Le départ vers un nouvel avenir
En août 2023, j’ai pris ma petite fille, âgées d’à peine quatre ans, et j’ai quitté le Nigéria où j’ai laissé mon mari et mes trois autres filles aînées, en quête d’un avenir meilleur pour mes enfants au Canada. J’ai aussi laissé mon père, veuf, et ma belle-mère, dont je m’occupais. Je suis partie le cœur rempli de rêves et d’espérance pour ma famille.
La transition n’a pas été facile. Le choc culturel était immense : je me sentais seule, les journées me paraissaient interminables, et les nuits encore plus. Pourtant, je me suis accrochée à ma foi, convaincue que la Sainte Vierge, consolatrice des migrants, m’accompagnait sur ce chemin. Je continuais d’avancer, certaine que Dieu avait un dessein pour chaque étape de ma vie, comme le dit Jérémie (cf. Jr 29,11). Nous étions des pèlerins de l’espérance.
J’ai essayé de bâtir un foyer dans ce nouveau pays, puis mes filles jumelles m’ont rejointe : il me manquait toujours mon mari et ma fille aînée, mais une partie de ma famille était à mes côtés.
Tout est parti en fumée
Mais en mars 2024, la tragédie s’est invitée dans notre vie. En l’espace de quarante minutes, nous avons perdu notre maison. En pleine nuit, un voisin bienveillant a frappé à notre porte en criant : « Au feu ! ». À son cri d’alarme, je n’ai pensé qu’à une chose : prendre mes papiers et sauver mes enfants. C’est ce que j’ai fait. Nous avons pu nous échapper et, dehors, nous avons vu tout ce que nous possédions partir en flammes.
La perte et la douleur m’ont presque submergée. J’ai remis en question beaucoup de choses : ma décision d’émigrer, ma foi, tout. Pourtant, je trouvais consolation dans une certitude : je suis fille de Dieu. Rien ne m’arrive en dehors de son regard. Cela me donnait espérance et confiance dans le fait que tout finirait par s’arranger.
Je répétais constamment dans ma prière : omnia in bonum – tout concourt au bien. Je savais que tout servirait à mon bien et à celui de ma famille. Mes enfants et moi puisions notre force dans les paroles de saint Josémaria, fondateur de l’Opus Dei, qui invitait toujours à garder une vision surnaturelle, quelles que soient les circonstances. Ces paroles m’ont soutenue dans les nuits sans sommeil et les moments de désespoir.
Pour autant la réalité de tout ce que nous avions perdu restait dure : nous n’arrêtions pas de compter, de constater nos manques. Mes enfants demandaient souvent comment nous allions vivre sans notre maison et nos affaires.
Mais l’Esprit Saint nous consolait quand nous repensions à ces mots de Chemin : « Contente-toi de ce qui suffit pour une vie simple et sobre. Sinon, tu ne seras jamais apôtre » (n° 631). Nous avons appris à nous détacher affectivement des biens matériels, et, au cœur même de la douleur, l’espérance et la consolation nous ont rejoints.
Dieu s’est manifesté à nous à travers le soutien des femmes de l’Opus Dei, de mes collègues de travail, de mon université et des habitants de notre ville : tous ont contribué à essuyer nos larmes et nous ont aidés à reprendre pied. Nous avons été consolés par d’innombrables gestes de bonté : repas, vêtements, dons… tant d’inconnus sont devenus instruments de la tendresse divine.
Une étincelle d’espérance
L’incendie a eu lieu pendant le Carême, juste avant la Semaine Sainte. Nous avons reçu tous les sacrements et suivi le Christ dans sa Passion, unissant nos souffrances aux siennes, déposant nos angoisses et nos fardeaux sur la Croix. Quand tout paraissait sombre, nous nous sommes accrochés à ses promesses : sa miséricorde nous a renouvelés et consolés.
Par la grâce de Dieu, quelques jours après l’incendie, nous avons reçu un logement plus grand et plus confortable, dans un beau quartier. Une bénédiction qui a redonné de la joie à notre famille et nous a rappelé que les projets de Dieu dépassent toujours les nôtres. Ce qui semblait être la fin s’est révélé être un nouveau départ, plein d’espérance et de gratitude.
De cette épreuve, j’ai appris qu’il ne faut jamais perdre de vue notre filiation divine. Nous devons vivre en enfants de Dieu, conscients qu’Il nous aime profondément et prend soin de nous. Notre unique espérance est en Lui.
Saint Augustin, qui avait cherché le bonheur loin de Dieu, écrivait : « Tu nous as faits pour toi, Seigneur, et notre cœur est sans repos tant qu’il ne demeure en toi ». Et saint Josémaria ajoutait : « Rien n’est peut-être plus tragique dans la vie d’un homme que ces méprises dues à la corruption et à la falsification de l’espérance, quand celle-ci est présentée en dehors de la perspective de l’Amour, qui rassasie sans rassasier » (Amis de Dieu, n° 208).
Dieu est notre unique source véritable d’espérance et de consolation. Toujours, Il nous invite à venir tels que nous sommes, pour recevoir son aide, son réconfort et sa paix dans l’épreuve. Cultivons l’habitude de nous abandonner entre les mains généreuses de notre Père plein d’amour.
