- Faire confiance au bonheur qui vient de Dieu
- La promesse de la joie traverse l’Évangile
- Les peines et les joies du chrétien
« DANS LES béatitudes, Jésus-Christ nous offre les clés qui ouvrent les portes du ciel… et du bonheur sur cette terre » [1]. Cependant, notre cœur a du mal à croire qu’il trouvera la joie dans la pauvreté, la faim, les pleurs ou la persécution. Le Seigneur insiste en utilisant deux verbes très expressifs pour indiquer le but de ce parcours : « réjouissez-vous, tressaillez de joie » (Lc 6, 23).
Ces contradictions apparentes nous invitent « à réfléchir sur le sens profond de la foi, qui consiste à mettre totalement sa confiance dans le Seigneur. Il s’agit d’abattre les idoles du monde pour ouvrir notre cœur au Dieu vivant et vrai ; lui seul peut donner à notre existence cette plénitude tant désirée et pourtant si difficile à atteindre. Nombreux sont ceux, même de nos jours, qui se présentent comme des dispensateurs de bonheur […]. Et là, il est facile de tomber involontairement dans le péché contre le premier commandement, l’idolâtrie, en remplaçant Dieu par une idole. L’idolâtrie et les idoles semblent être des choses d’autres temps, mais en réalité elles sont de tous les temps ! » [2]
« Dieu veut nous ouvrir, dit le prélat de l’Opus Dei, un panorama de grandeur et de beauté, qui est peut-être caché à nos yeux. Il est nécessaire d’avoir confiance en lui, de faire un pas vers sa rencontre, et d’enlever la peur de penser que, si nous le faisons, nous perdrons beaucoup de bonnes choses dans la vie. Sa capacité à nous surprendre est bien plus grande que toutes nos attentes » [3]. Cela ne signifie pas que la vie chrétienne consiste à accumuler des souffrances sur la terre pour pouvoir ensuite jouir du ciel ; Jésus veut que nous soyons heureux ici aussi, mais il ne veut pas que notre bonheur dépende de l’éphémère, de ce qui passe vite, mais de ce qui est vraiment vrai, de la seule chose capable d’étancher notre soif d’infini.
SI L’ON SE SOUVIENT de l’annonce de l’archange Gabriel à Marie, « on peut dire que le premier mot du Nouveau Testament est une invitation à la joie : “soyez heureux”, “réjouissez-vous”. Le Nouveau Testament est vraiment un “Évangile”, une “bonne nouvelle” qui nous apporte la joie. Dieu n’est pas loin de nous, il n’est pas inconnu, énigmatique, peut-être dangereux. Dieu est proche de nous » [4]. Cette irruption d’une joie nouvelle dans le monde traverse tout l’Évangile et trouve un point de révélation dans les Béatitudes. Jésus est celui qui comprend le mieux la nouveauté de ce qu’il dit. C’est pourquoi, si nous nous souvenons des moments qui nous ont rendus vraiment heureux, peut-être pourrons-nous découvrir qu’ils ne sont pas toujours basés sur la richesse, le plaisir ou le confort.
« La joie n’est pas l’émotion d’un moment : c’est autre chose ! La vraie joie ne vient pas des choses, de l’avoir, elle vient de la rencontre, de la relation avec les autres ; elle vient du fait de se sentir accepté, compris, aimé et du fait d’accepter, de comprendre et d’aimer » [5]. Il est logique que nous identifiions parfois la joie que Jésus nous promet avec quelque chose qui se produira dans le futur. Cependant, ses paroles sont également efficaces aujourd’hui, dans notre vie quotidienne. Ceux qui ont confiance en Dieu sont mieux préparés à se laisser aimer. Celui qui a confiance en Dieu est plus disposé à laisser les revers de fortune lui rappeler constamment que le vrai bonheur ne peut être trouvé qu’en compagnie de Dieu.
En tant qu’enfants de Dieu, créés à son image, nous n’aspirons pas à un bonheur fini, mais à partager le même bonheur que notre Père céleste. Jésus nous a promis que sa seule préoccupation est que sa joie soit en nous afin que notre joie soit complète (cf. Jn 15, 11). Par conséquent, le premier à se soucier de notre propre bonheur est Dieu lui-même, et cela nous remplit de consolation.
QUEL EST le principal obstacle à notre joie ? Avec la foi, nous pouvons affirmer que le seul mal qui peut nous conduire à la tristesse est le péché. Tous les autres malheurs le sont dans la mesure où nous n’avons pas encore jugé les choses du point de vue de Dieu. « Le Seigneur veut que nous soyons heureux, disait saint Josémaria, je vois mes enfants toujours heureux, avec une joie surnaturelle, avec quelque chose de si intime qu’elle est compatible avec les douleurs et les contrariétés de notre vie sur terre » [6]. Comme le souligne également saint Jean Chrysostome : « Sur terre, même la joie se termine souvent par la tristesse ; mais pour ceux qui vivent selon le Christ, même la tristesse se transforme en joie » [7].
Peut-être pensons-nous parfois que nous méritons une certaine tristesse, en raison de notre manque de correspondance. Toutefois, cette approche suppose que nous ne pouvons être heureux que si nous avons parfaitement accompli tout ce que nous nous sommes fixés. Alors que nous sommes sur le chemin de l’identification à Jésus-Christ, la joie à laquelle le Seigneur nous appelle « ne repose pas sur nos vertus : ce n’est pas une vaine autosatisfaction, mais elle est construite sur la faiblesse et la fragilité humaines elles-mêmes. Connaître sa propre faiblesse, faire l’expérience de la présence de l’adversité en nous-mêmes, peut et doit faire place à la joie » [8]. Comme le répétait le fondateur de l’Opus Dei : « Soyez-en convaincus : le Seigneur ne veut pas nos misères, mais il ne les méconnaît pas pour autant, et il compte précisément sur ces faiblesses pour que nous devenions plus saints » [9].
La vraie joie ne peut être trouvée que dans l’amour infini et immérité que Dieu nous offre. Et notre mère Marie a accueilli inconditionnellement le Seigneur dans son sein. C’est pourquoi elle est capable d’affirmer, pleine d’humilité, que « tous les âges me diront bienheureuse » (Lc 1,48). Nous pouvons lui demander de nous faire percevoir et apprécier cette même joie.
[1]. Mgr Fernando Ocariz, A la lumière de l’Évangile,p. 69.
[2]. Pape François, Angélus, 17 février 2019.
[3]. Mgr Fernando Ocariz, Se laisser surprendre par un Père bon, 17 janvier 2019.
[4]. Benoît XVI, Homélie, 18 décembre 2005.
[5]. Pape François, Discours, 6 juillet 2013.
[6]. Saint Josémaria, Homélie, 26 mai 1974.
[7]. Saint Jean Chrysostome, Homélie sur Saint Matthieu, 18.
[8].Mgr Fernando Ocariz, A la lumière de l’Évangile, p. 172.
[9]. Saint Josémaria, Amis de Dieu, n° 215.