"Se cacher et disparaître”, fondement biblique

Se cacher et disparaître est devenu presque naturel chez saint Josémaria. Il voyait que l'Opus Dei est "de Dieu" et qu'il devait être ainsi accueilli par ceux qui l'écoutaient. Où avait-il appris ce style de vie? Voici l'explication que José María Casciaro propose dans cette étude.

Se cacher et disparaître est devenu presque naturel chez saint Josémaria. Il voyait que l'Opus Dei est "de Dieu" et qu'il devait être ainsi accueilli par ceux qui l'écoutaient. Où avait-il appris ce style de vie? Voici l'explication que José María Casciaro propose dans cette étude.

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« Me cacher et disparaître », fondements bibliques de cette devise de Saint Josémaria Escriva. José María Casciaro

La pierre de taille enfouie sous les fondations

comme il devait fréquemment parler en public, cette circonstance lui demandait, bien évidemment, une tension de l’esprit, une sorte de lutte intérieure qu’il reflète bien dans un point de Chemin: « D’accord: tu fais du meilleur travail avec cet entretien familial ou avec cette confidence isolée, qu’en pérorant — du spectacle ! du spectacle ! — en public, devant des milliers de personnes. — Toutefois, s’il te faut pérorer, pérore »

Saint Josémaria Escriva de Balaguer écrivit dans l’édition de Chemin de 1939 : « Ne cherche pas à être la girouette dorée d’un grand édifice : pour étincelante et surélevée qu’elle soit, elle n’est pour rien dans la solidité du bâtiment. Sois plutôt une vieille pierre de taille enfouie sous les fondations, sous terre, là où personne ne te verra: grâce à toi la maison tiendra bon» (1).

À qui s’adressait-il ainsi? D’après ce qu’en dit Pedro Rodriguez dans son édition critico-historique de Chemin, c’était à lui-même et à ceux qui le suivaient au début de l’Opus Dei (2).

Il est vrai que l’image de la pierre de taille enfouie sous les fondations s’adaptait tout à fait à la prise de conscience immédiate du 2 octobre 1928, lorsqu’il accepta la mission de mettre en pratique tout ce que Dieu lui avait fait voir et qu’au bout d’un certain temps, il appellerait l’Opus Dei (3).

Il serait désormais comme une pierre de taille inaperçue, solide, à la base de cet édifice.Tel était son rôle puisque ce n’était pas son « Œuvre » mais celle de Dieu. Aussi, adopta-t-il très vite la devise « me cacher et disparaître », expression qui pénétra dans son âme pour s’y intégrer fermement et pour toujours (4).

Une anecdote. Le 25 juin 1944 eut lieu la consécration sacerdotale des trois premiers prêtres de l’Opus Dei issus des rangs de ses fidèles laïcs. C’était l’évêque de Madrid-Alcala qui les consacrait. La chapelle épiscopale était pleine à craquer, le fondateur de l’Œuvre n’y était pas.

Dans sa biographie de saint Josémaria, Ana Sastre en parle ainsi :

« Il craint que son émotion ne déborde mais il y a aussi une raison plus profonde qui justifie cette absence : il ne tient pas à être présent lors de cette journée pleine de joie et de félicitations. L’Œuvre est de Dieu est ses jalons lui appartiennent totalement » (5).

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Une autre anecdote. C’est Pilar Urbano qui la rapporte : « Monseigneur Escriva se trouve à Madrid en avril 1970, il loge au centre de Diego de Léon. Au petit matin, il est à la salle à manger pour entourer ses enfants au petit déjeuner. Il regarde quelques objets de la décoration de la pièce […]. Il apprécie sur le linteau de la cheminée, des petits socles en bois doré sur lesquels sont posés une pendule et les chandeliers assortis […]. — C’est très réussi. Ils sont bien mis en valeur. Dans leur vie civile, les hommes ont aussi besoin d’un piédestal afin que l’on apprécie mieux leur valeur. En revanche, moi j’ai toujours eu à me cacher et à disparaître… « Il faut qu’Il croisse et que je diminue ». Et malgré tout… ! » (6).

Pilar Urbano rapporte aussi : « Dans l’une de ses lettres des débuts des années trente, il déclare au vicaire général du diocèse de Madrid : « Je vois de plus en plus clairement que ce qui me revient c’est de me cacher et disparaître » (7). « Plus de quarante ans après, peu avant le 28 mars 1975, en ses noces d’or sacerdotales, il reprendra cette même expression : « Je souhaite vivre ce jubilé en accord avec ma norme de conduite habituelle : me cacher et disparaître, que seul Jésus se montre » […] » ajoute Pilar Urbano.

Tous les ans, l’Opus Dei offre à l’Église une nouvelle promotion de prêtres, issus des rangs des fidèles laïcs de différents pays, des professionnels triés sur le volet et bien préparés.

Cependant, mgr Escriva n’assiste normalement pas à ces ordinations. Il reste chez lui, à prier. Si on lui en demande la raison, il répond, tout à fait convaincu : « Il me revient de me cacher et disparaître ». « Ce ne sont pas des mots. C’est le choix d’un style de vie [...] Ce que fait mgr Escriva, durant quarante ans de réclusion à Rome, c’est fuir la galerie pour travailler plus efficacement » (8).

Saint Josémaria, avec une grande ouverture d’esprit, était attentif à tout ce qu’il y avait de bons chez les autres êtres humains avec lesquels il était en rapport, d’une façon ou d’une autre. Aussi, la devise « me cacher et disparaître », qu’il enracina si profondément dans sa vie, peut être issue du contact qu’il eut,en tant qu’aumônier durant son travail spirituel à la Fondation des Malades, avec Mercedes Reyna, Dame Apostolique du Sacré-Cœur (9), morte en odeur de sainteté, le 23 janvier 1929. Don Josémaria fut très impressionné par la grande sainteté de cette âme-là (10). La congrégation des Dames lui confia la rédaction de l’image pour la dévotion privée de Mercedes Reyna. Dans la note bibliographique, il inclut des petits textes de Mercedes parmi lesquels il y en a un qui est significatif et permet d’apprécier l’influence que cette sainte Dame Apostolique eut dans le choix de la devise de saint Josémaria dont nous parlons : « Je veux examiner mes actes et les dépouiller de mon amour-propre, de ma complaisance personnelle et tâcher de les envelopper de silence, afin que même (pas) la plus petite partie de la gloire qui n’appartient qu’à Dieu ne puisse retomber sur moi ; avoir une vie recueillie, silencieuse, et m’ingénier à me cacher et disparaître ».

La finesse spirituelle de Mercedes Reyna trouva l’âme de saint Josémaria très bien disposée et laissa chez lui une trace qui non seulement ne s’effaça jamais, mais que le fondateur de l’Opus Dei développa dans sa vie, avec l’aide des grâces divines qui lui furent accordées, très particulièrement de 1929 à 1931 (12), avec la méditation des mystères de l’Enfance du Seigneur et de sa vie cachée à Nazareth.

FUIR LA GALERIE

« Se cacher et disparaître » fut une façon de procéder pratiquement naturelle chez saint Josémaria. Il s’y plia toute sa vie durant et comme il devait fréquemment parler en public, cette circonstance lui demandait, bien évidemment, une tension de l’esprit, une sorte de lutte intérieure qu’il reflète bien dans un point de Chemin: « D’accord: tu fais du meilleur travail avec cet entretien familial ou avec cette confidence isolée, qu’en pérorant — du spectacle ! du spectacle ! — en public, devant des milliers de personnes. — Toutefois, s’il te faut pérorer, pérore » (13).

C’est d’abord ce qu’il se dit à lui-même et qu’il écrit, au cas où cela pourrait être utile à quelqu’un d’autre. Ceci dit, pour saint Josémaria, « se cacher et disparaître » est toujours mieux : « Le monde n’admire que le sacrifice à spectacle, parce qu’il ignore la valeur du sacrifice caché et silencieux » (14). Il insiste ainsi sur la valeur du sacrifice caché quand il contemple certains des plus importants mystères de l’histoire de la Révélation et de la Rédemption divine de l’humanité : « Voyez-vous quelle simplicité ? – « Ecce ancilla !... » — Et le Verbe s’est fait chair. — Les saints ont agi de la sorte : sans spectacle. S’il y en eut, ce fut bien malgré eux » (15).

Le souci de fuir la galerie transparaît sans arrêt, « se cacher et disparaître » : Toujours du spectacle ! — Tu me demandes des photos, des graphiques, des statistiques. — Je ne t’envoie rien de tout cela car — l’avis contraire me semble très respectable — je pourrais croire après que je n’ai travaillé que pour grimper ici-bas alors que tiens à me hisser au plus haut du Ciel » (16)

La volonté d’écarter toute circonstance brillante perce dans tous ses écrits : « Même les jours où l’on croit perdre son temps, avec la prose des mille petits détails, quotidiens, il y a suffisamment de poésie pour se sentir sur la Croix : sur une Croix sans spectacle » (17)

Et encore un point très expressif: “Reprends dans ton âme l’ancienne résolution de notre ami : Seigneur, je veux la souffrance, non le spectacle » (18).

Quand il parle de “notre ami”, il fait une allusion voilée à lui-même. La « résolution » est dite « ancienne » en toute objectivité, comme nous l’avons noté précédemment. Il insiste encore sur cette idée : « L’esprit de pénitence ne tient pas à faire de grandes mortifications certains jours et pas du du tout les autres. — L’esprit de pénitence consiste à savoir se vaincre tous les jours, en offrant de grandes et de petites choses par amour et sans spectacle » (19).

VIVRE SANS GLOIRE HUMAINE

Son projet de vivre sans gloire humaine est une autre façon de considérer sa vie. On trouve plusieurs fois l’expression « gloire humaine » dans les écrits du fondateur de l’Opus Dei. Pour ce qui nous concerne, nous en citerons quelques unes, celles où l’on perçoit clairement le fondement de son dessein ascétique (20). Ainsi : « Apprenons de Jésus. Son attitude, en s’opposant à toute gloire humaine, est en relation parfaite avec la grandeur d’une mission unique : celle du Fils bien-aimé de Dieu qui s’incarne pour sauver les hommes » (21).

Sous cet éclairage doctrinal et cette pratique de vie, les échecs humains comptent peu pour saint Josémaria et c’est ce qu’il recommande à ceux qui tiennent à suivre ses conseils : « Ne soyez pas étonnés d’être battus assez fréquemment […]. S’il y a de l’amour de Dieu, de l’humilité, de la persévérance et de la ténacité dans nos rangs, ces déroutes n’auront pas trop d’importance […] Il n’y a pas d’échecs si l’on agit avec droiture d’intention, en voulant faire la Volonté de Dieu, en comptant toujours sur sa grâce et sur notre néant » (22).

LE NOM «OPUS DEI»

Au départ, Don Josémaria ne voulait même pas que l’Œuvre qu’il connut par inspiration divine le 2 octobre 1928 eût un nom pour qu’elle demeurât totalement cachée, selon sa devise. C’est ce qu’il écrivit dans ses Notes Intimes (23) : «Je ne donnai donc aucun nom à l’Œuvre. J’aurais souhaité, si cela avait été possible — or ce ne l’était pas— qu’elle n’ait pas eu de nom, ni de personnalité juridique […]. En attendant, nous appelions notre travail tout simplement «l’Œuvre » (24). Dans une note à ses Notes saint Josémaria dit : « Revenons au nom de notre Œuvre. Un jour je suis allé discuter avec le P.Sanchez (25) au parloir de la résidence de La Flor. Je lui ai parlé de mes affaires personnelles (je ne lui parlais de l’Œuvre que quand cela avait un rapport avec mon âme) et le bon père Sanchez m’a demandé à la fin : « Comment va cette Œuvre de Dieu ?

Et c’est dans la rue que j’ai commencé à réfléchir : « Oeuvre de Dieu, Opus Dei! Operatio…, travail de Dieu. Voilà le nom que je cherchais ! Et à partir de là, elle s’est toujours appelée « Opus Dei »(26).

Toutefois, depuis pas mal d’années, notre jeune prêtre avait déjà utilisé ce nom qu’il avait écrit sur de nombreux documents, mais sans estimer que ce fût le nom de l’entreprise apostolique que Dieu lui confiait. En effet, au début cela lui semblait une expression présomptueuse (27).

Le père Sanchez avait sans doute lu ce nom sur les feuillets que saint Josémaria lui avait remis quelques semaines auparavant (28). Et ce fut après cet entretien avec le P.Sanchez que le fondateur réalisa que l’expression n’était pas une hardiesse mais qu’elle montrait avec précision la Volonté de Dieu, dont il n’était qu’un instrument dont le Seigneur voulait se servir pour la mener pratiquement à bien (29)

«UN FONDATEUR SANS FONDEMENT »

Mgr. Xavier Echevarría, Prélat de l’Opus Dei, évoque que « durant les premières années de la vie de l’Opus Dei, et pratiquement jusqu’aux premières approbations pontificales, il n’employa jamais de mot fondateur pour se désigner, tellement il était loin de se considérer le promoteur d’une institution à lui. Il ne s’en accommoda que quand au Saint-Siège on commença à ainsi le nommer. Il plaisantait souvent en disant qu’il était un fondateur sans fondement. Nous étions sensibles à l’idée qu’il avait de lui-même quand, très sérieusement, il nous confiait : Je n’ai rien fondé, rien : l’Œuvre est à Lui ! Moi je n’ai fait que déranger ! (30).

HUMILITÉ ET RESPONSABILITÉ DANS L’ACCOMPLISSEMENT DE SA MISSION PERSONNELLE

La délicatesse de conscience de saint Josémaria dans l’accomplissement de la volonté divine lui fit comprendre clairement que ce serait délaisser son devoir, ce dont il devrait rendre compte à Dieu, que de ne pas accepter, ou ne pas mener pratiquement à terme, les exigences, les obligations et les grâces fondationnelles qu’il avait reçues de la volonté divine souveraine, sans ne l’avoir jamais souhaité et sans qu’il n’ait même (pas) pu l’imaginer. Voici ce qu’il en dit en Chemin : « Cette fausse humilité n’est que commodité : ainsi, bien humblement, tu délaisses petit à petit des droits… qui sont des devoirs » (31)

Peter Berglar considère combien il est difficile de ménager l’humilité et la responsabilité dans l’accomplissement des devoirs de sa charge et pour faire en sorte que les subordonnés le fassent aussi : « Sur la voie de cette humilité et de cette sécularité, il y a des pièges et des écueils […]. Il ne s’agissait pas, bien entendu, de chercher une « alternative » à l’humilité, mais de vivre concrètement et de façon exemplaire la vertu de l’humilité en accord avec la sécularité, et c’est là qu’il trouvait les difficultés, écueils qui existent toujours.

Josemaría Escrivá de Balaguer, avec une humilité greffée sur sa fidélité, sur l’obéissance à sa mission et à sa prudence, rejeta toutes les offres, souvent alléchantes, qui lui auraient permis de faire une brillante carrière ecclésiastique, mais qui l’auraient empêché de suivre son chemin ou rendu la tâche difficile.

Il était donc logique […] qu’en 1928 il ait refusé d’être nommé « Chapelain honoraire du Palais », ce qui était à l’époque le rêve de nombreux membres du clergé, et que dans les années trente il n’ait pas accepté d’être nommé chanoine de la cathédrale de Cuenca, ni la charge de Directeur spirituel de la « Maison du Conseiller » de l’Action Catholique.

Ce qu’il répondit à don Ángel Herrera (32), lorsque celui-ci le lui proposa est très significatif:

“Non, non. Je vous en suis reconnaissant mais je n’accepte pas parce que dois suivre ... le chemin sur lequel Dieu m’appelle. Par ailleurs je n’accepte pas non plus

à cause de ce que vous me dites : c’est dans cette Maison que vont être accueillis les meilleurs prêtres d’Espagne. Or, il est évident que je ne suis pas à leur hauteur pour les diriger… »(33).

Cependant, il exerça toujours sa responsabilité personnelle dans l’administration, l’interprétation et la mise en pratique des grâces fondationnelles de l’Œuvre, sans rejeter cette contrainte sur les autres. Dans ce domaine, dès qu’il eut assumé la mission que Dieu lui confia, après le 2 octobre 1928, saint Josémaria fit montre d’une fermeté et d’une force constantes. Voici ce qu’en dit mgr X.Echevarria :

« Le naturel plein de sens surnaturel avec lequel il nous encourageait à être fidèles à l’esprit de l’Opus Dei, ne m’a jamais étonné. Il précisait que le Seigneur, l’Église et les membres de l’Œuvre, maintenant et dans les siècles à venir, nous demanderaient des comptes sur la façon dont nous avions tiré profit du temps passé près de lui, à boire de l’eau à la source. Et ce naturel ne me surprenait pas parce qu’il ajoutait très souvent: mes enfants, je ne suis rien, je suis un sac de misères, mais le Seigneur a jeté son dévolu sur ce pauvre instrument, pour commencer l’Opus Dei et on vous demandera des comptes, on vous regardera parce que vous avez vécu avec ce pauvre homme, qui a été le fondateur de l'Opus Dei. Conscient de sa responsabilité, mgr Escriva de Balaguer sut parler clairement et avec fermeté de tout ce qui concernait l’Opus Dei, prêt à défendre ce charisme même au prix de sa vie, de sa renommée et en dépit de toutes les contradictions possibles. Quand il était nécessaire de déterminer quel était le chemin adéquat à la figure ou à l’esprit de l’Œuvre, il avait la solution opportune et il expliquait clairement : là-dessus, je ne peux pas déléguer, je suis le fondateur, et je sais ce que le Seigneur m’a demandé. Si je déléguais et que j’abandonnais ma responsabilité, je risquerais de perdre mon âme et le Seigneur m’en demanderait des comptes serrés, parce que l’Opus Dei n’est pas de mon crû, il est entièrement à Lui. (34).

LE FONDEMENT BIBLIQUE DE LA DEVISE “ME CACHER ET DISPARAîTRE “

Saint Josémaria perçut le fondement biblique de cette devise essentiellement dans la contemplation de la Vie de Jésus, de ses années de « vie cachée » à Nazareth, surtout. Pour nous en convaincre, il suffirait de lire entièrement son homélie Le triomphe du Christ dans l’humilité (35).

Comme les références, profondément méditées sur l’humilité du Christ dans sa vie cachée sont presque innombrables dans la prédication et dans les écrits de saint Josémaria et il faudrait un énorme recueil pour ne les relever que sommairement.

Nous allons nous contenter alors de faire référence à quelques écrits publiés :

La méditation sur les tentations du Christ au désert, dans l’homélie La conversion des enfants de Dieu (36); les débuts des homélies sur l’Épiphanie du Seigneur (37) et sur le Cœur du Christ, paix des chrétiens (38) ; et beaucoup de points de l’homélie sur l’Humilité (39) et sur le Détachement (40).

Pour apprendre de la vie de Jésus, saint Josémaria part de la contemplation des événements que rapportent les Évangiles, grands ou petits : « Notre Seigneur s’est incarné pour nous manifester la volonté du Père. Et voici que, dès le berceau, il nous instruit déjà. Jésus-Christ nous cherche, —avec une vocation qui est un appel à la sainteté— pour que nous consumions avec Lui la Rédemption. Considérez ce premier enseignement : nous devons coracheter non pas en cherchant à l’emporter sur le prochain mais sur nous-mêmes. Comme le Christ, nous devons nous anéantir, sentir que nous sommes les serviteurs des autres pour les conduire vers Dieu » (41).

L’un des premiers paragraphes de l’homélie du 24 décembre 1963 est vraiment le programme de sa façon de méditer la vie cachée du Seigneur et de pénétrer dans les textes évangéliques. C’est un texte, qui en dit long sur la façon dont saint Josémaria lisait l’Évangile et dont il saisissait le sens divin de la vie de Jésus sur terre : « J’ai toujours tâché, lorsque je parle devant la Crèche, de regarder le Christ notre Seigneur pour le voir ainsi, enveloppé dans des langes et couché sur la paille d’une mangeoire. Et alors qu’il n’est qu’un Enfant, de le voir comme Docteur, comme Maître. J’ai besoin de le considérer ainsi parce que je dois apprendre de Lui. Et pour apprendre de Lui, il faut tâcher de connaître sa vie : lire l’Évangile, méditer les scènes que nous rapporte le Nouveau Testament afin de pénétrer le sens divin de la vie de Jésus sur terre. En effet, nous devons reproduire, chez nous, la vie du Christ, en connaissant le Christ : à force de lire la Sainte Écriture et de la méditer, à force de prier […]. Jésus qui grandit et qui vit comme l’un de nous, nous révèle que l’existence humaine, notre tâche courante et banale, a un sens divin. Nous avons beau avoir considéré ces vérités, nous devons toujours être pleins d’admiration à la pensée des trente ans que Jésus a passés dans l’obscurité, qui constituent la plus grande partie du séjour de Jésus parmi ses frères les hommes. […] En effet, nous sommes des chrétiens courants à mener une vie ordinaire, comme celle et tant de millions de personnes sous toutes les latitudes »(42)

Jesús cache sa divinité par amour pour la créature humaine.

« Tu ne t’es jamais demandé, poussé par une curiosité sainte, comment Jésus a-t-il pu déverser tant d’amour? C’est encore saint Paul qui prend soin de nous répondre : lui qui était dans la condition de Dieu, il n'a pas jugé bon de revendiquer son droit d'être traité à l'égal de Dieu ; mais au contraire, il se dépouilla lui-même en prenant la condition de serviteur. Devenu semblable aux hommes et reconnu comme un homme (43). Mes enfants, tout éblouis, soyez reconnaissants pour ce mystère et apprenez : toute la puissance, toute la majesté, toute la beauté, toute l’harmonie infinie de Dieu, ses grandes richesses incommensurables, tout un Dieu !, demeura caché dans l’Humanité du Christ pour nous servir. Le Tout-Puissant est là, décidé à ternir pour un temps sa gloire afin d’avoir une rencontre rédemptrice avec ses créatures » (44).

C’est la contemplation de la vie du Christ, le mystère global de son Incarnation, qui pousse le fondateur de l’Œuvre à se cacher et à disparaître (45). Son regard est tourné vers la vie entière du Sauveur et vers son enseignement totalement reflété dans sa conduite humaine qui est l’expression de quelque chose de plus profond encore, l’expression des « sentiments » divins, — si on est en droit de s’exprimer ainsi— que son âme humaine possède du fait du mystère ineffable de « l’union hypostatique » de sa nature divine avec la nature humaine : « Jésus-Christ, notre Seigneur, nous propose très fréquemment dans sa prédication l’exemple de son humilité : apprenez de Moi qui suis doux et humble de cœur (Mt 11, 29) » (46).

Aussi lorsqu’il commente les tentations de Jésus au désert, il s’arrête à méditer : «Dans la deuxième tentation, quand le diable lui propose de se jeter du haut du Temple, Jésus refuse encore de se servir de sa puissance divine. Le Christ ne cherche pas la vaine-gloire, l’apparat, la comédie humaine qui essaie de se servir de Dieu comme toile de fond de la propre excellence. Jésus-Christ veut accomplir la volonté du Père sans avancer les temps ni anticiper l’heure des miracles, mais en empruntant, pas à pas, le dur chemin des hommes, l’aimable chemin de la Croix » (47).

Saint Josémaria vécut toujours un don de soi sans limites pour accomplir la volonté de Dieu.

Cette attitude commence par l’accomplissement des commandements et des enseignements du Seigneur. Ainsi, par exemple, il s’arrête à considérer les paroles de Jésus dans une homélie ou il reprend Mt 6, 16-18 : « J’aimerais que vous découvriez en toute sa profondeur la simplicité du Maître qui n’étale pas sa vie pénitente. C’est ce qu’il te demande : Et lorsque vous jeûnez, ne prenez pas un air sombre, comme les hypocrites, qui exténuent leur visage, pour faire paraître aux hommes qu'ils jeûnent; en vérité, je vous le dis, ils ont reçu leur récompense. Pour toi, quand tu jeûnes, parfume ta tête et lave ton visage, afin qu'il ne paraisse pas aux hommes que tu jeûnes, mais à ton Père qui est présent dans le secret; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra » (48).

LA VIE DE LA TRÈS SAINTE VIERGE MARIE

C’est aussi la vie de Sainte Marie qui pousse le fondateur de l’Opus Dei à passer inaperçu. Voici un point de Chemin très évocateur dans ce sens-là : « Marie, Maîtresse du sacrifice caché et silencieux ! — Voyez-la, presque toujours en retrait, collaborer avec son Fils : elle sait et elle se tait » (49).

Il en parlera plus longuement dans une homélie: «Maîtresse d’espérance. Marie proclame que « toutes les générations l’appelleront bienheureuse » (50).

Humainement parlant, sur quelles raisons son espérance s’appuyait-elle? Qui était Elle pour les hommes et les femmes de l’époque ? Les grandes héroïnes de l’Ancien Testament, Judith, Esther, Deborah, jouirent dès ici-bas d’une gloire humaine, elles furent acclamées par le peuple, exaltées. Le trône de Marie, comme celui de son fils, c’est la Croix. Et toute sa vie durant, jusqu’à son assomption corps et âme au Ciel, c’est sa présence silencieuse qui nous impressionne » (51).

Il avait écrit en Chemin: «Marie Très Sainte, Mère de Dieu, passe inaperçue, dans son village, comme une femme parmi tant d’autres. — Apprends d’Elle à vivre avec « naturel » (52)

Le fondateur de l’Opus Dei médite encore la vie cachée de Sainte Marie et en parle en Chemin: «Quelle humilité que celle de ma Mère Sainte Marie ! — Vous ne la retrouverez pas sous les palmes de Jérusalem, ni — hormis les prémices de Cana— à l’heure des grands miracles. — Mais elle ne fuit pas le mépris du Golgotha : c’est, « juxta crucem Jesu — près de la croix de Jésus » que l’on trouve sa Mère » (53).

L’EXEMPLE DE SAINT JEAN BAPTISTE

Le passage de l’Évangile de Saint Jean 3, 30, “ il faut que [Jésus] grandisse et que je diminue” est une référence fréquente de la prédication de saint Josémaria. On la trouve, par exemple, dans son homélie La conversion des enfants de Dieu, où il pense à sa vie personnelle et enseigne : « Il faut sans doute un nouveau changement, une loyauté plus plénière, un humilité plus profonde, de sorte que notre égoïsme diminuant, le Christ grandisse en nous car illum oportet crescere,

me autem minui, il faut qu’Il grandisse et que je diminue “(54).

LES LETTRES DE SAINT PAUL

Nous avons déjà évoqué les citations de l’hymne de Ph 2, 5-8, qui reviennent plusieurs fois dans les écrits du fondateur de l’Œuvre. Ce texte résume brièvement et profondément, toute la vie du Christ (55) et de ce fait, il était très présent au cœur de saint Josémaria. « Votre vie est cachée avec le Christ en Dieu » (Col 3, 4) était encore une phrase de l’Apôtre qu’il méditait souvent et qu’il appréciait beaucoup.

Ce conseil qui s’adresse, au départ, aux fidèles de Colosses, est toujours en vigueur pour les chrétiens. Il ne s’agit pas de fuir ou de mépriser le monde. Saint Josémaria le perçoit clairement. Il s’agit d’accomplir pleinement ses obligations mais sans en faire un absolu, en les considérant comme un moyen, sans qu’elles ne deviennent une fin, mais en ayant toujours le regard rivé sur la destinée surnaturelle de l’existence humaine : « Un chrétien sincère, cohérent avec sa foi, n’agit que face à Dieu, avec vision surnaturelle, il travaille dans ce monde qu’il aime passionnément, plongé dans les affaires d’ici-bas, le regard rivé sur le Ciel. Saint Paul nous confirme cela quae sursum sunt quaerite; cherchez les choses d’en-haut, là où est le Christ, à la droite de Dieu; appréciez les choses du Ciel, non pas celles d’ici-bas. En effet, vous êtes déjà morts — à ce qui est mondain et grâce au Baptême— et votre vie est cachée avec le Christ en Dieu » (56).

L’IDENTIFICATION AU CHRIST

L’attachement du fondateur de l’Opus Dei à imiter la vie cachée de Jésus, au-delà d’une résolution chrétienne générale de « l’imitatio Christi », était chez lui le fruit d’un charisme spécial. Saint Josémaria comprend que la filiation divine est le fondement de la vie chrétienne et plus spécifiquement le fondement de la vie spirituelle des fidèles de l’Opus Dei (57). L’expérience, fruit de sa profonde contemplation de cette réalité surnaturelle, le pousse à être vivre en compénétration avec Jésus, à se configurer à Lui, à se faire un avec le Christ, à être alter Christus, un autre Christ, voire, à être ipse Christus, le Christ lui-même, comme il l’exprima quelques fois, en craignant toutefois que cela ne fût pas correctement interprété. Mais saint Josémaria Escriva de Balaguer, en profond connaisseur de la science théologique, savait bien quelle était la portée de la théologie sacramentelle du Baptême, enracinée dans la révélation, dans le Nouveau Testament et dans l’enseignement des Pères et des Docteurs de l’Église :

C’est par le Baptême que nous sommes configurés au Christ et chacune des Personnes de la Très Sainte Trinité vient inhabiter l’âme du chrétien (58).

«Que l’enseignement du Christ est transparent! [...] Ouvrons le Nouveau Testament au chapitre 11 de saint Matthieu, cette fois-ci : apprenez de Moi qui suis doux et humble de cœur (59). Vois-tu ? Nous devons apprendre de Lui, de Jésus, notre seul modèle. Si tu veux avancer en veillant à ne pas trébucher, à ne pas te dévoyer, tu n’as qu’à marcher là où Il a marché, poser tes pieds sur la trace de ses pieds, pénétrer dans son Cœur humble et patient, boire à la source de ses commandements et de ses affections.En un mot, tu dois t’identifier au Christ, tâcher de devenir vraiment un autre Christ parmi tes frères les hommes » (60).

Cette identification au Christ s’appuie sur un concept théologique ferme, comme nous le voyons dans ces deux points de Chemin: «Le Prêtre, quel qu’il soit, est toujours un autre Christ » (61). « C’est bien connu, cependant je tiens à te rappeler encore une fois que le Prêtre est « un autre Christ ». — Et que le Saint Esprit à bien dit : « ‘’nolite tangere Christos meos’’ — ne touchez pas à mes Christs » (62). Dans son homélie Prêtre pour l’éternité (63), le fondateur de l’ Oeuvre exprime cela très nettement: «Le sacerdoce permet de servir Dieu dans un état qui en soi n’est ni meilleur ni pire que les autres : il est différent. Cependant la vocation du prêtre est revêtue d’une dignité et d’une grandeur à nulle autre pareille sur terre. Saint Catherine de Sienne fait dire ceci au Christ : Je ne veux pas que la révérence due aux prêtres soit petite car la révérence et le respect qu’on leur voue ne s’adresse pas à eux, mais à Moi, en vertu du Sang que je leur ai permis d’administrer. N’était-ce cela, vous devriez les considérer comme les autres fidèles laïcs, et pas autrement… Il ne faut pas les offenser : en les offensant, c’est Moi que l’on offense, non pas eux. Aussi l’ai-je interdit et ai-je fait savoir que je n’admets pas que l’on touche à mes Christs (64).

« D’aucuns s’acharnent à chercher, —disent-ils—, quelle est l’identité du prêtre. Que ces propos de Sainte Catherine de Sienne sont clairs ! Quelle est l’identité du prêtre? Celle du Christ. Les chrétiens nous pouvons et nous devons tous être non plus alter Christus, mais ipse Christus : d’autres Christs, le Christ lui-même ! Or ceci se fait immédiatement chez le prêtre de façon sacramentelle » (65).

Sous l’éclairage de cette doctrine sur le sacerdoce, qu’il avait bien intégrée dans sa vie, la réaction de saint Josémaria que rapporte le témoin direct de cette scène, à Lima (Pérou) en 1974, est tout à fait “naturelle”: « Dès que le Père est arrivé dans la salle où nous l’attendions, une réunion de plus de cinquante prêtres […], il tint à baiser les mains de chacun […].

— Père, ils sont nombreux.

— Qu’importe.

En s’agenouillant, il déposa avec onction un baiser sur les mains de tous [...]. Nous étions émus […]. Je n’oublierai jamais cette leçon-là » (66).

Mais cette singulière dignité du prêtre qu’il a grâce à son identification au Christ-Tête, ne lui donne aucun droit de dominer ses frères. Aussi, dans un autre passage de l’homélie évoquée, il affirme : «Ils ont été ordonnés pour servir. Non pas pour commander, non pas pour se faire valoir, mais pour se livrer, dans un silence incessant et divin, au service de toutes les âmes » (67).

Voici ce qu’il répondit aussi, par ailleurs, aux journalistes Enrico Zuppi et Antonio Fugardi (68): « Je pense que ce que l’on demande aux prêtres c’est l’humilité d’apprendre à ne pas être à la page, à être réellement des serviteurs des serviteurs de Dieu — à penser à l’exclamation de Jean Baptiste : illum oportet crescere, me autem minui (Jn 3, 30); il faut que le Christ grandisse et que moi je diminue– afin que les chrétiens courants, les laïcs, rendent le Christ présent dans tous les milieux de la société […] Celui qui croit que pour que la voix du Christ soit entendue dans le monde d’aujourd’hui, il faut que le clergé parle sans arrêt où soit présent partout, n’a pas encore bien compris quelle est la dignité de la vocation divine de tous et de chaque fidèle chrétien en particulier » (69).

Et d’expliquer avec force cette réalité sacramentelle mystérieuse de l’identité du prêtre : « Tu m’écris que tu t’es finalement approché du confessionnal et que tu as éprouvé l’humiliation d’avoir à déballer le cloaque — je reprends tes propres mots— de ta vie devant un « homme ». — Quand est-ce que tu rejetteras cette vaine estime de toi-même ? Tu iras alors te confesser dans la joie de te montrer tel que tu es, devant « cet homme » oint, — un autre Christ, le Christ lui-même !— qui t’absout et t’accorde le pardon de Dieu » (70).

Et il en donne les raisons théologiques et de bon sens: “ C’est la raison pour laquelle le prêtre doit exclusivement être un homme de Dieu et rejeter la pensée d’aspirer à être brillant dans les domaines où les autres chrétiens n’ont pas besoin de lui. Le prêtre n’est ni psychologue, ni sociologue, ni anthropologue : il est un autre Christ, le Christ lui-même, au service des âmes de ses frères. Ce serait triste que le prêtre, en s’appuyant sur une science humaine, se croit autorisé à pontifier » (71).

Mais c’est à tous les chrétiens que le fondateur de l’Opus Dei accorde la dignité de leur configuration au Christ. D’abord, il les invite à être d’autres Christs ; puis, il se permet une formule plus audacieuse : le Christ lui-même : « Il se peut que quelqu’un pense que je fais exclusivement allusion à un secteur de personnes triées sur le volet. Ne vous laissez pas leurrer par la lâcheté ou la commodité. Ressentez, en revanche, l’urgence divine d’être, chacun de vous, un autre Christ, le Christ lui-même ; autrement dit, l’urgence de faire que votre conduite soit cohérente avec les normes de la foi. En effet, notre sainteté, celle à laquelle nous devons prétendre, n’est pas une sainteté au rabais, inexistante. La première condition qui nous est demandée — tout à fait conforme à notre nature— est celle d’aimer : la charité est le lien de la perfection (72). Une charité que nous devons pratiquer en accord avec les commandements explicites du Seigneur : tu aimeras le Seigneur ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit (73), sans rien garder pour nous. La sainteté est ainsi faite » (74).

Par ailleurs, il dit très nettement : « Maintenant, devant l’Enfant Jésus, nous pouvons poursuivre notre examen personnel : sommes-nous prêts à ce que notre vie devienne un modèle et un enseignement pour nos égaux, nos frères les hommes ? Sommes nous déterminés à être d’autres Christs ? Il ne suffit pas d’en parler. Toi — je m’adresse à chacun de vous et je me pose aussi cette question— toi, qui du fait d’être chrétien est appelé à être un autre Christ, mérites-tu que l’on dise de toi que tu es là pour, —facere et docere—, tout faire comme un fils de Dieu, attentif à la volonté de son Père, afin de pouvoir ainsi encourager d’autres âmes à participer à ce que la Rédemption a de bon, de noble, de divin et d’humain ? Vis-tu de la vie du Christ, dans ta vie ordinaire, au cœur du monde ? « (75).

Et, tout comme précédemment, il donne les raisons théologiques de cette identification à Jésus :

«C’est dans la tragédie de la Passion que notre propre vie est consumée

ainsi que toute l’histoire humaine. La Semaine Sainte ne saurait être réduite à un simple souvenir parce qu’elle est la considération du mystère de Jésus-Christ qui se prolonge dans notre âme. Le chrétien est tenu d’être alter Christus, ipse Christus, un autre Christ, le Christ lui-même. Par le Baptême, nous avons tous été constitués prêtres de notre propre existence, afin d’offrir des victimes spirituelles qui soient agréables à Dieu par Jésus-Christ (76), pour réaliser chacune de nos actions dans un esprit d’obéissance à la volonté de Dieu, en perpétuant ainsi la mission du Dieu-Homme » (77).

Dans une autre homélie, il expose cette même conviction et en donne les mêmes raisons théologiques : «Dans la vie spirituelle il n’y a pas de nouvelle époque à envisager. Tout est déjà donné en Christ qui est mort, est ressuscité qui vit et demeure à tout jamais. Mais il faut cependant être uni à Lui par la foi, permettre que sa vie se manifeste en nous, de sorte que l’on puisse dire de chaque chrétien qu’il n’est plus alter Christus, mais ipse Christus, le Christ lui-même ! » (78).

Il y a donc dans son enseignement une expérience vécue enflammée de la portée théologique et ascétique du sacerdoce commun des fidèles qui leur a été conféré par le sacrement du baptême : « Embrasser la foi chrétienne c’est s’engager à poursuivre, parmi les créatures, la mission de Jésus. Nous devons chacun de nous être alter Christus, ipse Christus, un autre Christ, le Christ lui-même. C’est seulement ainsi que nous pouvons nous engager dans cette entreprise, grande, immense, sans fin : sanctifier de l’intérieur toutes les structures temporelles, en y déposant le ferment de la Rédemption » (79).

La lecture de saint Paul dont nous avons parlé précédemment, l’a certainement éclaire à tout jamais pour qu’il veuille devenir un autre Christ, le Christ lui-même : «Nous devons tous être « ipse Christus » — le Christ lui-même. C’est ce que saint Paul nous demande au nom de Dieu : ‘induimini Dominum Iesum Christum’’ (Rm 13, 14) — revêtez-vous du Christ. — Chacun de nous — toi ! — doit considérer de quelle façon il met ce vêtement dont nous parle l’Apôtre ; chacun, personnellement, doit dialoguer avec le Seigneur, sans interruption » (80).

Par ailleurs, il fait référence à la Lettre aux Galates pour renforcer son idée de l’union à Jésus-Christ: “Les Rois Mages furent les prémices des Gentils. Mais, la Rédemption une fois consommée, il n’y a plus ni juif, ni grec, ni esclave, ni homme libre, ni homme, ni femme — il n’y plus aucun type de différence— parce que vous êtes un seul en Christ Jésus (3, 28) » (81).

Mais je ne tiens pas à faire ici un recensement exhaustif des textes du fondateur de l’Opus Dei sur ce sujet. Ils sont nombreux (82). Notre objectif n’était que d’illustrer le fond « christologique » de l’identification au Christ pour mieux comprendre la devise « me cacher et disparaître ».

«VERE TU ES DEUS ABSCONDITUS» (Is 45, 15)

À la fin de l’article du Catéchisme de l’Église catholique sur la Révélation, il y a trois numéros qui parlent du Christ comme « Médiateur et plénitude de la Révélation » et considèrent abondamment que Jésus-Christ, «Le Christ, le Fils de Dieu fait homme, est la Parole unique, parfaite et indépassable du Père. En Lui Il dit tout, et il n’y aura pas d’autre parole que celle-là » (83).

L’Église a toujours considéré que la divine révélation surnaturelle est contenue aussi bien dans les livres de l’Ancien que dans ceux du Nouveau Testament, puisque Dieu est le seul et même auteur qui parle à travers les auteurs de ses écrits. Mais, comme le disait Saint Jean de la Croix, c’est Jésus-Christ qui est la Parole de Dieu par excellence. Il est le Fils, Parole incarnée, la plus parfaite expression divine dans la forme et le langage humains. Il n’est pas étonnant que Jésus-Christ, en tant qu’homme, manifeste de façon sublime la pensée, le vouloir, le « cœur » de Dieu. Il y a une relation mystérieuse entre les sentiments humains de Jésus-Christ et les « sentiments » de Dieu, pour le dire dans notre langage terrestre, le seul dont nous disposons. Ceci étant, l’humilité du Christ-homme doit être un avant-goût de « l’humilité » de Dieu. Nous n’avons pas ici à exposer ce sujet profond et délicat. Je veux seulement considérer le fait que Dieu Tout-Puissant « se cache » derrière les œuvres impressionnantes de la création. Le livre de la Sagesse a exprimé de façon sublime comment Dieu qui se révèle de façon naturelle dans les œuvres créées ne fait toutefois pas étalage de sa toute-puissance mais la manifeste discrètement à tous ceux qui veulent lire, au moyen de leur raison, (84) le livre de la création (85).

Or Dieu, si nous pouvons nous permettre de parler ainsi, agit avec une condescendance, une « humilité » incompréhensibles pour nous. C’est ainsi qu’il agit dans la création et dans l’Incarnation du Verbe, de même que dans la vie terrestre du Fils de Dieu. Ceci dit, Notre Seigneur Jésus-Christ vit une humilité inénarrable dans la Très Sainte Eucharistie (86). L’humilité avec laquelle Jésus-Christ vécut sur terre est cohérente avec « l’humilité » divine.

C’est sans doute ce qui fait que le prophète Isaïe s’écrie : Vere tu es Deus absconditus (87).

Cette exclamation est une réflexion prophétique, pleine d’admiration, sur l’être de Dieu, insondable, mystérieux pour l’intelligence humaine. Elle a des applications universelles, philosophiques et théologiques d’une immense profondeur que nous ne pouvons évidemment pas développer ici. Ceci dit, le texte d’Isaïe est bien dans le cadre des circonstances historiques (Sitz im Leben) où l’oracle d’Isaïe fut d’abord prononcé : il annonçait l’éléction de Cyrus, comme instrument pour réaliser les desseins de Dieu qui voulait sauver le peuple élu, en captivité à Babylone. Tout le passage d’Isaïe 44, 24-45, 25, baigne dans la perspective universaliste qui brise les vieux moules d’un nationaliste excluant. Il s’agit d’un discours poétique, porteur d’un message d’encouragement aux exiliés (88).

Dans Is 45, 8 le texte hébreu utilise trois substantifs abstraits: sédeq, yesa‘ y sedaqá. Le premier et le troisième sont synonimes de “justice”. Le second veut dire “salut”. La Néovulgate les a ainsi traduits. Cependant, la Vulgate en a fait des noms propres : « juste, sauveur » parce qu’elle y a vu une référence plus directe au Messie. Elle a ainsi produit un texte recueilli par la liturgie divine : Rorate coeli desuper, et nubes pluant iustum; aperiatur terra et germinet Salvatorem, et iustitia oriatur simul (89). Bien que le Seigneur (Yhwh) soit “le Dieu caché”, lui seul peut sauver. Aussi, tous les peuples reconnaîtront sa souveraineté universelle et iront l’adorer à Sion. Le langage employé au début à des résonnaces guerrières (90) mais en réalité il s’agit d’une libération de l’idolâtrie pour se laisser captiver par la vérité du Dieu caché qui est l’unique Dieu et Sauveur véritable.

J’oserai dire que nous trouvons chez saint Josémaria Escriva des sentiments semblables à ceux que le texte prophétique exprime, parce qu’il en a pris connaissance quand il a médité les deux Testaments : « Pensez aux considérations de saint Paul que nous avons lues à l’Épître : Quelle profondeur dans la richesse, la sagesse et la science de Dieu ! Ses décisions sont insondables, ses chemins sont impénétrables ! Qui a connu la pensée du Seigneur ? Qui a été son conseiller ? […] (91). À la lumière des paroles de Dieu, que les desseins humains sont petits lorsqu’ils s’acharnent à changer ce que Notre Seigneur a établi ! »(92).

Nous avons en effet, au n. 613 de Chemin, un résumé de la citation d’Is

40, 14: «Pour être humble, toi, si vide et si imbu de ta personne, il te suffit de considérer ces mots d’Isaïe : tu es « ‘’une goutte d’eau ou de rosée qui tombe sur la terre et qu’on remarque à peine’’ ». Saint Josémaria fait une traduction libre probablement tirée du texte de la Vulgate latine (93).

On trouve des exclamations semblables à celles d’Is 45, 15 dans le Psaume 89 (88), 47. « Combien de temps, Seigneur, resteras-tu caché ? » que le fondateur de l’Œuvre lisait avec dévotion et qu’il méditait en disant le Bréviaire Romain (94).

Nous trouvons des idées très liées à celles-ci dans des passages très différents de l’Écriture : du Ps 31 (30), 21-95 à Mt 6, 1-6 : « Gardez-vous de pratiquer votre justice aux regards des hommes pour être vus d'eux; autrement, vous n'avez pas de récompense auprès de votre Père qui est dans les cieux » (96).

Pour récapituler, il me semble évident de dire que la méditation constante des passages de la Sainte Écriture apprit à saint Josémaria à « plonger en Dieu » à adopter constamment la devise “me cacher et disparaître”, mais sans du tout

abandonner sa sollicitude pour les hommes, bien au contraire. L’identification au Christ le conduisit par la main à “aimer le monde passionément”. C’est ainsi qu’il intitule l’une de ses plus importantes homélies dans laquelle il explique certains des traits fondamentaux de l’esprit de l’Opus Dei (97).

Notes

1. J. ESCRIVA DE BALAGUER, Chemin, Valencia, 1ª edic., 1939, n. 590. À partir d’ici je citerai cet ouvrage à partir de Camino, Edición crítico-histórica préparée par P. RODRÍGUEZ (Ed. Rialp, Madrid 2002).

2. Cf. ibid., p. 714-715; il y a dans ces pages différents écrits du Fondateur de l’Oeuvre qui montrent que l’idée d’être une fondation, une pierre de taille, était très présente dans son esprit et dans son cœur.

3. En effet, l’idée de “la pierre de taille” est reprise dans le contexte de l’ascétisme des “petites choses”. Cf. Chemin n. 756,823.

4. Cette expression prend d’autres tournures dans ses écrits. Lorsqu’il médite le premier mystère du Saint Rosaire, par exemple, il écrit : “ Tu es dans ce foyer, ce qu’il te plaît d’être : un ami, un petit valet, un curieux, un voisin… — Moi, je n’ose rien être. Je me cache derrière toi et, ébloui, je contemple la scène » (J. Escriva de Balaguer «, Saint Rosaire, «L’Annonciation », je cite la 29ª éd. espagnole [Ed. Rialp, Madrid 1986]). Il faut considérer que Saint Rosaire fut écrit en 1931. Par la suite, cette devise intégra très vite la vie intérieure de Saint Josémaria.

5. A. SASTRE, Tiempo de Caminar. Semblanza de Monseñor Josemaría Escrivá de Balaguer

(Ed. Rialp, Madrid 41991), 292.

6. P. URBANO, El hombre de Villa Tevere (Plaza & Janés, Barcelona 1995), 345-346.

7. Ibid., 346.

8. Ibid.

9. Congregation fondée par Luz Rodríguez-Casanova.

10. Voir la note biographique sur Mercedes Reyna O’Farril, dans l’édition

critico-historique de Camino préparée par P. Rodríguez, o.c, p. 348, note 30.

11. Cf. l’édition critico-historique de Camino, p. 915, note 9. Cf. aussi, ibid., pages 558-559, notes au n. 402 de Chemin.

12. Dans l’édition critico-historique de Camino, pages. 914-915 et notes y compris, on peut apprécier l’amorce d’un processus spirituel chez ce jeune prêtre Escriva durant ces années-là.

13. Chemin, n. 846

14. Ibid., n. 185. Parfois, souffrir sans spectacle est qualifié de “sacrifice caché et silencieux”. C’est aussi une formule originelle de saint Josémaria Escriva. On la trouve, par exemple, au n. 172 de Quand le Christ passe : « Une femme du peuple, fait un jour la louange de Jésus et s’écrie : Bienheureux le ventre qui t’a porté et les seins qui t’ont nourri. Ce à quoi le Seigneur répond : bienheureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu et la gardent, faisant ainsi l’éloge de sa Mère, de son fiat sincère, dévoué, réalisé jusqu’aux ultimes conséquences, qu’Elle n’étala pas devant la galerie, mais qu’Elle vécut dans le sacrifice caché et silencieux de chaque jour ».

(J. ESCRIVÁ DE BALAGUER, Quand le Christ passe, que je cite dans sa 34ème éd. espagnole.

[Ed. Rialp, Madrid 1997]).

15. Chemin, n. 510.

16. Ibid., n. 649.

17. J. ESCRIVÁ DE BALAGUER, Forge, n. 522; je cite la 9ème éd. espagnole (Ed.

Rialp, Madrid 1996).

18. Ibid., n. 765.

19. Ibid., n. 784. Je me permets d’ajouter une nouvelle citation de Chemin: Fuis le spectacle! Que ta vie soit connue de Dieu. En effet, la sainteté est inaperçue bien que remplie d’efficacité « (Ibid, n. 941).

20. Ces propos peuvent être une référence : “Apprenons de cette attitude de Jésus. Dans sa vie sur terre, il n’a même pas voulu la gloire qui lui revenait. En effet, ayant le droit d’être traité comme Dieu, il a pris la forme d’un serviteur, d’un esclave (cf. Ph 2, 6-7). De ce fait, le chrétien sait que toute la gloire est pour Dieu et qu’il ne peut pas mettre la grandeur sublime de l’Évangile au service d’intérêts et d’ambitions humaines « (Quand le Christ passe, n. 62). Cf. Chemin, n. 780-788.

21. Quand le Christ passe, n. 62. Cf. Ibid., n. 286.

22. Ibid., n. 76. «Ce fut un échec, un désastre, parce que tu as perdu notre esprit. — Tu sais bien qu’avec des visées surnaturelles, la fin (victoire ? défaite ? bah !) n’a qu’un seul nom : réussite » (Chemin, n. 406)

Le Jeudi Saint de l’année 1960, dans une homélie, il parle de la liturgie de la Sainte Messe : « Le Confiteor nous met devant notre indignité, non pas devant le souvenir abstrait de la coulpe, mais face à la présence bien concrète de nos péchés et de nos fautes. Aussi répétons-nous : Kyrie eleison, Christe eleison ; Seigneur, prends pitié de nous ; Christ, prends pitié de nous. Si le pardon dont nous avons besoin était lié à nos mérites, nous aurions alors une tristesse amère à l’âme. Mais, par bonté divine, le pardon vient de la miséricorde de Dieu que nous exaltons déjà — Gloria ! — car Toi seul es Saint, Toi seul es Seigneur, Toi seul es le Très Haut, Jésus-Christ, avec le Saint-Esprit, dans la gloire de Dieu le Père » (Quand le Christ passe, n. 88).

23. J. ESCRIVÁ DE BALAGUER, Notes intimes (non encore publiées), que je cite d’après les références littérales d’André VAZQUEZ DE PRADA, Le Fondateur de l’Opus Dei vol. I (Ed. Rialp, Madrid 1997), passim.

24. Cfr. A. VAZQUEZ DE PRADA, o. c. p. 331. À ce propos, voici ce qu’en dit Vazquez de Prada: “Cette expression générique convenait à l’humilité du fondateur, qui attendait que le Seigneur lui donne un nom approprié, le moment venu. En tout état de cause, son idée là-dessus était que ce nom devait répondre à deux caractéristiques particulières :

D’abord, ne faire aucune référence à sa personne, ne pas être rattaché à « Escriva ». Et ensuite, ne pas permettre de sobriquets dérivés pour appeler ses membres qui étaient et qui devaient toujours être des chrétiens courants. La solution était donc un nom abstrait à trouver ».

25. Il parle du père Valentín Sánchez Ruiz S.J., qui était son directeur spirituel à ce moment-là.

26. Cf. A. VAZQUEZ DE PRADA, o. c. p. 333.

27. Ibid., p. 334.

28. Cf. ibid., p. 332 et note 21 de la même page; cf. aussi ibid., p. 333.

29. A. VAZQUEZ DE PRADA, o. c. p. 330-335 parle de l’adoption du nom “Opus Dei” avec plus de détails et de façon plus documentée. Cf. Aussi les références faites dans ces pages-là.

30. X. ECHEVARRÍA, Memoria del Beato Josemaría Escrivá (Ed. Rialp, Madrid

2000), 301.

31. Chemin, n. 603. Cfr. también: «Ne prenons pas les droits de la charge pour ceux de la personne. Les premiers ne sauraient être délaissés » (Chemin, n. 407).

32. Ángel Herrera Oria, né 1886, fut nommé président de l’Action Catholique Nationale des Propagandistes (ACN de P), promue par le père Angel Ayale, s.j. En 1911, il fut le directeur du quotidien «El Debate». En 1931 il fonda le parti politique «Acción Nacional» (qui devint l’ «Acción Popular»). En 1933, il quitta la direction «El

Debate» pour être le président de la Junta Central de la Acción Católica Española. En 1940, il fut ordonné prêtre et en 1947, évêque. Créé cardinal en 1965, il est décédé en 11968.

33. P. BERGLAR, Opus Dei. Vie et oeuvre du fondateur Josémaria Escriva de Balaguer (Ed. Rialp, Madrid 51990), 257-258.

34. J. ECHEVARRÍA, o. c. p. 303.

35. Prononcée le 24 décembre 1963 et publiée dans Quand le Christ passe, n. 12-21.

36. Quand le Christ passe, n. 61-63.

37. Ibid., n. 31.

38. Ibid., n. 162.

39. Publiée dans Amis de Dieu, je cite la la 23èm édition espagnole (Ed. Rialp, Madrid

1997), voir surtout les n. 97, 102 y 103.

40. Dans Amis de Dieu, voir spécialement n. 111 et 112.

41. Ibid., n. 31.

42. Ibid., n. 14.

43. Ph 2, 6-7.

44. Amis de Dieu, n. 111.

45. «Lorsque Saint Paul évoque ce mystère, il chante aussi une hymne joyeuse que nous pouvons attentivement apprécier : Ayez dans vos cœurs les mêmes sentiments que le Christ avait dans le sien […] (Ph 2, 5-8)» (Amis de Dieu n. 97).

46. Ibid.

47. Quand le Christ passe, n. 61.

48. Amis de Dieu, n. 136.

49. Chemin, n. 509.

50. Lc 1, 48.

51. Amis de Dieu, n. 286.

52. Chemin, n. 499.

53. Ibid., n. 507.

54. Quand le Christ passe, n. 58.

55. Cf. G. ARANDA, La historia de Cristo en la tierra, selon Ph 2, 6-11, «Scripta

Theologica» 14 (1982) 219-236.

56. Amis de Dieu, n. 206.

57. Cf. F. OCÁRIZ-I. DE CELAYA, Vivir como hijos de Dios. Estudios sobre el Beato

Josemaría Escrivá (EUNSA, Pamplona 1993).

58. Quelqu’un trouva que “se faire ipse Christus” était une expression un peu osée. Il en fut presque scandalisé, sans aucun motif. En effet, il n’avait pas perçu la portée de la bonne théologie enracinée dans la puissance du sacrement du Baptême chrétien, par lequel nous sommes configurés à Jésus-Christ.

59. Mt 11, 29.

60. Amis de Dieu, n. 128.

61. Chemin, n. 66.

62. Ibid., n. 67. Cf. Ps 105 (104) 15.

63. Publiée dans Aimer l’Église, o.c.

64. SAINTE CATHERINE DE SIENNE, Le Dialogue, ch.116; cf. Ps 105 (104) 15.

65. Prêtre pour l’éternité, dans Aimer l’Église, o.c.

66. A. SASTRE, o. c. p. 299, témoignage du père Miguel Guitard

Crosas.

67. Prêtre pour l’éternité, dans Aimer l’Église aux Editions Le laurier.

68. Respectivement directeur et rédacteur «L’Osservatore della Domenica»; l’interview fut publiée le 19 mai 1968.

69. Paragraphe reproduit dans Entretiens avec mgr Escriva de Balaguer que je cite dans 15ème ed. (Ed. Rialp, Madrid 1986), n. 59.

70. Sillon, n. 45, que je cite en sa 15ème éd. espagnole (Ed. Rialp, Madrid 1996).

71. Quand le Christ passe n. 79.

72. Col 3, 14.

73. Mt 22, 37.

74. Amis de Dieu, n. 6.

75. Ibid., n. 21. C’est un paragraphe de l’homélie Le triomphe du Christ dans l’humilité, prêchée le 24 décembre 1963.

76. 1 P 2, 5.

77. Quand le Christ passe, n. 96. Passage de l’homélie La mort du Christ, vie du chrétien.

78. Ibid., n. 104. Tiré de l’homélie Le Christ présent chez les chrétiens. Il donne plus loin, dans cette homélie, de nouvelles raisons théologico-ascétiques : « C’est cet amour du Christ là que chacun de nous doit s’efforcer à réaliser dans sa propre vie. Mais pour être ipse Christus il faut se regarder en Lui. Il ne suffit pas d’avoir une idée générale de l’esprit de Jésus, il faut apprendre de Lui des détails, des attitudes. Il faut surtout contempler son passage sur terre, ses traces pour en tirer la lumière, la sérénité, la paix « (Quand le Christ passe, n. 107).

79. Ibid., n. 183, tiré de l’homélie de la solennité du Christ Roi. Dans l’homélie de la solennité de l’Ascension du Seigneur, en 1966, il s’écrie : « Chacun de nous doit être ipse Christus. Il est l’unique médiateur entre Dieu et les hommes (1Tm 2, 5) ; et nous nous unissons à Lui pour offrir, avec Lui, toutes les choses au Père. Notre vocation de fils de Dieu, au cœur du monde, demande que nous ne cherchions pas seulement notre sainteté personnelle, mais que nous foulions les chemins de la terre, pour en faire des raccourcis qui, en louvoyant les obstacles, conduisent les âmes vers le Seigneur, que nous prenions part, en tant que citoyens courants, à toutes les activités temporelles, pour être ce levain (Mt 13, 33) qui doit informer toute la pâte ( (cfr. 1 Co 5, 6)» (Quand le Christ passe, n. 120). Cf. passim A. ARANDA, «El bullir de la sangre de Cristo». Estudios sobre el cristocentrismo del Beato Josemaría Escrivá (Ed. Rialp, Madrid 2000).

80. Forge, n. 74.

81. Quand le Christ passe n. 38.

82. Voir aussi ce qui s’y rapporte dans: Quand le Christ passe, n. 11; 115; 121; 150; 185. Chemin, n. 687. Forge, nn. 25; 450. Amis de Dieu, n. 6. Sillon, n.166; 200.

83. Cf. Catéchisme de l’Église catholique, n. 65. En se pliant à He 1, 1-2 et à la constitution Dei Verbum du concile Vatican II — qui renvoie aussi à Saint Jean de la Croix, Montée du Carmel, 2, 22, 3-5— le Catéchisme établit la continuité de la Révélation divine dans les deux Testaments dont la plénitude est la Parole Incarnée.

84. «Analogôs», «par analogie», dit littéralement le texte sacré originel.

85. «En effet, à travers la grandeur et la beauté des créatures/ on peut contempler, par analogie, celui qui les a engendrées » (Sg 13, 5).

86. «Humilité de Jésus, à Bethléem, à Nazareth, au Calvaire. Mais davantage d’humiliation et d’anéantissement dans la Sainte Hostie: plus qu’à la crèche et qu’à Nazareth et que sur la Croix. — Aussi, combien suis-je tenu d’aimer la Messe ! (« Notre” Messe, Jésus...» (Chemin, n. 533).

87. Is 45, 15.

88. Il est surprenant que Cyrus soit appelé “l’oint”, titre réservé aux rois de Juda. En effet, il s’agit d’un étranger qui ne connaissait pas le Dieu du peuple élu. Qui plus est, on dit que la mission et les succès du conquérant perse sont dûs à une providence spéciale de Dieu qui l’a désigné pour délivrer Israël de l’oppression des autres peuples (Is 45, 1-5). Ce message a dû provoquer la stupeur chez les auditeurs. Après les siècles, il attire toujours notre attention sur les desseins de Dieu qui se sert parfois de situations historiques qui peuvent nous sembler paradoxales.

89. Les paroles d’ Is 45, 9-17 étaient une correction pour ceux qui ne voulaient pas réaliser leurs projets de salut par le biais d’un étranger. C’est à partir de cette circonstance historique que l’on peut mieux comprendre le sens de ce passage. Le texte prophétique leur montre qu’ils se trompent en rejetant les desseins de Dieu Tout-Puissant. La comparaison du potier et de l’argile (cf. Is 45, 9) serait évoquée par saint Paul 9, 20-21. Il actualise ainsi le texte prophétique.

90. Il parle de s’emparer d’un butin précieux et de vaincre des hommes forts pour en faire des prisonniers.

91. Cf. Rm 11, 33-36: cf. aussi Ps 139 (138), 6.17-18; Jb 15, 8; Is 40,

13.28; 1 Co 2, 11.16; 8, 6; Col 1, 16-17.

92. La fin surnaturelle de l’Église, homélie publiée dans Aimer l’Église, o.c.

93. Le texte hébreu d’ Is 40, 14 dit: «Les nations sont comme une goutte d’eau qui tombe d’une vasque, / elles pèsent comme un grain de poussière dans les plateaux de la balance ; / les îles ont le poids d’un petit grain de poussière,».

94. Le texte de la Vulgate du Bréviaire Romain que lisait saint Josémaria était: «Usquequo, Domine, avertis in finem?».

95. «Tu les caches au plus secret de ta face, loin des intrigues des hommes. Tu leur réserves un lieu sûr, loin des langues méchantes.» (Ps 31 (30). Cfr. Jr 13, 17.

96. Tout le texte de Mt 6, 1-6 est d’une importance spéciale à ce propos.

97. Cette homélie fut prononcée sur le campus de l’Université de Navarre, le 8 octobre 1967 mais c’est toute la vie et l’enseignement de saint Josémaria qui suit ce tracé, sans s’en écarter. Il faudrait citer l’ensemble de ses écrits pour illustrer ce message spirituel. Qu’il suffise, comme un échantillon parmi des milliers, de lire ce paragraphe de Vers la sainteté, autre homélie fondamentale : « D’abord une jaculatoire et puis une autre et encore une autre… jusqu’à ce que cette ferveur-là semble insuffisante parce que les mots sont plats et qu’on se fraye un passage vers l’intimité divine, en regardant Dieu sans répit et sans fatigue […] Tandis que nous réalisons avec la plus grande perfection possible, avec nos erreurs et nos limites, les tâches propres à notre condition et à notre métier, l’âme souhaite s’échapper. Elle va vers Dieu, comme le fer attiré par la force de l’aimant. L’on comence à aimer Jésus, plus efficacement, dans une douce émotion « (Amis de Dieu, n. 296)