La joie et la beauté de servir

L’Ecole de Formation Professionnelle (EFP) Yarani forme, depuis 1990, des jeunes filles à des métiers de l’hôtellerie, de la restauration et du milieu sanitaire Nous avons rencontré Marie Odile Cachia, Directrice de l’Ecole et Florence N’Guessan, ancienne élève.

 Marie-Odile, vous dirigez Yarani, qui forme des jeunes filles à des métiers de l’hôtellerie, de la restauration et du milieu sanitaire. Pouvez- nous dire plus sur ce qui a motivé une telle initiative ?

L’école est née de la volonté d’apporter une solution au problème d’insertion professionnelle des jeunes filles et des femmes issues de milieux modestes.

L’EFP Yarani est une initiative d’EDE (Education et Développement), association ivoirienne à but non lucratif. Cette école est née de la volonté d’apporter une solution au problème d’insertion professionnelle des jeunes filles et des femmes issues de milieux modestes ou défavorisés. L’idée est que toute fille ou femme puisse bénéficier d’une formation professionnelle quelque soit son niveau scolaire, lui permettant en fin de compte de trouver rapidement un emploi.

L’objectif principal que s’assigne Yarani est la formation de la femme. Mais cette formation ne se limite pas à apprendre des techniques en vue de réaliser telle ou telle profession, mais plutôt s’attèle à former la femme de façon intégrale. Cette formation doit donc lui permettre non seulement d’assumer un travail dans les collectivités, mais aussi et surtout d’affronter de manière responsable les charges familiales et sociales et de contribuer efficacement à l’ordre et à l’équilibre familial. C’est pour ces raisons que l’Ecole offre une formation humaine fondée sur des principes moraux solides. 

 Comment ces jeunes filles arrivent-elles, à partir de leur travail, à impacter la famille et la société ?

Ces jeunes femmes ont un rôle charnière car tout en apprenant un métier (cuisinière, pâtissière, aide-soignante), elles apprennent également à s’occuper des tâches familiales : cuisine, ménage. C’est un pan de la formation intégrale; à cela s’ajoute le fait de fréquenter les autres, d’apprendre à les comprendre, d’anticiper leurs besoins, autant de qualités qu’elles mettent au service de la famille et par ricochet de la société. Par ailleurs, en réalisant ces tâches, elles ne sont pas désœuvrées ; cela contribue à les rendre contentes, épanouies et équilibrées. C’est cette joie contagieuse qu’elles diffusent dans l’exercice de leur profession et qui rejaillit favorablement sur chaque membre de la famille. 

  Marie Florence : vous avez un CAP d’employée d’hôtel, vous êtes une ancienne élève de Yarani, et vous travaillez comme employée de maison dans une résidence pour étudiantes. Pourquoi avoir choisi ce métier ? Vous sentez-vous épanouie ?

Avant de commencer, je voudrais signifier ma reconnaissance à l’EFP Yarani pour cette polyvalence que j’y ai acquise. A l’origine, j’ai reçu une formation d’employée d’hôtel, mais j’exerce valablement le travail d’employée de maison grâce à la formation intégrale que j’ai reçue à Yarani.

Concernant le métier d’employée d’hôtel, je dois avouer qu’à proprement parler je ne l’ai pas choisi, parce que je voulais travailler dans la santé. Les deux métiers ont en commun le service à la personne. Je me suis finalement orientée vers le métier d’employée d’hôtel grâce au conseil d’une amie. Je dois dire que cette formation a dépassé mes attentes: j’y ai découvert ma vocation professionnelle. Être employée d’hôtel est un métier enrichissant et passionnant. Dans le métier d’employée de maison que j’exerce maintenant, je m’épanouis tout autant. Mon travail consiste à prendre soin de la maison dans ses aspects matériels (ménage, cuisine, lingerie) afin de donner vie à une ambiance de foyer si utile, pour que les jeunes qui fréquentent la résidence puissent donner le meilleur d’elles-mêmes dans la famille et dans la société. En un mot, je sers pour qu’elles puissent à leur tour servir.

 Qu’aimez-vous le plus dans ce métier ?

Dans ce travail, tout d’abord, ce que j’aime le plus c’est le caractère innovant qu’il comporte […] c’est l’art de la surprise continuelle pour les autres.

Dans ce travail, tout d’abord, ce que j’aime le plus c’est le caractère innovant qu’il comporte. Par exemple, lorsque je présente les plats d’une façon attrayante et originale, je fais appel à la créativité, de même, lorsque je décore la maison surtout à l’occasion des fêtes de Noël, ou encore lorsqu’il faut réaliser un gâteau d’anniversaire ; c’est l’art de la surprise continuelle pour les autres. Quelle grande joie j’éprouve lorsque je m’aperçois, que par ces petits détails, les personnes sont si contentes !

Ensuite, ce métier me fait grandir en vertus. J’ai appris à aimer ce que je fais et à bien travailler par amour de Dieu et par égard pour les autres. C’est aussi un travail qui stimule la responsabilité et la générosité. Je m’efforce aussi d’être sereine quelque soit le volume de travail, et je développe l’entente et l’esprit d’équipe avec celles qui travaillent avec moi. Chaque fois, je m’aperçois que ce travail m’a rendu plus attentive aux autres, plus méticuleuse dans les détails. Il m’a aussi permis de m’occuper et de vaincre la paresse qui est un véritable fléau.

Enfin, je bénéficie continuellement de marques de considération de la part de mon employeur, ce qui est une source de motivation. Toutefois, il lui arrive fréquemment de me reprendre avec délicatesse pour les erreurs commises mais aussi de me dire merci pour les grandes ou les petites choses que je réalise.

 Quel lien a votre travail d’employée de maison avec la construction de l’ambiance de foyer et l’éducation des enfants ?

En toute objectivité et sans vanité, je dirai que ce travail est un pilier pour la construction de l’ambiance de foyer et l’éducation des enfants.

En toute objectivité et sans vanité, je dirai que ce travail est un pilier pour la construction de l’ambiance de foyer et l’éducation des enfants. Comme je l’ai souligné plus haut, par le soin apporté à la maison, en œuvrant pour qu’elle soit propre, gaie, conviviale, un véritable havre de paix, ce travail contribue à ce que tous les membres de la famille se refassent physiquement, moralement et spirituellement. La famille étant la plus petite cellule de la société, si elle se porte bien, la société tout entière à son tour va bien. Le travail d’employée de maison a donc une grande répercussion sur la famille et la société et il importe à tout un chacun de l’aimer, d’apprendre à le redécouvrir sous ses multiples facettes, de lui redonner ses lettres de noblesses pour que s’ouvrent devant nous des portées insoupçonnées jusqu’alors. Pour appuyer mes propos, je voudrais terminer en faisant référence à une réflexion de St Josémaria sur le travail au foyer : « La femme peut apporter une contribution précieuse, en tant que personne et toujours avec ses qualités féminines, et elle y parviendra dans la mesure où elle sera préparée, humainement et professionnellement parlant. La famille tout comme la société, ont besoin de son apport particulier… »(Entretiens, n°87).