer les traits essentiels de la nature de l'Opus Dei dans le droit particulier avait été substantiellement atteint, même s'il fallait encore le traduire dans une configuration juridique pleinement conforme à sa nature spirituelle et apostolique. Dans une de ses lettres, il allait affirmer que « l'Œuvre ayant été définie et approuvée [par l'approbation pontificale définitive de 1950], son droit particulier était en parfaite harmonie avec l'essence de notre chemin, sauf les choses que j'ai dû admettre, propres à l'état de perfection, pour les supprimer quand Dieu nous en donnerait l’occasion » (Lettre 25 janvier 1961, no 42 : IJC, p. 97).

Après le Concile Vatican II, le fondateur de l'Opus Dei a convoqué, avec le consentement du Saint-Siège, un Congrès général spécial qui, une fois sa phase plénière terminée, s'est poursuivi sous forme de commissions techniques. La commission chargée des aspects canoniques, a entrepris sous la direction du fondateur de réviser le Codex Iuris Peculiaris selon lesdirectives émanant du Congrès Général, en vue de la configuration juridique définitive.

Outre des améliorations systématiques et rédactionnelles, la Commission a prévu pour l'avenir la suppression par l'autorité compétente des éléments étrangers à la nature de l'Opus Dei mais intégrés dans le ius peculiare en raison des exigences des configurations juridiques antérieures. En 1974, saint Josémaria a mis la dernière main au texte préparé qu'il a approuvé le 1er octobre 1974, en indiquant qu'il devait s'appeler Codex iuris particularis, pour le distinguer du Codex de 1963. Ce changement de nom montrait également que la configuration juridique précédente, inadéquate, était définitivement abandonnée, car en droit canonique l'expression « droit particulier » se réfère à l'ensemble des normes ayant pour destinataires les fidèles d'une circonscription ecclésiastique.

Lorsque le Siège Apostolique a érigél'Opus Dei en prélature personnelle, en 1982, les statuts remis par le législateur à la prélature retranscrirent fidèlement le texte du Codex de 1974, avec quelques ajustements indispensables pour refléter la nature de la nouvelle configuration juridique. Cette procédure utilisée par le législateur, en adoptant et en sanctionnant comme statuts de la circonscription nouvellement érigée le texte que le fondateur avait préparé, a permis, par le biais du droit pontifical particulier, de parfaire l'adaptation des caractéristiques générales de la figure de la prélature personnelle à la réalité spirituelle, pastorale et apostolique de l'Opus Dei (cf. Jean-Paul II II, Const. ap. Ut sit Prœmio).


Thèmes connexes : Description générale de l'Opus Dei (voir Introduction) ; Itinéraire juridique de l'Opus Dei ; Prélatures personnelles.

Bibliographie : IJC, en particulier pp. 454 et suivante (contient en annexe le texte latin officiel des Statuts, p. 628 et suivantes ; également dans OIG, p. 309-346) ; Valentín Gómez-Iglesias – Antonio Viana – Jorge Miras, El Opus Dei, Prelatura Personal. La Constitución Apostólica “Ut Sit”, Pamplona, Navarra Gráfica Ediciones, 2000, p. 57-95 ; Antonio Viana, “Contenidos del derecho particular del Opus Dei », Ius Canonicum, 39 (1999), p. 85-122.

Jorge Miras