Les Fioretti du Pape François en novembre

« Chrétiens 'à mi-chemin', jamais ! » Nous poursuivons la publication d'extraits de propos tenus par le pape devant divers publics au cours du mois de novembre.

La sainteté ce n'est pas fermer les yeux et prendre l'expression des images pieuses

Audience générale, 19 novembre 2014 :

«Nous devons avoir bien à l'esprit que la sainteté n'est pas quelque chose que nous nous procurons, que nous obtenons par nos qualités et nos capacités. La sainteté est un don, c'est le don que nous fait le Seigneur Jésus, lorsqu'il nous prend avec lui et qu'il nous revêt de lui-même, il nous rend comme lui. Dans la Lettre aux Éphésiens, l'apôtre Paul affirme que «le Christ a aimé l'Église et s'est donné lui-même pour elle, pour la rendre sainte» (Ep 5, 25-26). Voilà, la sainteté est véritablement le visage le plus beau de l'Église, le visage le plus beau: c'est se redécouvrir en communion avec Dieu, dans la plénitude de sa vie et de son amour. On comprend alors que la sainteté n'est pas une prérogative uniquement de certains: la sainteté est un don qui est offert à tous, sans exclure personne, et qui constitue ainsi le caractère distinctif de chaque chrétien.

Tout cela nous fait comprendre que pour être saints, il ne faut pas nécessairement être évêques, prêtres ou religieux: non, nous sommes tous appelés à devenir saints ! Tant de fois également, nous sommes tentés de penser que la sainteté est réservée uniquement à ceux qui ont la possibilité de se détacher des affaires ordinaires, pour se consacrer exclusivement à la prière. Mais il n'en est pas ainsi ! Certains pensent que la sainteté signifie fermer les yeux et prendre l'expression des images pieuses. Non ! Cela n'est pas la sainteté ! La sainteté est quelque chose de plus grand, de plus profond, que nous donne Dieu. Au contraire, c'est en vivant avec amour et en offrant son témoignage chrétien dans les tâches quotidiennes que nous sommes appelés à devenir saints. Et chacun dans les conditions et dans l'état de vie dans lequel il se trouve. Mais toi tu es consacré, tu es consacrée ? Sois saint en vivant avec joie ton don et ton ministère. Tu es marié ? Sois saint en aimant et en prenant soin de ton mari, de ta femme, comme le Christ l'a fait avec l'Église. Tu es baptisé et pas marié ? Sois saint en accomplissant avec honnêteté et compétence ton travail et en offrant du temps au service de tes frères. 'Mais père, je travaille dans une usine ; je suis comptable, toujours entouré de chiffres, là, on ne peut pas être saint...'. 'Oui, oui, là on peut ! Là où tu travailles, tu peux devenir saint. Dieu te donne la grâce de devenir saint. Dieu se communique à toi'. On peut devenir saint toujours en tout lieu, c'est-à-dire que l'on peut s'ouvrir à cette grâce qui œuvre en nous et nous conduit à la sainteté. Tu es parent ou grand-parent ? Sois saint en enseignant avec passion aux enfants ou aux petits-enfants à reconnaître et à suivre Jésus. Et il faut beaucoup de patience pour cela, pour être un bon parent, un bon grand-père, une bonne mère, une bonne grand-mère, il faut beaucoup de patience et dans cette patience, vient la sainteté : en exerçant la patience. Tu es catéchiste, éducateur ou volontaire ? Sois saint en devenant un signe visible de l'amour de Dieu et de sa présence à nos côtés. Voilà : chaque état de vie conduit à la sainteté, toujours ! Chez toi, dans la rue, au travail, dans l'Église, à ce moment et dans ton état de vie a été ouverte la voie vers la sainteté. Ne vous découragez pas et allez sur cette voie. C'est vraiment Dieu qui nous donne la grâce. Le Seigneur ne demande que cela : que nous soyons en communion avec Lui et au service de nos frères […] Chaque pas vers la sainteté fera de nous des personnes meilleures, libérées de l'égoïsme et de la fermeture sur soi, et ouvertes aux frères et à leurs nécessités. […] Soutenons-nous les uns les autres, afin que le chemin vers la sainteté ne se parcoure pas seul, chacun pour soi, mais se parcoure ensemble, dans l'unique corps qui est l'Église, bien-aimée et rendue sainte par le Seigneur Jésus Christ. Allons de l'avant avec courage, sur ce chemin de la sainteté.»

Le Règne de Dieu est caché dans la sainteté de la vie quotidienne

À Sainte-Marthe, le 13 novembre 2014 :

«Le Règne de Dieu n'est pas un spectacle. Tant de fois, le spectacle est la caricature du Règne de Dieu […] Jamais le Seigneur ne dit que le Règne de Dieu est un spectacle […] C'est une fête, une très belle fête. Une grande fête, car le Ciel sera une fête, mais pas un spectacle. C'est notre faiblesse humaine qui préfère le spectacle. En réalité, le Règne de Dieu est silencieux, il grandit à l'intérieur. C'est l'Esprit Saint qui le fait grandir avec notre disponibilité, dans notre terre, que nous devons préparer […] Le Règne de Dieu connaîtra pourtant le moment de la manifestation de sa force, à la fin des temps […] Le jour où il fera du bruit, il le fera comme la foudre qui fend le ciel […] Sinon pour l'heure, le Règne de Dieu est caché dans la sainteté de la vie quotidienne, cette sainteté de tous les jours. Parce que le Règne de Dieu n'est pas éloigné de nous, il est proche. C'est une de ses caractéristiques : sa proximité de tous les jours […] La souffrance, la croix, la croix quotidienne de la vie, la croix du travail, de la famille, de bien faire les choses, cette petite croix quotidienne fait partie du Règne de Dieu […] Le Règne de Dieu est humble, comme la semence : humble mais pour grandir ensuite, par la force de l'Esprit Saint. Nous n'avons qu'à le laisser grandir en nous, sans nous vanter : laisser l'Esprit venir en nous, nous transformer et nous porter de l'avant dans le silence, dans la paix, dans la sérénité, dans la proximité avec Dieu, avec les autres, dans l'adoration de Dieu, sans spectacle».

Des chrétiens jusque dans leur porte-monnaie ?

À Sainte-Marthe, le 19 novembre 2014 :

«Le deuxième avertissement, pour l'Eglise de Sardes, concerne 'les chrétiens d'apparence'». Ceux-là «se croient vivants mais ils sont morts... l'apparence est leur linceul», ils sont «vides à l'intérieur». Chez eux «tout semble bien», ils n'ont «rien à se reprocher», ils ont «une famille, pas d'ennemis, tout le nécessaire», ils sont «mariés à l'Église, tranquilles...», mais ils sont «morts».

L'appel de Dieu à se convertir, signifie passer «des apparences à la réalité, de la tiédeur à la ferveur» en cherchant à «écouter l'Esprit-Saint».

Après les tièdes et les morts, il y a ceux qui sont «en état de putréfaction», les corrompus. C'est la rencontre avec Zachée, dans l'Évangile (Lc 19, 1-10). L'Esprit-Saint, qui est «futé», travaillait dans le cœur de Zachée, poussé d'abord par «la curiosité» puis touché par «la Parole de Dieu» : son cœur «se convertit» et il trouve «la joie».

«Zachée déclare alors : «Je fais don aux pauvres de la moitié de mes biens, et si j'ai fait du tort à quelqu'un, je vais lui rendre quatre fois plus […] Quand la conversion arrive aux poches, elle est assurée. Des chrétiens de cœur ? Oui, tous. Des chrétiens dans l'âme ? Tous. Mais des chrétiens jusqu'aux poches, il y en a peu».

La Parole de Dieu «est capable de tout changer», mais l'homme «n'a pas toujours le courage de croire en cette Parole et de la recevoir. […] Pensons très sérieusement à notre conversion, pour pouvoir avancer sur le chemin de la vie chrétienne».

Chrétiens 'à mi-chemin', jamais !

À Sainte-Marthe, le 6 novembre 2014 :

Jésus «est venu pour aller chercher ceux qui s'étaient éloignés du Seigneur». Les pharisiens et les scribes s'arrêtent quant à eux «à mi-chemin» : «ils sont trop attentifs à équilibrer les pertes et les bénéfices. Mais cela n'est pas l'esprit de Dieu, Il n'est pas un affairiste, Dieu est Père et va sauver jusqu'à la fin, jusqu'à la limite.»

Ce style de Dieu dit «à nous pasteurs, à nous chrétiens» comment nous comporter. Et il est «vraiment triste le pasteur» qui s'arrête «à mi-chemin» Le vrai pasteur, le vrai chrétien a ce zèle en lui: que personne ne se perde!». Et «pour cela, il n'a pas peur de se salir les mains: il n'a pas peur! Il va où il doit aller, il risque sa vie, il risque sa renommée, il risque de perdre son confort, son statut, même de perdre sa carrière ecclésiastique. Mais c'est un bon pasteur!». Et «les chrétiens aussi doivent être comme cela. […] Pasteurs à mi-chemin, jamais! Chrétiens à mi-chemin, jamais!»

«Il est dit que ces gens s'approchaient de Jésus», mais «tant de fois, on lit dans l'Evangile que c'est Lui qui est allé chercher les gens […] Le bon pasteur, le bon chrétien, est toujours en sortie, en sortie de lui-même, en sortie vers Dieu, dans la prière, dans l'adoration, en sortie vers les autres pour porter le message du salut.»

Ainsi «le bon pasteur et le bon chrétien incarnent la tendresse […] Ne pas avoir peur que l'on parle mal de nous» lorsque nous allons «à la rencontre de nos frères et sœurs qui sont éloignés du Seigneur». Demandons au Seigneur «cette grâce pour chacun de nous et pour notre Mère, la Sainte Eglise».

Les chrétiens avec deux ou trois touches de peinture finiront mal

À Sainte-Marthe, le 7 novembre 2014 :

«Les chrétiens mondains […] sont des chrétiens de nom, avec deux ou trois choses chrétiennes, mais rien de plus». Ce sont «des chrétiens païens». Ils ont «un nom chrétien, mais une vie païenne» ou, pour le dire d'une autre manière, «des païens avec deux touches de peinture du christianisme: ainsi, ils apparaissent comme des chrétiens, mais ils sont païens […] Ces personnes, nos frères», n'existaient pas qu'à l'époque de Paul. Aujourd'hui «il y en a beaucoup […] A ce point, chacun de nous — moi aussi! — doit se demander: est-ce que j'ai quelque-chose de ces personnes? Est-ce que j'ai quelque-chose de mondain en moi? Quelque-chose de païen? J'aime me vanter? J'aime l'argent? J'aime l'orgueil, la superbe? Où ai-je mes racines, c'est-à-dire d'où suis-je citoyen? Du ciel ou de la terre? Du monde ou de l'esprit mondain? […] Attention à ne pas glisser vers le chemin des chrétiens païens, chrétiens en apparence […] à la tentation de s'habituer à la médiocrité», qui conduit «à la ruine» car le cœur devient tiède : «Parce que tu es tiède, je vais te vomir de ma bouche […] Notre citoyenneté est dans les cieux et là nous attendons, comme sauveur, le Seigneur Jésus Christ». Mais la citoyenneté des ennemis de la croix? L'Apôtre répond que «leur sort final sera la perdition». Donc, «ces chrétiens avec une touche de peinture finiront mal» Les signes pour comprendre ce vers quoi nous allons «sont dans ton cœur: si tu aimes et si tu es attaché à l'argent, à la vanité et à l'orgueil, tu prends la mauvaise route; si tu cherches à aimer Dieu, à servir les autres, si tu es doux, si tu es humble, si tu es le serviteur des autres, tu prends la bonne route». Et ainsi «ta carte de citoyenneté est bonne: c'est celle du ciel». En revanche, «l'autre est une citoyenneté qui te portera malheur». C'est précisément «ce que Jésus demandait tant, dans la conversation qu'il avait avec ses disciples, au Père: il demandait de les sauver de l'esprit du monde, de cette mondanité qui conduit à la perdition».

C'est pourquoi «le conseil de Paul» est de demander aujourd'hui la grâce de rester «solides dans le Seigneur et dans l'exemple de la croix du Christ: humilité, pauvreté, douceur, service aux autres, adoration, prière».

'Je fais le bien, je ne fais pas des affaires avec le bien'

À Sainte-Marthe, le 3 novembre 2014 :

«C'est la joie d'un évêque, quand il voit l'Église ainsi : dans la même charité, dans la concorde. C'est l'air que Jésus veut dans l'Église. On peut avoir des opinions diverses, mais toujours dans cette atmosphère d'humilité, de charité, sans mépriser personne […] 'Quand tu donnes un festin, invite des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles ; et tu seras heureux, parce qu'ils n'ont rien à te rendre : cela te sera rendu à la résurrection des justes.' (Lc 14, 12-14) […] Là où il y a l'harmonie, l'unité, le service des autres, il y a la gratuité […] 'Je fais le bien, je ne fais pas des affaires avec le bien'».

C'est tellement laid un chrétien hypocrite !

À Sainte Marthe, le 31 octobre 2014

«Jésus demande aux pharisiens s'il est licite ou non de guérir le samedi, mais eux ne répondent pas. Lui alors prend par la main un malade et le guérit. Les pharisiens, mis face à la vérité, se taisaient 'mais ensuite parlaient mal de lui en cachette…et cherchaient comment lui nuire'. Jésus réprimandait ces gens qui «étaient si attachés à la loi, qui avaient oublié la justice» et refusaient même toute aide à leurs parents âgés avec l'excuse d'avoir tout donné au Temple. Mais «qu'est-ce qui est plus important : le quatrième commandement ou le Temple ?»

«Ce choix de vivre attachés à la loi, les éloignait de l'amour et de la justice. Ils prenaient soin de la loi, mais ils négligeaient la justice. Ils respectaient la loi, mais négligeaient l'amour. Ils se considéraient des modèles. Et c'est pour cela que Jésus pour ces gens n'avaient qu'un seul mot : des hypocrites. Ils cherchaient partout des prosélytes et puis ? Ils fermaient la porte. Des hommes de fermeture, des hommes tellement attachés à la loi, à la lettre de la loi, non pas à la loi qui est celle de l'amour, mais à la lettre de la loi qui ferme les portes de l'espérance, de l'amour, du salut… […] Le chemin pour être fidèles à la loi, sans négliger la justice, sans négliger l'amour, c'est le chemin inverse : de l'amour à l'intégrité, de l'amour au discernement, de l'amour à la loi […] Voilà la route que nous enseigne Jésus, totalement opposée à celle des docteurs de la loi. Et cette route de l'amour à la justice porte à Dieu. À l'inverse, l'autre route, celle d'être attachés uniquement à la loi, à la lettre de la loi, porte à la fermeture, porte à l'égoïsme. La route qui va de l'amour à la connaissance et au discernement, à la pleine réalisation, porte à la sainteté, au salut, à la rencontre avec Jésus. Par contre, l'autre route porte à l'égoïsme, à l'orgueil de se considérer justes, à cette sainteté des apparences, non ? Jésus leur dit : 'Mais cela vous plaît d'apparaître aux autres comme des hommes de prière, de vous faire voir, non ?' C'est pour cela que Jésus dit aux gens : 'Faites ce qu'ils disent, mais pas ce qu'ils font' […] Jésus s'approche : la proximité est vraiment la preuve que nous allons sur la vraie route. Parce que c'est vraiment la route que Dieu a choisi pour nous sauver : la proximité. Il s'est approché de nous, il s'est fait homme. La chair : la chair de Dieu, voilà le signe ; la chair de Dieu est le signe de la vraie justice. Dieu qui s'est fait homme comme l'un de nous, et nous qui devons devenir comme les autres, comme ceux qui sont dans le besoin, comme ceux qui ont besoin de notre aide […] La chair de Jésus, voilà le pont qui nous rapproche de Dieu, et non pas la lettre de la loi : non ! Dans la chair du Christ, la loi se réalise pleinement» et «c'est une chair qui sait souffrir, qui a donné sa vie pour nous […] Que […] cet exemple de proximité de Jésus, de l'amour à la plénitude de la loi nous aide à ne jamais glisser dans l'hypocrisie : jamais. C'est tellement laid un chrétien hypocrite. Que le Seigneur nous sauve de cet écueil !»