ACTIONS DE GRÂCES

1. La reconnaissance des dons divins, condition du progrès spirituel. 2. Importance des actions de grâce.

1. La reconnaissance des dons divins, condition du progrès spirituel.
2. Importance des actions de grâce.

En théologie morale, la gratitude est considérée comme une partie potentielle de la vertu de justice. Selon saint Josémaria, la justice nous porte à considérer notre dépendance vis à vis de Dieu et à reconnaître les biens abondants qu'Il nous accorde, pour nous remplir de gratitude et du désir de répondre à un Père qui nous aime à la folie ; cela suscite l'esprit de piété filiale qui nous fera traiter Dieu avec tendresse de cœur (cf. Amis de Dieu 167). Il synthétise ainsi sa profonde compréhension des relations entre la gratitude, l'amour de Dieu et la filiation divine. Et, en même temps, il aide à percevoir que, comme conséquence de la paternité universelle de Dieu, la vertu chrétienne de justice nous pousse à nous montrer reconnaissants, affables et généreux envers les autres (cf. Amis de Dieu 169).

1. La reconnaissance des dons divins, condition de progrès spirituel

Les écrits de saint Josémaria soulignent que la personne reconnaissante possède une profonde humilité personnelle (cf. Quand le Christ Passe 3) et la conscience de sa propre petitesse (cf. Forge 174), qui lui fait tout recevoir comme un don immérité (cf. Forge 365), qu'il s'agisse d'une joie ou d'une peine, que cela vienne de Dieu ou, apparemment, des hommes (cf. Chemin 658 894). En percevant le don reçu, cette personne est consciente de l'amour que le don exprime et répond avec un amour reconnaissant qui se répand en actions de grâces (cf. Forge 904). La clé des actions de grâces propres à la vertu de gratitude est donc l'amour ; l'amour humain qui répond à l'Amour divin (cf. Chemin de Croix, Cinquième Station).

La tradition chrétienne attache une grande importance aux actions de grâces dans la liturgie. Saint Josémaria fait écho à cette praxis en invitant à rendre grâce pour le don que Dieu fait de Lui-même dans l'Eucharistie (cf. Forge 27 et 304 ; Quand le Christ Passe 88) et dans les autres sacrements (cf. Forge 11 ; Chemin 521) ; et il appelle même à faire retentir des chants (cf. Chemin 523-524) en union avec la liturgie céleste (cf. Ap 1, 6 ; 4, 11 ; 5, 13). Il souligne en particulier l'importance de l'action de grâces après la communion : « Notre amour pour le Christ qui s'offre à nous, nous pousse à savoir trouver, à la fin de la Messe, quelques minutes pour une action de grâces personnelle, intime, qui prolonge dans le silence du cœur cette autre action de grâces qu'est l'Eucharistie »(Quand le Christ Passe 92).

Divers auteurs spirituels ont lié la gratitude au don de piété et à l'action du Saint-Esprit dans l'âme, mettant en évidence ce que l’on appelle prière de gratitude, également en dehors de la liturgie. Dans ce sens, saint Josémaria nous encourage à favoriser une attitude constante d'action de grâces, cette pratique de piété trouvant son fondement dans le sens de la filiation divine. Le chrétien qui se sait enfant de Dieu le Père dans le Fils, animé par l'Esprit Saint, est capable de vivre dans une constante et humble gratitude filiale envers son Père, et manifeste ainsi sa conscience de la présence aimante de son Père et de dons divins dans tout ce qui lui arrive (cf. Amis de Dieu 44-45 et 149 ; Forge 173, 221 et 365 ; Chemin 608).

Dans les écrits de saint Josémaria, se trouvent citées de nombreuses raisons différentes pour rendre grâce à Dieu, depuis la plus humaine et la plus facile (cf. Forge 16, 19, 174 ; Sillon 85 ; Amis de Dieu 247), jusqu'à la vocation à la sainteté (cf. Quand le Christ passe 32 ; Forge 279, 904 ; Sillon 454 ; Chemin 913), voire la tentation (cf. Forge 313) ou l'échec (cf. Chemin 404) ; ou comme le font les enfants : « As-tu bien observé comment les enfants remercient ? — Imite-les en disant comme eux à Jésus, pour ce qui t’est favorable comme pour ce qui t’est adverse : “ Que tu es bon, que tu es bon !… ” Cette affirmation bien sentie, c'est le chemin d’enfance. Elle t'obtiendra la paix, certes avec une bonne mesure de rires et de larmes, mais avec aussi un Amour sans limites ni mesure. »(Chemin 894).

L'invitation à être reconnaissant et à aimer la Croix comme don du Christ (cf. C 773, C 776) a un sens profond, car elle met en lumière un élément important du progrès spirituel, l'identification au Christ : « Ut in gratiarum semper actione maneamus ! Mon Dieu, merci, merci pour tout : pour ce qui me contrarie, pour ce que je ne comprends pas, pour ce qui me fait souffrir. Les coups sont nécessaires pour arracher du bloc de marbre ce qui est superflu. C'est ainsi que Dieu sculpte dans les âmes l'image de son Fils. Remercie le Seigneur de ces délicatesses ! » (VC, VI Station ; cf. Forge 609).

La gratitude, l'action de grâce à Dieu, doivent s'exprimer dans un amour manifesté dans des œuvres et en vérité (cf. Forge 866), dans les œuvres de service (cf. Forge 891), dans des résolutions concrètes d'amélioration (cf. Chemin 298 ; Forge 279), et dans l'apostolat (cf. Sillon 2, 184 ; Forge 27). Ce n'est qu'ainsi que l'on correspond sincèrement et véritablement au grand amour que Dieu a pour nous, ses enfants. Nous devons remercier, avec notre amour, pour l'amour qui a conduit le Christ à s'incarner, à vivre et à mourir pour tous les hommes (cf. Sillon 813). « Veux-tu savoir comment remercier le Seigneur de ce qu'Il fit pour nous ?... Avec ton amour ! Il n'y a pas d'autre chemin. L'amour se paie avec de l'amour. Mais c'est le sacrifice qui témoigne de l'amour véritable. Courage, donc ! renonce à toi-même et prends sa Croix. Tu seras sûr alors de Lui rendre amour pour Amour » (Chemin de Croix, V Station).

2. Importance des actions de grâces

La croissance en sainteté présuppose la gratitude, la reconnaissance effective des dons de Dieu, en percevant son amour dans tout ce qui nous arrive. Et cette gratitude est appelée à s'exprimer en actions de grâces.

Cette spirale continue - de l'Amour gratuit de Dieu à l'amour reconnaissant envers Dieu - conduit à l'union définitive de l'enfant de Dieu avec le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Ce fut le cas dans la vie de saint Josémaria comme en témoignent quelques paroles prononcées le 27 mars 1975, veille du cinquantième anniversaire de son ordination sacerdotale, trois mois seulement avant sa mort : « Seigneur, merci pour tout. Merci beaucoup ! Je t'ai rendu grâces ; habituellement, je t'ai rendu grâces. Avant de répéter désormais ce cri liturgique - gratias tibi, Deus, gratias tibi ! - je le disais avec mon cœur ... parce que nous n'avons pas d'autre raison que de rendre grâces ... la vie de chacun doit être un chant d'action de grâces ... rendre grâces, c'est une obligation capitale. Ce n'est pas une obligation d'un instant ... c'est un devoir constant, une manifestation de vie surnaturelle, une façon humaine et divine à la fois de correspondre à ton Amour, qui est divin et humain » (cité dans BERNAL, 1976, 116-118).


Thèmes connexes : Contemplatifs au milieu du monde ; Prière ; Présence de Dieu.

Bibliographie : Salvador Bernal Mons. Josemaría Escrivá de Balaguer. Apuntes sobre la vida del Fundador del Opus Dei, Madrid, Rialp, 19763 ; Francisco Fernández-Carvajal– Pedro Beteta López Hijos de Dios. La filiación divina que vivió y predicó el Beato Josemaría Escrivá Madrid, Palabra, 19963 ; Fernando Ocáriz Naturaleza, gracia y gloria, Pamplona, EUNSA, 20012 ; Alexis RiaudLa acción del Espíritu Santo en las almas Madrid, Palabra, 19832.

Catherine Dean