L'empreinte discrète du bienheureux Alvaro del Portillo à Bagdad

Un an après la béatification d’Alvaro del Portillo, les ornements de la célébration liturgique du 27 septembre servent aujourd’hui à célébrer la Messe à Bagdad, au sein des communautés de chrétiens persécutés par l’État Islamique.

Photo : Aide à l'Eglise en Détresse (AED)

Depuis qu’elles furent expulsées de leur couvent situé au nord de l’Irak, il y a plus de deux ans, les religieuses du Sacré-Cœur de Jésus sont responsables de l’entretien de la paroisse Notre Dame-du-Rosaire, à Bagdad

Le patriarche les a hébergées dans un couvent attenant à l’église et à une école primaire dont les biens, expropriés par l’État, viennent d’être récupérés. L’an dernier, avec le soutien d’un programme de la Fondation Promotion Sociale de la Culture (Promoción Social de la Cultura), ces religieuses accueillirent dans cette école dix familles de réfugiés chrétiens.

Jusqu’à il y a encore peu de temps, un spectateur occidental aurait trouvé invraisemblable que l’on puisse être persécuté au nom de ses croyances. Pourtant, les assassinats et les persécutions qui poussent les populations à venir se réfugier dans nos pays nous font toucher du doigt, en plein XXIème siècle, la réalité du martyre et la nécessité de sauvegarder le droit fondamental à la liberté religieuse.

Hormis la foi, ils ont tout perdu

Pour les membres de cette petite communauté chrétienne de Bagdad, pratiquer leur foi, se retrouver à l’église pour célébrer ensemble les sacrements -tout spécialement la Sainte Messe- est une nécessité vitale. Hormis la foi, ils ont tout perdu. Mais rendre un culte à Dieu dans un environnement hostile, où les églises n’ont parfois plus de toiture, n’est pas évident.

Aussi, quelle n’a pas été leur joie quand ils ont découvert, en même temps que l’aide humanitaire, les colis contenant les ornements liturgiques utilisés le 27septembre 2014 à Madrid, pour la cérémonie de la béatification d’Alvaro del Portillo. L’église de l’Assomption et son curé en ont bénéficié également. En effet, en décembre dernier, le Père Robert Jarjis était entré en contact avec Jumana Trad, présidente de la Fondation Promotion sociale de la culture, pour lui demander de lui procurer des ornements pour célébrer la sainte messe.

Alvaro del Portillo venait d’être béatifié et l’atelier de couture « Coser y cantar »(« coudre et chanter ») qui avait créé le linge liturgique pour cette occasion, tenait justement à le faire parvenir aux chrétiens d’Orient, avec la prière des milliers de catholiques du monde entier qui avaient participé à cette cérémonie.

C’est ainsi qu’en 2015, ces objets liturgiques, portés par une communion des saints très spéciale, firent un long voyage pour aller de Valdebebas (Madrid) à Bagdad.

Ces objets liturgiques, portés par une communion des saints très spéciale, ont fait un long chemin de Valdebebas à Bagdad.

Jumana a informé les responsables de « Coser y Cantar » de l’arrivée du dernier colis remis ces jours-ci à Bagdad :

« Le Père Robert a été très ému de recevoir le cadeau de ces ornements. Ce type d’ornements faisant défaut à Bagdad, il avait projeté d’en acheter quelques-uns au cours de son prochain séjour en Italie et d’en offrir aux prêtres de différentes paroisses à son retour. Les religieuses, quant à elles, en ont vendus à d’autres prêtres pour se procurer les fonds nécessaires à leur subsistance. Elles n’en reviennent pas et se réjouissent que ces objets créés à des milliers de kilomètres soient arrivés jusqu’à elles. »


Du tissu pour les familles musulmanes et pour les camps de réfugiés chrétiens
« Le Père Robert se sert de quelques nappes d’autel, dont la plus grande vient de l’autel de la béatification, poursuit Jumana. L’an dernier, elle fut utilisée pour la Messe de commémoration du 31 octobre en l’église de Notre Dame-du-Salut où plus de cinquante fidèles chrétiens avaient été tués en 2010 ».

Cette église, de rite chaldéen, située dans le quartier de Karrada, fut investie par un groupe de djihadistes de l’État Islamique. Toutes portes closes, ils y ont séquestré plus de cent fidèles qui assistaient à la messe dominicale.

Un groupe de djihadistes de l’État islamique a tué, en cette Église chaldéenne, cinquante-huit personnes (dont deux prêtres) et blessé soixante-quinze autres personnes.

Ils ont tiré sur les statues sacrées et sur les otages provoquant la mort de cinquante-huit personnes, dont deux prêtres, et blessant soixante-quinze autres personnes.

En même temps que ces ornements, « Coser y cantar » a aussi envoyé Bagdad des tissus à usage multiple. Les religieuses en ont remis certains à des familles musulmanes avec lesquelles elles étaient en contact. D’autres se retrouvent aujourd’hui dans un camp de réfugiés chrétiens de Bagdad, au sein d’un dispensaire mobile qui offre une assistance médicale à 124 familles.

Et Jumana de conclure : « Telle est la discrète empreinte du bienheureux Alvaro del Portillo que l’on retrouve aujourd’hui un peu partout à Bagdad ».