Interview de Marlies Kücking, membre du Conseil Central de l’Opus Dei

Voici l’interview que Marlies Kücking, directrice du Conseil Central de l’Opus Dei a accordée à l’agence Zenit. Née à Cologne. Licenciée ès lettres germaniques et anglaises. Elle a travaillé au gouvernement de l’ Œuvre de 1964 à 2005.

Vous êtes sans doute la femme au poste le plus important de l’Opus Dei vous êtes cependant peu connue à l’extérieur de l’organisation. Est-ce à l’instar de la stratégie de saint Josémaria, se cacher et disparaître afin d‘éviter tout personnalisme ?

Dans l’Opus Dei, le gouvernement à tous ses niveaux, et à plus forte raison au conseil central dont je fais partie, est fondé sur la collégialité. Chacune de ses composantes est le référent de tâches spécifiques, ni plus ni moins importantes, qui sont menées en coordination, grâce à une étude sérieuse et responsable des questions qui, selon leur importance, peuvent être confiées à plusieurs personnes, jamais moins de trois.

Cette façon d’agir qui, j’en suis convaincue, a été une grâce spéciale que saint Josémaria reçut de Dieu dès les débuts de l’Opus Dei, évite aussi bien la tyrannie d’un gouvernement personnaliste que le retranchement commode derrière un anonymat.

Il faut bien rappeler que lorsqu’on parle de postes de gouvernement dans l’Opus Dei, on fait allusion à une tâche ayant un but éminemment spirituel : impartir une formation chrétienne. L’Opus Dei, comme le disait son fondateur, est « une grande catéchèse ».

Aussi s’agit-il de faire en sorte que les fidèles de la Prélature, les coopérateurs et les milliers de personnes qui s’approchent de l’Opus Dei aient accès aux moyens leur permettant de vivre leur foi de façon cohérente, au beau milieu du monde, qu’ils soient en mesure de trouver le Christ dans leurs activités professionnelles, familiales et sociales. Ceci demande, vous vous en doutez, un minimum de coordination et d’organisation. Et c’est l’enjeu du travail de gouvernement dont je vous ai parlé.

Comment fonctionne le gouvernement de l’œuvre ? Quel est le rôle des directeurs centraux ?

Mon travail, avec celui des autres directrices centrales consiste à tenir le prélat au courant des questions concernant le travail apostolique de l’Œuvre parmi les femmes du monde entier, lui soumettre les projets des nouvelles initiatives, ainsi que les solutions aux affaires multiples et variées qui nous parviennent de tous les pays où la prélature est installée et des zones où il n’y a encore que quelques fidèles de l’Opus Dei.

Je vous ai parlé tout à l’heure de la collégialité de notre gouvernement. J’aimerais ajouter un autre aspect qui complète cette idée-là : la décentralisation et le respect de la liberté et de l’autonomie de l’Opus Dieu au niveau régional et local. Avec l’esprit que partagent tous les fidèles de la prélature et qui sera le même aujourd’hui et demain et partout, il faut respecter la diversité des mentalités, le degré de développement d’une société ou du travail apostolique de la prélature.

Avez-vous le sentiment d’être le manager d’une multinationale, la mère d’une famille nombreuse, la collaboratrice d’un évêque ou bien une compagne, une sœur pour les 45.000 femmes qui font partie de la prélature ?

Pour tout vous dire je ne me suis jamais posé cette question ! Je ne suis absolument pas une manager. L’Opus Dei est une « petite partie de l’Église » disait saint Josémaria, et dans l’Église la charité est fondamentale, le souci des uns pour les autres, par amour de Dieu.

L’amour que nous nous portons dans la prélature est très grand: nous partageons nos peines et nos joies, nous tâchons d’être tout près des personnes qui en ont le plus besoin à cause de la maladie, les revers de la vie, etc.

C’est au prélat qu’incombe tout d’abord ce devoir – un devoir stimulant, à vrai dire – et avec lui aux directeurs et aux directrices, où qu’ils se trouvent.

Cela fait trente ans que le fondateur de l’Opus Dei est décédé. Vous avez avoué, à un moment donné, avoir été touchée par « la sollicitude maternelle » de ce saint. À quoi faisiez-vous donc allusion ?

Pour ses fils, pour ses filles, pour tous ceux qui le côtoyaient, saint Josémaria était un père et une mère. Comme une mère, il lui suffisait de voir quelqu’un pour détecter qu’il avait mauvaise mine, qu’il n’était pas en forme, qu’il avait maigri ou qu’il avait un souci : il partageait les joies et les peines, il savait poser la bonne question pour mettre à l’aise son interlocuteur, il connaissait les goûts de chacun.

Mais son amour n’avait rien de sentimental. De ce fait, tout comme les mamans fortes, il savait être ferme et corriger si besoin était. Il le faisait sans détours en y mettant aussi tout son cœur. Je puis vous assurer – et je ne suis pas la seule à avoir expérimenté cela – qu’après une conversation de ce genre, on était plein de reconnaissance. De plus, il n’était pas rare que quelques heures après, ou le lendemain, il vous montre clairement par un détail d’affection qu’il n’y avait « rien eu entre nous »

Zenit.org (23 juin 2005)