La traduction du texte est de Zenit (zenit.org)
Mon nom est Massimo Tellan. Je suis prêtre depuis quinze ans, curé à Casal Monastero, secteur nord, depuis six ans. Je crois que nous nous rendons tous compte que nous vivons toujours plus plongés dans un monde culturellement submergé de paroles, souvent privées de signification, qui désorientent le cœur humain à un tel point qu'elles le rendent sourd à la parole de vérité.
Cette Parole éternelle qui s'est faite chair et qui a pris un visage en Jésus de Nazareth devient ainsi pour beaucoup de personnes évanescente et, en particulier pour les nouvelles générations, inconsistante et lointaine. Dans tous les cas, elle est confuse dans la jungle d'images ambiguës et éphémères dont nous sommes quotidiennement bombardés.
Quelle place laisser alors à l'éducation à la foi, à ce binôme de paroles à accueillir et d'images à contempler ? Où se trouve l'art de raconter la foi et d'introduire au mystère, comme cela se produisait par le passé avec la biblia pauperum ? Dans la société actuelle des images comment pouvons-nous retrouver la force débordante de la vue qui accompagne le mystère de l'incarnation et de la rencontre avec Jésus, comme cela eut lieu pour Jean et André sur les rives du Jourdain, invités à aller et voir où habitait le maître ? En d'autres termes : comment éduquer à la recherche et à la contemplation de cette véritable beauté qui, comme l'écrivait Dostoïevski, sauvera le monde?
Benoît XVI : Merci pour ce très beau cadeau. Je suis reconnaissant que nous n'ayons pas que des mots, mais également des images. Nous voyons que de la méditation chrétienne naissent aujourd'hui aussi de nouvelles images, nous voyons que la culture chrétienne, que l'iconographie chrétienne renaît.Oui, nous vivons dans l'inflation des paroles, des images. Il est donc difficile de laisser de la place à la parole et à l'image. Il me semble que précisément dans la situation de notre monde, que nous connaissons tous, qui est également une souffrance pour nous, la souffrance de chacun, le temps de Carême acquiert une nouvelle signification.
Le jeûne physique, qui pendant un certain temps n'était plus considéré à la mode, apparaît aujourd'hui à tous comme nécessaire. Il n'est pas difficile de comprendre que nous devons jeûner. Nous nous trouvons aussi parfois face à certaines exagérations dues à un idéal de beauté erroné. Mais le jeûne physique est cependant une chose importante, car nous sommes corps et âme et la discipline du corps, la discipline également matérielle, est importante pour la vie spirituelle qui est toujours une vie incarnée dans une personne qui est corps et âme.
Cela est une dimension. Aujourd'hui se développent et se manifestent d'autres dimensions. Il me semble que le temps de Carême pourrait précisément aussi être un temps de jeûne des paroles et des images. Nous avons besoin d'un peu de silence, nous avons besoin d'un espace sans le bombardement permanent des images. C'est pourquoi il est très important aujourd'hui de rendre accessible et compréhensible la signification de quarante jours de discipline extérieure et intérieure, pour nous aider à comprendre qu'une dimension du Carême, de cette discipline physique et spirituelle, est celle de se créer des espaces de silence et aussi des espaces sans images, pour ouvrir à nouveau notre cœur à la véritable image et à la véritable parole.
Il me semble prometteur de constater aujourd'hui qu'il y a une renaissance de l'art chrétien, aussi bien d'une musique pour la méditation - comme par exemple celle qui est née à Taizé - que d'un art chrétien, pour revenir à l'art de l'icône, qui reste attaché d'une certaine manière aux grandes normes de l'art de l'iconologie du passé, mais en s'ouvrant aux expériences et aux visions d'aujourd'hui. Là où il y a une méditation approfondie de la Parole, où nous entrons réellement dans la contemplation de cette visibilité de Dieu dans le monde, de cette tangibilité de Dieu dans le monde, naissent également de nouvelles images, de nouvelles possibilités de rendre visibles les événements du salut. Telle est précisément la conséquence de l'événement de l'incarnation.
L'Ancien Testament interdisait toute image et il devait l'interdire dans un monde plein de divinités. Il vivait justement dans le grand vide qui était également représenté par l'intérieur du temple, où, contrairement aux autres temples, il n'y avait aucune image, mais seulement le trône vide de la Parole, la présence mystérieuse du Dieu invisible, non défini par nos images. (...)