L'effusion de l'Esprit Saint donne naissance à l'Eglise

Voici plusieurs extraits de l'homélie de Benoît XVI, prononcée le jour de la Pentecôte 2008, pour nous aider à préparer la venue de l'Esprit Saint.

Cette communauté se trouvait réunie dans le même lieu, le Cénacle, le matin de la fête juive de la Pentecôte, fête de l'Alliance, où l'on faisait mémoire de l'événement du Sinaï, lorsque Dieu, à travers Moïse, avait proposé à Israël de devenir sa propriété parmi tous les peuples, pour être le signe de sa sainteté (cf. Ex 9). Selon le Livre de l'Exode, ce pacte antique fut accompagné par une manifestation de puissance terrifiante de la part du Seigneur:  "Or la montagne du Sinaï - y lit-on - était toute fumante, parce que Yahvé y était descendu dans le feu; la fumée s'élevait comme d'une fournaise et toute la montagne tremblait violemment" (Ex 19, 18). 

Nous retrouvons les éléments du vent et du feu dans la Pentecôte du Nouveau Testament, mais sans aucune connotation de peur. Le feu prend, en particulier, la forme de langues qui se posent sur chacun des disciples, qui furent "tous remplis de l'Esprit Saint" et par l'effet de cette effusion "ils se mirent à parler en d'autres langues" (Ac 2, 4). 

Il s'agit d'un véritable "baptême" de feu de la communauté, une sorte de nouvelle création. Lors de la Pentecôte, l'Eglise est constituée non par une volonté humaine, mais par la force de l'Esprit de Dieu. Et il apparaît immédiatement comment cet Esprit donne vie à une communauté qui est dans le même temps une et universelle, dépassant ainsi la malédiction de Babel (cf. Gn 11, 7-9). En effet, seul l'Esprit Saint, qui crée l'unité dans l'amour et dans l'acceptation réciproque des différences, peut libérer l'humanité de la tentation permanente d'une volonté de puissance terrestre qui veut tout dominer et uniformiser.

Multiplicité et unité de l’Eglise

(…) A partir de l'événement de Pentecôte se manifeste pleinement cette union entre l'Esprit du Christ et son Corps mystique, c'est-à-dire l'Eglise. Je voudrais m'arrêter sur un aspect particulier de l'action de l'Esprit Saint, c'est-à-dire sur le lien entre multiplicité et unité. C'est ce dont parle la deuxième lecture, en traitant de l'harmonie des divers charismes dans la communion du même Esprit. 

Mais dans le récit des Actes que nous avons écouté, ce lien se révèle déjà avec une extraordinaire évidence. Lors de l'événement de la Pentecôte il apparaît clairement qu'une multitude de langues et de cultures différentes appartient à l'Eglise; dans la foi, celles-ci peuvent se comprendre et se féconder réciproquement. Saint Luc veut clairement transmettre une idée fondamentale, c'est-à-dire qu'au moment même de sa naissance l'Eglise est déjà "catholique", universelle. Elle parle dès le début toutes les langues, car l'Evangile qui lui est confié est destiné à tous les peuples, selon la volonté et le mandat du Christ ressuscité (cf. Mt 28, 19). L'Eglise qui naît lors de la Pentecôte n'est pas tout d'abord une communauté particulière - l'Eglise de Jérusalem - mais l'Eglise universelle, qui parle les langues de tous les peuples. De celle-ci naîtront ensuite d'autres communautés dans toutes les parties du monde, des Eglises particulières qui sont toutes et toujours des réalisations de la seule et unique Eglise du Christ. L'Eglise catholique n'est pas cependant une fédération d'Eglises, mais une réalité unique:  la priorité ontologique revient à l'Eglise universelle. Une communauté qui ne serait pas catholique en ce sens ne serait même pas une Eglise.

Le don de la Paix

(…) Cela dit, et pour conclure, l'Evangile de Jean nous offre une parole qui s'accorde très bien avec le mystère de l'Eglise créée par l'Esprit. La parole sortie à deux reprises de la bouche de Jésus ressuscité lorsqu'il apparut au milieu des disciples au Cénacle, le soir de Pâques:  « Shalom - Paix à vous ! » (Jn 20, 19.21). L'expression "shalom" n'est pas un simple salut; elle est beaucoup plus :  elle est le don de la paix promise (Jn 14, 27) et conquise par Jésus au prix de son sang, elle est le fruit de sa victoire dans la lutte contre l'esprit du mal. Elle est donc une paix "non à la manière du monde", mais comme Dieu seul peut la donner.

En cette fête de l'Esprit et de l'Eglise nous voulons rendre grâce à Dieu pour avoir donné à son peuple, choisi et formé parmi toutes les nations, le bien inestimable de la paix, de sa paix! Dans le même temps, nous renouvelons la prise de conscience de la responsabilité qui est liée à ce don:  la responsabilité de l'Eglise d'être constitutionnellement signe et instrument de la paix de Dieu pour tous les peuples. (…)

« Laissez-vous réconcilier avec Dieu »

Parmi ces signes, il faut naturellement souligner principalement le Sacrement de la réconciliation, que le Christ ressuscité institua au moment même où il fit don aux disciples de sa paix et de son Esprit. Comme nous l'avons entendu dans la page évangélique, Jésus souffla sur les apôtres et dit:  « Recevez l'Esprit Saint. Tout homme à qui vous remettrez ses péchés, ils lui seront remis; tout homme à qui vous maintiendrez ses péchés, ils lui seront maintenus » (Jn 20, 21-23). 

Comme le don de la réconciliation, qui n'est malheureusement pas suffisamment compris, est important, car il pacifie les cœurs ! La paix du Christ ne se diffuse qu'à travers des cœurs renouvelés d'hommes et de femmes réconciliés et devenus serviteurs de la justice, prêts à diffuser la paix dans le monde grâce à la seule force de la vérité, sans jamais faire de compromis  avec  la  mentalité  du monde, car le monde ne peut pas donner la paix du Christ:  voilà comment l'Eglise peut-être le ferment de cette réconciliation qui vient de Dieu. Elle ne peut l'être que si elle reste docile à l'Esprit et rend témoignage à l'Evangile, que si elle porte la Croix comme Jésus et avec lui. C'est précisément ce dont témoignent les saints et les saintes de chaque époque !