AUDACE

1. Signification et contexte. 2. Deux sens d’audace. 3. Audace et enfance spirituelle.

1. Signification et contexte.
2. Deux sens d’audace.

3. Audace et enfance spirituelle.

    Les références à l’audace, pour indiquer l’attitude qui consiste à oser entreprendre des tâches difficiles ou risquées, ou à des termes et expressions similaires (courage, sainte effronterie, force, sainte intransigeance), sont courantes dans les écrits de saint Josémaria et constituent un trait caractéristique de sa spiritualité.

    1. Signification et contexte

    On trouve le contexte approprié pour comprendre la signification du terme « audace » pour saint Josémaria dans l’expression « Dieu et audace », qui apparaît deux fois dans Chemin (11 et 401) et une fois dans Sillon(96). Aux débuts de l’Opus Dei, l’expression est liée à l’histoire de la première activité apostolique de nature institutionnelle, l’Académie DYA, inaugurée fin 1933 (cf. AVP, I, pp. 508-519, 533-538). Certains témoignages montrent que c’était une expression que saint Josémaria utilisait fréquemment, pour encourager ceux qui s’approchaient de son apostolat à surmonter les difficultés et à se comporter avec magnanimité et hauteur de vues (cf. Témoignages,1994, p. 294).

    L’expression « Dieu et audace » souligne que l’audace n’est pas une attitude purement humaine, mais qu’elle est basée sur la confiance en Dieu par laquelle le chrétien reçoit la force d’agir avec audace. C’est une manifestation de foi en Dieu, qui opère dans le chrétien et le conduit à éviter toute attitude pusillanime et à ne pas temporiser (cf. C 54), tant dans sa mission apostolique que dans sa propre vie spirituelle. Elle constitue une caractéristique de cette « ascétique chrétienne, si naturelle et surnaturelle à la fois » (S 559) qui conduit le disciple de Jésus à dépasser ses propres limitations, à se grandir face aux obstacles (cf. C 12) et à élargir ses horizons avec la « sainte ambition de conduire le monde entier à Dieu » (S 701) – une ambition qui doit être « pour le Christ, par amour » ( C 24) – sans tomber dans la fausse prudence de ceux qui « ont toujours qualifié de folies les œuvres de Dieu » (C 479). Au contraire, « la prudence rend l’homme audacieux, sans folie » (AD 87), écrit saint Josémaria.

    2. Deux sens de l’audace

    Les passages dans lesquels saint Josémaria parle d’audace apparaissent dans deux domaines principaux. D’une part, l’audace, comprise avant tout comme synonyme de courage et de force, est l’opposé de la lâcheté, de la honte et du respect humain qui dissuadent le chrétien et l’empêchent de se présenter clairement comme un disciple du Christ : « Quel mal effrayant nous pouvons causer si nous nous laissons entraîner par la peur ou par la honte de montrer, dans la vie ordinaire, que nous sommes chrétiens ! » (S 36). C’est un témoignage ouvert de fidélité à Dieu et à la foi reçue : « Ayons le courage de vivre, de façon publique et constante, en conformité avec notre sainte foi » (S 46). Ce sens de l’audace se trouve déjà dans Cheminet apparaît le plus souvent dans Sillon,où il y a un chapitre avec ce titre (S 96-124).

    L’audace n’est pas, comme on l’a vu, quelque chose de purement humain, et ne doit pas être confondue avec la témérité, l’imprudence ou la bravoure inconsciente de ceux qui agissent poussés par leur caractère impulsif ou en réaction à certaines circonstances. Ainsi, écrit saint Josémaria, » l'audace n'est ni imprudence, ni témérité irréfléchie, ni simple hardiesse » (S 97 : cf. C 401) : au contraire, poursuit-il, « c’est la force, la vertu cardinale, nécessaire à la vie de l’âme » (S 97). Sa racine est ancrée dans la confiance en Dieu : « Tu vois ? avec Lui, tu y es arrivé ! De quoi t'étonnes-tu donc ? — II faut t'en convaincre : il n'y a là rien de surprenant. Si l'on a confiance en Dieu — une confiance véritable ! — les choses deviennent si faciles. Et, en plus, on dépasse toujours la limite de ce que l'on avait imaginé » (S 123). Le chrétien audacieux, qui a confiance en Dieu, est rempli d’optimisme : « Auparavant, tu étais pessimiste, indécis et apathique. À présent, te voilà totalement transformé : tu te sens audacieux, optimiste, sûr de toi..., parce que tu t'es enfin décidé à ne chercher ton appui qu'en Dieu » (S 426). Et cela indépendamment du fait qu’on n’aperçoive pas les fruits : « Il faut t'en convaincre : lorsqu'on travaille pour Dieu, il n'y a pas de difficultés qu'on ne puisse surmonter, ni de découragements qui fassent abandonner la tâche, ni d'échecs dignes de ce nom, aussi infructueux qu'apparaissent les résultats » (S 110). Celui qui est surnaturellement audacieux ne recule pas, mais insiste plutôt (cf. S 107), reconnaissant humblement que la force vient d’en haut, qu’elle ne vient pas de ses propres efforts : « Avec une profonde humilité, forts de la force de notre Dieu et non “de la force de nos chars de combat et de nos chevaux”, comme le dit le Psaume, et sans respect humain, nous devons faire en sorte qu’il n’y ait pas dans la société de lieux où l’on ne connaisse pas le Christ » (F 716).

    L’audace, lorsqu’elle est surnaturelle, naît de l’amour pour Dieu et se manifeste dans la façon dont nous entrons en relation avec Lui. C’est « une folie d’amoureux » (S 799), « une folie d’amour » (F 790, F 825 : AD 307), « une audace d’enfant » (F70), « une audace divine » (AD 306). Ce second sens du terme est déjà présent dans les premières œuvres de saint Josémaria : « Ne crains pas si, en méditant par toi-même, il t’arrive de laisser échapper des marques d’affection et des mots audacieux et enfantins. Jésus le désire » (SR, Épilogue). Les deux sens sont intimement liés et dans le chapitre de Chemin où sont inclus les textes qui se réfèrent au premier sens de l’audace, l’audace ou la hardiesse dans la relation avec Dieu apparaît également : « Ne demande pas seulement à Jésus le pardon de tes fautes : ne L’aime pas seulement dans ton cœur… Répare toutes les offenses qu’on Lui a faites, qu’on Lui fait et qu’on Lui fera… Aime-Le de toute la force de tous les cœurs de tous les hommes qui L’ont le plus aimé. Sois audacieux : dis-Lui que tu es plus éperdument amoureux de Lui que Marie-Madeleine, plus que Thérèse et la petite Thérèse…, plus fou qu’Augustin, Dominique et François, plus qu’Ignace et François-Xavier » (C 402).

    3. Audace et enfance spirituelle

    L’audace est une attitude propre aux enfants (cf. C 857, C 896), dont la bravoure et la confiance naïve révèlent l’intimité et l’absence de respect humain : « Aie plus d’audace encore, et quand tu auras besoin de quelque chose, en partant toujours du Fiat de Marie, ne demande plus rien. Dis simplement : “ Jésus, je veux ceci ou cela. ” C’est ainsi que les enfants demandent » (C 403). Le chemin de l’enfance spirituelle trouve dans l’audace un merveilleux instrument du surnaturel : « Clame, enfant audacieux : quel amour que celui de Thérèse d’Avila ! — Quel zèle que celui de François-Xavier ! — Quel homme admirable que saint Paul ! — Ah, Jésus, eh bien moi… je t’aime plus que Paul, que François-Xavier et que Thérèse ! » (C 874). Saint Josémaria encourage le chrétien à l’audace dans la vie intérieure, en imitant les grands saints (Cf. QCP 83), comme le chemin pour tomber amoureux de Dieu, en Le laissant agir (cf. S 124) et nous transformer : « Sois audacieux dans ta prière et Notre Seigneur, de pessimiste te changera en optimiste, de timide en audacieux, d'homme à l'esprit timoré en homme de foi, en apôtre ! » (S 118). Caractéristique de ce sens de l’audace est sa relation étroite avec la vie d’enfance spirituelle : « Et, avant de terminer cette dizaine, tu as embrassé les blessures de ses pieds..., et moi, plus audacieux — étant plus enfant — j’ai posé mes lèvres sur son côté ouvert » (SR, Premier Mystère Glorieux). En fin de compte, la racine et le fondement de l’audace ne sont rien d’autre que l’amour : « Vois comme les difficultés, qu’elles soient petites ou grandes, sont évidentes... Mais, quand l’amour est là, on ne tient pas compte de ces obstacles, et on avance avec audace, avec décision, avec courage » (F 676).


    Thèmes connexes : Force : Enfance spirituelle : Magnanimité.

    Bibliographie : S 97-124 Aa.Vv. Bienheureux Josémaría Escrivá de Balaguer, un homme de Dieu. Témoignages sur le fondateur de l’Opus Dei, Madrid, Palabra, 1994 : José Morales, « La pratique du christianisme dans Sillon », dans Aa.Vv. La personnalité du Bienheureux Josémaría Escrivá de Balaguer, Pampelune, EUNSA, 1994, p. 213-241.

    Victor Sanz Santacruz