- L'Esprit Saint nous dévoile l'amour de Dieu
- L'amour de Dieu renouvelle, pardonne et donne des forces
- Donner et accueillir l'amour de Dieu
« IL Y A ENCORE beaucoup d’autres choses que Jésus a faites ; et s’il fallait écrire chacune d’elles, je pense que le monde entier ne suffirait pas pour contenir les livres que l’on écrirait » (Jn 21, 25). L’amour de Dieu ne tient pas dans un livre ni dans une formule. Il n’y a pas de mots pour l’expliquer ; car il est ineffable, nous ne pouvons pas le saisir totalement ni l’enfermer dans nos schémas mentaux. L’amour est un des fruits de l’Esprit Saint et c’est précisément à lui que nous devons demander, en cette veille de sa fête, de nous parler de cet amour. C’est lui qui nous rappellera, jour après jour, qu’« une œuvre du Christ est une œuvre d’amour :amour de Celui qui s’est offert, amour du Père qui l’a donné » [1]. Le mot amour est si souvent employé que nous pouvons avoir parfois l’impression qu’il a perdu de sa force. Cependant, le Paraclet saura faire vibrer dans notre âme l’unique amour qui ne connaît ni trahison ni fatigue.
Saint Clément Romain écrit, à la fin du 1er siècle : « Qui pourra expliquer correctement le lien que l’amour divin établit ? Qui pourra rendre compte de la grandeur de sa beauté ? L’amour nous élève à des hauteurs ineffables. L’amour nous unit à Dieu, l’amour couvre la multitude des péchés, l’amour supporte tout, supporte tout avec patience ; il n’y a rien de sordide ni de hautain en lui ; l’amour n’admet pas les divisions, ne favorise pas la discorde, mais fait tout dans la concorde […]. Par amour pour nous, notre Seigneur Jésus-Christ, accomplissant la volonté du Père, a donné son sang pour nous, sa chair pour notre chair, sa vie pour notre vie. Vous voyez, frères bien-aimés, combien l’amour est grand et admirable et combien sa perfection est indicible. Personne n’est capable de la pratiquer correctement, si Dieu ne lui accorde pas ce don » [2]
Nous avons cherché, peut-être trop souvent, des succédanés, ou nous avons pensé ne pas avoir besoin de cette affection. Trop souvent, comme le fils prodigue et son frère, nous avons rêvé d’un bonheur loin de notre Père et de notre foyer. Conscients de notre fragilité, nous pouvons faire appel au Paraclet pour qu’il nous fasse savourer l’amour que Dieu veut nous offrir. « Car l’Esprit scrute le fond de toutes choses, même les profondeurs de Dieu » (1 Co 2, 10). De quelles profondeurs notre cœur est-il invité à jouir ? « Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez dans mon amour » (Jn 15, 9), a dit Jésus. Nous ne voulons pas quitter cet amour.
« VOICI en quoi consiste l’amour : ce n’est pas nous qui avons aimé Dieu, mais c’est lui qui nous a aimés, et il a envoyé son Fils en sacrifice de pardon pour nos péchés » (1 Jn 4, 10). Nous pouvons « tout d’abord, penser à ce que Dieu a fait et fait pour moi, ne pas prétendre fonder ma sécurité sur ce que j’ai fait et je fais pour Dieu, car ce sera toujours peu (mes pauvres choses). En réalité, ce que je fais sera un don de Dieu » [3]. Nous pourrions, presque d’instinct, succomber à la tentation de concevoir et de vivre notre rapport à Dieu comme si nous n’en avions pratiquement pas besoin. Or, la dynamique de l’amour de Dieu est bien différente. « Toutes les bonnes choses viennent du Seigneur, et sans lui, vous ne pouvez pas commencer et perfectionner non seulement un peu, mais absolument rien » [4]. C’est pourquoi il est encore plus important dans ce domaine d’être guidé par un maître qui nous conseille. Saint Josémaria était fermement persuadé d’avoir besoin de l’Esprit Saint : « Je sens l’Amour en moi, et je veux Le fréquenter, être son ami, son confident, lui faciliter le travail de polir, d’arracher, d’allumer… Pourtant je ne saurai pas le faire, c’est Lui qui m’en donnera les forces, c’est lui qui fera tout, si je veux… et je veux ! Hôte Divin, Maître, Lumière, Guide, Amour : que cette pauvre âme sache te faire bon accueil, et écouter tes leçons, et s’enflammer, et te suivre et t’aimer. Résolution : entretenir, sans interruption si possible, l’amitié et la fréquentation amoureuse et docile avec l’Esprit Saint. Veni Sancte Spiritus ! » [5]
Nous pouvons formuler la même résolution et permettre à l’Esprit de rendre plus fort notre cœur. Un lieu privilégié pour bien nous disposer à son action est la confession : «Le Malin nous pousse à regarder notre fragilité avec un jugement négatif. Au contraire, l’Esprit la met en lumière avec tendresse. La tendresse est la meilleure manière de toucher ce qui est fragile en nous. Le fait de montrer du doigt et le jugement que nous utilisons à l’encontre des autres sont souvent un signe de l’incapacité à accueillir en nous notre propre faiblesse, notre propre fragilité. […] C’est pourquoi il est important de rencontrer la Miséricorde de Dieu, notamment dans le Sacrement de la Réconciliation, en faisant une expérience de vérité et de tendresse. Paradoxalement, le Malin aussi peut nous dire la vérité. Mais s’il le fait, c’est pour nous condamner. Nous savons cependant que la Vérité qui vient de Dieu ne nous condamne pas, mais qu’elle nous accueille, nous embrasse, nous soutient, nous pardonne» [6].
IL SE PEUT que, souvent, dans nos relations avec Dieu nous fassions davantage attention à ce que nous donnons qu’à ce que nous recevons, bien sûr inconsciemment. C’est un angle d’attaque qui nous limite parce que, involontairement, nous nous plaçons face à Dieu au lieu de nous mettre à côté de lui. Il est important de purifier, toujours plus, l’image de Dieu que nous nous sommes formée. « Si nous avons à l’esprit un Dieu qui prend, qui s’impose, nous voudrons nous aussi prendre et nous imposer : occuper des espaces, réclamer de la considération, rechercher du pouvoir. Mais si nous avons dans le cœur Dieu qui est don, tout change. […] L’Esprit, mémoire vivante de l’Église, nous rappelle que nous sommes nés d’un don et que nous grandissons en nous donnant ; non pas en nous conservant, mais en nous donnant » [7].
Il peut aussi nous arriver de faire attention à ce que nous recevons, mais en le considérant comme un droit. « Regardons-nous du dedans et demandons-nous, qu’est ce qui nous empêche de nous donner. Il existe, disons, trois ennemis du don, les principaux, trois, tapis toujours à la porte de notre cœur : le narcissisme, le fait de se poser en victime et le pessimisme. Le narcissisme fait s’idolâtrer soi-même, il fait se complaire seulement de ses propres intérêts. […] Le fait de se poser en victime, est dangereux. Celui qui se prend pour une victime se plaint tous les jours de son prochain : “Personne ne me comprend, personne ne m’aide, personne ne m’aime, tous sont contre moi !” Que de fois avons-nous entendu ces lamentations ! […] Enfin il y a le pessimisme. Ici la litanie quotidienne est : “Rien ne va bien, la société, la politique, l’Église…”. Le pessimiste s’en prend au monde, mais il reste inerte et pense : “De toute façon à quoi sert-il de donner ? C’est inutile” » [8].
Nous demandons à la Vierge Marie de nous apprendre à accueillir l’amour divin comme elle l’a fait, en faisant nôtres quelques mots de saint Josémaria : « À cause de tes chutes involontaires — chutes d’enfant — Dieu ton Père ne te portera que plus d’attention, sans oublier que la main affectueuse de Marie ta Mère ne lâchera pas la tienne. Profites-en, et lorsque chaque jour le Seigneur te relève, embrasse-le de toutes tes forces et pose ta pauvre tête sur sa poitrine ouverte, pour que les battements de son Cœur infiniment aimable achèvent de te rendre fou » [9].
[1]. Benoît XVI, Homélie, 4 juin 2006.
[2]. Saint Clément Romain, Lettre aux Corinthiens, ch. 49-50.
[3]. Mgr Fernando Ocariz, A la lumière de l’Évangile.
[4]. Saint Bernard, In festivitate Pentecostes sermo, 2, 6.
[5]. Saint Josémaria, Notes intimes, n° 864.
[6]. Pape François, Patris corde, n° 2.
[7]. Pape François, Homélie, 31 mai 2020.
[8]. Ibid.
[9]. Saint Josémaria, Chemin, n° 884.