FIDÈLES DE L’OPUS DEI

1. Unité de vocation et diversité de situations et de fonctions. 2. Numéraires, Agrégés, Surnuméraires. 3. Hommes et femmes. 4. Prêtres et laïcs. 5. Incorporation dans l’Opus Dei.

1. Unité de vocation et diversité de situations et de fonctions. 
2. Numéraires, Agrégés, Surnuméraires. 
3. Hommes et femmes. 
4. Prêtres et laïcs. 
5. Incorporation dans l’Opus Dei. 

À partir du 2 octobre 1928, saint Josémaria consacra sa vie et ses efforts à mettre en œuvre ce que Dieu lui avait fait voir ce jour-là. Il devait proclamer par sa vie et sa parole que le travail, la vie ordinaire des fidèles chrétiens, était un chemin de sainteté. Le message transmis par Dieu impliquait chez le fondateur « en même temps, et inséparablement, un appel, une mission : Dieu voulait que [saint Josémaria] consacre toutes ses énergies à la promotion d’une institution – une Œuvre, pour reprendre le terme qu’il a employé dès le début – dont le but est de répandre parmi les chrétiens vivant dans le monde une conscience profonde de l’appel que Dieu leur a adressé au moment même de leur Baptême. En outre, une Œuvre qui s’identifie au phénomène pastoral qu’elle promeut, formée par des chrétiens ordinaires qui, en découvrant ce qu’implique la vocation chrétienne, s’engagent sur cet appel et s’efforcent ensuite de communiquer cette découverte aux autres, répandant ainsi dans le monde entier la conscience que la foi peut et doit vivifier l’existence humaine de l’intérieur, avec toutes les réalités qui la composent : premièrement les exigences du travail professionnel lui-même et, en général, la vie familiale et sociale, l’engagement scientifique et culturel, la coexistence civique, les relations professionnelles ... » (IJC, p. 27).

Par conséquent, l’Opus Dei ne devait pas seulement être un porte-voix de ce message au monde, mais aussi constituer une manière pratique et spécifique d’incarner l’appel à la sainteté dans la vie ordinaire des fidèles chrétiens, qui, sans changer de place, d’état, sans quitter l’endroit où Dieu les a placés, en utilisant une spiritualité séculière, cherchent à être contemplatifs au milieu du monde. L’Opus Dei est un instrument que le Seigneur a voulu utiliser, écrit saint Josémaria, « pour que tous les chrétiens puissent découvrir (...) la valeur sanctificatrice et sanctifiante de la vie ordinaire – du travail professionnel – et l’efficacité de l’apostolat de la doctrine par l’exemple, l’amitié et la confidence » (Lettre 9-I-1932, no 91 : AVP, I, p. 568).

L’ampleur de la portée de ce message, qui anticipait la proclamation de l’appel universel à la sainteté faite par le Concile Vatican II, signifiait que les personnes qui recevraient la vocation de membres de l’Opus Dei viendraient des types les plus divers de personnes qui composent la société humaine : hommes et femmes, célibataires, mariés, veufs, jeunes et vieux, pauvres et riches, intellectuels et ouvriers, etc. Parmi ses membres, il devrait également y avoir des clercs séculiers et des laïcs. C’est pourquoi, au fil des ans, saint Josémaria allait affirmer avec certitude, comme on le trouve dans l’une de ses lettres, que dans l’Opus Dei « toute la société d’aujourd’hui est présente, et le sera toujours : intellectuels et hommes d’affaires ; professionnels et artisans ; entrepreneurs et ouvriers ; personnes de la diplomatie, du commerce, de l’agriculture, de la finance et des lettres ; journalistes, hommes de théâtre, du cinéma et du cirque, sportifs. Jeunes et vieux. En bonne santé et malades ». Et il concluait : l’Œuvre est « une organisation désorganisée, comme la vie elle-même, merveilleuse » (Lettre 9-I-1959, no 11 :Ocáriz, « La vocation à l’Opus Dei comme vocation dans l’Église », dans OIG, p. 181).

1. Unité de vocation et diversité de situations et de fonctions

Cet article cherche à traiter des fidèles de l’Opus Dei en tant que tels, en décrivant leur vocation à rechercher la sainteté au milieu du monde, leur relation de communion avec le Prélat et les autres fidèles, leur condition de chrétiens ordinaires qui ne changent pas de position dans les diocèses auxquels ils appartiennent et où ils doivent accomplir un apostolat intense. Dans le même temps, on décrira leurs différentes situations et fonctions. Tout d’abord, il faut s’attarder sur ce qui les unit : la même vocation. Comme l’a dit le fondateur : « Je vous ai toujours affirmé que dans l’Œuvre il n’y a qu’une seule et unique vocation (...). Une seule vocation divine, un seul phénomène spirituel, qui s’adapte avec souplesse aux conditions personnelles de chaque individu et à son propre état. L’identité de la vocation implique une égalité de don de soi dans les limites naturelles imposées par ces diverses conditions » (Lettre 24-XII-1951, no 137 : AVP, III, p. 157, nt. 164).

Cette unité de vocation implique qu’il n’y a pas de membres de diverses catégories ou classes dans l’Œuvre, certains supérieurs aux autres, puisque tous sont également fidèles de l’Opus Dei et dans une telle condition il n’y a pas un plus ou un moins, tout comme dans les diocèses il n’y a pas de fidèles qui sont plus fidèles du diocèse que d’autres. Le phénomène vocationnel est identique chez tous, ce qui signifie que la vocation a la même exigence pour tous puisque chacun fait l’objet du même appel à atteindre la sainteté dans sa vie ordinaire selon l’esprit de l’Opus Dei. Les moyens de sanctification sont les mêmes, le droit de recevoir la formation est identique, et le devoir de l’Œuvre de pourvoir à un tel droit a la même force et la même force exécutoire à l’égard de tous ses membres. Le don de soi est le même pour tous « plein, perpétuel et définitif » (Statuta, 87 § 1). Tous « participent pleinement à l’apostolat particulier » de l’Œuvre. Tous sont « prêts à rechercher avec détermination leur sanctification par leur propre travail ou profession, sans changer leur état canonique » et prêts à « exercer de toute leur force l’apostolat conformément aux fins et aux moyens propres à l’Opus Dei » (Statuta, 18). La condition de membre de l’Œuvre ne change pas la position de ces fidèles devant l’Église et la société civile : sauf dans le cas du clergé incardiné dans la Prélature, les fidèles de l’Opus Dei sont ce qu’ils étaient déjà, des fidèles ordinaires. Il y a seulement en plus le fait d’avoir découvert être appelé par Dieu à se sanctifier dans le monde selon l’esprit de l’Œuvre qui ne sort personne de sa place dans la société et dans l’Église. Pour cette raison, les fidèles laïcs incorporés dans la Prélature restent pleinement des fidèles des diocèses dans lesquels ils résident. Les membres du clergé incardinés à la Prélature (ceux-ci ont changé de statut, car, comme nous le verrons plus loin, ils étaient auparavant laïcs de la Prélature) sont dans les diocèses fondamentalement comme les autres clercs séculiers qui résident en dehors du diocèse d’incardination.

Les Statuts de la Prélature de l’Opus Dei sont très clairs à cet égard : tous les fidèles qui rejoignent la Prélature le font animés par la même vocation divine : ils se proposent tous la même fin apostolique, ils vivent un seul esprit et une praxis ascétique identique (cf. Statuta, 6) et tous sont unis à celui qui est à la tête de l’Œuvre : le Prélat qui gouverne selon le droit en tout ce qui concerne la nature et les fins de l’Opus Dei.

2. Numéraires, Agrégés et Surnuméraires

Restant sauve l’unité de la vocation, on distingue parmi les fidèles les Numéraires, les Agrégés et les Surnuméraires (ajout du traducteur : hommes et femmes). On les décrit ainsi dans les Statuts de la Prélature (cf. Statuta, 8-11) :

a) Les Numéraires sont les fidèles qui, dans le célibat apostolique, ont une disponibilité personnelle maximale pour les travaux apostoliques propres à la Prélature ; ils peuvent résider dans le siège des Centres de la Prélature pour s’occuper de ces tâches apostoliques et de la formation des autres membres de l’Opus Dei.

b) Les Agrégés sont les fidèles qui, dans le célibat apostolique, doivent répondre à des besoins concrets et permanents de nature personnelle, familiale ou professionnelle qui les conduisent d’ordinaire à vivre avec leur propre famille et conditionnent leur disponibilité pour les tâches apostoliques ou de formation dans l’Opus Dei.

c) Les Surnuméraires sont les fidèles de la Prélature – mariés ou célibataires, mais en tout cas sans engagement pour le célibat – qui, avec la même vocation divine que les autres, participent pleinement à l’apostolat de l’Opus Dei, avec une disponibilité, en ce qui concerne les activités apostoliques, qui est compatible avec l’accomplissement de leurs obligations familiales, professionnelles et sociales.

Le critère de cette classification des situations des fidèles est, comme on peut le voir, la disponibilité habituelle plus ou moins grande de chacun, dépendant de circonstances personnelles, familiales et professionnelles, non pas pour la sainteté et l’apostolat – auxquels tous sont également appelés – mais « pour se consacrer aux tâches de formation et à certaines tâches apostoliques » (Statuta, 7 § 1).

Les profils de cette distinction et leur terminologie se sont forgés au cours de l’histoire de l’Œuvre et en parallèle au développement du travail apostolique et au fil de la recherche des incarnations juridiques les plus appropriées – ou les moins inadéquates –parmi celles qui existaient à chaque instant ; en effet la nouveauté que représentait l’Opus Dei a voulu qu’il n’y en ait aucune de pleinement satisfaisante pendant de nombreuses années. Presque immédiatement, c’est-à-dire juste après le 2 octobre 1928, saint Josémaria s’est entouré d’un groupe de jeunes laïcs de conditions très différentes (certains étaient intellectuels, d’autres artistes, d’autres ouvriers), et aussi de quelques prêtres. Au début, il n’accomplissait de travail apostolique qu’avec les hommes ; à partir de 1930, lorsqu’il reçoit une lumière fondationnelle qui complète celle d’octobre 1928, il commence le travail apostolique avec les femmes. Peu à peu, certains et certaines vont se donner à Dieu dans le célibat apostolique avec une disponibilité totale pour faire "vie de leur vie" l’esprit de l’Opus Dei et le répandre là où c’était nécessaire. Au fur et à mesure où le travail apostolique se développait, le fondateur commença à déléguer des tâches de formation à certaines de ces personnes : elles jouissaient de la pleine disponibilité pour se consacrer à la formation des autres membres de l’Œuvre et de ceux qui s’en approchaient.

Ceux qui, au début, ont suivi saint Josémaria dans le cadre de l’Opus Dei étaient pour la plupart de jeunes étudiants. Mais l’horizon du fondateur était beaucoup plus large, c’est pourquoi dans une note écrite en 1931 dans laquelle il se souvient du 2 octobre 1928, il pouvait dire : « Ce jour-là, le Seigneur a fondé son Œuvre : dès lors, j’ai commencé à côtoyer des âmes : des laïcs, étudiants ou non, mais jeunes. Et de former des groupes. Et à prier et faire prier. Et à souffrir... » (Notes intimes, no 306 2-X-1931 : citée et commentée dans IJC, p. 26). Assumant ce large horizon, dans un premier temps, il a concentré son action apostolique parmi les intellectuels car « il s’est immédiatement rendu compte que s’il voulait atteindre tous les secteurs de la société il devait commencer par ceux qui, avec une profession intellectuelle, possédaient la mobilité et les qualités qui leur permettaient d’atteindre les différents environnements » (Ocáriz, « La vocation à l’Opus Dei comme vocation dans l’Église », dans OIG, p. 182).

Les premiers textes juridiques de l’Opus Dei reflètent cette réalité, puisqu’ils se concentrent avant tout sur les laïcs intellectuels et célibataires. Et cela non pas pour des raisons sociologiques mais parce que la législation canonique et la doctrine théologique de l’époque n’accordaient pas suffisamment de place à la présence dans une seule institution de la variété des personnes auxquelles l’Opus Dei était appelé à s’adresser : des hommes et des femmes de conditions très différentes, certains célibataires et d’autres mariés, beaucoup d’entre eux vivant dans leurs foyers, transformant leur propre maison et leurs occupations familiales en un moyen de sainteté et d’apostolat. Saint Josémaria était conscient dès le début de cette universalité, et de ce que les personnes mariées pouvaient aussi être membres de l’Œuvre ; Il suffit de prendre pour exemple le fait que plusieurs résidents de DYA, la première résidence créée par le fondateur de l’Opus Dei, se souviennent que, dès 1935, « dans les méditations le Père leur parlait d’une vocation matrimoniale à laquelle ils étaient appelés et dans laquelle ces jeunes de l’œuvre de saint Gabriel devraient se sanctifier, la plupart d’entre eux étant encore célibataires » (AVP, I, p. 585, nt. 267) ; réalité reprise par un point bien connu de Chemin : « Tu ris parce que je te dis que tu as la “ vocation du mariage ” ? — Eh bien, tu l’as. Et c’est bel et bien une vocation » (C 27).

Toutefois pour que cet esprit soit pleinement incarné dans les documents juridiques, un long processus fût nécessaire. Ce n’est pas ici le lieu de montrer comment, pas à pas, la pleine reconnaissance juridique de la réalité perçue par le fondateur de l’Œuvre s’est concrétisée. Contentons nous, en faisant abstraction des phases précédentes, de commencer par les premières constitutions approuvées par le Saint-Siège, comme celle de 1947, dans laquelle il est déclaré que les personnes de toutes conditions, célibataires ou mariées, peuvent être admises comme Surnuméraires, mais seulement en tant que membres au sens large et en parlant d’une adhésion seulement spirituelle, puisqu’au numéro 342 il est dit qu'« ils cherchent à vivre l’esprit et les apostolats de l’Institution, sans s’y incorporer par un lien juridique » (sur ces constitutions, cf. IJC, p. 183-192 et 199-200).

Un pas en avant est fait avec les Constitutionibus Operis Dei Addenda, approuvées par Rescrit du Saint-Siège le 18 mars 1948. On y réaffirme la possibilité que des Surnuméraires mariés ou célibataires de toute condition ou fonction peuvent s’incorporer à l’Opus Dei – alors sous la forme juridique d’Institut séculier –, et il est ajouté que ces surnuméraires « se consacrent partiellement au service de l’Institut, et utilisent comme moyens de sanctification et d’apostolat leurs propres occupations familiales et leur profession ou leurs travaux ; (...) ils vivent le même esprit et, selon leurs possibilités, les mêmes coutumes que les membres Numéraires » (Constitutionibus Operis Dei Addenda, 18-III-1948 : IJC, p. 201).

Une nouvelle étape est franchie quelques mois plus tard lorsque dans un autre Rescrit du Saint-Siège du 8 septembre 1949 on en vient à distinguer au sein des Surnuméraires ceux qui étaient alors appelés Surnuméraires internes qui vivaient dans le célibat, mais qui, en raison de circonstances personnelles permanentes, ne pouvaient pas avoir une disponibilité totale pour les tâches de formation et de direction ; on leur reconnait la qualité de membres stricto sensu (mais en distinguant ce sens strict du plus strict : strictiore sensu ; cf. IJC, pp. 201-202, 542-543). Les constitutions approuvées par le Saint-Siège en 1950 maintiennent cette situation en en changeant quelque peu la terminologie. Cela conduit alors à la distinction entre les Numéraires, les Agrégés (appelés surnuméraires internes en 1949 et Oblats en 1950) et les Surnuméraires, tous considérés comme membres de l’Opus Dei, bien qu’avec des nuances.

Ce qui avait été obtenu était important mais les dispositions susmentionnées pouvaient donner l’impression que les Agrégés et les Surnuméraires occupaient un second plan derrière les Numéraires comme protagonistes. Ce manque de clarté était dû au fait que les figures juridiques construites autour dudit état de perfection, n’étaient pas prêtes à reconnaître une seule classe de membres, en référence à des personnes issues de situations sociales et professionnelles très diverses, certains célibataires et d’autres mariés, tous également appelés à vivre le même esprit et engagés à rechercher la sainteté dans son sens le plus complet. Saint Josémaria a donc dû procéder en examinant les exceptions juridiques dans le cadre juridique de l’époque, de sorte que, pour ouvrir la catégorie de membres à part entière à tous, il a été amené à introduire différentes intensités ou degrés dans la même condition de membre (c’est pourquoi les clarifications concernant la nature d’appartenance furent ajoutées) ; ceci, contrairement au charisme fondateur et à ce qui était réellement vécu, pouvait laisser penser qu’il y avait des membres de seconde classe. Cette façon de traiter la question obscurcissait l’unité vocationnelle, la pleine participation dans le même charisme et le fait que, dans le cas des Surnuméraires, l’état matrimonial constituait un véritable chemin de sainteté, un aspect essentiel dans la prédication de saint Josémaria depuis le début.

Il n’est donc pas surprenant que dans ses Lettres le fondateur, s’éloignant des catégories juridiques, indique clairement que tous les fidèles de l’Opus Dei sont membres de l’Œuvre au sens strict, « parce que – quel que soit l’état civil de la personne – le don de soi au travail et à l’accomplissement fidèle de ses propres devoirs d’état, selon l’esprit de l’Opus Dei, était plein » (Lettre 25-I-1961, no 11 : Ocáriz, « La vocation à l’Opus Dei comme vocation dans l’Église », dans OIG, p. 186). Chacun dans l’Opus Dei est, en effet, appelé à se sanctifier pleinement dans sa vie professionnelle, sa vie de famille, etc. « Toute la spiritualité de l’Opus Dei repose, comme la porte sur le pivot, sur le travail professionnel effectué au milieu du monde. Sans vocation professionnelle, on ne peut pas venir à l’Opus Dei ». Il ajoute ensuite : « notre vie peut se résumer en disant que nous devons sanctifier le travail, nous sanctifier dans le travail et sanctifier par le travail » (Lettre 15-X-1948, no 6 : AVP, III, p. 94). Et chacun, marié ou célibataire, où qu’il vive, doit atteindre une « vie intérieure contemplative, unie à son propre travail professionnel, quel qu’il soit » (Lettre 8-XII-1949, no 28 : AVP, III, p. 86, nt. 226).

Il s’ensuit, comme le souligne Ocáriz, qu’« il appartient à la substance théologique du phénomène pastoral de l’Opus Dei que les Numéraires et les Agrégés (célibataires, avec une disponibilité spéciale pour une tâche ou une autre etc.) ne sont pas le paradigme de membre de l’Opus Dei dont la figure des surnuméraires – qui sont logiquement la majorité – serait une approximation. Chacun, répétons le, a la même vocation particulière à la sainteté et à l’apostolat » (Ocáriz, « La vocation à l’Opus Dei comme vocation dans l’Église », dans OIG, p. 189).

Depuis que l’Opus Dei a été érigé en Prélature Personnelle, il est définitivement clair, également juridiquement, que les Surnuméraires et les Agrégés sont pleinement membres de l’Œuvre : tous – Numéraires, Agrégés et Surnuméraires – sont des fidèles incorporés dans la Prélature, possèdent la même vocation divine, recherchent la même fin apostolique, ont un seul esprit et une praxis ascétique identique (cf.Statuta, 6).

3. Hommes et femmes

Logiquement, la distinction entre les membres s’applique aussi bien aux hommes qu’aux femmes, puisque les fidèles de l’Église appartiennent aux deux sexes. Il y a donc des femmes Numéraires, des Agrégées et Surnuméraires. Toutes les conditions de vie et les professions honnêtes sont un chemin de sainteté pour tous les membres de l’Œuvre, hommes et femmes. Celles-ci accompliront leur tâche en apportant à la société et à la famille ce qui est propre à la condition féminine : « La femme est appelée à donner à la famille, à la société civile, à l'Église, ce qui lui est caractéristique, ce qui lui est propre et qu'elle est seule à pouvoir donner : sa tendresse délicate, sa générosité infatigable, son amour du concret, sa finesse d'esprit, sa faculté d'intuition, sa piété profonde et simple, sa ténacité ... » (Entretiens 87).

Il y a en plus une activité spécifique des femmes de l’Opus Dei : les tâches de l’administration domestique des Centres de cette prélature personnelle. Certaines femmes de l’Œuvre sont professionnellement dédiées à cette tâche. Ceci est indiqué au numéro 9 des Statuts : « les Numéraires auxiliaires, avec la même disponibilité que les autres Numéraires, consacrent leur vie principalement à des tâches manuelles ou domestiques qu’elles assument volontairement comme travail professionnel au siège des Centres de l’Œuvre ». Notons qu’il ne s’agit pas seulement de ce qu’une profession ou un métier d’une grande importance sociale soit sanctifié par certaines femmes de l’Opus Dei, mais que nous sommes devant une tâche d’une importance particulière en ce qui concerne la dimension de famille chrétienne caractéristique de toute l’Œuvre : c’est le propre des mères et des sœurs de remplir des tâches qui font de chaque maison un foyer. C’est pourquoi saint Josémaria appelaient ces tâches « apostolat des apostolats » (Lettre 8-VIII-1956, no 43 : Ocáriz, « La vocation à l’Opus Dei comme vocation dans l’Église », dans OIG, p. 191), parce que « en travaillant dans l’Administration, dit-il à ses filles, vous participez à tous les apostolats, vous collaborez à tout le travail apostolique. Sa bonne marche est une condition nécessaire, la plus grande des impulsions pour toute l’Œuvre, si vous le faites par amour de Dieu. Sans votre apostolat, on ne pourrait pas faire aller de l’avant les autres selon notre esprit » (Lettre 29-VII-1965, no 11 :ibid., p. 191).

4. Prêtres et laïcs

Ce qui a été indiqué ci-dessus sur la vocation à l’Opus Dei montre clairement que les laïcs de toutes sortes et de toutes conditions peuvent être appelés par Dieu à l’Œuvre. On pourrait se demander si cette vocation s’adresse aussi au clergé. La réponse est oui, car dans l’Opus Dei il y a des clercs séculiers. C’est une réalité qui existe depuis le début puisque le sacerdoce ministériel est essentiel dans l’Opus Dei, dont la réalité – confirmée par l’érection de la Prélature – est structurée autour de la relation entre le sacerdoce commun et le sacerdoce ministériel. Cette réalité a eu des concrétisations différentes et avec des nuances variées dans les différentes configurations juridiques par lesquelles l’Œuvre est passée. Dans les années trente, saint Josémaria transmettait l’esprit de l’Œuvre à certains prêtres et les faisait collaborer aux tâches de formation, en les considérant comme ses enfants. En effet, l’une des premières vocations à l’Œuvre fut celle de Don José María Somoano, prêtre décédé le 16 juillet 1932. Mais, dans l’ensemble, l’expérience d’associer ces membres du clergé à l’Œuvre ne fut pas positive. Saint Josémaria lui-même commentait dans un écrit de 1937 : « Quand je réunissais ces prêtres, le lundi, dans ce que j’appelais « Conférence sacerdotale », afin de leur donner l’esprit de l’Œuvre, afin qu’ils soient mes enfants et mes collaborateurs ; quand, en 1932 ou 1933, volontairement, spontanément, librement plusieurs de ces prêtres firent une promesse d’obéissance, dans notre maison de Luchana, je ne pouvais pas imaginer que – avec une très bonne intention, sans doute – ils allaient presque immédiatement se désolidariser de l’Œuvre » (Notes intimes, no 1435 : AVP, I, pp. 536-537, nt. 118). Le fondateur comprit alors que l’Œuvre avait besoin de prêtres sortant de ses membres laïcs, afin qu’en en possédant pleinement l’esprit ils accomplissent l’œuvre pastorale de formation et d’attention spirituelle des fidèles de l’Œuvre. Peu après la fin de la guerre civile espagnole en 1939, saint Josémaria a présenté la possibilité de l’ordination sacerdotale à certains de ses enfants qui ont commencé à effectuer les études philosophiques et théologiques appropriées. Pendant ce temps, le fondateur cherchait la solution canonique possible pour l’incardination de ces prêtres dans l’Opus Dei ; le 14 février 1943 il comprit quel en était le chemin en célébrant la Sainte Messe. C’est ainsi qu’est née la Société Sacerdotale de la Sainte Croix. Un an plus tard, en juin 1944, les premiers prêtres allaient être ordonnés.

Les prêtres incardinés dans la Prélature (Numéraires et Agrégés) constituent le presbyterium qui collabore avec le Prélat dans l’exercice de sa mission pastorale. Ils viennent des fidèles de la Prélature qui ont effectué les études requises. Se considérant appelés au sacerdoce, ils manifestent au Prélat leur disponibilité de recevoir le sacrement de l’Ordre pour, par son exercice, servir les âmes, en premier lieu les autres fidèles de l’Œuvre. Il revient ensuite au Prélat de les appeler aux ordres sacrés. La vocation sacerdotale ne constitue pas le couronnement de leur vocation dans l’Opus Dei (cf. Entretiens 69), mais est une nouvelle façon de servir les autres. Pour ces clercs, « le sacerdoce présuppose un appel divin authentique qui façonne profondément la vocation de celui qui le reçoit, mais ne change pas la particularité de la vocation à l’Opus Dei, de la même manière que le sacerdoce ministériel n’est pas constitutif de la vocation chrétienne en tant que telle, mais de la vocation personnelle de certains chrétiens » (Ocáriz, « La vocation à l’Opus Dei comme vocation dans l’Église », dans OIG, p. 192).

Dès leur ordination, ces membres du clergé de la Prélature font partie de la Société Sacerdotale de la Sainte-Croix, à laquelle peuvent également être incorporés, en tant qu’Agrégés et Surnuméraires des clercs des diocèses les plus divers qui cherchent la sanctification sacerdotale selon l’esprit et la praxis de l’Opus Dei. Comme indiqué ci-dessus, le fondateur comprenait que le charisme de l’Œuvre valait aussi pour les prêtres incardinés dans les diocèses. La solution pour les faire participer pleinement au charisme fût trouvée en 1950, peu de temps avant l’approbation définitive (cf. IJC, pp. 228-230, 288-291).

La Société Sacerdotale de la Sainte-Croix est une « association de clercs intrinsèquement unie à la Prélature » (Jean-Paul II, Const. Ap. Ut sit, 28-XI-1982, no 1), qui forme un seul tout (aliquid unum) avec la Prélature et dont on ne peut pas la séparer (cf. Statuta, no 36 § 2). Appartiennent à cette association aussi bien les prêtres à la fois Numéraires et Agrégés (aussi appelés Coadjuteurs) provenant des laïcs incorporés dans la Prélature et incardinés dans celle-ci, que des prêtres diocésains qui cherchent à atteindre la sainteté selon l’esprit et la praxis de l’Œuvre (cf. Statuta, 57). Dans le cas de ces derniers il s’agit d’une vocation particulière qui façonne leur vocation sacerdotale. Ce nouvel appel renforce l’obligation de rechercher la sainteté dans l’exercice du ministère, car « pour les prêtres leur travail professionnel, dans lequel ils doivent se sanctifier et avec lequel ils doivent sanctifier les autres, est le sacerdoce ministériel du Pain et de la Parole » (Lettre 24-XII-1951, no 148 : IJC, p. 289). L’appartenance à la Société Sacerdotale, en s’effectuant par le biais d’une convention de nature juridique associative, laisse inchangé le lien avec les diocèses respectifs : ces prêtres y restent incardinés, dépendent de leur Ordinaire comme les autres membres du clergé du diocèse et sont membres à part entière de son presbyterium.

Les prêtres Agrégés et Surnuméraires diocésains, bien qu’ils ne soient pas incardinés dans la Prélature et ne font pas partie de son presbyterium, sont de l’Opus Dei. Leur vocation à l’Œuvre les conduit à être plus unis à leur évêque, à renforcer leur attachement à leur propre diocèse, à y donner toute leur vie, à œuvrer pour les vocations, à s’efforcer de vivre la charité au sein du presbyterium, à suivre délicatement les orientations de l’évêque, à promouvoir la sainteté sacerdotale parmi le clergé diocésain, et, si l’évêque le souhaite, à mettre en pratique la vie commune du clergé (cf. Statuta, 68-69 & 71). Comme l’a exprimé Mgr Álvaro del Portillo, la Société Sacerdotale de la Sainte-Croix « fournit à ses membres l’attention spirituelle et ascétique opportune qui non seulement laisse intacte mais renforce l’obéissance canonique que ces prêtres doivent à leur propre évêque. Il n’y a donc pas de problème de double obéissance qui puisse créer des conflits : (...) ces prêtres n’ont pas un double supérieur – l’évêque lui-même et un supérieur interne, de l’Opus Dei – mais un seul : chacun son évêque » (Del Portillo, « Entretien avec Joaquín Navarro-Valls », ABC, 29-XI-1982).

5. Incorporation dans l’Opus Dei

De qui a été dit plus haut on comprend que pour être membre de l’Opus Dei il est nécessaire d’être appelé par Dieu, d’avoir une vocation à l’Œuvre. Comme toute vocation dans l’Église, elle aussi requiert un discernement personnel du candidat éventuel et une évaluation par l’autorité compétente. La Volonté de Dieu se manifeste à une personne non seulement par une perception subjective liée à ses dispositions personnelles mais aussi par la présence chez le candidat d’éléments objectifs qui guideront avec une plus grande certitude la personne à demander l’admission à l’Œuvre en tant que Numéraire, Agrégé ou Surnuméraire. Ces éléments seront évalués par l’autorité de la Prélature.

L’incorporation a lieu « par convention avec la Prélature » (Jean-Paul II, Const. Ap. Ut sit, 28-XI-1982, art. III), de laquelle naît un lien de communion qui unit le fidèle et la Prélature. La convention consiste en une déclaration mutuelle de celui qui représente la prélature et de celui qui souhaite s’y incorporer, devant deux témoins. Le fidèle exprime la ferme intention de se consacrer de toutes ses forces à la recherche de la sainteté et à l’exercice de l’apostolat selon l’esprit et la pratique de l’Opus Dei, en s’engageant à rester sous la juridiction du Prélat et des autres autorités compétentes, de se consacrer fidèlement à ce qui se réfère à la fin spécifique de l’Œuvre, d’accomplir ce qu’implique d’être un Numéraire, un Agrégé ou un Surnuméraire, et d’observer les normes régissant la Prélature et les dispositions légitimes du Prélat et des autres autorités compétentes de la Prélature en ce qui concerne son gouvernement, son esprit et son apostolat. La Prélature, pour sa part, s’engage à donner aux fidèles une formation doctrinale-religieuse, spirituelle, ascétique et apostolique assidue, à offrir l’assistance pastorale spécifique des prêtres de la Prélature et à remplir les autres obligations établies par son Droit (cf. Statuta, nos 27 § 2 et 3).

Compte tenu des obligations qu’implique le lien à l’Opus Dei, l’admission ne peut être demandée qu’à partir de l’âge de dix-sept ans ; auparavant, à partir de quatorze ans et demi, on peut demander l’admission, mais uniquement en tant qu’aspirant. L’incorporation temporaire ne peut se faire qu’à partir de l’âge de dix-huit ans ; l’incorporation définitive cinq ans plus tard (cf. Statuta, 19-27). Mgr Álvaro del Portillo, premier successeur de saint Josémaria, a expliqué le contenu des obligations contractées : « Les membres de l’Opus Dei s’engagent à rechercher la sainteté et à la répandre à partir de la place que chacun occupe dans le monde, à travers son travail professionnel et ses occupations quotidiennes. Pour remplir cet engagement, ils ont le droit de demander à la Prélature de les aider par une assistance spirituelle continue et exigeante. Cette formation est reçue personnellement ou en petits groupes, à travers des cours, des conférences, des retraites spirituelles, etc. De leur côté, tous les membres de l’Opus Dei s’efforcent de vivre chaque jour leurs obligations temporelles avec les pratiques religieuses nécessaires pour avoir une vie de contemplatifs au milieu du monde comme l’exige notre vocation. Le propre de l’Opus Dei est l’esprit avec lequel tout cela est réalisé, dans une solide unité de vie où la foi professée se confond avec le travail laïque que chaque membre accomplit sous sa responsabilité personnelle » (Del Portillo, Entretien avec Pier Giovanni Palla, Il Tempo, 30-XI-1982).

Dans les paragraphes précédents, nous avons décrit le processus d’incorporation dans la Prélature dans le cas des laïcs qui s’applique de manière identique aux hommes et aux femmes. Si nous passons maintenant à l’incorporation des prêtres diocésains dans la Société Sacerdotale de la Sainte-Croix, le prêtre qui, considérant que Dieu l’appelle à l’Œuvre, veut répondre à cet appel, doit manifester sa volonté d’être membre de ladite Société, en tant qu’Agrégé ou Surnuméraire, au moyen d’une lettre adressée au Président général de l’Association (cf. Statuta, 63). De cette manière, le candidat exerce le droit d’association propre au clerc diocésain (cf. Code de droit canonique de 1983, canon 278 § 2). Il reçoit une formation spécifique et passe par les différentes étapes d’intégration dans l’Œuvre. Si un séminariste est attiré par l’esprit de l’Œuvre et souhaite être membre de la Société Sacerdotale de la Sainte-Croix, il ne peut être admis comme associé, mais simplement comme aspirant (cf. Statuta, 60 §1). Il pourra en revanche demander l’admission après avoir reçu l’ordination diaconale.

Thèmes connexes : Fidèles chrétiens ; Organisation et gouvernement de l’Opus Dei.

Bibliographie : Statuta Operis Dei o Codex iuris particularis seu Statuta Praelaturae Sanctae Crucis et Operis Dei, in OIG, p. 309-346 et IJC, p. 628-657 ; AVP, I passim ; IJC passim ; OIG passim ; Jean-Paul II, Const. Ap. Ut sit, 28-XI-1982 ; Lucas Francisco Mateo-Seco - Rafael Rodríguez-Ocaña Prêtres dans l’Opus Dei. Sécularité, vocation et ministère, Pampelune, EUNSA, 1994.

Luis Navarro