APOSTOLAT AD FIDEM

1. Portée et signification de l’expression. 2. Aspects historiques. 3. Caractéristiques générales.

1. Portée et signification de l’expression.
2. Aspects historiques.
3. Caractéristiques générales.

Saint Josémaria attachait une grande importance à la relation avec les non-chrétiens, les chrétiens non catholiques, ou encore avec les catholiques éloignés de l’Église. Toujours dans le respect de leurs croyances et de leur liberté, il aspirait en même temps à les attirer vers la plénitude de la vérité. Il se référait parfois à ce champ apostolique avec l’expression apostolat ad fidem. Il a montré une appréciation singulière pour cet apostolat qui, sous ses diverses formes, est une expression substantielle de la mission de l’Église, ainsi qu’une manifestation de l’ouverture de l’Église catholique à toute l’humanité et du respect de la liberté : « Tu m’as souvent entendu parler de l’apostolat “ad fidem”. Je n’ai pas changé d’opinion : quel merveilleux chantier nous attend dans le monde entier, avec ceux qui ne connaissent pas la vraie foi et qui pourtant sont nobles, généreux et optimistes ! » (F 944).

1. Portée et signification de l’expression

Saint Josémaria utilise l’expression apostolat ad fidem pour désigner à la fois l’apostolat avec les catholiques éloignés de l’Église, l’apostolat avec les chrétiens non catholiques et l’apostolat avec les non-chrétiens. Dans les faits, en utilisant l’expression avec une portée aussi générale, il n’ignore pas, bien sûr, les différences entre les situations ; et, concrètement, en l’appliquant à la fois à l’apostolat avec les non-chrétiens et à celui relatif aux chrétiens non catholiques, il prend en compte la différence fondamentale qu’il y a entre être ou ne pas être incorporé à Jésus-Christ par le baptême. Tant dans ses enseignements pastoraux que dans les initiatives apostoliques qu’il a promues, il y a une distinction claire entre ce que l’on peut appeler un « apostolat proprie ad fidem », se référant aux non-chrétiens, et un « apostolatad plenitudinem fidei », en ce qui concerne les chrétiens qui ne sont pas en pleine communion avec l’Église catholique (cf. Ocáriz,2009, p. 110, 117 et suiv.).

Le premier correspond à la dimension missionnaire ad extra de l’Église ; le second se réfère au désir de promouvoir l’unité des chrétiens, c’est-à-dire l’œcuménisme bien que ne se référant pas aux activités œcuméniques en tant que telles entre l’Église catholique et les autres Églises et communautés ecclésiales mais à la pleine incorporation dans l’Église catholique de chrétiens singuliers (cf. UR, 4), en partant du témoignage personnel que les catholiques offrent par leur exemple et leur parole à tous les hommes, dans l’accomplissement de la mission apostolique universelle de l’Église reçue de Jésus-Christ (cf. Mt 28, 19-20).

Les diverses formes d’apostolat ad fidem ont pour motivation commune l’amour de Dieu et des hommes et, comme but essentiel que tous les hommes et toutes les femmes accueillent et embrassent la plénitude de la vérité et du salut « qui subsiste dans l’Église catholique et apostolique » (DH, 1).

2. Aspects historiques

Pendant le processus qui a conduit à l’approbation pontificale de l’Opus Dei en 1950, saint Josémaria a demandé avec insistance au Saint-Siège que des chrétiens non catholiques et aussi des non chrétiens puissent être coopérateurs de l’Opus Dei, participant ainsi à ses biens spirituels. C’était une demande sans précédent, à une époque où ni l’œcuménisme ni la relation avec les non-chrétiens ne possédaient la force et l’extension qu’ils prirent surtout à partir du Concile Vatican II (cf. IJC, p. 253, nt. 63 ; Rodriguez,1979, p. 67).

Il reçut un premier refus qui devint plus tard un dilata jusqu’à ce qu’avec l’approbation finale de 1950 la figure des « coopérateurs non catholiques » apparaisse, pour désigner ceux qui, sans appartenir évidemment à l’Opus Dei, collaborent à l’œuvre apostolique par leurs prières et leurs aumônes et, fréquemment, par leur travail (cf. AVP, III, p. 482, nt. 61). Se référant à ces coopérateurs, saint Josémaria a écrit dans l’une de ses Lettres : « Des protestants de nombreuses confessions différentes, des hébreux, des musulmans, des païens passent d’une noble amitié avec une de mes filles ou un de mes fils à la participation à une œuvre apostolique. Et, comme sur un plan incliné, ils ont ainsi l’occasion de connaître la richesse d’esprit que contient la doctrine chrétienne. À beaucoup le Seigneur donnera la grâce de la foi, récompensant ainsi leur bonne volonté, manifestée par une collaboration loyale dans des œuvres de bien » (Lettre 12-XII-1952, no 33 : AVP, III, p. 482, nt. 61).

À cet égard, il rappelait une anecdote de sa rencontre avec Jean XXIII quand il lui avait commenté spontanément et avec affection : « Saint-Père, dans notre Œuvre, tous les hommes, catholiques ou non, ont toujours trouvé une demeure accueillante : je n'ai pas appris l'œcuménisme de Votre Sainteté » (Entretiens 22). Et saint Josémaria poursuivait : « Il eut un rire ému, car il savait que, dès 1950, le Saint-Siège avait autorisé l'Opus Dei à recevoir, comme coopérateurs, les non-catholiques et même les non-chrétiens » (Ibid.).

Après le Concile Vatican II, saint Josémaria a souligné dans l’une de ses homélies qu’il avait été rempli de joie quand, au cours de l’Assemblée conciliaire, il avait vu comment « prenait corps, avec une intensité renouvelée, ce souci de faire parvenir la Vérité à ceux qui marchent à l’écart de l’unique Chemin, le Chemin de Jésus, car je suis dévoré par le désir de voir l’humanité tout entière se sauver » (AD 226). Et il ajoutait que cette grande joie était aussi motivée « parce que se trouvait confirmé à nouveau cet apostolat si cher à l’Opus Dei : l’apostolat ad fidem qui ne rejette personne et accueille les non-chrétiens, les athées, et les païens, pour qu’ils puissent, dans la mesure du possible, participer aux biens spirituels de notre Association. Tout ceci se rattache à une longue histoire de souffrances et de loyauté, dont j’ai déjà parlé ailleurs » (AD 227).

3. Caractéristiques générales

Selon saint Josémaria, l’apostolat ad fidem doit être compris principalement dans le cadre de « l’apostolat d’amitié et de confidence » (cf. S 191 & 192) par lequel « on éveille chez les autres la faim de Dieu, et où on les aide à découvrir de nouveaux horizons avec naturel, avec simplicité (...), par l'exemple d'une foi vécue à fond, par la parole aimable mais toute pleine de la force de la vérité divine » (QCP 149). Cet apostolat personnel est réalisé par les fidèles de l’Opus Dei avec leurs semblables au milieu de leurs circonstances familiales, professionnelles et sociales, contribuant ainsi à informer le monde entier avec l’esprit de Jésus et à ce que tous perçoivent la bonus odor Christi (cf. QCP 156, 105, 36 ; AD 271) : « Grâce à ton amitié et à ta doctrine – je corrige : grâce à la charité et au message du Christ – tu pousseras beaucoup de gens qui ne sont pas catholiques à collaborer sérieusement avec toi, pour faire du bien à tous les hommes » (S 753). Saint Josémaria a également disposé que les initiatives apostoliques promues par les fidèles de l’Opus Dei soient également ouvertes aux non-chrétiens.

Une caractéristique commune aux différentes formes d’apostolat ad fidem est le respect et l’amour de la liberté que saint Josémaria a enseignés à ses enfants comme une caractéristique fondamentale de la foi chrétienne. C’est ainsi qu’il a pu déclarer que depuis le début de l’Œuvre, dans cette action apostolique, « nous avons tenté de vivre un catholicisme ouvert, qui défend la légitime liberté des consciences, qui incline à traiter charitablement et fraternellement tous les hommes, catholiques ou non, et à collaborer avec tous, en participant aux nobles aspirations qui animent l'humanité » (Entretiens 29). Le respect de la liberté est une exigence de justice et de charité et non une tactique pour parvenir à la conversion de l’autre. C’est précisément l’amitié loyale, unie à l’amour de la vérité, qui conduit à montrer à tous la richesse de la foi catholique de manière authentique, avec simplicité et naturel, en respectant les consciences et en évitant un accommodement de la doctrine qui serait l’expression d’un faux irénisme (cf. F 456).

Enfin, saint Josémaria comprend que le principe classique de l’ordre de la charité doit aussi s’appliquer à l’apostolat ad fidem : « Le premier apostolat que nous devons réaliser dans le monde en tant que chrétiens, le meilleur témoignage de foi, est de contribuer à ce que l’on respire dans l’Église le climat d’une charité authentique. S’il nous arrive de ne pas nous aimer vraiment, s’il y a parmi nous des attaques, des calomnies et des ressentiments, qui pourra se sentir attiré par ceux qui affirment prêcher la Bonne Nouvelle de l’Évangile ? » (AD 226). C’est pourquoi il ajoutait que pour que l’apostolat ad fidem s’enracine fortement et ne reste pas dans un « verbiage hypocrite », il doit être précédé et accompagné d’amour pour ceux qui sont déjà membres de l’Église : « quand nous aimons dans le Cœur du Christ ceux qui, comme nous, sont fils d’un même Père, qui professent une même foi, sont héritiers d’une même espérance (Minucio Félix, Octavius, 31), notre âme s’agrandit et brûle du désir d’approcher tous les hommes de notre Seigneur » (AD 226 ;cf. S 643 & 64).


Thèmes connexes : Apostolat ; Coopérateurs de l’Opus Dei.

Bibliographie : AD 222-237; Entretiens passim; QCP passim; S 64,181-232, 643, 753 ; Fernando Ocáriz, « Évangélisation, prosélytisme and œcuménisme », ScrTh, 38 (2006), pp. 617-636 Id., « La Prélature de l’Opus Dei : apostolat ad fidem et œcuménisme », dans Eduardo Baura (éd.) Études sur la Prélature de l’Opus Dei. Vingt-cinq ans après la Constitution apostolique Ut sit, Pampelune, EUNSA, 2009, pp. 109-123 ; Pedro Rodríguez Église et œcuménisme, Madrid, Rialp, 1979.

Juan Alonso